Titre VII
N° 7 - octobre 2021
Chronique de droits fondamentaux et libertés publiques (janvier à juin 2021)
Le premier semestre de l'année 2021 a été marqué par plusieurs saisines de droit du Conseil constitutionnel, sur trois lois organiques et deux résolutions modifiant les règlements des assemblées. Les trois décisions sur les lois organiques (l'une sur le Conseil économique, social et environnemental(3), l'autre sur l'élection du Président de la République(4) et la troisième sur les expérimentations locales(5)) ont validé l'ensemble des dispositions concernées, parfois avec réserves et n'appellent guère de commentaire.
À l'inverse, la résolution tendant à modifier le Règlement de l'Assemblée nationale a fait l'objet d'une déclaration de non-conformité totale(6). C'est la deuxième fois dans l'histoire qu'une telle résolution connaît un sort aussi strict, après celle destinée à introduire la faculté de créer une coprésidence paritaire pour les groupes parlementaires(7). La décision du 1er avril 2021, loin de constituer un poisson d'avril, n'a rien de surprenant. La résolution censurée était destinée à permettre à la conférence des présidents de l'Assemblée d'« adapter temporairement les modalités de participation des députés aux réunions de commission et aux séances publiques, le cas échéant par le recours à des outils de travail à distance, en tenant compte de la configuration politique de l'Assemblée » : une forme « d'article 16 » parlementaire, conférant les pleins pouvoirs - ou presque - à son Président (la conférence des présidents étant dominée par la majorité, dont est issu le Président). Or, juge le Conseil, s'il « est loisible aux assemblées de définir dans leur règlement des dispositions dérogatoires susceptibles d'être temporairement mises en œuvre sur décision de leurs autorités, lorsque ces dernières constatent que des circonstances exceptionnelles perturbent, de manière significative, les conditions de participation des parlementaires aux réunions des commissions et en séance publique, de délibération ou de vote », il est nécessaire que « ces dispositions dérogatoires, comme celles s'appliquant en temps normal, [soient] contrôlées, avant leur mise en application, par le Conseil constitutionnel afin qu'il se prononce sur leur conformité à la Constitution » (§ 5).
En d'autres termes, s'il est possible que des mesures exceptionnelles soient prises, il faut qu'elles soient identifiées préalablement, par exemple dans une liste de mesures inscrites dans le Règlement, qu'aurait donc contrôlée le Conseil et à laquelle l'autorité compétente pourrait avoir recours si les conditions sont réunies.
La résolution tendant à modifier le Règlement du Sénat a, quant à elle, été pleinement jugée conforme à la Constitution. Elle vise notamment à permettre au Sénat d'assurer un meilleur suivi des ordonnances, qui ont connu un réel et déplorable essor cette dernière année et, plus généralement, au cours de cette législature, en lien avec la crise sanitaire. N'oublions pas, cependant, que le meilleur suivi que peut assurer le Parlement, permettant également de parfaire les dispositifs prévus par les ordonnances et de faire disparaître, parfois, des atteintes aux droits et libertés serait d'assumer pleinement la phase de leur ratification, ce qu'il ne fait que trop peu.
Deux autres décisions ont été rendues par le Conseil au cours de la période considérée et appellent des développements plus approfondis : d'une part, celle sur la loi relative aux langues régionales, qui a suscité un certain émoi peu justifié, tant elle est rendue à droit constant et, d'autre part, celle sur la loi pour une sécurité globale(8).
Galimatias sur les langues régionales
Décision n° 2021-818 DC du 21 mai 2021, Loi relative à la protection patrimoniale des langues régionales et à leur promotion, par J.-Ph. Derosier
La décision sur les langues régionales se distingue davantage par son contexte que par son contenu. En effet, elle a été rendue sur saisine de députés de la majorité, ce qui, sans être inédit, est exceptionnel. En revanche, c'est bien la première fois que, derrière eux, se cache un Ministre (celui de l'Éducation nationale), plaçant d'ailleurs la Secrétaire générale du Gouvernement dans la délicate position consistant à défendre la constitutionnalité du texte soumis au contrôle a priori du Conseil, comme c'est toujours le cas, tout en allant à l'encontre de la position - certes officieuse - du membre du Gouvernement ayant défendu le texte au Parlement. De surcroît, la saisine émane de membres de la majorité qui ne sont pas en dissidence avec elle, comme ce fut le cas des députés « frondeurs » sur la loi El Khomri en 2016(9) ou des députés de droite, opposés à l'indemnisation des combattants impliqués aux côtés de l'armée républicaine espagnole, au lendemain du coup d'État de Franco(10). Parmi eux, quatre ont fait valoir, après coup, que leur consentement aurait été vicié et qu'ils n'avaient pas souhaité, en réalité, saisir le Conseil. C'est dire si l'on versait dans la confusion, à y perdre non son latin, mais son basque ou son breton.
Le point avait toutefois son importance puisque seuls soixante et un députés avaient signé la saisine et, par conséquent, s'il s'avérait que le consentement d'au moins deux d'entre eux était vicié, la requête n'aurait pu être valablement accueillie. Toutefois, faisant application de sa jurisprudence déjà arrêtée lors de la saisine par les députés de droite précédemment mentionnée, confirmée en 1999(11), le Conseil a rappelé qu'« aucune disposition de la Constitution non plus que de la loi organique relative au Conseil constitutionnel ne permet aux autorités ou parlementaires habilités à déférer une loi au Conseil constitutionnel de le dessaisir en faisant obstacle à la mise en œuvre du contrôle de constitutionnalité engagé. Dès lors, hormis les cas d'erreur matérielle, de fraude ou de vice du consentement, le Conseil constitutionnel ne saurait prendre en compte des demandes exprimées en ce sens » (§ 3). Or, après examen minutieux des arguments des requérants demandant que leur signature soit retirée, il en conclut qu'il n'y a ni erreur matérielle, ni fraude, ni vice du consentement.
Au-delà, le Conseil rend une décision s'inscrivant dans sa jurisprudence constante, en matière de reconnaissance des langues régionales. D'une part, il ne fait pas droit au moyen des requérants de censurer l'article 6 de la loi, relatif aux modalités de participation financière d'une commune à la scolarisation d'un enfant résidant sur son territoire, dans un établissement privé sous contrat situé sur le territoire d'une autre commune et dispensant un enseignement de langue régionale. En effet, l'article 2 de la Constitution, selon lequel « la langue de la République est le français », n'interdit nullement que des collectivités territoriales participent financièrement à l'apprentissage de langues régionales(12). Il pose simplement comme limite que l'usage d'une autre langue que le français ne puisse pas être imposé à une personne morale de droit public ou à une personne de droit privé dans l'exercice d'une mission de service public, ou que des particuliers, dans leurs relations avec les administrations et les services publics, ne puissent pas se prévaloir d'un droit à l'usage d'une telle langue, ni de les contraindre à un tel usage(13). En d'autres termes, un tel enseignement doit demeurer facultatif et, dans l'enceinte de l'école, tous (usagers et agents) doivent parler et comprendre le français(14).
D'autre part, le Conseil constitutionnel s'est saisi d'office de deux dispositions et, en particulier, de l'article 4 qui permettait l'apprentissage d'une langue régionale, au sein du service public de l'enseignement, par la méthode immersive, c'est-à-dire en ne se bornant pas seulement à enseigner cette langue, mais à l'utiliser aussi comme langue principale d'enseignement et comme langue de communication au sein de l'établissement. Une telle pratique revient à en imposer l'usage et, dans le prolongement de sa jurisprudence, notamment une décision où il avait déjà eu à connaître de cette méthode d'enseignement(15), le Conseil a conclu qu'elle contrevenait à l'article 2 de la Constitution. Cette décision ne remet ainsi en cause ni la jurisprudence antérieure du Conseil, ni le principe même de l'enseignement immersif, pour autant qu'il ne relève pas du service public de l'enseignement.
Garantir la liberté sans l'asservir
Décision n° 2021-817 DC du 20 mai 2021, Loi pour une sécurité globale préservant les libertés, par J.-Ph. Derosier
La loi pour une sécurité globale préservant les libertés - dont le titre, déjà, interpelle, sous-entendant que garantir la sécurité pouvait s'épargner de préserver les libertés - a fait l'objet d'une triple saisine, par les parlementaires de gauche des deux assemblées et par le Premier ministre, ce qui constitue une première sur une loi ordinaire si l'on excepte celles que ce dernier défère lorsqu'elles accompagnent une loi organique. Le chef du Gouvernement s'était en effet engagé à soumettre au Conseil constitutionnel l'article 24 de la proposition de loi (devenu article 52), qui avait causé quelques tumultes au Parlement. Pas moins de vingt et un articles étaient contestés, en tout ou en partie. En outre, se saisissant d'office de six autres articles, le Conseil en déclare huit totalement et quatre partiellement contraires à la Constitution, il émet quatre réserves d'interprétation et valide onze articles, en tout ou en partie.
Au-delà des articles censurés pour vice de procédure (les « cavaliers législatifs »), les déclarations de contrariété à la Constitution portent sur l'expérimentation en matière de police municipale (article 1er), l'instauration de la vidéosurveillance dans les cellules de garde à vue ou d'isolement dans les centres de rétention administrative (article 41), la surveillance par drones (article 47) ou par caméras embarquées (article 48), ainsi que le nouveau délit de provocation à l'identification d'agents des forces de l'ordre (article 52). Ce dernier a néanmoins pu être créé, ensuite, par la loi confortant le respect des principes de la République (dite « séparatisme »)(16), en tenant compte de la décision du Conseil, qui a considéré que la définition du délit était trop imprécise et portait ainsi atteinte au principe constitutionnel de légalité des délits et des peines, inscrit à l'article 8 de la Déclaration de 1789.
L'expérimentation en matière de police municipale aurait permis que certaines communes et établissements publics de coopération intercommunale pussent demander que leurs agents de police municipale et gardes champêtres exercent des compétences de police judiciaire, identifiées par ce même article. Il s'agissait notamment de la constatation de certains délits par procès-verbal, pourvu qu'elle ne nécessitât pas d'actes d'enquête. Cependant, le dispositif envisagé contrevenait à la Constitution. En effet, selon la jurisprudence bien établie du Conseil, l'article 66 de la Constitution impose que la police judiciaire soit placée sous la direction et le contrôle de l'autorité judiciaire. Dans la loi LOPSI, le Conseil avait ainsi retenu que « l'exigence de direction et de contrôle de l'autorité judiciaire sur la police judiciaire ne serait pas respectée si des pouvoirs généraux d'enquête criminelle ou délictuelle étaient confiés à des agents qui, relevant des autorités communales, ne sont pas mis à la disposition des officiers de police judiciaire »(17). Or c'est bien cette « mise à disposition » qui faisait défaut en l'espèce, car les modalités prévues par la loi étaient insuffisantes.
Elle se bornait ainsi à prévoir que les agents de police municipale et les gardes champêtres, pour l'exercice de leurs compétences de police judiciaire, sont placés en permanence sous l'autorité du directeur de police municipale ou du chef de service de police municipale dûment habilité, ces derniers étant placés, pour l'exercice de ces missions, sous la direction du procureur de la République, sous la surveillance du procureur général et sous le contrôle de la chambre de l'instruction du siège de leur fonction. De plus, il était prévu que le procureur de la République se voyait adresser sans délai les rapports et procès-verbaux établis par les agents de police municipale et les gardes champêtres, par l'intermédiaire des directeurs de police municipale et chefs de service de police municipale. Malgré cela, le procureur de la République n'était pas en mesure d'exercer un contrôle direct et effectif sur les directeurs de police municipale et chefs de service de police municipale, faute de pouvoir leur adresser des instructions ou faute, pour eux, d'être soumis à l'obligation de le tenir informé sans délai des infractions dont ils auraient eu connaissance. De même, la loi ne prévoyait pas d'associer l'autorité judiciaire aux enquêtes administratives relatives à leur comportement, ou leur notation par le procureur général.
Cependant, il faut lire la motivation du Conseil comme une possibilité de confier de telles compétences à la police municipale, à la condition toutefois de prévoir les garanties suffisantes. En effet, le Conseil relève que c'est « en confiant des pouvoirs aussi étendus aux agents de police municipale et gardes champêtres, sans les mettre à disposition d'officiers de police judiciaire ou de personnes présentant des garanties équivalentes » (§ 12), que le dispositif encourt la censure, justifiée à partir d'une comparaison effectuée avec ce que prévoit le code de procédure pénale à l'égard des officiers de police judiciaire. Par conséquent, si les directeurs de police municipale et chefs de service de police municipale se voyaient placés dans un régime équivalent, un tel transfert de compétence serait alors conforme à la Constitution.
Ce sont surtout les dispositions relatives à la vidéosurveillance qui concentrent le plus de réserves et de censures de la part du Conseil constitutionnel, notamment celles qui étaient les plus intrusives au regard du droit au respect de la vie privée, dont la garantie constitutionnelle résulte de l'article 2 de la Déclaration de 1789. Il en allait d'abord ainsi de la possibilité de placer les cellules de garde à vue et d'isolement des centres de rétention administrative sous vidéosurveillance, laquelle aurait pu être activée pendant toute la durée de la garde à vue ou de l'isolement (lequel n'est pas limité), sur simple décision du chef du service responsable de la sécurité des lieux concernés, dès lors qu'il existait des motifs raisonnables de penser que la personne concernée pourrait tenter de s'évader ou représenter une menace pour elle‑même ou pour autrui, le procureur de la République territorialement compétent étant informé et pouvant y mettre fin. Ce dispositif s'inspirait de ce qui avait été mis en place afin d'éviter que le dernier survivant des attentats du 13 novembre 2015, Salah Abdeslam, ne mette fin à ses jours(18). La généralisation d'un dispositif aussi exceptionnel et intrusif à toutes les cellules de garde à vue et à toutes les chambres d'isolement des centres de rétention administrative faisait peser sur le droit au respect de la vie privée une atteinte disproportionnée, qui n'était pas justifiée par les objectifs de valeur constitutionnelle de prévention des atteintes à l'ordre public et de recherche des auteurs d'infractions.
C'est encore l'absence de conciliation équilibrée entre ces exigences constitutionnelles qui justifie que la surveillance par drones (article 47) ou par caméras embarquées (article 48) soit amplement censurée. Dans les deux cas, l'utilisation de ces moyens de surveillance, tant pour des finalités de police judiciaire que de police administrative, était très largement autorisée, sans pratiquement aucune limitation de durée, parfois pour tout type d'infraction (y compris de simples contraventions aux arrêtés de police d'un Maire) et, concernant les caméras embarquées, sur simple décision des agents des forces de l'ordre ou des services de secours, sans même requérir l'autorisation d'une autorité telle l'autorité judiciaire.
Il faut donc en retenir que le recours à la vidéosurveillance aéroportée ou embarquée n'est possible que dans les cas les plus graves et à la condition de l'assortir d'un nombre maximal de garanties, qui permettent de justifier une telle atteinte au droit au respect de la vie privée. Si la sécurité « globale » interpelle, elle ne saurait en tout état de cause verser dans une surveillance totale : la sécurité est le fondement même du pacte social, mais sa finalité est de garantir la liberté, non de l'asservir.
Limitation ne vaut pas suspension
Décision n° 2021-878/879 QPC du 29 janvier 2021, M. Ion Andronie R. et autre [Prolongation de plein droit des détentions provisoires dans un contexte d'urgence sanitaire], par E. Cartier
Cette décision marque une étape importante bien qu'à contretemps dans le faible lot de contentieux « Covid » qu'a eu à traiter le Conseil constitutionnel durant cette période de crise sanitaire. Il s'agit aussi d'une étape dans la vie contentieuse de la disposition normative visée par les requérants, laquelle, visant à adapter les règles de procédure pénale au premier état d'urgence sanitaire, prolongeait de plein droit, sans jugement, pour la durée de l'état d'urgence et jusqu'à six mois en matière criminelle, l'ensemble des détentions provisoires ayant été prononcées, en raison du contexte sanitaire de l'époque. Issue d'une des premières ordonnances édictées sur le fondement de la loi du 23 mars 2020(19), elle avait déjà été contestée en sa qualité de disposition réglementaire devant le Conseil d'État à l'occasion d'un référé liberté, très critiqué par la doctrine et le monde judiciaire en général, en raison de l'ordonnance de tri par laquelle le juge avait rejeté la requête le 3 avril 2020 en la considérant comme « manifestement infondée ». Par ailleurs, la chambre criminelle de la Cour de cassation avait renvoyé au Conseil constitutionnel le 27 mai 2020 une QPC portant sur l'article 11 de la loi du 23 mars 2020 qui habilitait le Gouvernement à intervenir en la matière. Le Conseil, tout en écartant le moyen fondé sur la violation de l'article 66 C., avait précisé que « l'inconstitutionnalité alléguée par les requérants ne pourrait résulter que de l'ordonnance prise sur le fondement de ces dispositions »(20). Par l'article 16 de l'ordonnance du 25 mars 2020(21), dont le délai d'habilitation prévu par la loi était désormais expiré et rendait compétent le Conseil constitutionnel(22), le Gouvernement avait en effet court-circuité de plano l'office du juge, seul à même d'apprécier la situation concrète de chaque intéressé en vue de prendre une décision motivée intéressant sa liberté la plus essentielle : celle de ne pas voir son corps entravé sans un jugement, liberté qui est au fondement de la notion même d'Habeas corpus, clairement exprimée à l'article 66 de notre Constitution. L'intervention d'un juge est d'autant plus nécessaire que la détention provisoire concerne des personnes présumées innocentes et doit demeurer une exception comme le rappelle le code de procédure pénale.
Les deux QPC en cause furent renvoyées au Conseil par deux arrêts de la chambre criminelle de la Cour de cassation à l'occasion de pourvois formés par deux prévenus, respectivement contre des arrêts des chambres de l'instruction des cours d'appel de Paris et Lyon. S'y sont jointes cinq interventions de requérants institutionnels dont une partie de ceux présentes lors de l'action en référé devant le Conseil d'État en avril 2020(23). Si la loi du 11 mai 2020 avait depuis mis un terme à ce régime d'exception(24), l'enjeu de ces QPC n'était pas que virtuel, compte tenu de la persistance de la crise sanitaire et de l'adaptation encore nécessaire de notre droit aux objectifs constitutionnels de protection de la santé, de sauvegarde de l'ordre public et de recherche des auteurs d'infraction. Si l'intervention du législateur délégué ne portait que sur la durée des titres de détention, préservant ainsi le caractère judiciaire de leur titre initial et que, comme le soulignait le représentant du Premier ministre, demeurait la possibilité pour les intéressés de formuler à tout moment des demandes de remise en liberté devant le juge ou, pour le juge, d'y procéder d'office, le législateur délégué avait unilatéralement et de manière générale, substitué sa volonté à celle du juge, abstraction faite de l'examen systématique de la situation personnelle de chaque prévenu lors de chaque prolongation. Le dispositif ne prévoyait l'intervention du juge que dans les cas de prolongation maximale (six mois), à l'issue d'un délai de trois mois, soit très tardivement dans cette hypothèse, ou uniquement à l'issue de la prolongation dans les deux autres hypothèses (prolongeant respectivement de deux et trois mois la durée de la détention). Paradoxalement, dans le même temps, les mêmes dispositions prévoyaient, dans un contexte où l'incarcération se révélait par ailleurs dangereuse sur un plan sanitaire, la sortie anticipée d'une partie des détenus condamnés, de manière simple ou via des mesures de conversion de peines.
Les enjeux et l'issue de ces QPC semblaient dès lors assez bien balisés, d'autant que la Cour de cassation elle-même avait, dans un arrêt du 26 mai 2020, opéré une interprétation constructive des délais prévus par l'article 16 de l'ordonnance au regard de l'article 5 de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH), impliquant l'intervention de la juridiction qui aurait été compétente pour prolonger la détention au cours de la période suivant la date d'expiration du titre ayant été prolongé(25). Cette solution bien que préservant concrètement les mêmes libertés fondamentales ne fermait cependant pas la porte au renvoi d'une QPC au Conseil constitutionnel par les juridictions suprêmes, conformément à la décision 858/859 QPC du 2 octobre 2020(26), à laquelle renvoyait d'ailleurs la première décision de renvoi de la chambre criminelle. Le Conseil veille en effet à ce que l'application de la théorie du droit vivant, acclimatée au système français, ne fragilise pas l'autonomie des contentieux voulue par le constituant et réaffirmée constamment par le Conseil. La logique va d'ailleurs assez loin sur le plan formel comme matériel, puisqu'il préfère ici censurer la disposition législative plutôt que de formuler une réserve d'interprétation qui aurait été le pendant de l'interprétation conforme opérée par la Cour de cassation sur le fondement de la CEDH. Les deux contrôles demeurent ainsi distincts, complémentaires et non concurrentiels.
L'appréciation de l'inconstitutionnalité matérielle de la disposition législative en cause ne surprend pas compte tenu de la jurisprudence du Conseil relative aux conditions de détention et aux autres conditions matérielles de déroulement du procès, en particulier celles relatives aux hypothèses de vidéo-audiences comme de suppression de l'audience, dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire(27) et en dehors(28). Sa jurisprudence relative aux délais minimums d'intervention de l'autorité judiciaire en cas de privation de liberté allait dans le même sens(29). Constatant l'absence de « bref délai » entre la mesure de prorogation et l'intervention systématique du juge, et indiquant qu'un tel dispositif aurait pu « faire l'objet d'aménagements procéduraux » permettant de diminuer le caractère liberticide de la mesure, le Conseil ne pouvait que censurer le dispositif sur le fondement de la seule atteinte à l'article 66 C., sans estimer devoir se prononcer sur les autres moyens qui ne manquaient pourtant pas d'intérêt tels le principe de non-rétroactivité de la loi pénale ou celui des droits de la défense.
Au-delà du raisonnement assez classique qui préside à la censure opérée par le Conseil, sa décision présente un intérêt quant à la portée de cette censure. En effet, le représentant du Premier ministre, comme souvent, a fortiori quand l'argumentaire relatif à la constitutionnalité de la disposition législative en cause est faible, avait demandé au Conseil de préserver ses effets passés, prétextant - bien que les mesures ne produisent plus d'effet depuis l'entrée en vigueur de la loi du 11 mai 2020 - le risque contentieux attaché à la possibilité pour les intéressés de demander l'annulation par ricochet de la procédure. Le Conseil a suivi sur ce point l'argumentaire du Premier ministre, invoquant les « conséquences manifestement excessives » d'une telle remise en cause qui aurait méconnu « les objectifs de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public et de recherche des auteurs d'infractions », ceux-là mêmes qui justifiaient d'avoir écarté le juge durant cette période. Malgré l'absence de réponse claire par le représentant du Premier ministre à la question posée par M. Alain Jupé concernant le nombre de procédures en cours contestant la régularité des procédures de détention provisoire (d'ailleurs non suivie de la note promise par ce dernier) et malgré le contre-argument pertinent basé sur le caractère inopérant des contestations en question dans la mesure où, les titres de détention en cause ayant cessé de produire leurs effets, ils devraient être considérés comme sans portée sur la régularité de ceux les ayant remplacés. Le juge, saisi d'une telle contestation, aurait ainsi dû rendre un non-lieu à statuer. Reste l'engagement de la responsabilité de l'État pour le préjudice subi du fait de l'application des dispositions législatives inconstitutionnelles en cause. Cette voie n'a pas été écartée par le Conseil qui ne fait référence qu'à l'hypothèse de la contestation des mesures en cause, sans évoquer directement la question d'éventuelles actions indemnitaires, indépendantes en principe de la remise en cause des effets normatifs de la déclaration d'inconstitutionnalité.
L'urgence, fût-elle sanitaire, sans précédent, marquée par un degré très élevé d'incertitudes et un contexte évolutif, ne peut s'accommoder en matière de liberté individuelle, a fortiori en matière de détention, de la suppression du juge, gardien naturel de cette liberté, ce qu'avait a minima préservé l'état d'urgence sécuritaire en lui réservant le noyau dur de la détention des individus. Ce que le Gouvernement, fort d'une habilitation de circonstances, a pensé pouvoir supprimer dans le cadre de la première phase de cette crise. La limitation de certains droits fondamentaux justifiée par l'urgence sanitaire ne peut ainsi pas conduire à leur suspension pure et simple.
Un verdissement avéré de la jurisprudence du Conseil
Décision n° 2021-891 QPC du 19 mars 2021, Association Générations futures et autres [Participation du public à l'élaboration des chartes d'engagements départementales relatives à l'utilisation des produits phytopharmaceutiques], par E. Cartier
Cette décision s'inscrit dans le cadre d'une série de contentieux initiés directement devant le Conseil d'État depuis 2017 par des associations de protection de l'environnement à propos des conditions d'épandage de pesticides à proximité des zones d'habitation. La règlementation en cause transposait au niveau législatif et réglementaire les objectifs d'une directive de l'UE 2009/128/CE du 21 octobre 2009. La QPC en question fut soulevée par les huit associations requérantes, auxquelles s'est jointe en intervention l'association Ragster, à l'occasion d'un recours en excès de pouvoir contre le décret n° 2019-1500 du 27 décembre 2019 relatif aux mesures de protection des personnes lors de l'utilisation de produits phytopharmaceutiques (appellation dont on notera la connotation pour le moins ambivalente s'agissant de produits de la famille des pesticides(30)) à proximité des zones d'habitation, pris en application de la disposition législative en cause. Étaient contestées, sur le double fondement, d'une part de l'incompétence négative du législateur, d'autre part de la violation de l'article 7 de la Charte de l'environnement, les modalités insuffisantes de participation et d'information du public préalables à l'élaboration des chartes d'engagement des utilisateurs des produits phytopharmaceutiques, telles que prévues par le paragraphe III de l'article L. 253-8 du code rural et de la pêche maritime issu de la loi du 30 octobre 2018, dite « EGalim »(31).
Si les moyens soulevés par les requérants étaient classiques et s'inscrivaient dans une longue série de décisions du Conseil constitutionnel comme du Conseil d'État, l'originalité de la décision tient ici à l'élargissement de la notion de « décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement » et de celle relative à la possibilité pour « toute personne » de participer à l'élaboration de ce type de décision. Le droit de l'environnement est en effet caractérisé, compte tenu de son objet et des difficultés liées à sa réception par ses différents destinataires, par la diversification de ses sources, de ses modes de production et du degré d'impérativité de ses normes. Les chartes visées par la disposition législative en cause illustrent cette diversification. Elles constituent en effet, comme de nombreux autres actes de ce type dans ce domaine(32), des engagements volontaires passés à l'issue d'un processus de concertation entre les acteurs non étatiques concernés, en l'occurrence les agriculteurs utilisateurs de pesticides et les riverains. Leur qualification de « décisions publiques » au sens de l'article 7 de la Charte de l'environnement n'allait pas de soi dans la mesure où seules les dispositions réglementaires issues du décret du 27 décembre 2019 prévoyaient l'approbation par le préfet des chartes adoptées à l'échelle départementale, ce dernier étant invité à vérifier que ces documents offraient des garanties équivalentes pour la protection de la santé des riverains à celles offertes par voie réglementaire, et à intervenir si nécessaire pour renforcer ces garanties par voie d'arrêté. La force obligatoire desdites chartes (sans laquelle elles n'auraient pas le statut normatif de « décisions ») était néanmoins conditionnée par l'intervention du préfet, contrairement à l'argumentaire développé par le représentant du Premier ministre qui s'appuyait sur l'exposé des motifs de l'amendement à l'origine de la disposition législative en cause et sur différents rapports ayant inspiré le mécanisme mis en place par la loi. Cette caractéristique a suffi à elle seule au Conseil pour leur reconnaître la qualité de « décisions publiques ».
Leur incidence sur l'environnement était moins compliquée à établir dans la mesure où les produits phytopharmaceutiques concernés avaient par nature, du fait de leur effet sélectif, une incidence sur la biodiversité. La raison d'être des chartes en cause concernait cependant non pas la biodiversité mais la santé des riverains. En associant « biodiversité » et « santé humaine » et en attachant à ces chartes « une incidence directe et significative sur l'environnement », le Conseil confirme la convergence entre ces deux composantes d'une conception holistique de l'environnement.
L'application du principe de « nbsp ; participation du public » à ces chartes témoigne là aussi d'une volonté de renforcer sa portée. Ainsi, après avoir constaté la carence du législateur quant à la détermination en la matière des « conditions et limites dans lesquelles s'exerce le droit de participation du public », il relève la méconnaissance par les dispositions en cause de ce droit garanti par la Constitution. Il indique en effet que le fait d'avoir prévu, dans une procédure spécifique (distincte de celle prévue à titre subsidiaire par le Code de l'environnement(33)), la participation alternative des « représentants » des riverains, méconnaissait le champ d'application de l'article 7 de la Charte de l'environnement qui reconnaît ce droit à « toute personne », à la différence par exemple du droit de participer à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises reconnu à « tout travailleur » par l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution de 1946. Dans une décision 595 QPC le Conseil avait néanmoins validé un dispositif prévoyant de manière alternative une participation directe et indirecte du public à propos des dispositions réglementaires fixant les conditions d'exercice de l'activité d'élimination de certains déchets par leur producteur ou leur détenteur(34). Le Conseil renforce ainsi la portée de ce principe matriciel du droit de l'environnement.
Compte tenu de la modification rédactionnelle du dispositif législatif en cause entre-temps, le Conseil confère à son invalidation un effet immédiat avec application « à toutes les affaires non jugées définitivement à la date de publication de la présente décision ». L'affaire, reprise en main par le Conseil d'État une fois la décision rendue, l'a conduit à annuler, faute de protection suffisante, y compris du point de vue de l'information réelle des riverains en amont des épandages, plusieurs dispositions du décret du 27 décembre 2019 encadrant leur épandage près des habitations(35). Tirant directement les conséquences de la décision QPC, il a annulé pour incompétence les dispositions relatives aux conditions d'élaboration des chartes et leur approbation par le préfet. Cette affaire et ses différentes péripéties illustrent la coordination avérée et nécessaire de l'office des juges des deux ailes du Palais royal et l'importance de certains acteurs sociétaux dans la mobilisation de la Justice, tant administrative que constitutionnelle. Elles témoignent par ailleurs d'un véritable verdissement de la jurisprudence de ces deux juridictions dont on peut espérer que l'impact ne sera pas que virtuel au regard des attentes légitimes relatives à la politique environnementale actuelle.
(1): * Professeur agrégé des facultés de droit à l'Univ. Lille, EA 4487 - CRDP (ERDP) - Centre « Droits et perspectives du droit (Équipe de recherche en droit public) », F-59 000 Lille, France ; Directeur scientifique du ForInCIP et de la revue Jurisdoctoria, auteur du blog La Constitution décodée.
(2): ** Professeur agrégé des facultés de droit à l'Univ. Lille, Co-Directeur de EA 4487 - CRDP (ERDP) - Centre « Droits et perspectives du droit (Équipe de recherche en droit public) », F-59 000 Lille, France.
(3): Décision n° 2020-812 DC du 14 janvier 2021, Loi organique relative au Conseil économique, social et environnemental.
(4): Décision n° 2021-815 DC du 25 mars 2021, Loi organique portant diverses mesures relatives à l'élection du Président de la République.
(5): Décision n° 2021-816 DC du 15 avril 2021, Loi organique relative à la simplification des expérimentations mises en œuvre sur le fondement du quatrième alinéa de l'article 72 de la Constitution.
(6): Décision n° 2021-814 DC du 1er avril 2021, Résolution modifiant le règlement de l'Assemblée nationale en ce qui concerne l'organisation des travaux parlementaires en période de crise.
(7): Décision n° 2013-664 DC du 28 février 2013, Résolution tendant à modifier le Règlement de l'Assemblée nationale afin d'instaurer la faculté, pour les groupes politiques, de se doter d'une coprésidence paritaire. À l'inverse, une seule résolution sénatoriale a connu la même rigueur, décision n° 92-309 DC du 9 juin 1992, Résolution modifiant l'article 47 bis du règlement du Sénat.
(8): Pour être complet, il faut citer la décision n° 2021-819 DC du 31 mai 2021, Loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire, dont on réserve toutefois le commentaire pour la prochaine chronique, en lien avec la décision n° 2021-824 DC du 5 août 2021, Loi relative à la gestion de la sortie de crise sanitaire II.
(9): Décision n° 2016-736 DC du 4 août 2016, Loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels.
(10): Décision n° 96-386 DC du 30 décembre 1996, Loi de finances rectificative pour 1996.
(11): Décision n° 99-421 DC du 16 décembre 1999, Loi portant habilitation du Gouvernement à procéder, par ordonnances, à l'adoption de la partie législative de certains codes.
(12): Décision n° 96-373 DC du 9 avril 1996, Loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française.
(13): Décision n° 99-412 DC du 15 juin 1999, Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.
(14): Décisions n° 2001-456 DC du 27 décembre 2001, Loi de finances pour 2002, n° 2001-454 DC du 17 janvier 2002, Loi relative à la Corse et n° 2004-490 DC du 12 février 2004, Loi organique portant statut d'autonomie de la Polynésie française.
(15): Décision n° 2001-456 DC du 27 décembre 2001, précitée.
(16): Article 36 de la Loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République, JORF du 25 août 2021.
(17): Décision n° 2011-625 DC du 10 mars 2011, Loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (consid. 59).
(18): Article 58-1 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009, modifiée par la loi du 22 juillet 2016.
(19): Loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de Covid-19.
(20): Décision n° 2020-851/852 QPC du 3 juillet 2020, M. Sofiane A. et autre [Habilitation à prolonger la durée des détentions provisoires dans un contexte d'urgence sanitaire].
(21): Ordonnance n° 2020-303 du 25 mars 2020 portant adaptation de règles de procédure pénale.
(22): Conduisant à qualifier les dispositions prises par voie d'ordonnance de « dispositions législatives », conformément à la décision 2020-843 QPC du 28 mai 2020 Force 5 [Autorisation d'exploiter une installation de production d'électricité].
(23): Le syndicat des avocats de France, le syndicat de la Magistrature, la Ligue des droits de l'homme, la Section française de l'observatoire international des prisons et le Conseil national des barreaux.
(24): Sous la forme d'un retour progressif au droit commun, Loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions.
(25): Cass. crim., 26 mai 2020, n° 20-81.910 et n° 20-81.971.
(26): Décision n° 2020-858/859 QPC du 2 octobre 2020, M. Geoffrey F. et autre [Conditions d'incarcération des détenus].
(27): Décision n° 2020-872 QPC du 15 janvier 2021 M. Krzystof B. [Utilisation de la visioconférence sans accord des parties devant les juridictions pénales dans un contexte d'urgence sanitaire].
(28): Décision n° 2019-802 QPC, 20 septembre 2019 M. Abdelnour B. [Utilisation de la visioconférence sans accord du détenu dans le cadre d'audiences relatives au contentieux de la détention provisoire].
(29): Décisions n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010 Mlle Danielle S. [Hospitalisation sans consentement] ; 2012-235 QPC du 20 avril 2012, Ass. Cercle de réflexion et de proposition d'actions sur la psychiatrie [Dispositions relatives aux soins psychiatriques sans consentement] ; 2011-631 DC du 9 juin 2011, Loi relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité ; 2020-800 DC du 11 mai 2020 Loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions.
(30): Comme le nom d'une certaine association regroupant les intérêts économiques des entreprises produisant ce type de produits : l'Union des industries de la protection des plantes. Cette association fut à l'origine d'une QPC très connue elle aussi et commentée dans cette chronique -- Décision 2019-823 QPC, v. Emmanuel CARTIER, Chronique de droits fondamentaux et libertés publiques, Titre VII, 2020/2 (N° 5).
(31): Loi n° 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l'équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous.
(32): Sous la forme de contrats d'engagement, de pactes ou de chartes comme ici.
(33): Art. L. 123-19-1 du code de l'environnement.
(34): Décision n° 2016-595 QPC du 18 novembre 2016 Société Aprochim et autres [Conditions d'exercice de l'activité d'élimination des déchets].
(35): CE, N° 437815, 3e et 8e ch., 27 juillet 2021.
Citer cet article
Jean-Philippe DEROSIER ; Emmanuel CARTIER. « Chronique de droits fondamentaux et libertés publiques (janvier à juin 2021) », Titre VII [en ligne], n° 7, La liberté individuelle, octobre 2021. URL complète : https://webview.conseil-constitutionnel.fr/publications/titre-vii/chronique-de-droits-fondamentaux-et-libertes-publiques-janvier-a-juin-2021
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