Chronique Conseil constitutionnel et jurisprudence de la CEDH (janvier 2024 à juin 2024)
Titre VII
N° 13 - novembre 2024
Durant la période considérée (janvier à juin 2024), des décisions relatives au principe d'égalité, au principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine et à certains droits procéduraux retiennent plus particulièrement l'attention. Elles témoignent non seulement de la convergence des standards de protection européen et constitutionnel mais aussi, parfois, de l'existence d'un niveau de protection constitutionnel plus élevé. Ainsi, si le droit européen des droits de l'homme a bien été à l'origine d'un puissant mouvement d'extension de l'application des garanties du droit à un procès équitable à des procédures se déroulant hors les juridictions ordinaires, pour autant, s'agissant des procédures disciplinaires, la jurisprudence du Conseil promeut une élévation du niveau de protection, comme en témoigne la décision n° 2024-1097 QPC du 26 juin 2024, M. Hervé A. Mais il est vrai que la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH) ne constitue qu'un standard minimal que les États peuvent, de manière bienvenue, choisir de dépasser(1).
A) Principe d'égalité
C'est sans surprise que le Conseil constitutionnel juge, dans la décision n° 2024-1086 QPC du 25 avril 2024, Mme Mercedes D., le 1 ° de l'article 84 de l'ordonnance n° 45-2441 du 19 octobre 1945 portant code de la nationalité française, dans sa rédaction initiale, contraire à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et au troisième alinéa du Préambule de la Constitution de 1946 selon lequel « la loi garantit à la femme, dans tous les domaines, des droits égaux à ceux de l'homme ». Topique du système patriarcal, cette disposition avait, en effet, été abrogée mais sans effet rétroactif(2).
Dans le droit fil de décisions précédentes, la forte intensité du contrôle des différences de traitement fondées sur le sexe est de nouveau constatée(3), faisant résolument écho à la jurisprudence européenne tant il est vrai que le juge de Strasbourg prend de longue date le contrepied des traditions trouvant leurs origines dans « le rôle primordial de l'homme et le rôle secondaire de la femme dans la famille »(4).
Dans cette perspective, seules « des raisons très fortes » sont de nature à légitimer une différence de traitement exclusivement fondée sur le sexe mais aussi sur la naissance, également en cause ici(5). La marge nationale d'appréciation est particulièrement restreinte et le contrôle approfondi puisque le juge vérifie si d'autres moyens n'auraient pas permis de satisfaire l'objectif poursuivi(6).
Se trouvait en cause, en l'espèce, la subordination de l'effet collectif attaché à l'acquisition de la nationalité française par la mère au bénéfice de ses enfants mineurs légitimes ou légitimés à la condition que celle-ci soit veuve alors que l'acquisition de la nationalité française par le père produisait dans tous les cas un tel effet.
Or, si ce dispositif poursuit l'objectif légitime du maintien de l'unité familiale en faisant en sorte que tous les enfants mineurs, légitimes ou légitimés, d'un couple possèdent la même nationalité, il institue une différence de traitement à la fois entre les enfants selon que la nationalité française a été acquise par le père ou la mère et entre le père et la mère. Mais, en l'absence de différence de situation des intéressés, le but avancé, susceptible d'être atteint par d'autres moyens, n'est pas de nature à justifier pareille différence.
Par ailleurs, se trouvait en cause, dans la décision n° 2024-1091/1092/1093 QPC du 28 mai 2024, M. Diabe S. et a., la conformité de l'article 3, alinéa 2, de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique au regard du principe d'égalité devant la justice garanti par les articles 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789(7). Les requérants reprochaient, en effet, à cette disposition – qui stipule que « les personnes de nationalité étrangère résidant habituellement et régulièrement en France sont également admises au bénéfice de l'aide juridictionnelle » – de subordonner le bénéfice de l'aide juridictionnelle pour les étrangers à la régularité de leur séjour en France.
Le Conseil affirme que « (s)i le législateur peut prévoir des règles de procédure différentes selon les faits, les situations et les personnes auxquelles elles s'appliquent, c'est à la condition que ces différences ne procèdent pas de distinctions injustifiées et que soient assurées aux justiciables des garanties égales, notamment quant au respect du droit d'agir en justice et des droits de la défense » (paragr. 7), le droit d'agir en justice étant ici, pour la première fois, mentionné au titre des garanties constitutives de l'égalité devant la justice(8).
L'aide juridictionnelle aux personnes physiques dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits en justice bénéficie aux personnes de nationalité française, aux ressortissants des États membres de l'Union européenne ainsi qu'aux autres personnes de nationalité étrangère résidant habituellement en France à condition qu'elles y résident régulièrement. Partant, une différence de traitement entre les étrangers est bien instituée selon qu'ils se trouvent ou non en situation régulière sur le territoire. Or, si le législateur peut adopter des dispositions spécifiques à l'égard des étrangers, en tenant compte notamment de la régularité de leur séjour, c'est à la condition de respecter leurs droits fondamentaux garantis par la Constitution et, en particulier, d'assurer des garanties égales à tous les justiciables (paragr. 12).
Certes, par dérogation, les étrangers peuvent bénéficier, sans condition de résidence, de l'aide juridictionnelle lorsqu'ils sont mineurs, lorsqu'ils sont mis en cause ou parties civiles dans une procédure pénale, ou lorsqu'ils font l'objet de certaines mesures prévues par l'article 515-9 du code civil ou par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA) ainsi qu'à titre exceptionnel, « lorsque leur situation apparaît particulièrement digne d'intérêt au regard de l'objet du litige ou des charges prévisibles du procès » (article 3, alinéas 3 et 4, de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991). Mais, « en privant dans tous les autres cas les étrangers ne résidant pas régulièrement en France du bénéfice de l'aide juridictionnelle pour faire valoir en justice les droits que la loi leur reconnaît, les dispositions contestées n'assurent pas à ces derniers des garanties égales à celles dont disposent les autres justiciables » (paragr. 14).
Si l'article 6, § 3 c) de la Convention européenne des droits de l'homme ne garantit expressément un droit à l'aide judiciaire gratuite qu'en ce qui concerne les procédures pénales et sous certaines conditions (l'insuffisance des ressources financières de l'intéressé et le fait que les intérêts de la justice l'exigent), et non pour toutes les contestations en matière civile(9), la Cour européenne des droits de l'homme (Cour EDH) a, de longue date, affirmé que la Convention « a pour but de protéger des droits non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs », notamment s'agissant du « droit d'accès aux tribunaux, eu égard à la place éminente que le droit à un procès équitable occupe dans une société démocratique »(10). Ainsi, dans certains cas, l'absence d'une aide judiciaire en matière civile peut emporter une violation de l'égalité des armes, « inhérente à la notion de procès équitable », en ce qu'elle prive l'intéressé du droit d'accès effectif à un tribunal(11). En la matière, le juge européen tient compte des faits et circonstances de l'espèce, notamment la gravité de l'enjeu pour l'intéressé, de la complexité du droit et de la procédure applicables et de la capacité de l'intéressé de défendre effectivement sa cause, chaque partie devant se voir offrir « une possibilité́ raisonnable de présenter sa cause dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire »(12).
Par ailleurs, la décision n° 2024-1086 QPC du 25 avril 2024, Mme Mercedes D., peut être mise en relation avec l'une des caractéristiques majeures de la Convention européenne des droits de l'homme, laquelle prévoit, dans son article 1er, que « les Hautes Parties contractantes reconnaissent à toute personne relevant de leur juridiction les droits et libertés définis au titre I de la présente Convention ». Les étrangers, même en situation irrégulière, sont susceptibles, en effet, d'avoir relevé de la juridiction d'un État partie et peuvent ainsi former un recours individuel au sens de l'article 34 de la Convention afin de se plaindre d'une violation d'un droit garanti. La Convention ne prévoit pas, en effet, de condition relative à la nationalité ou à la résidence. La condition pour que la responsabilité d'un État partie soit mise en cause est qu'il ait exercé sa « juridiction » au sens de l'article 1er de la Convention européenne des droits de l'homme à l'égard de la personne concernée.
Le principe d'égalité devant la justice se trouvait également en cause dans la décision n° 2023-1080 QPC du 6 mars 2024, Société de la Fontaine, relative à la conformité aux articles 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 de l'article 710, alinéa 2, du code de procédure pénale selon lequel « en matière criminelle, la chambre de l'instruction connaît des rectifications et des incidents d'exécution auxquels peuvent donner lieu les arrêts de la cour d'assises »(13). Pour la requérante, cette disposition, telle qu'interprétée par la Cour de cassation, méconnaissait, en effet, le principe d'égalité et le droit à un recours juridictionnel effectif.
La peine complémentaire de confiscation, applicable au propriétaire d'un bien, peut aussi porter sur un bien dont l'auteur de l'infraction n'est pas le propriétaire mais dont il a la libre disposition, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi (art. 131-21 du code pénal). Dans cette perspective, la confiscation est susceptible de porter préjudice à un propriétaire tiers à la procédure.
Lorsque le tiers propriétaire n'a pas été identifié et n'a pas réclamé cette qualité au cours de la procédure, il peut, postérieurement au prononcé de la peine de confiscation, saisir la juridiction de jugement qui l'a prononcée d'un incident contentieux relatif à son exécution afin de solliciter la restitution du bien (art. 710 du code de procédure pénale). Mais les voies de recours à l'encontre de la décision rendue sur la requête en difficulté d'exécution du tiers propriétaire d'un bien confisqué varient en fonction de la juridiction qui a rendu la décision, ce qui pose la question de l'octroi de garanties procédurales à l'intéressé, notamment la possibilité de formuler des observations afin de faire valoir ses droits.
Ainsi, lorsque la peine a été prononcée par une cour d'assises, la chambre de l'instruction est compétente pour connaître de cet incident contentieux. Son arrêt est, cependant, insusceptible d'appel (art. 597 du code de procédure pénale) alors que, lorsque la peine est prononcée par le tribunal correctionnel, la décision est susceptible d'appel. Or, pour le Conseil constitutionnel, cette différence de traitement entre tiers propriétaires, « qui n'est au demeurant pas justifiée par la nature criminelle ou correctionnelle de la peine, est sans lien avec l'objet des dispositions contestées, qui est de permettre à ce tiers propriétaire de solliciter, par la voie de l'incident contentieux, la restitution du bien confisqué » (paragr. 11).
En appréhendant la question sous l'angle de l'exigence d'accorder des garanties égales aux justiciables, faisant à cet égard écho au nécessaire respect de l'égalité des armes au sens de la jurisprudence européenne, la décision commentée renforce les garanties dont bénéficie le tiers propriétaire.
Attentif à l'effectivité de ses droits, le juge constitutionnel avait précédemment jugé l'article 225-25 du code pénal contraire à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen au regard de l'absence de garantie pour le propriétaire, dont le titre est connu ou qui a réclamé cette qualité au cours de la procédure, d'être « mis en mesure de présenter ses observations sur la mesure de confiscation envisagée par la juridiction de jugement aux fins, notamment, de faire valoir le droit qu'il revendique et sa bonne foi »(14). Et le Conseil d'affirmer que « les personnes dont le titre est connu ou qui ont réclamé cette qualité au cours de la procédure sont recevables à interjeter appel ou à former un pourvoi en cassation contre la décision ordonnant la confiscation d'un bien leur appartenant »(15).
Cette décision s'inscrivait dans le droit fil de la jurisprudence européenne qui a, de longue date, identifié des garanties procédurales inhérentes au droit au respect des biens, comme en matière d'expropriation ou de confiscation. Dès lors, la Cour vérifie-t-elle, au regard du second alinéa de l'article 1 du Protocole 1, que le propriétaire a bien eu « une occasion adéquate d'exposer sa cause aux autorités compétentes », garantissant, dès lors, l'effectivité des voies de recours(16).
Le juge européen veille aussi au respect des droits du tiers propriétaire. Ainsi, sanctionne-t-il l'absence de protection adéquate contre l'arbitraire lorsqu'il n'existe pas de procédure de nature à permettre au tiers propriétaire, qui n'a pas été jugé pour l'infraction pénale ayant conduit à la confiscation du bien en cause, de faire valoir ses droits(17).
À ses yeux, les personnes dont les biens sont menacés de confiscation doivent se voir conférer le statut de partie au procès dans le cadre duquel la confiscation peut être ordonnée, que ce soit au regard du droit au respect des biens(18) ou du droit à un procès équitable au sens de l'article 6, § 1, de la Convention européenne des droits de l'homme(19).
Par ailleurs, la décision n° 2024-1095 QPC du 6 juin 2024, M. Anthony M., apporte à la fois la confirmation de l'importance du pouvoir du juge lorsqu'il s'agit de déterminer l'identité de situations mais aussi de sa position de retrait par rapport aux choix du législateur.
Se trouvait en cause, ici, la conformité à l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de la première phrase de l'article L. 815-24-1 du code de la sécurité sociale relative à la subordination du bénéfice de l'allocation supplémentaire d'invalidité à une condition de ressources(20). Ainsi cette allocation supplémentaire « n'est due que si le total de cette (dernière) et des ressources personnelles de l'intéressé et du conjoint, du concubin ou du partenaire lié par un pacte civil de solidarité n'excède pas des plafonds fixés par décret », son montant variant donc selon la situation matrimoniale de l'allocataire. Or, pour le requérant, la différence de traitement entre les personnes invalides vivant en concubinage, tenues, à ce titre, de déclarer les revenus de leur concubin pour le calcul de l'allocation et celles vivant en colocation ou chez des parents, qui ne sont pas tenues de déclarer les ressources des personnes avec lesquelles elles vivent, était contraire à l'article 6 de la Déclaration.
Il estimait également contraire au principe d'égalité le traitement identique des personnes invalides vivant en concubinage, non soumises à une obligation de solidarité financière, et de celles mariées ou liées par un pacte civil de solidarité qui y sont soumises.
On le sait, pour le Conseil constitutionnel, si, en règle générale, le principe d'égalité « impose de traiter de la même façon des personnes qui se trouvent dans la même situation, il n'en résulte pas pour autant qu'il oblige à traiter différemment des personnes se trouvant dans des situations différentes » (paragr. 7).
Après avoir précisé que la prise en compte des revenus de l'allocataire tient à la volonté du législateur, attestée par les travaux préparatoires de la loi, de « tenir compte des conditions de vie des personnes invalides afin de déterminer le montant de l'allocation à leur octroyer pour leur garantir un niveau de ressources minimal », le juge constitutionnel considère, à propos de la différence de traitement litigieuse, que les deux catégories de personnes en cause sont dans des situations différentes (paragr. 10). En effet, les personnes vivant en concubinage ont une vie de couple, une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, ce qui n'est pas le cas des personnes vivant en colocation ou chez des proches.
En considérant, dès lors, que la différence de traitement en jeu est en rapport direct avec l'objet de la loi, le Conseil adopte une position en harmonie avec celle du juge européen. Ce dernier a pu, en effet, considérer une différence de traitement en matière successorale entre, d'une part, des sœurs célibataires ayant toujours vécu ensemble et, d'autre part, des époux et des partenaires civils, compatible avec l'article 14 combiné avec l'article 1 du Protocole 1 (droit au respect des biens) dans l'arrêt Burden c/ Royaume-Uni. En l'espèce, la survivante des deux sœurs était appelée à être assujettie à d'importants droits de succession que n'aurait pas à payer le membre survivant d'un couple marié ou d'un partenariat civil. Mais, pour la Cour, « (p)lutôt que la durée ou le caractère solidaire de la relation, l'élément déterminant est l'existence d'un engagement public, qui va de pair avec un ensemble de droits et d'obligations d'ordre contractuel »(21).
Concernant le second argument du requérant dans la décision n° 2024-1095 QPC, M. Anthony M., soit le traitement identique de situations différentes, le Conseil esquive un réel examen de la comparabilité des situations concernées, notamment l'absence d'obligation de solidarité financière dans le cadre du concubinage, se limitant, dès lors, pour l'essentiel à entériner le choix du législateur.
Ainsi, à ses yeux, il était loisible à ce dernier « de soumettre à la même condition de ressources, pour l'octroi de l'allocation supplémentaire d'invalidité, les personnes invalides vivant en concubinage et celles mariées ou liées par un pacte civil de solidarité, qui constituent les trois formes d'union sous lesquelles peut s'organiser, juridiquement, la vie commune d'un couple » (paragr. 14). Pourtant, les concubins ne bénéficient pas des règles plus favorables applicables aux autres formes d'union en matière fiscale ou successorale.
Cette forme d'évitement du juge constitutionnel contraste avec l'approche plus tranchée du juge européen. Ce dernier met, en effet, l'accent, dans l'arrêt précité Burden c/ Royaume-Uni, sur le fait que les conséquences juridiques du mariage ou celles d'un partenariat civil, dans lesquels « deux personnes décident expressément et délibérément de s'engager – distinguent ce type de relation des autres formes de vie commune ».
Pour autant, la Grande chambre met l'accent sur la liberté de choix des États en faveur de dispositifs plus favorables concernant l'octroi d'exonérations de droits de succession aux différentes catégories de survivants, « les États demeurant en principe libres d'élaborer des règles différentes dans le domaine de la politique fiscale » (§ 65). La reconnaissance d'une large marge nationale d'appréciation est aussi affirmée lorsque les États refusent un avantage accordé aux personnes mariées à celles qui ne le sont pas. La Commission européenne des droits de l'homme a ainsi pu juger, dans la décision Fernanda Quintana Zapata c/ Espagne, que les époux et les concubins étaient dans des situations différentes de nature à justifier l'exclusion du concubin survivant du bénéfice de la pension de réversion, dès lors, dénuée de caractère discriminatoire. Or, en l'espèce, la requérante et son concubin avaient vécu ensemble plus de soixante-cinq ans et avaient eu cinq enfants(22).
Certes, cette décision est ancienne mais, en la matière, l'élément décisif est l'ample marge d'appréciation concédée aux États en matière de politique sociale et fiscale. Et, en tout état de cause, pour le Conseil constitutionnel, traiter de manière identique des situations différentes n'est pas, comme pour le juge européen, constitutif d'une discrimination(23). Il s'agit seulement d'une possibilité pour le législateur et non d'une obligation.
B) Principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine
On le sait, la Cour européenne a joué un rôle majeur dans le renforcement de l'effectivité de la protection des droits fondamentaux des personnes privées de liberté. Mobilisant la technique des obligations positives, elle affirme ainsi, sur le fondement de l'article 3 de la Convention européenne des droits de l'homme, le droit de tout détenu à des conditions de détention respectueuses de la dignité humaine dans l'arrêt Kudla c/ Pologne(24), garantie dont bénéficie mutatis mutandis toute personne privée de liberté, dont les personnes étrangères placées en rétention administrative(25).
L'article 3 de la Convention impose donc à l'État de protéger la santé et l'intégrité physique des personnes privées de liberté, ce qui implique l'obligation de les nourrir convenablement(26). Ainsi l'alimentation insuffisante de personnes retenues est susceptible, généralement combinée avec d'autres problèmes, de constituer un traitement dégradant(27).
Dans cette perspective, la décision n° 2024-1090 QPC du 28 mai 2024, M. Mohamed K., s'inscrit résolument dans le droit fil du standard conventionnel, comme cela a pu être déjà relevé à propos des droits fondamentaux des personnes détenues.
Se trouvait en cause, ici, la constitutionnalité de la deuxième phrase du premier alinéa de l'article L. 813-13 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile (CESEDA)(28). Le requérant estimait, en effet, que le législateur avait privé de garantie légale le principe de sauvegarde de la dignité de la personne humaine en ne prévoyant pas les conditions dans lesquelles peut s'alimenter un étranger retenu dans le cadre de la procédure de vérification de son droit de circulation ou de séjour.
Pour le Conseil, le principe à valeur constitutionnelle de sauvegarde de la dignité de la personne humaine contre toute forme d'asservissement et de dégradation implique bien que « toute mesure privative de liberté doit être mise en œuvre dans le respect de la dignité de la personne humaine » (paragr. 5). Dès lors, il incombe aux autorités judiciaires et de police judiciaire de veiller à ce que les modalités de mise en œuvre d'une mesure de rétention soient respectueuses de la dignité de la personne humaine. Il revient également aux autorités judiciaires compétentes de prévenir et de réprimer les agissements portant atteinte à la dignité de la personne retenue et d'ordonner la réparation des préjudices subis.
Un étranger peut être retenu dans un local de police ou de gendarmerie par un officier de police judiciaire aux fins de vérification de son droit de circulation ou de séjour sur le territoire français s'il n'a pas été en mesure de justifier de ce droit à l'occasion d'un contrôle des obligations de détention, de port et de présentation des pièces ou documents l'autorisant à circuler ou séjourner en France (art. L. 813-1 du CESEDA). Dans ce cadre, l'officier de police judiciaire doit, à l'issue de la retenue, dresser un procès-verbal comportant, à peine de nullité, certaines mentions (art. L. 813-13 et L. 813-16 du CESEDA). Il doit préciser, afin de permettre aux autorités chargées du contrôle de la régularité de la privation de liberté d'apprécier les conditions dans lesquelles s'est déroulée la procédure de vérification du droit de circulation et de séjour, le jour et l'heure du début et de la fin de la retenue et la durée de celle-ci et, le cas échéant, la prise d'empreintes digitales ou de photographies ainsi que l'inspection visuelle ou la fouille des bagages et effets personnels, et les dates et heures de début et de fin de ces opérations. Or, alors que la durée de la retenue peut atteindre vingt-quatre heures, il n'est pas prévu de faire figurer au procès-verbal la mention relative aux conditions dans lesquelles l'étranger a pu s'alimenter pendant la rétention. Dès lors, les autorités judiciaires ne sont pas à même de vérifier que la privation de liberté en cause s'est déroulée dans des conditions respectueuses de la dignité de la personne humaine (paragr. 13).
C) Droits procéduraux
1. Droits de la défense
La confirmation de la convergence des standards européen et constitutionnel quant au respect effectif des droits de la défense des personnes vulnérables, soumises à des mesures de protection, doit être relevée. En ce domaine, la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l'homme dans l'arrêt Vaudelle c/ France(29) avait conduit à des modifications du code de procédure pénale et, ensuite, à une réception implicite de cette exigence par le juge constitutionnel non pas à propos du procès pénal en cause dans l'affaire Vaudelle mais de la garde à vue(30).
Dans la décision n° 2023-1076 QPC du 18 janvier 2024, M. Moussa H., il censure, au regard de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, le fait que, lorsqu'il apparaît au cours de la procédure que la personne déférée est un majeur protégé, l'article 706-113, alinéa 1, première phrase, du code de procédure pénale n'impose pas aux autorités judiciaires d'informer son tuteur ou son curateur(31). Dès lors, « le majeur protégé peut être dans l'incapacité d'exercer ses droits, faute de discernement suffisant ou de possibilité d'exprimer sa volonté en raison de l'altération de ses facultés mentales ou corporelles » et est « susceptible d'opérer des choix contraires à ses intérêts, au regard notamment de l'exercice de son droit de s'entretenir avec un avocat et d'être assisté par lui » (paragr. 9).
La nécessaire protection du majeur protégé a été, depuis lors, confirmée par le Conseil qui déclare contraires à l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen les deux derniers alinéas de l'article 706-113 du code de procédure pénale dans une décision n° 2024-1100 QPC du 10 juillet 2024, M. Christophe A., qui sera évoquée dans une prochaine chronique.
2. Droit de se taire
Deux décisions QPC, s'inscrivant dans le prolongement de la décision n° 2016-594 QPC du 4 novembre 2016, Mme Sylvie T., par laquelle le Conseil avait consacré le « droit de se taire » dans le cadre d'une procédure pénale(32), permettent de conforter l'effectivité de ce droit, découlant du principe selon lequel nul n'est tenu de s'accuser, en jugeant deux dispositifs contraires à l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
La décision QPC Mme Sylvie T. constituait la réception implicite d'une jurisprudence européenne ancienne puisqu'en l'absence de consécration textuelle, la Cour de Strasbourg avait mis au jour, au regard de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, le droit de tout « accusé » « de se taire et de ne pas contribuer à sa propre incrimination » dès l'arrêt Funke c/ France du 25 février 1993(33). Ce droit, qui implique de pouvoir bénéficier de l'assistance d'un avocat, vaut ainsi pour la personne gardée à vue, qui doit en être informée(34).
Depuis lors, le juge constitutionnel a consacré la garantie du droit de se taire en dehors du cadre de la garde à vue(35) mais aussi en dehors d'une procédure pénale en garantissant son exercice dans le cadre d'une procédure disciplinaire avec la décision n° 2023-1074 QPC du 8 décembre 2023, M. Renaud N.
Se trouvait en cause, dans la décision n° 2024-1089 QPC du 17 mai 2024, M. Christophe M., la conformité à la Constitution du deuxième alinéa de l'article 51-1 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse(36). Le requérant estimait, en effet, que l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen était méconnu en l'absence d'information de la personne dont la mise en examen est envisagée par le juge d'instruction pour un délit de diffamation ou d'injure publique de son droit de se taire lorsque ce dernier l'avise, par lettre recommandée, qu'elle peut produire des observations ou que le juge d'instruction l'invite à répondre à des questions écrites.
L'article 51-1 de la loi sur la liberté de la presse prévoit une procédure dérogatoire au droit commun, essentiellement écrite, pour l'instruction des délits de diffamation ou d'injure aux fins de permettre au tribunal correctionnel de se prononcer rapidement(37). Aux termes de son alinéa 2, lorsque le juge d'instruction a l'intention de mettre en examen une personne pour l'un de ces délits, il l'en informe par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en précisant chacun des faits qui lui sont reprochés ainsi que leur qualification juridique. Le juge d'instruction avise également la personne concernée de son droit de faire connaître des observations écrites dans un délai d'un mois et peut, par le même avis, l'interroger afin de solliciter, dans le même délai, sa réponse à différentes questions écrites.
Or, au regard de l'office du juge d'instruction, l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen exige, comme le suggérait la Cour de cassation, que la personne concernée soit informée de son droit de se taire(38). Ce dernier doit, en effet, « établir l'imputabilité des propos à la personne pouvant être poursuivie et, si nécessaire, instruire sur leur tenue effective, sur leur caractère public ainsi que sur l'identité et l'adresse de cette personne ». En outre, pour procéder à sa mise en examen, le juge d'instruction s'assure de l'existence d'indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elle ait pu participer, comme auteur ou comme complice, à la commission des infractions dont il est saisi. Partant, il est susceptible, comme l'avait relevé la Cour de cassation, de « porter une appréciation sur les faits retenus à titre de charges contre la personne dont il envisage la mise en examen » (paragr. 8).
Par ailleurs, la personne concernée peut être amenée à reconnaître les faits qui lui sont reprochés lorsqu'elle formule des observations ou répond aux questions qui lui sont posées d'autant que le fait même que le juge d'instruction l'invite à présenter des observations ou à répondre à des questions, est susceptible de la conduire à croire qu'elle ne dispose pas du droit de se taire (paragr. 9).
Se trouvait en cause, dans une seconde décision – la décision précitée n° 2024-1097 QPC du 26 juin 2024, M. Hervé A. –, la constitutionnalité des articles 52, alinéa 1, première phrase, et 56, alinéa 1 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature(39). Le requérant estimait, en effet, que la loi méconnaissait l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en ne prévoyant pas qu'un magistrat mis en cause soit informé de son droit de se taire lors de son audition par le rapporteur dans le cadre de l'enquête puis lors de sa comparution devant le Conseil supérieur de la magistrature statuant en conseil de discipline quand bien même ses déclarations étaient susceptibles d'être utilisées à son encontre dans le cadre de la procédure disciplinaire.
Cette QPC permet au juge constitutionnel de confirmer son approche protectrice quant au champ d'application du droit de se taire, promue dans la décision précitée n° 2023-1074 QPC du 8 décembre 2023, M. Renaud N. Saisi, dans cette dernière, de la question de la notification du droit de se taire à une personne mise en cause en dehors d'une procédure pénale, il avait, en effet, considéré que le droit de se taire s'applique non seulement « aux peines prononcées par les juridictions répressives mais aussi à toute sanction ayant le caractère d'une punition », exigeant dès lors que « le professionnel faisant l'objet de poursuites disciplinaires ne puisse être entendu sur les manquements qui lui sont reprochés sans qu'il soit préalablement informé du droit qu'il a de se taire » (paragr. 9), ce qu'il réaffirme ici (paragr. 9).
Or, on le sait, le bénéfice des garanties du droit à un procès équitable est conditionné, dans le cadre de la Convention européenne des droits de l'homme, à un critère matériel d'applicabilité, soit l'existence d'une « contestation sur des droits et des obligations de caractère civil » ou d'une « accusation en matière pénale » au sens de l'article 6 § 1 du texte conventionnel. Et si le juge européen retient souvent une acception large de ces notions autonomes, pour autant, l'applicabilité de l'article 6 à certains contentieux demeure exclue.
L'article 6, § 1, de la Convention peut être jugé applicable, au titre du « volet civil », à des procédures disciplinaires devant des juridictions ordinales lorsqu'est en jeu le droit d'exercer une profession(40). Après plusieurs revirements de jurisprudence, l'applicabilité de cette disposition au contentieux de la fonction publique a également été reconnue, cette jurisprudence ayant ensuite été appliquée, par exemple, à des procédures disciplinaires à l'encontre de magistrats ou d'enseignants(41). Par la suite, le juge européen a également considéré l'article 6, § 1, en « matière civile » applicable non seulement lorsqu'était en jeu une interdiction temporaire ou permanente d'exercer une profession libérale mais aussi lorsqu'était en cause l'infliction d'une amende. L'issue de la procédure n'étant pas déterminante pour juger de l'applicabilité de l'article 6, § 1, le droit d'exercer une profession peut être en cause du seul fait que sa suspension fait partie des mesures susceptibles d'être prononcées contre l'intéressé, comme à propos d'un notaire(42) ou d'un huissier de justice(43).
Mais le droit de ne pas s'auto-incriminer, en cause ici, fait partie des garanties propres à la « matière pénale » au sens de la Convention. Or, en principe, l'article 6, dans son volet pénal, ne s'applique pas aux poursuites disciplinaires(44). Toutefois, en présence de sanctions particulièrement lourdes ou d'un contentieux mi-pénal, mi-disciplinaire, la Cour de Strasbourg a pu admettre son applicabilité(45). En ce domaine, c'est la nature et la gravité de la sanction qui constituent l'élément décisif(46). Pour la Cour européenne, le fait que « des actes susceptibles de conduire à une sanction disciplinaire constituent également des infractions n'est pas suffisant pour considérer qu'une personne responsable selon le droit disciplinaire est 'accusée' d'un crime »(47).
Pratiquant un contrôle in concreto, le juge européen fait donc application, aux fins de déterminer si la notion autonome de « matière pénale » est en jeu, des critères dits « critères Engel », soit la qualification juridique de l'infraction en droit interne, la nature même de l'infraction et le degré de sévérité de la sanction que risque de subir l'intéressé. Ainsi, dans l'affaire précitée Grosam, considérant que les deux premiers critères ne sont pas satisfaits en présence d'une infraction qualifiée de disciplinaire par le droit interne et d'une norme dépourvue de caractère général puisque s'appliquant aux seuls huissiers de justice en tant que membres d'un groupe professionnel en vue du respect de règles déontologiques particulières, il examine le troisième critère. En l'espèce, les sanctions encourues – le blâme, le blâme écrit, une amende d'un montant pouvant aller jusqu'au centuple du salaire mensuel minimum et la révocation – étaient, hormis l'amende, des « sanctions disciplinaires typiques ». Et contrairement aux amendes dans les procédures pénales, la loi pertinente ne prévoyait pas de peine de prison en cas de non-paiement. Au surplus, une révocation éventuelle de l'intéressé ne l'aurait pas non plus empêché d'exercer un métier du droit. Dès lors, l'article 6, dans son « volet pénal », est jugé inapplicable(48).
Déjà relevée, l'approche plus généreuse du Conseil constitutionnel quant au champ d'application de certaines garanties du droit à un procès équitable est, ici, confirmée(49). S'il est vrai que les notions d'« accusation en matière pénale » et de « sanction ayant le caractère d'une punition » présentent d'indéniables affinités, pour autant, l'appréhension plus protectrice de la notion de « sanction ayant le caractère d'une punition » dans le cadre d'un contrôle abstrait, démontre de nouveau la complémentarité du contrôle de conventionnalité et du contrôle de constitutionnalité a posteriori. Dans la décision n° 2024-1097 QPC du 26 juin 2024, M. Hervé A., le Conseil constate, en effet, une méconnaissance de l'article 9 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.
Lorsque le Conseil supérieur de la magistrature est saisi de poursuites disciplinaires et qu'il est procédé à une enquête, le rapporteur désigné par le président du conseil de discipline entend ou fait entendre le magistrat mis en cause et a donc la faculté de l'interroger sur les faits qui lui sont reprochés.
Puis, lors de sa comparution, l'intéressé est entendu par le conseil de discipline qui peut l'inviter à fournir des explications et évoquer ses moyens de défense sur les faits litigieux.
Dans cette perspective, le magistrat mis en cause est susceptible de reconnaître les manquements pour lesquels il est poursuivi. En outre, le fait même qu'il soit entendu ou invité à présenter ses observations peut être de nature à lui laisser croire qu'il ne dispose pas du droit de se taire. Or, « lors de l'audience, le conseil de discipline prend connaissance des déclarations du magistrat qui sont consignées dans le rapport établi à la suite de l'enquête et reçoit celles qui sont faites devant lui » (paragr. 14).
(1): Aux termes de l'article 53 de la Convention « Aucune des dispositions de la présente Convention ne sera interprétée comme limitant ou portant atteinte aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales qui pourraient être reconnus conformément aux lois de toute Partie contractante ou à toute autre Convention à laquelle cette Partie contractante est partie ».
(2): La loi n° 73-42 du 9 janvier 1973 complétant et modifiant le code de la nationalité française et relative à certaines dispositions concernant la nationalité française avait modifié l'article 84 de l'ordonnance du 19 octobre 1945 ensuite abrogé par la loi n° 93-933 du 22 juillet 1993 réformant le droit de la nationalité.
(3): Voy. Cons. const., déc. n° 2013-360 QPC du 9 janvier 2014, Mme Jalila K., cette chron., Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2014, n° 44, p. 163 ; déc. n° 2018-737 QPC du 5 octobre 2018, M. Jaime Rodrigo F., cette chron., Titre VII, n° 2, avril 2019 ; déc. n° 2021-954 QPC du 10 décembre 2021, Mme Fatma M., cette chron., Titre VII, n° 8, avril 2022.
(4): Cour EDH, arrêt du 16 novembre 2004, req. n° 29865/96, Ünal Tekeli c/ Turquie, § 63.
(5): La hiérarchisation des motifs de distinction en lien avec l'intensité du contrôle, opérée par la Cour européenne, a été systématisée dans l'arrêt de Grande chambre Chabauty c/ France du 4 octobre 2012 (req. n° 57412/08, § 50).
(6): Lorsque sont concernées des questions relatives à la nationalité, l'article 14 de la Convention, qui ne peut être invoqué seul, est mobilisé en combinaison avec l'article 8 au titre de la vie privée qui englobe le refus d'accorder une nationalité au regard de son impact sur « l'identité sociale » d'une personne (Cour EDH, arrêt du 11 octobre 2011, req. n° 53124/09, Genovese c/ Malte, § 33).
(7): Disposition dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-274 du 7 mars 2016 relative au droit des étrangers en France.
(8): Cons. const., commentaire de la décision, p. 15.
(9): Cour EDH, arrêt du 26 février 2002, req. n° 46800/99, Del Sol c/ France, § 20.
(10): Cour EDH, arrêt du 9 octobre 1979, req. n° 6289/73, Airey c/ Irlande, § 24. La Cour veille à ce que l'assistance judiciaire soit effective (Cour EDH, arrêt du 13 mai 1980, req. n° 6694/74, Artico c/ Italie, nomination d'un avocat d'office).
(11): Cour EDH, arrêt du 13 février 2003, req. n° 36378/97, Bertuzzi c/ France, §§ 31-32, procédure opposant le requérant à un professionnel du droit. Aussi, Cour EDH, arrêt du 15 février 2005, req. n° 68416/01, Steel et Morris c/ Royaume-Uni, § 72, partie adversaire – Mc Donald's – disposant de moyens importants pour assurer sa défense.
(12): Cour EDH, arrêt précité Steel et Morris, §§ 61-62.
(13): Disposition dans sa rédaction résultant de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire.
(14): La disposition, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2016-444 du 13 avril 2016 visant à renforcer la lutte contre le système prostitutionnel et à accompagner les personnes prostituées, était ainsi rédigée : « Les personnes physiques et morales reconnues coupables des infractions prévues aux sections 1 bis et 2 du présent chapitre encourent également la peine complémentaire de confiscation de tout ou partie des biens leur appartenant ou, sous réserve des droits du propriétaire de bonne foi, dont elles ont la libre disposition, quelle qu'en soit la nature, meubles ou immeubles, divis ou indivis ».
(15): Cons. const., déc. n° 2021-899 QPC du 23 avril 2021, M. Henrik K. et a., paragr. 12 et paragr. 16. Voy. aussi Cons. const., déc. n° 2021-932 QPC du 23 septembre 2021, Société SIMS Holding agency corp et a., et déc. n° 2021-949/950 QPC du 24 novembre 2021, Mme Samia T. et a. La loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire modifie l'article 121-21 du code pénal en prévoyant que la peine de confiscation concernant le bien d'un tiers propriétaire ne peut être prononcée si ce dernier, dont le titre est connu ou qui a réclamé cette qualité au cours de la procédure, n'a pas été mis en mesure de présenter ses observations sur la confiscation envisagée. En qualité de juge de droit commun de la CEDH, la Cour de cassation avait également œuvré en faveur de l'octroi de garanties procédurales suffisantes, estimant, au visa de la Convention, que « toute personne dont le titre est connu ou qui a revendiqué cette qualité pendant la procédure a droit à ce que sa cause soit entendue par une juridiction ordonnant la confiscation d'un bien dont elle est propriétaire ou dont elle revendique la propriété » (Cass. crim., arrêt du 7 septembre 2022, n° 21-84.322).
(16): Cour EDH, arrêt du 24 octobre 1986, req. n° 9118/80, AGOSI c/ Royaume-Uni, § 55, confiscation. Aussi, Cour EDH, 21 mai 2002, req. n° 28856/95, Jokela c/ Finlande, § 45, expropriation.
(17): Cour EDH, arrêt du 13 octobre 2015, req. n° 3503/08, Ünsped Paket Servisi SaN. Ve TiC. A. Ş. c/ Bulgarie. Aussi, Cour EDH, arrêt du 4 juillet 2017, req. n° 58045/11, S.C. Service Benz Com S.R.L c/ Roumanie.
(18): Cour EDH, arrêt du 1er avril 2010, req. n° 16903/03, Denisova et Moiseyeva c/ Russie, §§ 59-60 et § 64. Aussi, Cour EDH, arrêt du 16 avril 2019, req. n° 27879/13, Bokova c/ Russie.
(19): Cour EDH, arrêt du 10 avril 2012, req. n° 20496/02, Silickiene c/ Lituanie, § 50.
(20): Disposition dans sa rédaction résultant de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale.
(21): Cour EDH, Gr. ch., arrêt du 29 avril 2008, req. n° 13378/05, Burden c/ Royaume-Uni, § 65.
(22): Commission EDH, décision du 11 novembre 1986, req. n° 11089/84.
(23): Cour EDH, Gr. ch., arrêt du 6 avril 2000, req. n° 34369/97, Thlimmenos c/ Grèce.
(24): Cour EDH, Gr. ch., arrêt du 26 octobre 2000, req. n° 30210/96, Kudla c/ Pologne, § 94.
(25): Cour EDH, arrêt du 27 juillet 2004, req. n° 57671/00, Slimani c/ France ; Cour EDH, Gr. ch., arrêt du 21 janvier 2011, req. n° 30696/09, M.S.S c/ Belgique et Grèce, parmi d'autres éléments, nourriture insuffisante.
(26): Cour EDH, arrêt du 15 juin 2006, req. n° 64846/01, Moisejevs c/ Lettonie, individu placé en détention provisoire insuffisamment nourri, traitement dégradant au sens de l'article 3 de la Convention.
(27): Par exemple, Cour EDH, arrêt du 26 novembre 2009, req. n° 8256/07, Tabesh c/ Grèce, demandeur d'asile privé de liberté ne bénéficiant ni d'activités récréatives, ni d'une restauration appropriée ou arrêt du 22 juillet 2010, req. n° 12186/08, A.A. c/ Grèce, parmi d'autres éléments, absence d'infrastructure pour les repas.
(28): Disposition dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2020-1733 du 16 décembre 2020 portant partie législative du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
(29): Cour EDH, arrêt du 31 janvier 2001, req. n° 35683/97. En sa qualité de juge de droit commun de la Convention, la Cour de cassation censure, au visa de l'article 6 de la CEDH, l'absence d'information du tuteur ou du curateur lors de la phase de jugement (Voy. Cass. crim., arrêt du 27 novembre 2012, n° 15-84.469 ; arrêt du 10 janvier 2017, n° 15-84.469)
(30): Voy. Cons. const., déc. n° 2018-730 QPC du 14 septembre 2018, M. Mehdi K., absence d'obligation légale d'aviser le tuteur ou le curateur d'un majeur protégé de son placement en garde à vue ; cette chron., Titre VII, n° 2, avril 2019.
(31): Disposition dans sa rédaction résultant de la loi n° 2021-1729 du 22 décembre 2021 pour la confiance dans l'institution judiciaire.
(32): § 5, personne mise en cause gardée à vue. Voy. cette chron., Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 55-56, juin 2017, p. 266.
(33): § 44 de l'arrêt, req. n° 10588/83.
(34): Cour EDH, Gr. ch., arrêt du 27 novembre 2008, req. n° 36391/02, Salduz c/ Turquie et arrêt du 14 octobre 2010, req. n° 1466/07, Brusco c/ France.
(35): Cons. const., déc. n° 2020-886 QPC du 4 mars 2021 , M. Oussama C. ; déc. n° 2021-894 QPC du 9 avril 2021, M. Mohamed H. ; déc. n° 2021-895/901/902/903 QPC du 9 avril 2021, M. Francis S. et a. ; déc. n° 2021-920 QPC du 18 juin 2021, M. Al Hassane S. ; cette chron., Titre VII, n° 7, octobre 2021.
(36): Disposition dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 de programmation 2018-2022 et de réforme pour la justice.
(37): Articles 80-1 et 116 du CPP.
(38): Cass. crim., arrêt du 13 février 2024, n° 00313, décision de renvoi.
(39): L'article 52 de l'ordonnance n° 58-1270 dans sa rédaction résultant de la loi organique n° 2010-830 du 22 juillet 2010 relative à l'application de l'article 65 de la Constitution et l'article 56 de l'ordonnance dans sa rédaction résultant de la loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats et au Conseil supérieur de la magistrature.
(40): Cour EDH, arrêt du 28 juin 1978, req. n° 6232/73, König c/ Allemagne ; arrêt du 23 juin 1981, req. n° 6878/75 et 7238/75, Le Compte, Van Leuven et De Meyere c/ Belgique.
(41): Cour EDH, Gr. ch., arrêt du 19 avril 2007, req. n° 63235/00, Vilho Eskelinen et a. c/ Finlande ; arrêt du 5 février 2009, req. n° 22330/05, Olujic c/ Croatie ; arrêt du 3 juin 2008, req. n° 41296/04 et 41298/04, Karaduman et Tandogan c/ Turquie. L'arrêt Vilho Eskelinen et a. prévoit, cependant, que l'article 6, § 1, n'est pas applicable si le droit national « exclut l'accès à un tribunal s'agissant du poste ou de la catégorie de salariés en question » et si « l'objet du litige est lié à l'exercice de l'autorité étatique ou remet en cause le lien spécial » de confiance et de loyauté entre l'agent et l'État employeur (§ 62). Dès lors, certains contentieux disciplinaires peuvent, par exception, ne pas être soumis au respect des garanties générales du droit à un procès équitable.
(42): Cour EDH, arrêt du 5 mars 2020, req. n° 69291/12, Peleki c/ Grèce.
(43): Cour EDH, Gr. ch., arrêt du 1er juin 2023, req. n° 19750/13, Grosam c/ République tchèque. Aussi, Cour EDH, arrêt du 16 juillet 2009, req. n° 8453/04, Bayer c/ Allemagne.
(44): Cour EDH, arrêt du 8 juin 1976, req. n° 5100/71 et a., Engel et a. c/ Pays-Bas, §§ 80-85 ; arrêt précité Le Compte, Van Leuven et De Meyere, § 42 ; arrêt du 10 février 1983, req. n° 7299/75 et 7496/76, Albert et Le Compte c/ Belgique, § 25.
(45): Cour EDH, arrêt du 25 février 1995, req. n° 22107/93, Findlay c/ Royaume-Uni (peine d'emprisonnement, renvoi de l'armée) ; arrêt du 28 juin 1984, req. n° 7819/77 et 7878/77, Campbell et Fell c/ Royaume-Uni (sanctions infligées à des personnes détenues) ; arrêt du 26 septembre 2000, req. n° 33933/96, Guisset c/ France (sanctions infligées par la Cour de discipline budgétaire et financière).
(46): Cour EDH, arrêt précité Engel et a., §§ 82-83.
(47): Cour EDH, arrêt précité Peleki, § 36.
(48): §§ 111-123. Voy. aussi Cour EDH, arrêt du 19 février 2013, req. n° 47195/06, Müller-Hartburg c/ Autriche, § 47 ; Cour EDH, Gr. ch., arrêt du 6 novembre 2018, req. n° 55391/13 et a., Ramos Nunes de Carvalho e Sá c/ Portugal, §§ 126-127.
(49): Voy. Cons. const., déc. n° 2019-781 QPC du 10 mai 2019, M. Grégory M., principe du contradictoire, cette chron., Titre VII, n° 3, octobre 2019 ; Cons. const., déc. n° 2019-798 QPC du 26 juillet 2019, M. Windy B., principe d'impartialité, cette chron., Titre VII, n° 4, avril 2020.
Citer cet article
Hélène SURREL. « Chronique Conseil constitutionnel et jurisprudence de la CEDH (janvier 2024 à juin 2024) », Titre VII [en ligne], n° 13, L'environnement, novembre 2024. URL complète : https://webview.conseil-constitutionnel.fr/publications/titre-vii/chronique-conseil-constitutionnel-et-jurisprudence-de-la-cedh-janvier-2024-a-juin-2024
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