Décision n° 2013-4753 AN du 22 février 2013
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la décision en date du 13 décembre 2012, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 2 janvier 2013 sous le numéro 2013-4753 AN, par laquelle la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques saisit le Conseil constitutionnel de la situation de Mme Chantal DELHAYE, demeurant à Dammarie-les-Lys (Seine-et-Marne) candidate aux élections qui se sont déroulées en juin 2012 dans la 8ème circonscription de la Seine-et-Marne pour l'élection d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu les observations présentées par Mme DELHAYE, enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 28 janvier 2013 ;
Vu les autres pièces produites et jointes aux dossiers ;
Vu la Constitution, notamment son article 59 ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral, notamment ses articles L.O. 136-1 et L. 52-4 ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant, qu'aux termes des quatre premiers alinéas de l'article L.O. 136-1 du code électoral : « Saisi d'une contestation formée contre l'élection ou dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 52-15, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat dont le compte de campagne, le cas échéant après réformation, fait apparaître un dépassement du plafond des dépenses électorales.
« Saisi dans les mêmes conditions, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12.
« Il prononce également l'inéligibilité du candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit en cas de volonté de fraude ou de manquement d'une particulière gravité aux règles relatives au financement des campagnes électorales.
« L'inéligibilité déclarée sur le fondement des trois premiers alinéas du présent article est prononcée pour une durée maximale de trois ans et s'applique à toutes les élections. Toutefois, elle n'a pas d'effet sur les mandats acquis antérieurement à la date de la décision » ;
2. Considérant qu'en vertu des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 52-4 du même code : « Le mandataire recueille, pendant l'année précédant le premier jour du mois de l'élection et jusqu'à la date du dépôt du compte de campagne du candidat, les fonds destinés au financement de la campagne.
« Il règle les dépenses engagées en vue de l'élection et antérieures à la date du tour de scrutin où elle a été acquise, à l'exception des dépenses prises en charge par un parti ou groupement politique. . . » ;
3. Considérant que le compte de campagne de Mme DELHAYE, candidate aux élections qui se sont déroulées les 10 et 17 juin 2012 en vue de la désignation d'un député dans la 8ème circonscription de la Seine-et-Marne, a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 13 décembre 2012 au motif que des mouvements de fonds ont eu lieu après le dépôt du compte ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que deux chèques sont venus abonder les recettes du compte de campagne les 28 septembre et 12 octobre 2012 et différents chèques ont été débités sur ce compte les 8 octobre, 18 octobre et 24 octobre 2012, alors que le compte avait été présenté à la commission le 16 août 2012 ; que Mme DELHAYE soutient que ces différents chèques avaient été établis avant le dépôt du compte de campagne ; que, toutefois, cette circonstance ne saurait à elle seule justifier que l'encaissement par la candidate de chèques émis par le mandataire financier et l'encaissement par le mandataire financier de chèques émis par la candidate aient été différés ; que la circonstance que les mouvements de fonds postérieurs à la présentation du compte correspondaient pour l'essentiel aux dépenses de transport de la candidate, lesquelles auraient pu être comptabilisées comme des avantages en nature, ne saurait constituer une justification de tels mouvements de fonds postérieurs au dépôt du compte de campagne ; que c'est donc à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté son compte de campagne ;
5. Considérant qu'eu égard, d'une part, au caractère substantiel de l'obligation méconnue, dont Mme DELHAYE ne pouvait ignorer la portée et, d'autre part, au caractère tardif des mouvements de fonds postérieurs à la présentation du compte, lesquels ont au surplus porté sur une part substantielle des dépenses de campagne, il y a lieu, en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral, de prononcer l'inéligibilité de Mme DELHAYE à tout mandat pour une durée d'un an à compter de la date de la présente décision,
D É C I D E :
Article 1er.- Mme Chantal DELHAYE est déclarée inéligible en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d'un an à compter de la présente décision.
Article 2.- La présente décision sera notifiée à Mme DELHAYE et au président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 21 février 2013, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.
Rendu public le 22 février 2013.
JORF du 1 mars 2013 page 3853, texte n° 95
Recueil, p. 361
ECLI : FR : CC : 2013 : 2013.4753.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.5. Financement
- 8.3.5.3. Présentation du compte
8.3.5.3.2. Totalité des opérations financières
Rejet du compte de campagne par la CNCCFP au motif que des mouvements de fonds ont eu lieu après le dépôt du compte auprès de la Commission. Il résulte de l'instruction que deux chèques sont venus abonder les recettes du compte de campagne les 28 septembre et 12 octobre 2012 et différents chèques ont été débités sur ce compte les 8 octobre, 18 octobre et 24 octobre 2012, alors que le compte avait été présenté à la Commission le 16 août 2012.
La candidate soutient que ces différents chèques avaient été établis avant le dépôt du compte de campagne. Toutefois, cette circonstance ne saurait à elle seule justifier que l'encaissement par la candidate de chèques émis par le mandataire financier et l'encaissement par le mandataire financier de chèques émis par la candidate aient été différés.
La circonstance que les mouvements de fonds postérieurs à la présentation du compte correspondaient pour l'essentiel aux dépenses de transport de la candidate, lesquelles auraient pu être comptabilisées comme des avantages en nature, ne saurait constituer une justification de tels mouvements de fonds postérieurs au dépôt du compte de campagne.
Rejet à bon droit. Inéligibilité pour un an.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.5. Financement
- 8.3.5.5. Dépenses produites au compte de campagne
8.3.5.5.7. Factures non réglées avant le dépôt du compte
L'absence d'encaissement par la candidate de chèques émis par le mandataire financier et par le mandataire financier de chèques émis par la candidate à la date du dépôt du compte de campagne, même si ces chèques ont été établis avant cette date, n'est pas une circonstance susceptible de justifier des mouvements de fonds postérieurs au dépôt du compte de campagne, en méconnaissance des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 52-4 du code électoral.