Décision

Décision n° 77-5 I du 18 octobre 1977

Examen de la compatibilité de certaines fonctions avec l'exercice du mandat parlementaire (Monsieur Marcel DASSAULT, député)
Compatibilité

Le Conseil constitutionnel,
Saisi le 28 octobre 1976 par M Marcel DASSAULT, député de l'Oise, en application de l'article LO 151 du code électoral, d'une demande tendant à l'examen de sa situation au regard des dispositions relatives aux incompatibilités parlementaires ;

Vu la Constitution et notamment ses articles 25 et 62 ;

Vu le Code électoral et notamment ses articles LO 146 et LO 151 ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 76-I-3 du 20 décembre 1976 ;

Vu l'extrait du procès-verbal de la réunion du Bureau de l'Assemblée nationale du 23 mars 1977 approuvé lors de sa réunion du 25 mai 1977 ;

Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 77-I-4 du 7 juin 1977 ;

1. Considérant que la question posée au Conseil constitutionnel est de savoir si M Marcel DASSAULT se trouve dans un des cas d'incompatibilité prévus à l'article LO 146 du code électoral ;

2. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article LO 146 du code électoral : « Sont incompatibles avec le mandat parlementaire les fonctions de chef d'entreprise, de président de conseil d'administration, de président et de membre de directoire, de président du conseil de surveillance, d'administrateur délégué, de directeur général, directeur général adjoint ou gérant exercées dans : 1 : les sociétés, entreprises ou établissements jouissant sous forme de garanties d'intérêts, de subventions ou, sous forme équivalente, d'avantages assurés par l'Etat ou par une collectivité publique sauf dans le cas où ces avantages découlent de l'application automatique d'une législation générale ou d'une réglementation générale ; 3 : les sociétés ou entreprises dont l'activité consiste principalement dans l'exécution de travaux, la prestation de fournitures ou de services pour le compte ou sous le contrôle de l'Etat, d'une collectivité ou d'un établissement public ou d'une entreprise nationale ou d'un Etat étranger ; 5 : les sociétés dont plus de la moitié du capital est constitué par des participations de sociétés, entreprises ou établissements visés aux 1 3 ci-dessus » ;

3. Considérant qu'en vertu du dernier alinéa du même article LO 146 du code électoral : « les dispositions du présent article sont applicables à toute personne qui, directement ou par personne interposée, exerce en fait la direction de l'un des établissements, sociétés ou entreprises, ci-dessus visés » ;

4. Considérant que, pour l'appréciation de la situation d'un parlementaire au regard de l'article LO 146 ci-dessus rappelé, le Conseil constitutionnel doit se placer à la date à laquelle il prend sa décision ; qu'en effet, il résulte des termes du quatrième alinéa de l'article LO 151 que le parlementaire dont il a été déclaré qu'il se trouve dans un cas d'incompatibilité « doit régulariser sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification qui lui est faite de la décision du Conseil constitutionnel » ; qu'il n'y a donc pas lieu de tenir compte de circonstances ayant pris fin antérieurement à cette décision ;

5. Considérant, au regard du premier alinéa de l'article LO 146, que si certaines des sociétés dont le capital appartient en partie, directement ou indirectement, à M Marcel DASSAULT entrent dans le champ d'application des dispositions de ce texte, il est constant que ce parlementaire n'exerce au sein desdites sociétés aucune des fonctions énumérées au premier alinéa dudit article, incompatibles avec le mandat parlementaire ;

6. Considérant, au regard du dernier alinéa de l'article LO 146, que la notion de direction de fait, au sens de ce texte, doit s'entendre d'une participation à la conduite générale de l'entreprise active, régulière et comportant prise de décisions ; que l'ensemble des informations portées à la connaissance du Conseil constitutionnel et des investigations auxquelles celui-ci, en l'état des pouvoirs dont il dispose, a été en mesure de procéder, n'ont pas apporté la preuve que M Marcel DASSAULT exerce en fait, au jour de la présente décision, directement ou par personne interposée, la direction de l'une ou de plusieurs des sociétés ou entreprises dont il s'agit ;

7. Considérant que, comme tout texte édictant une incompatibilité et qui a donc pour effet de porter une atteinte à l'exercice d'un mandat électif, le dernier alinéa de l'article LO 146 du Code électoral ne saurait faire l'objet d'une interprétation extensive ; qu'en conséquence, l'incompatibilité qu'il prévoit ne peut être étendue aux personnes qui, détenant la propriété d'une partie, quelle qu'en soit l'importance, du capital d'une société exercent les droits qui y sont attachés ; que, dès lors, la circonstance que M Marcel DASSAULT détient la majorité des titres de différentes sociétés entrant dans le champ d'application des dispositions ci-dessus rappelées n'a pas pour effet de le placer en situation d'incompatibilité ;

8. Considérant que de tout ce qui précède il résulte qu'il n'est pas établi qu'au jour de la présente décision M Marcel DASSAULT se trouve dans un des cas d'incompatibilité prévus à l'article LO 146 du code électoral ;

Décide :
Article premier :
M Marcel DASSAULT, au jour de la présente décision, ne se trouve dans aucun des cas d'incompatibilité prévus à l'article LO 146 du code électoral.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée au Président de l'Assemblée nationale, à M Marcel DASSAULT, député, et sera publiée au Journal officiel de la République française.

Journal Officiel du 20 octobre 1977, page 5084 (rectif. page 5094)
Recueil, p. 81
ECLI : FR : CC : 1977 : 77.5.I

Les abstracts

  • 10. PARLEMENT
  • 10.1. MANDAT PARLEMENTAIRE
  • 10.1.2. Incompatibilités
  • 10.1.2.2. Procédure

Tout texte édictant une incompatibilité et qui a donc pour effet de porter une atteinte à l'exercice d'un mandat électif doit être strictement interprété. Tel est le cas de l'article L.O. 146 du code électoral. Pour l'appréciation de la situation d'un parlementaire au regard de l'article L.O. 146, le Conseil constitutionnel doit se placer à la date à laquelle il prend sa décision. Il n'y a donc pas lieu de tenir compte de circonstances ayant pris fin antérieurement à cette décision. S'il n'est pas établi, au vu des informations dont dispose le Conseil constitutionnel le jour de sa décision, que l'intéressé se trouve dans le cas d'incompatibilité prévu au deuxième alinéa de l'article L.O. 146 du code électoral, il appartiendrait au bureau du Sénat ou au ministre de la justice, de saisir à nouveau le Conseil de sa situation si le justifiaient des faits ou informations postérieurs à la présente décision.

(77-5 I, 18 octobre 1977, cons. 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, Journal Officiel du 20 octobre 1977, page 5084 (rectif. page 5094))
  • 10. PARLEMENT
  • 10.1. MANDAT PARLEMENTAIRE
  • 10.1.2. Incompatibilités
  • 10.1.2.4. Cumul avec l'exercice d'activités privées
  • 10.1.2.4.6. Direction de fait (L.O. 146, dernier alinéa)

Au regard du premier alinéa de l'article L.O. 146 du code électoral, M. Marcel Dassault n'exerce dans des sociétés dont le capital lui appartient en partie, aucune des fonctions incompatibles avec le mandat de parlementaire. Au regard du dernier alinéa de cet article, il n'exerce à ce jour la direction de fait d'aucune des sociétés dont s'agit, la notion de direction de fait devant s'entendre de la participation à la conduite générale de l'entreprise, active, régulière et comportant prise de décisions. Un texte édictant une incompatibilité ne saurait faire l'objet d'une interprétation extensive. Dès lors, l'incompatibilité prévue à l'article L.O. 146 ne peut être étendue aux personnes qui, détenant la propriété d'une partie du capital d'une société, exercent les droits qui y sont attachés.

(77-5 I, 18 octobre 1977, cons. 2, 5, 6, 8, Journal Officiel du 20 octobre 1977, page 5084 (rectif. page 5094))
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