Titre VII
N° 5 - octobre 2020
Chronique Conseil constitutionnel et jurisprudence de la CEDH (janvier 2020 à juin 2020)
Visant à mettre en relation la jurisprudence du Conseil constitutionnel avec celle de la Cour européenne des droits de l'homme, la présente chronique porte sur les décisions QPC rendues entre le 1er janvier et le 30 juin 2020.
Les décisions commentées, qui concernent le principe de nécessité des peines, le principe d'égalité et plusieurs droits substantiels(1), attestent d'un niveau de protection des droits globalement équivalent. Mais, ce dernier diffère, toutefois, concernant le principe non bis in idem et le principe d'égalité.
A. Principe de nécessité des peines
Était en cause, dans la décision n° 2020-838/839 QPC du 7 mai 2020, M. Jean-Guy C. et autre, la conformité à la Constitution du premier alinéa de l'article L. 131-11 du Code des juridictions financières, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2008-1091 du 28 octobre 2008. Les requérants estimaient, en effet, que l'impossibilité pour le juge des comptes d'infliger une amende pour gestion de fait dans la seule hypothèse où le comptable de fait était poursuivi, pour les mêmes opérations, sur le fondement de l'article 433-12 du Code pénal (CP) sanctionnant l'immixtion dans l'exercice d'une fonction publique, violait l'article 8 de la Déclaration dans la mesure où des poursuites pénales sur d'autres fondements étaient susceptibles d'être engagées à l'encontre du comptable de fait à raison des mêmes opérations.
Si le principe non bis in idem ne s'est pas vu reconnaître une valeur constitutionnelle(2), pour autant, on sait que l'article 8 de la DDHC prohibe le cumul de poursuites et de sanctions « pénales »(3) sous réserve que trois conditions soient remplies. Les sanctions en jeu doivent réprimer de mêmes faits qualifiés de manière identique et être d'une nature équivalente c'est-à-dire principalement d'une sévérité analogue et les intérêts sociaux protégés doivent être les mêmes.
Ici, les requérants faisaient plus précisément valoir que la disposition contestée n'interdisait pas le cumul de poursuites pour gestion de fait et de poursuites sur le fondement d'autres dispositions concernant cinq infractions pénales : l'abus de confiance (article 314-1 du Code pénal (CP)), la concussion (article 432-10 du CP), la corruption passive (article 432-11, 1 ° du CP), le détournement de fonds publics (article 432-15 du CP) et l'abus de biens sociaux (articles L. 241-3, 4 ° et L. 242-6, 3 ° du Code de commerce). Mais, pour le Conseil, « (l)a seule circonstance que plusieurs incriminations soient susceptibles de réprimer un même comportement ne peut caractériser une identité de faits au sens des exigences résultant de l'article 8 de la Déclaration de 1789 que si ces derniers sont qualifiés de manière identique ». Si les incriminations évoquées par les intéressés « sont susceptibles de réprimer des faits par lesquels une personne s'est rendue coupable de gestion de fait, elles ne se limitent pas, contrairement à cette dernière infraction, à cette seule circonstance. En effet, entrent dans les éléments constitutifs de ces premières infractions soit l'utilisation des fonds ou des valeurs, soit la mission ou les fonctions dont est investi celui qui les a maniés. Dès lors, ces infractions ne tendent pas à réprimer de mêmes faits, qualifiés de manière identique » (§ 9). Et le Conseil d'ajouter, par ailleurs, que s'il existait d'autres cas de cumul entre les poursuites pour gestion de fait et des poursuites à des fins de sanction ayant le caractère de punition, ces derniers devraient aussi être soumis au respect du principe de nécessité des peines (§ 10).
La décision commentée lui permet de préciser la teneur de la condition selon laquelle les sanctions en jeu doivent réprimer les mêmes faits, c'est-à-dire des faits définis et qualifiés de manière identique par les dispositions pertinentes.
Comme l'indique le Service juridique dans le commentaire de la décision, l'argumentation des requérants reposait « sur l'idée que des poursuites devaient être considérées comme portant sur les mêmes faits dès lors que les champs d'application des infractions poursuivies se recoupent, quand bien même ces faits ne seraient pas qualifiés juridiquement de la même façon par les textes définissant ces infractions ». Or, pour que la première condition soit remplie, « le juge constitutionnel n'exige pas seulement que ces faits soient matériellement identiques, mais s'attache également à la qualification juridique que leur attache le législateur »(4). Cela n'implique pas que les actes définissant les infractions soient identiques, mais suffisamment proches pour « permettre de conclure que le législateur a entendu réprimer les mêmes faits », ce qui conduit logiquement à exclure « des infractions dont les champs d'application sont très différents et ne se recoupent qu'accessoirement »(5).
Cette approche de l'élément idem du principe non bis in idem paraît convergente avec celle de la Cour européenne qui, depuis l'arrêt Zolotoukhine c/ Russie, qui a clarifié sa position, prend en compte l'identité des faits matériels. L'article 4 du Protocole 7 interdit de poursuivre ou de juger une « personne pour une seconde 'infraction' pour autant que celle-ci a pour origine des faits identiques ou des faits qui sont en substance les mêmes »(6). Dans cette perspective, la question de savoir si deux infractions étaient les mêmes dépend d'une « analyse axée sur les faits » plutôt que d'« un examen formel consistant à comparer les 'éléments essentiels' des infractions »(7).
La condition relative au fait que les sanctions relevaient du même ordre de juridiction, qui emportait une limitation importante du champ d'application du principe de nécessité des peines, a été supprimée de manière bienvenue(8). Mais l'inconstitutionnalité d'un cumul de poursuites ou de sanctions demeure toujours conditionnée à la finalité et à l'équivalence des sanctions en jeu(9). Or, pour la Cour européenne, l'élément décisif est la nature pénale, au sens de la Convention, des sanctions. La nature - incluant la finalité - et le degré de sévérité de la sanction sont pris en compte aux fins de déterminer si celle-ci relève de la « matière pénale » au sens de l'article 6 § 1 c'est-à-dire pour déterminer l'applicabilité de cette disposition(10). Ainsi, dans l'arrêt Grande Stevens et a. c/ Italie du 4 mars 2014, les sanctions en cause « relèvent, par leur sévérité, de la matière pénale » en raison des montants très élevés des amendes encourues (§ 99). Le principe non bis in idem entre, dès lors, en jeu si sont en cause des sanctions « pénales ».
L'utilisation par le juge constitutionnel du critère de l'équivalence des sanctions suscite des interrogations quant au champ d'application de l'interdiction du cumul de sanctions, ce que l'affaire Lucky Dev c/ Suède (27 novembre 2014, n° 7356/10) permet d'illustrer.
Se trouvait en cause, en l'espèce, l'infliction de majorations d'impositions et la poursuite de la requérante pour des infractions fiscales et comptables pour des faits en substance identiques. La condamnation pour une infraction comptable aggravée - consistant dans le non-respect d'exigences comptables prévues par la loi - se distinguait suffisamment de la question des pénalités fiscales pour conclure que l'intéressée n'avait pas été punie deux fois pour la même infraction. Concernant la procédure pénale, la requérante avait été poursuivie, mais acquittée. Mais elle avait été jugée à nouveau pour une infraction fiscale pour laquelle elle avait déjà été acquittée par un jugement définitif, ce qui emporte violation de l'article 4 du Protocole 7 (§ 63). Alors que la sanction administrative résidait dans des majorations d'impositions et des pénalités fiscales, la peine encourue pour l'infraction fiscale allait d'une amende à une peine d'emprisonnement maximale de six ans pour une infraction fiscale aggravée. La loi prévoyait qu'une personne qui n'était pas considérée comme ayant fourni intentionnellement des informations erronées, mais avait fait preuve d'une négligence flagrante pouvait être condamnée à une amende ou à une peine d'emprisonnement d'une durée maximale d'un an. Or, dans un tel cas, on peut se demander si le Conseil constitutionnel considérerait que les sanctions ont une nature équivalente. Le critère premier paraissant être la sévérité de la sanction, il est délicat de répondre à cette question au regard des montants des majorations d'imposition dans l'affaire en cause(11). Dès lors, le cumul de poursuites et de sanctions pourrait peut-être être admis, l'application du principe de proportionnalité commandant alors seulement que le montant global des sanctions prononcées ne dépasse pas le montant le plus élevé de l'une des sanctions encourues(12).
À tout le moins, la méthode appliquée par le juge constitutionnel paraît complexe et source d'incertitudes(13). L'interdiction du cumul de poursuites et de sanctions ne s'applique pas à toutes les « sanctions ayant le caractère d'une punition », ce qui implique, dès lors, une appréciation au cas par cas du caractère comparable des sanctions en jeu.
B. Principe d'égalité devant la loi
La décision 2019-828/829 QPC du 28 février 2020, M. Raphaël S. et autre, est topique de la complémentarité des contrôles de constitutionnalité et de conventionnalité lorsqu'est en cause une question sensible, marquée par la diversité des solutions nationales. En pareil cas, particulièrement lorsqu'est concernée la politique pénale, le juge européen peut faire le choix, en raison de sa qualité de juge international, d'une attitude de self restraint, faisant prévaloir le caractère subsidiaire du mécanisme de protection.
Se trouvait en jeu, ici, le fait que le mari ou la femme de l'accusé témoigne, devant la cour d'assises, sans avoir à prêter serment (article 355, 5 °, du Code de procédure pénale (CPP)) alors que les concubins ou les partenaires liés par un pacte civil de solidarité sont, eux, soumis à cette obligation (article 331 du CPP) (14).
Examinant, dès lors, la conformité du 5 ° de l'article 335 du CPP - dans sa rédaction résultant de la loi n° 2011-939 du 10 août 2011 - au principe d'égalité devant la loi consacré par l'article 6 de la Déclaration, le Conseil constate que l'existence de la dispense de prêter serment vise à « préserver le conjoint appelé à témoigner du dilemme moral auquel il serait exposé s'il devait choisir entre mentir ou se taire, sous peine de poursuites, et dire la vérité, pour ou contre la cause de l'accusé » (§ 10). Aussi ne peut-il que relever ensuite que les personnes qui ont une vie commune de couple sont dans une situation analogue au regard de l'objectif poursuivi par le législateur : « les concubins ou les partenaires liés par un pacte civil de solidarité ne sont pas moins exposés que les conjoints au dilemme moral dont le législateur a entendu préserver ces derniers lorsqu'ils sont appelés à témoigner au procès de leur conjoint accusé » (§ 11).
Le Conseil apprécie ensuite la pertinence de la justification que la Cour de cassation attache au traitement différencié en cause. Selon cette dernière, au regard de la règle selon laquelle une déposition effectuée sans prêter serment alors que le témoin était tenu de le faire est susceptible de vicier la procédure, la limitation de la liste des personnes dispensées du serment permet plus facilement à la cour d'assises de s'assurer de l'existence ou non du lien d'un témoin avec un accusé, notamment dans le cas d'un mariage compte tenu de la publicité dont il fait l'objet. Mais l'argument n'emporte pas la conviction du juge constitutionnel, un pacte civil de solidarité faisant l'objet d'un enregistrement en mairie. Et s'agissant des personnes vivant en concubinage, dans la mesure où est en jeu la vie commune de deux personnes, « présentant un caractère de stabilité et de continuité », la cour d'assises est aussi à même, au regard notamment des éléments recueillis lors de l'instruction, de s'assurer de l'existence de pareille vie commune. Partant, « l'intérêt qui s'attache à faciliter la connaissance par la juridiction des liens unissant l'accusé et le témoin ne saurait, à lui seul, justifier la différence de traitement établie par les dispositions contestées entre le mariage, le concubinage et le pacte civil de solidarité » (§ 13). Prenant en compte les évolutions sociétales et la réalité de la vie familiale, le juge constitutionnel adopte ainsi une position particulièrement protectrice des droits des intéressés.
Confronté, dans l'affaire Van der Heijden c/ Pays-Bas, à un dispositif assez proche permettant de contraindre des personnes de témoigner, le juge de Strasbourg a une position bien différente, position déjà discutée à l'époque, ce dont témoignent les opinions dissidentes de sept juges sur dix-sept accompagnant l'arrêt rendu, certes, en 2012(15).
En l'espèce, la requérante alléguait une violation de l'article 8 de la CEDH, garantissant le droit au respect de la vie privée et familiale et une violation de l'article 14 - la clause de non-discrimination - combiné avec l'article 8 du fait de sa condamnation à une peine de détention de treize jours pour avoir refusé de témoigner, dans le cadre d'une procédure pénale, contre son compagnon, avec lequel elle entretenait une relation depuis dix-huit ans et avait eu deux enfants que ce dernier avait reconnus. La législation de l'État partie dispensait, en effet, de témoigner, lors d'un procès pénal, le conjoint ou le partenaire civil de l'accusé, mais non son concubin, qui, en cas de refus de témoigner, s'exposait à une détention pour refus d'obtempérer à un ordre de la justice.
Contrairement à la solution de droit commun consistant à examiner prioritairement l'allégation de discrimination, la Cour européenne fait le choix d'examiner celle de violation de l'article 8 de la Convention et considère qu'il n'y a pas lieu d'examiner le grief tiré de l'article 14 combiné avec l'article 8. Et le cadre de son examen est clairement défini, la Cour « rappel(ant) d'emblée que le mécanisme de contrôle institué par la Convention a un rôle fondamentalement subsidiaire » (§ 55). En outre, si elle reconnaît bien l'existence d'une « vie familiale », elle fait du droit au respect de cette dernière un simple intérêt général en concurrence avec l'objectif de prévention des infractions pénales visé par le dispositif litigieux.
Le juge européen admet que le droit de ne pas témoigner, s'il est reconnu par un État, puisse être soumis à des conditions, notamment être restreint aux personnes dont les liens avec un suspect peuvent faire l'objet d'une vérification objective. Et alors même que le législateur néerlandais avait voulu éviter aux personnes concernées « le dilemme moral auquel elles seraient confrontées si elles devaient choisir entre témoigner au risque de mettre en péril leur relation avec le suspect ou se parjurer afin de préserver cette relation » (§ 25), il refuse d'assimiler le concubinage aux formes d'unions faisant l'objet d'une reconnaissance officielle, distinguant les domaines de la sécurité sociale ou de la fiscalité, pour lesquels les États n'établissent souvent pas de distinction entre unions officielles et unions de fait, de « l'intérêt général important qui s'attache à la poursuite d'infractions graves » (§ 74). Et la Cour de minorer enfin l'importance de l'atteinte subie par la requérante alors même qu'était en jeu une privation de liberté, celle-ci ayant choisi d'accepter « la conséquence juridique découlant de (son) choix, c'est-à-dire son exclusion de la sphère des liens familiaux 'protégés' auxquels s'applique la dispense de l'obligation de témoigner » (§ 76).
Particulièrement discutable, la position de la Cour traduit donc une très grande compréhension à l'égard des Pays-Bas.
C. Droits substantiels
Outre la décision n° 2020-841 QPC du 20 mai 2020, La Quadrature du Net et autres, sur le droit de communication de données à la commission de protection des droits de la Hadopi, qui apporte la confirmation d'un haut niveau de protection des droits au respect de la vie privée et du secret des correspondances, semblable à celui garanti par la Cour européenne, mais aussi la Cour de justice de l'Union européenne avec lesquelles le Conseil constitutionnel partage le souci de l'existence de garanties, a fortiori lorsque des données sensibles sont concernées(16), les décisions commentées traduisent un niveau de protection équivalent en lien avec des modalités de contrôle analogues, contrôle approfondi, par exemple, pour la liberté individuelle ou contrôle restreint des choix du législateur sur des questions complexes.
1. Droit à une vie familiale normale
La décision n° 2019-826 QPC du 7 février 2020, M. Justin A., portait sur la question de l'établissement par un père de naissance de son lien de filiation à l'égard d'un enfant né d'un « accouchement sous X »(17).
Le requérant arguait d'une méconnaissance du droit de mener une vie familiale normale du fait de l'impossibilité de reconnaître un enfant né d'un accouchement secret à compter de son placement en vue de l'adoption. Selon lui, ce dernier pouvant intervenir à l'expiration d'un délai de deux mois après son recueil par le service de l'aide sociale à l'enfance, le père de naissance, ignorant les date et lieu de naissance de l'enfant, serait dans l'impossibilité de le reconnaître avant son placement en vue de l'adoption et partant, d'en solliciter la restitution. Il arguait aussi d'une méconnaissance de l'intérêt supérieur de l'enfant en ce que la filiation adoptive serait privilégiée au détriment de celle biologique.
Le Conseil devait donc, ici, apprécier la conformité aux dixième et onzième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 de l'article 351 du Code civil, deuxième alinéa, dans sa rédaction résultant de la loi n° 96-604 du 5 juillet 1996 - « Lorsque la filiation de l'enfant n'est pas établie, il ne peut y avoir de placement en vue de l'adoption pendant un délai de deux mois à compter du recueil de l'enfant » - et de l'article 352, deuxième phrase du premier alinéa, du même Code, dans sa rédaction issue de la loi n° 66-500 du 11 juillet 1966, selon laquelle le placement en vue de l'adoption « nbsp ; fait échec à toute déclaration de filiation et à toute reconnaissance ».
Il identifie en premier lieu les objectifs poursuivis par le législateur. Concernant l'article 351 du Code civil, ce dernier « a entendu concilier l'intérêt des parents de naissance à disposer d'un délai raisonnable pour reconnaître l'enfant et en obtenir la restitution et celui de l'enfant dépourvu de filiation à ce que son adoption intervienne dans un délai qui ne soit pas de nature à compromettre son développement ». L'interdiction de la reconnaissance d'un enfant après le placement en vue de l'adoption vise, par ailleurs, à « garantir à l'enfant, déjà remis aux futurs adoptants, un environnement familial stable » (§ 9). Le juge constitutionnel examine ensuite le caractère proportionné de la conciliation opérée par la loi. À cet égard, est relevé le fait que le père de naissance peut reconnaître l'enfant avant sa naissance et jusqu'à son éventuel placement en vue de l'adoption. En outre, concernant un enfant né d'un accouchement secret, si la transcription de la reconnaissance paternelle s'avère impossible, le père peut en informer le procureur de la République, qui doit procéder à la recherche des date et lieu d'établissement de l'acte de naissance de l'enfant (article 62-1 du Code civil). Enfin, le Conseil ajoute que la reconnaissance d'un enfant avant son placement en vue de l'adoption fait échec à son adoption même lorsque l'enfant n'est précisément identifié qu'après son placement (§ 10). Au vu de ces éléments, la conciliation opérée, dans l'intérêt supérieur de l'enfant, entre le droit des parents de naissance de mener une vie familiale normale et l'objectif de favoriser l'adoption de cet enfant, n'est pas manifestement déséquilibrée(18).
En présence, ici, d'un conflit délicat entre des droits fondamentaux et des intérêts, le juge constitutionnel affirme classiquement qu'il ne lui appartient pas « de substituer son appréciation à celle du législateur sur la conciliation entre un droit fondamental et un objectif » (§ 11). Ce considérant de principe fait évidemment écho à la façon dont la Cour européenne apprécie si un juste équilibre a bien été garanti par un État partie dans le cas d'un conflit de droits et/ou d'intérêts et, plus particulièrement, la manière dont elle procède à la détermination de l'étendue de la marge nationale d'appréciation. Si elle ne s'est pas prononcée sur le dispositif en jeu, son approche, sous-tendue par la volonté de tenir compte de la pluralité des solutions nationales, présente de réelles affinités avec celle du Conseil. Ainsi, en est-il dans l'affaire Odièvre c/ France, dans laquelle la requérante, née d'un « accouchement sous X » alléguait une violation de l'article 8 de la Convention en raison de l'impossibilité d'avoir accès à ses origines, en pointant notamment la « position isolée de la France, l'accouchement anonyme n'existant que dans deux autres États tandis que dix autres imposaient l'indication du nom des parents »(19).
Ici, la Cour européenne va procéder à une neutralisation du consensus européen au nom de l'intérêt général. Non sans paradoxe, elle reconnaît bien la singularité de la France, au moins pour ce qui est de l'impossibilité à jamais d'établir un lien de filiation à l'égard de la mère biologique, pour cependant relever ensuite « la diversité des systèmes et traditions juridiques » (§ 47). La relativisation du consensus paraît tenir à l'importance que revêt le « droit au respect de la vie, valeur supérieure garantie par la Convention » (§ 45). Le « caractère complexe et délicat » d'une question qui intéresse des « rapports interindividuels » et la possibilité, récemment établie, de lever le secret de l'identité de la mère biologique sont pris en compte pour déterminer l'étendue de la marge nationale d'appréciation. Mais l'élément décisif paraît résider dans le souci du législateur français « d'éviter des avortements clandestins, ou des abandons 'sauvages' » (§§ 45-47 et § 49).
Adoptant une stratégie d'évitement, le juge européen se place opportunément, non pas sur le terrain des ingérences, mais sur le terrain des obligations positives, choix qui traduit sa volonté de ne pas trancher le conflit au fond, en présence d'une question complexe mêlant intérêts privés impossibles à concilier et intérêt général. Dès lors, il peut affirmer que « les États doivent pouvoir choisir les moyens qu'ils estiment les plus adaptés au but de la conciliation ainsi recherchée » (§ 49).
En présence de conflits de droits, la Cour européenne concède, dans la très grande majorité des cas, une marge d'appréciation assez large aux États parties quoique souffrant d'une relative indétermination. Et lorsque sont en cause des conflits de droits « internes » à l'article 8 de la CEDH, l'importance du droit en cause combinée à l'absence de consensus et l'existence d'un intérêt général peuvent conduire à la reconnaissance expresse d'une large marge nationale d'appréciation. Tel a été le cas dans l'affaire Kearns c/ France relative à la longueur du délai de rétractation concernant le consentement à l'adoption d'enfants nés lors d'un « accouchement sous X ». La Cour pointe, ici, l'absence de consensus - « la diversité législative considérable parmi les États membres qui l'ont établi » - et la présence non seulement d'intérêts difficilement conciliables - ceux de la mère biologique, ceux de l'enfant et ceux de la famille d'adoption -- mais aussi de l'intérêt général. Dès lors, l'État français n'avait pas excédé sa marge d'appréciation, le juge européen relevant également que l'intéressée avait été correctement informée sur la procédure d'« accouchement sous X »(20).
Dans cette perspective, la solution du Conseil constitutionnel présente des affinités avec l'approche qu'adopte la Cour européenne lorsqu'elle est confrontée à pareil conflit.
2. Liberté individuelle
Dans le droit fil des décisions n° 2010-71 QPC du 26 novembre 2010, Mlle Danielle S. et n° 2011-135/140 QPC du 9 juin 2011, M. Abdellatif B et autre, qui constituaient une réception implicite de la jurisprudence européenne relative au droit à la liberté et à la sûreté(21), la décision n° 2020-844 QPC du 19 juin 2020, M. Éric G., apporte la confirmation de la vigilance du juge constitutionnel quant aux garanties dont doivent bénéficier les personnes faisant l'objet d'un internement lorsqu'il juge le premier alinéa de l'article L. 3222-5-1 du Code de la santé publique (CSP) - dans sa rédaction issue de la loi n° 2016-41 du 26 janvier 2016 - contraire à l'article 66 de la Constitution.
Se trouvait en cause, ici, l'absence de contrôle juridictionnel systématique des mesures d'isolement et de contention, autorisées en « dernier recours » par la disposition litigieuse.
Alors que la Cour européenne pratique un contrôle rigoureux des atteintes alléguées au droit à la liberté et la sûreté, soulignant que l'article 5 est, avec les articles 2, 3 et 4 de la Convention au premier rang des droits fondamentaux qui protègent la sécurité physique d'un individu et a, à ce titre, une importance primordiale dans une société démocratique(22), le Conseil exerce également un contrôle exigeant puisque les atteintes portées à l'exercice de la liberté individuelle « doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées aux objectifs poursuivis » (§ 3)(23). L'intensité de ce contrôle fait bien écho au « contrôle scrupuleux » du juge de Strasbourg(24).
Dans les établissements de soins psychiatriques, le recours à l'isolement ou à la contention est susceptible d'être décidé sans requérir le consentement de la personne concernée, dès lors, ces mesures constituent bien « une privation de liberté » (§ 4). Mais, pour le Conseil, « le législateur a fixé des conditions de fond et des garanties de procédure propres à assurer que le placement à l'isolement ou sous contention, dans le cadre de soins psychiatriques sans consentement, n'intervienne que dans les cas où ces mesures sont adaptées, nécessaires et proportionnées à l'état de la personne qui en fait l'objet » (§ 6). Décidé par un psychiatre pour une durée limitée, le placement d'une personne à l'isolement ou sous contention ne peut être mis en œuvre que lorsqu'il est « l'unique moyen de prévenir un dommage immédiat ou imminent pour elle-même ou autrui ». Son application fait « l'objet d'une surveillance stricte confiée par l'établissement d'accueil à des professionnels de santé désignés à cette fin ». En outre, la traçabilité des mesures prises doit être assurée via la tenue d'un registre consultable par certaines autorités, notamment le Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Enfin, chaque établissement de santé établit un rapport annuel sur le recours aux mesures d'isolement et de contention et l'évaluation de leur mise en œuvre (§ 5)(25).
Par ailleurs, si l'article 66 de la Constitution exige que toute privation de liberté soit placée sous le contrôle de l'autorité judiciaire, il n'implique pas que cette dernière soit saisie préalablement à toute mesure de privation de liberté et, ici, au placement à l'isolement ou sous contention. Mais, le respect de la liberté individuelle impose qu'un juge intervienne « dans le plus court délai possible ». Or, si le législateur a prévu que la mesure de placement ne pouvait être décidée que pour une durée limitée, « il n'a pas fixé cette limite ni prévu les conditions dans lesquelles au-delà d'une certaine durée, le maintien de ces mesures est soumis au contrôle du juge judiciaire » (§§ 7-8). Et la Cour de cassation a estimé que les mesures d'isolement et de placement sous contention, constitutives de modalités de soins, ne relevaient pas de l'office du JLD qui ne peut donc ni prononcer la mainlevée de la mesure d'hospitalisation sans consentement à raison de l'irrégularité de l'isolement ou de la contention, ni se prononcer sur la régularité de ces mesures(26). L'absence de contrôle systématique du juge judiciaire des mesures d'isolement et de contention méconnaît donc l'article 66 de la Constitution.
La position du Conseil constitutionnel est, ici, pleinement convergente avec celle de la Cour européenne. Tenant à la volonté de garantir le respect de la dignité humaine et du principe de la prééminence du droit, la protection européenne du droit à la liberté et à la sûreté ne laisse, en effet, guère de place au principe de subsidiarité. Elle se traduit par une interprétation étroite des exceptions autorisées par l'article 5 de la Convention(27) et s'accompagne, à la fois, d'un contrôle du respect des règles nationales pertinentes et d'un « contrôle de conformité » à la Convention, garantissant la protection de l'individu contre l'arbitraire(28).
L'hospitalisation involontaire d'une personne dans un établissement psychiatrique relève des cas autorisés de privation de liberté, l'article 5 § 1 e) de la CEDH prévoyant la détention d'une personne au motif qu'elle est aliénée. Pour être conforme à la Convention, elle doit respecter les « voies légales » et être « régulière ». Plus précisément, la Cour européenne conditionne la régularité d'un internement à une triple condition. Il faut que soit établi, par une expertise médicale objective, un trouble mental réel, que ce dernier revête un caractère et une ampleur légitimant l'internement et que ce dernier ne puisse pas se prolonger sans la persistance d'un pareil trouble(29). Et la régularité de cette privation de liberté suppose que l'État se soit conformé à son obligation positive de protéger la liberté des personnes vulnérables, même si l'atteinte en cause est le fait d'une personne privée, et notamment d'empêcher une privation de liberté dont les autorités auraient eu ou dû avoir connaissance (30).
L'article 5 énonce, dans ses paragraphes 2 à 4, les garanties dont doivent bénéficier les individus privés de liberté, garanties contre l'arbitraire dont le non-respect a valu plusieurs condamnations à la France s'agissant d'hospitalisations sans consentement dans des établissements psychiatriques. Mettant notamment l'accent sur l'« importance de la rapidité ou de la célérité des contrôles juridictionnels requis en vertu de l'article 5, §§ 3 et 4 »(31), le juge européen vérifie que les personnes en cause ont bien été informées, ont été « aussitôt » traduites devant un juge ou un magistrat habilité par la loi à exercer des fonctions judiciaires, conformément à l'article 5, § 3, et ont disposé d'une voie de recours devant un tribunal, afin qu'il statue « à bref délai » sur la légalité de la détention et ordonne leur libération si cette dernière est illégale(32). Lorsque la décision initiale de privation de liberté est le fait d'une autorité administrative, le droit à un recours, prévu à l'article 5, § 4, est bien applicable(33). Cette disposition requiert ensuite un contrôle judiciaire périodique de la légalité du maintien de la mesure privative de liberté « à des intervalles raisonnables »(34). La jurisprudence du Conseil constitutionnel a permis le respect de ces garanties(35).
Confrontée, par ailleurs, dans l'affaire précitée M. S. c/ Croatie (n° 2), à une allégation de violation des articles 3 et 5, § 1 e) de la CEDH du fait de l'absence de garanties entourant le traitement auquel avait été soumise la requérante qui, souffrant de troubles psychotiques, avait été hospitalisée sans son consentement et avait été attachée à un lit dans une chambre isolée pendant quinze heures, la Cour adopte une position convergente avec celle du juge constitutionnel.
Soulignant le caractère traumatisant des mesures coercitives, elle estime qu'il ne peut en être fait usage qu'en dernier recours et lorsque ces mesures constituent le seul moyen disponible pour empêcher la survenance d'un dommage imminent à l'égard du patient ou d'autrui (§ 102 et § 104). En outre, l'utilisation de pareilles mesures doit s'accompagner de garanties adaptées contre les abus, fournissant une protection procédurale suffisante. Les autorités compétentes doivent ainsi être à même de démontrer que les exigences de nécessité et de proportionnalité ont bien été respectées et que des solutions alternatives raisonnables ne permettaient pas de faire face de manière satisfaisante au risque imminent de dommage pour le patient ou des tiers. Il doit aussi être démontré que la mesure coercitive en jeu n'a pas été prolongée pendant une période excédant ce qui était strictement nécessaire pour atteindre l'objectif poursuivi. À cet égard, la Cour prend notamment appui sur les normes internationales pertinentes, notamment la Recommandation du Comité des ministres du Conseil de l'Europe aux États membres relative à la protection des droits de l'homme et de la dignité des personnes atteintes de troubles mentaux(36).
Outre une violation de l'article 3 en raison de l'infliction d'un traitement inhumain et dégradant, la Cour constate une violation de l'article 5, § 1 e) en l'absence de garanties procédurales effectives, particulièrement importantes compte tenu de la vulnérabilité des personnes souffrant de troubles mentaux.
Conformément au droit croate, un représentant de la requérante avait été désigné par une juridiction, mais ce dernier ne lui avait pas rendu visite. Dès lors, elle n'avait pas pu bénéficier de ses conseils juridiques sur la procédure et sur la position à adopter pour se défendre de manière efficace. Or, pour la Cour, il est essentiel qu'une personne dans une telle situation ait accès à un tribunal et soit entendue ou représentée. En outre, il n'était pas prouvé que le juge chargé de la procédure avait pris les mesures nécessaires afin de garantir le droit à un recours effectif de la requérante, notamment quant à sa participation à l'audience.
3. Droit à la liberté d'expression et de communication
Se trouvait en cause, dans la décision n° 2020-845 QPC du 19 juin 2020, M. Théo S., le délit de recel d'apologie d'actes de terrorisme, qui punit le fait de détenir des fichiers ou des documents caractérisant une telle apologie, en toute connaissance de cause et en adhésion avec l'idéologie ainsi exprimée et vise à la fois à prévenir la diffusion publique d'idées et de propos dangereux en lien avec le terrorisme et l'endoctrinement d'individus susceptibles de réitérer de tels propos ou de commettre des actes de terrorisme. Plus précisément, était contestée l'interprétation de la Cour de cassation qui avait « jugé qu'entre dans les prévisions des articles 321-1 et 421-2-5 du Code pénal le fait de détenir, en toute connaissance de cause, des fichiers ou des documents caractérisant l'apologie d'actes de terrorisme, lorsque cette détention s'accompagne d'une adhésion à l'idéologie exprimée dans ces fichiers ou documents » et reconnaissait, dès lors, « l'existence d'un délit de recel d'apologie d'actes de terrorisme » (§ 6)(37).
Examinant tout d'abord la nécessité de l'atteinte portée au droit à la liberté d'expression, le Conseil relève, comme dans ses décisions M. David P. de 2017(38), qu'il existe « un ensemble d'infractions pénales autres que l'incrimination contestée et de dispositions procédurales pénales spécifiques ayant pour objet de prévenir la commission d'actes de terrorisme », dispositions qu'il passe en revue (§ 15). Dès lors, il estime que « les autorités administrative et judiciaire disposent, indépendamment du délit contesté, de nombreuses prérogatives, non seulement pour lutter contre la diffusion publique d'apologies d'actes de terrorisme et réprimer leurs auteurs, mais aussi pour surveiller une personne consultant ou collectant ces messages et pour l'interpeller et la sanctionner lorsque cette consultation ou cette collection s'accompagnent d'un comportement révélant une intention terroriste, avant même que ce projet soit entré dans sa phase d'exécution » (§ 22).
Concernant ensuite les exigences d'adaptation et de proportionnalité, le Conseil constitutionnel procède à deux constats. D'une part, la détention de fichiers ou de documents apologétiques n'est susceptible de participer à l'apologie publique d'actes de terrorisme « qu'à la condition de donner lieu ensuite à une nouvelle diffusion publique ». D'autre part, l'incrimination de recel d'apologie d'actes de terrorisme n'exige pas, au regard de l'interprétation de la Cour de cassation, que l'auteur du recel ait la volonté de commettre des actes terroristes ou d'en faire l'apologie. Or, ni l'adhésion du receleur à l'idéologie exprimée dans les fichiers ou documents apologétiques, ni la détention des fichiers ou documents « ne sont susceptibles d'établir, à elles seules, l'existence d'une volonté de commettre des actes terroristes ou d'en faire l'apologie » (§§ 23-24). Ainsi, le délit de recel d'apologie d'actes de terrorisme, en réprimant d'une peine d'emprisonnement « le seul fait de détenir des fichiers ou des documents faisant l'apologie d'actes de terrorisme sans que soit retenue l'intention terroriste ou apologétique du receleur comme élément constitutif de l'infraction », porte une atteinte disproportionnée au droit à la liberté d'expression et de communication (§ 26).
Alors que la Cour de cassation avait curieusement jugé ce dispositif liberticide compatible avec l'article 10 de la Convention(39), la solution du juge constitutionnel consacre un niveau de protection du droit à la liberté d'expression analogue à celui garanti par la Cour de Strasbourg. Certes, cette dernière n'a pas été, jusqu'alors, confrontée à une incrimination analogue, mais on conçoit difficilement comment elle pourrait admettre la compatibilité avec l'article 10 de la CEDH de la pénalisation de la seule détention d'un discours. Cette disposition garantit, en effet, la liberté de communiquer des informations et des idées, mais aussi celle du public d'en recevoir. Et le juge européen, comme le Conseil constitutionnel(40), se montre plus particulièrement vigilant quant à l'accès à l'Internet, devenu l'un des principaux moyens pour les individus d'exercer leur droit à la liberté d'expression et d'information(41). Évidemment, ce dernier connaît des limites lorsque le discours en jeu constitue un appel à la violence et/ou à la haine, notamment un discours de soutien à des groupes terroristes(42), mais la sanction des abus de la liberté d'expression suppose évidemment la diffusion d'un discours.
4. Droit de propriété
La décision n° 2020-837 QPC du 7 mai 2020, Société A.D-Trezel, permet également de mettre l'accent sur les affinités entre les modalités de contrôle des atteintes au droit de propriété au regard de l'article 2 de la DDHC et celles des règlementations de l'usage des biens au sens de l'article 1, alinéa 2 du Protocole 1. Les deux juridictions limitent, en effet, leur contrôle à la proportionnalité stricto sensu de l'atteinte en jeu. Pour le Conseil constitutionnel, pareille atteinte doit effectivement être liée à une exigence constitutionnelle ou justifiée par l'intérêt général et ne doit pas être disproportionnée par rapport à l'objectif poursuivi (§ 3).
Était en cause, ici, la conformité du dernier alinéa de l'article L. 145-34 du Code de commerce, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2014-626 du 18 juin 2014, la requérante arguant que ce dernier portait une atteinte indue au droit de propriété du bailleur en limitant l'augmentation du loyer lors du renouvellement du bail commercial et en ayant, dès lors, « pour effet d'imposer un niveau de loyer fortement et durablement inférieur à la valeur locative du bien, entraînant ainsi une perte financière importante pour le bailleur ». Et d'ajouter que si ces dispositions pouvaient être écartées par les parties dans la mesure où elles n'étaient pas d'ordre public, leur application aux baux en cours, conclus avant leur entrée en vigueur, mais renouvelés postérieurement, conduisait dans ce cas à priver, en pratique, les bailleurs de la possibilité d'y déroger (§ 2).
Pour le Conseil, il est bien porté atteinte au droit de propriété du bailleur, les dispositions litigieuses l'empêchant « de percevoir, dès le renouvellement de son bail et le cas échéant jusqu'à son terme, un loyer correspondant à la valeur locative de son bien lorsque ce loyer est supérieur de 10 % au loyer acquitté lors de la dernière année du bail expiré » (§ 6).
L'article L. 145-34, alinéa 1, du Code de commerce instaure, certes, un plafonnement du loyer du bail commercial renouvelé, en prévoyant que son taux de variation ne puisse excéder la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré. Cependant, la règle du plafonnement ne s'applique pas dans deux cas : pour les baux initialement conclus pour une durée de plus de neuf années et pour ceux dont la durée n'est pas supérieure à neuf ans lorsqu'est intervenue, entre la prise d'effet du bail initial et celle du bail à renouveler, une modification notable des caractéristiques du local considéré, de la destination des lieux, des obligations respectives des parties ou des facteurs locaux de commercialité. Dans ces hypothèses, la variation du loyer ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l'année précédente.
Visant à éviter une hausse importante du loyer de renouvellement d'un bail commercial afin de garantir la viabilité des entreprises commerciales et artisanales, le dispositif incriminé porte une atteinte au droit de propriété proportionnée à cet objectif d'intérêt général. D'une part, le bailleur peut bénéficier, chaque année, d'une augmentation de 10 % du loyer de l'année précédente jusqu'à ce qu'il atteigne, le cas échéant, la nouvelle valeur locative. D'autre part, les parties ont la possibilité, lors de la conclusion du bail initial ou lors de son renouvellement, de ne pas appliquer les dispositions en jeu. Par ailleurs, concernant les baux conclus avant la date d'entrée en vigueur des dispositions en jeu et renouvelés après cette date, la mise en œuvre de ce dispositif ne résulte pas de la loi examinée, mais de leurs conditions d'entrée en vigueur déterminées à l'article 21 de la loi du 18 juin 2014.
On le voit, le contrôle opéré est d'une intensité limitée et fait pleinement écho à celui exercé par le juge européen lorsque sont en cause des politiques étatiques concernant la réglementation des loyers.
Le domaine concerné - les politiques économiques et sociales - en lien avec la nature de l'atteinte portée au droit au respect des biens conduit à la reconnaissance d'une large marge d'appréciation aux États parties.
S'agissant de l'adoption de lois réglementant l'usage des biens, « particulièrement indiquées et fréquentes dans le domaine du logement, qui occupe une place centrale dans les politiques sociales et économiques de nos sociétés modernes », les législateurs des États parties doivent ainsi « jouir d'une grande latitude pour se prononcer tant sur l'existence d'un problème d'intérêt public appelant une réglementation que sur le choix des modalités d'application de cette dernière »(43). Dans cette perspective, le juge européen respecte la manière dont un État partie « conçoit les impératifs de l'intérêt général, sauf si son jugement se révèle manifestement dépourvu de base raisonnable »(44). Il faut dire que l'article 1, alinéa 2, du Protocole 1 lui-même laisse aux États la latitude de définir ce « qu'ils jugent nécessaire » pour une réglementation de l'usage des biens.
Dès lors, pratiquant un contrôle réduit sur la légalité et la finalité de la restriction, la Cour vérifie l'existence d'un « juste équilibre » entre les droits et/ou intérêts concurrents, examinant si l'atteinte n'est pas manifestement dépourvue de base raisonnable(45).
Concernant le but poursuivi, le contrôle est plutôt formel, les autorités nationales se trouvant « nbsp ; mieux placées que le juge international pour déterminer ce qui est d'« utilité publique » ou conforme à l'« intérêt général » - notion « ample par nature » - du fait de leur « connaissance directe de leur société et de ses besoins ». Concernant plus particulièrement le domaine du logement, l'accent est mis sur le caractère complexe des questions sociales, économiques et politiques en jeu(46).
Dès lors, il est très rare que la Cour constate, comme dans l'affaire précitée Hutten-Czapska en présence d'une législation consacrant une restriction considérable des droits des propriétaires (limitation à la cessation des baux, plafonnement du montant des loyers en deçà du coût d'entretien des biens), qu'un « juste équilibre » entre les exigences de l'intérêt général de la communauté et les impératifs de la sauvegarde des droits fondamentaux de l'individu n'a pas été garanti(47), que les limitations des droits des propriétaires portent sur l'interdiction automatique de résilier un bail de longue durée ou l'impossibilité pour le propriétaire bailleur d'exercer un droit de reprise(48).
Ainsi, quand bien même les références à la jurisprudence européenne relatives au droit de propriété sont extrêmement rares dans les commentaires des décisions du Conseil, la convergence des contrôles est évidente.
5. Libertés économiques et protection de l'environnement
Deux décisions QPC touchant à la protection de l'environnement conduisent enfin à rappeler que si la CEDH ne renferme pas de disposition relative à la préservation de l'environnement, cette dernière peut être indirectement protégée par le juge européen à l'occasion de l'examen d'une allégation d'atteinte à un droit formellement garanti par la Convention, que ce soit, par exemple, le droit au respect de la vie privée et familiale et/ou du droit au respect du domicile au sens de l'article 8 de la Convention ou le droit au respect des biens. La jurisprudence est marquée à la fois par une forte valorisation de l'objectif de protection de l'environnement - « la protection de l'environnement, dont la société se soucie sans cesse davantage (...) est devenue une valeur dont la défense suscite dans l'opinion publique, et par conséquent auprès des pouvoirs publics, un intérêt constant et soutenu »(49)- et la consécration d'obligations positives, à la fois substantielles et procédurales, à la charge des États en ce domaine.
Dans cette perspective, la décision n° 2019-823 QPC du 31 janvier 2020, Union des industries de la protection des plantes, en ce qu'elle affirme la valeur constitutionnelle de l'objectif de protection de l'environnement susceptible de justifier une restriction à l'exercice de la liberté d'entreprendre (« la protection de l'environnement, patrimoine commun des êtres humains, constitue un objectif de valeur constitutionnelle »)(50), fait écho à l'importance attachée à la protection de l'environnement par le juge de Strasbourg(51). Ce dernier valorise fortement cet objectif lorsqu'il statue sur des atteintes au droit au respect des biens(52), particulièrement lorsque sont en cause des réglementations de l'usage des biens au sens de l'article 1, alinéa 2, du Protocole 1, considérant que des « impératifs économiques et même certains droits fondamentaux, comme le droit de propriété, ne devraient pas se voir accorder la primauté face à des considérations relatives à la protection de l'environnement, en particulier lorsque l'État a légiféré en la matière »(53).
La protection de l'environnement, « où l'intérêt général de la communauté occupe une place prééminente »(54) est donc généralement de nature à justifier des restrictions apportées à des activités économiques, mais aussi à l'exercice du droit de propriété de simples particuliers, la Cour respectant « l'appréciation portée à cet égard par le législateur national, sauf si elle est manifestement dépourvue de base raisonnable »(55). La faible intensité de son contrôle, avec la reconnaissance d'une large marge d'appréciation au profit des États parties, peut être rapprochée du contrôle restreint du Conseil lorsqu'est en jeu la liberté d'entreprendre.
La décision n° 2020-843 QPC du 28 mai 2020, Force 5, qui avait trait à la participation du public à l'élaboration de la décision autorisant l'exploitation d'une installation de production d'électricité susceptible d'avoir des incidences sur l'environnement(56), fournit, par ailleurs, l'occasion de rappeler qu'en l'absence de fondement textuel, le juge européen a interprété certains droits garantis par la Convention comme incluant des garanties quant à la qualité du processus décisionnel.
Le propos se limitera, ici, à souligner que le droit au respect de la vie privée et familiale et/ou du domicile garantit indirectement le droit à un environnement sain. Impliquant pour les États l'adoption de mesures positives pour protéger les individus contre des atteintes graves à leur environnement, il inclut aussi des obligations procédurales, la Cour attachant « une importance particulière à l'accès du public à des informations permettant d'évaluer le danger auquel il est exposé »(57). Elle garantit ainsi très tôt le droit d'être informé des risques graves de pollution causés par des activités dangereuses(58) et prend par la suite appui sur la Convention d'Aarhus du 25 juin 1998, sur l'accès à l'information, la participation du public au processus décisionnel et l'accès à la justice en matière d'environnement, dont l'article 5 § 1 c) consacre l'accès à l'information du public en cas de menace imminente à la santé ou à l'environnement, comme dans l'affaire Tatar c/ Roumanie, dans laquelle est rappelée « l'importance de l'accès du public aux conclusions des études environnementales préliminaires ainsi qu'à des informations permettant d'évaluer le danger auquel il est exposé »(59).
(1): Concernant la décision n° 2020-836 QPC du 3 avril 2020, M. Maxime O., relative au recours à la visioconférence, sans l'accord de l'intéressé, pour les audiences de la chambre de l'instruction relatives au contentieux de la détention provisoire, nous nous permettons de renvoyer à nos observations sur la décision n° 2019-802 QPC du 20 septembre 2019, M. Abdelnour B. : cette chron., https://www.conseil-constitutionnel.fr/publications/titre-vii/chronique-conseil-constitutionnel-et-jurisprudence-de-la-cedh-juillet-2019-a-fin-decembre-2019
(2): Pour autant, le commentaire du Service juridique se réfère à ce principe, Cons. const., Site Internet, p. 16 ou p. 18.
(3): Pour le Conseil d'État, les amendes pour gestion de fait infligées par la juridiction des comptes relèvent de la « matière pénale » au sens de l'article 6 § 1 de la CEDH (CE, 16 novembre 1998, n° 172820, SARL Deltana et M. Perrin).
(4): Cons. const., site Internet, commentaire, p. 17.
(5): Ibid..
(6): CEDH, Grande chambre, 10 février 2009, n° 14939/03, § 82.
(7): CEDH, Grande chambre, 15 novembre 2016, A. et B. c/ Norvège, n° 24130/11 et a., § 108.
(8): Cons. const., décision n° 2016-545 QPC du 24 juin 2016, M . Alec W. et autre, cette chron., Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, octobre 2016, n° 53, p. 180.
(9): Voy., par exemple, Cons. const., décision n° 2015-513/514/526 QPC du 14 janvier 2016, M. Alain D. et autres, infraction de délit d'initié et sanction de manquement d'initié de l'AMF.
(10): Les critères pris en compte sont la qualification juridique de l'infraction en droit interne, la nature de l'infraction et le degré de sévérité de la sanction (CEDH, 8 juin 1976, Engel et a. c/ Pays-Bas, n° 5100/71 et a., § 82). La notion de « procédure pénale » figurant dans l'article 4 du Protocole 7 est interprétée à la lumière des principes applicables aux expressions d' « accusation en matière pénale » (article 6) et de « peine » (article 7).
(11): À titre d'exemple, la sanction du délit d'initié (une peine d'emprisonnement de deux ans et une amende de 1 500 000 euros) n'est pas d'une nature différente des pénalités financières infligées par l'Autorité des marchés financiers, qui peuvent atteindre des montants colossaux - plusieurs millions d'euros - et sont prononcées en fonction de la gravité des manquements en jeu et au regard des avantages ou des profits éventuellement retirés de ces derniers (décision n° 2014-453/454 QPC et n° 2015-462 QPC du 18 mars 2015, M. John L. et autres, cons. 26, cette chron., Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, juin 2015, n° 48, p. 234).
(12): Cons. const., décision n° 89-260 DC du 28 juillet 1989, Loi relative à la sécurité et à la transparence du marché financier, cons. 15-23.
(13): Il est vrai, par ailleurs, que la grille d'analyse de la Cour de Strasbourg doit aussi être « opérationnelle » nonobstant la diversité des solutions nationales, certains États prévoyant, par exemple, des peines d'emprisonnement pour des infractions administratives au sens du droit national comme dans l'affaire précitée Zolotoukhine.
(14): La Cour de cassation avait jugé que les dérogations à l'obligation de prêter serment ne pouvaient être étendues au concubin ou à la personne pacsée avec l'accusé (Crim., 26 janvier 1994, n° 93-81.978 ; Crim., 25 mai 2011, n° 10-86.229).
(15): CEDH, Grande chambre, 3 avril 2012, n° 42857/05.
(16): Le Conseil déclare contraires à la Constitution les troisième et quatrième alinéas de l'article L. 331-21 du Code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2009-669 du 12 juin 2009.
(17): L'article 326 du Code civil permet à la mère, lors de l'accouchement, de demander que le secret de son admission et de son identité soit préservé.
(18): Le requérant arguait, par ailleurs, d'une méconnaissance du principe d'égalité devant la loi, mettant l'accent sur le fait que les mêmes règles s'appliquaient au père et à la mère et sur l'existence d'une différence de traitement entre le père de naissance empêché d'établir sa filiation après le placement en vue de l'adoption et les adoptants qui bénéficieraient dès ce moment de la garantie de l'établissement d'un lien de filiation. Or, si le père et la mère de naissance sont bien dans une situation différente pour reconnaître l'enfant, les dispositions en cause n'instaurent pas de différence de traitement entre eux, de même, par ailleurs, qu'entre les parents de naissance et les futurs adoptants.
(19): CEDH, Grande chambre, 13 février 2003, n° 42326/98, § 19 et § 35.
(20): CEDH, 10 janvier 2008, n° 35991/04, § 74, § 77, § 79, § 75 et § 83.
(21): Avec la loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 et la loi n° 2013-869 du 27 septembre 2013, les droits des personnes faisant l'objet d'une hospitalisation sans consentement ont été renforcés, notamment avec le contrôle systématique du Juge des libertés et de la détention (JLD) lorsque le maintien de l'hospitalisation est prévu au-delà de douze jours (art. L. 3211-12-1 du CSP).
(22): CEDH, 19 février 2015, M. S. c/ Croatie (n° 2), n° 75450/12, § 139.
(23): En ce sens, Cons. const., décision n° 2008-562 DC du 21 février 2008, Loi relative à la rétention de sûreté et à la déclaration d'irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental, cons. 13.
(24): CEDH, 18 juin 1971, De Wilde, Ooms et Versyp c/ Belgique, n° 2832/66 et a., § 82.
(25): Article L. 3225-1, alinéas 2 et 3 du Code de la santé publique.
(26): 1re Civ., 21 novembre 2019, n° 19-20.513.
(27): CEDH, arrêt précité, Engel et a. c/ Pays-Bas, § 58.
(28): CEDH, 5 février 2002, Conka c/ Belgique, n° 51564/99, § 39.
(29): CEDH, 24 octobre 1979, Winterwerp c/ Pays-Bas, n° 6301/73, § 39
(30): CEDH, 16 juin 2005, Storck c/ Allemagne, § 102, internement d'une jeune femme à la demande de son père.
(31): CEDH, Grande chambre, 3 octobre 2006, McKay c/ Royaume-Uni, n° 543/03, § 30.
(32): L'exigence du « bref délai » de l'article 5 § 4 n'est pas respectée lorsque le juge rend une décision sur une demande de sortie d'internement au bout de quatre mois (CEDH, 18 juin 2002, Delbec c/ France, n° 43125/98).
(33): Il ne s'applique pas, en revanche, lorsque la décision a été prononcée par « un tribunal statuant à l'issue d'une procédure judiciaire », le contrôle étant alors « incorporé à la décision initiale » (CEDH, arrêt précité De Wilde, Ooms et Versyp c/ Belgique, § 76).
L'absence de décision d'un tribunal pour statuer sur la demande de libération d'une personne hospitalisée à la demande d'un tiers pendant quinze jours suivant la procédure d'admission viole la Convention (CEDH, 7 mars 2006, *Van Glabeke c/ France*, n° 38287/02).(34): CEDH, arrêt précité Winterwerp, § 55. Voy., CEDH, 18 novembre 2010, Baudoin c/ France, n° 35935/03, hospitalisation sans titre, en lien avec le partage de compétences entre le juge judiciaire et le juge administratif.
(35): Cons. const., décisions précitées n° 2010-71 QPC et n° 2011-135/140. Aussi, Cons. const., décision n° 2011-202 QPC du 2 décembre 2011, Mme Lucienne Q.
(36): § 105 de l'arrêt. Rec (2004)10, 22 septembre 2004, article 27.
(37): Cass. crim., 7 janvier 2020, n° 19-80.136.
(38): Cons. const., décisions n° 2016-611 QPC du 10 février 2017 et n° 2017-682 QPC du 15 décembre 2017.
(39): Dans l'arrêt précité du 7 janvier 2020, la Cour de cassation juge que pareille condamnation « n'est compatible avec l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'homme que si est caractérisée, en la personne du receleur, son adhésion à l'idéologie exprimée dans de tels fichiers ».
(40): Pour le Conseil, « En l'état actuel des moyens de communication et eu égard au développement généralisé des services de communication au public en ligne ainsi qu'à l'importance prise par ces services pour la participation à la vie démocratique et l'expression des idées et des opinions, ce droit implique la liberté d'accéder à ces services et de s'y exprimer » (décision n° 2020-801 DC du 18 juin 2020, Loi visant à lutter contre les contenus haineux sur Internet, § 4).
(41): En dernier lieu, CEDH, 23 juin 2020, OOO Flavus et a. c/ Russie, n° 12468/15, § 28, mesures de blocage de l'accès à des sites.
(42): Par exemple, CEDH, 25 novembre 1997, Zana c/ Turquie, n° 18954/91.
(43): CEDH, 19 décembre 1989, Mellacher et a. c/ Autriche, n° 10522/83 et a., § 45, législation ayant pour effet une importante réduction des loyers visant à lutter contre la spéculation immobilière et à ramener les loyers à un niveau socialement acceptable et à encourager l'amélioration de la qualité des logements.
(44): CEDH, 21 février 1986, James et a. c/ Royaume-Uni, n° 8793/79, § 46.
(45): La Cour de cassation procède de même. Voy., par exemple, Cass., 3e civ., 10 octobre 2019, n° 17-28.862.
(46): CEDH, Grande chambre, 19 juin 2006, n° 35014/97, § 165.
(47): Pour un autre exemple de violation, voy. CEDH, 12 juin 2012, Lindheim et a. c/ Norvège, n° 13221/08 et a.
(48): CEDH, 21 décembre 2010, Almeida Ferreira et Melo Ferreira c/ Portugal, n° 41696/07 ; 19 juin 2008, Gauchin c/ France, n° 7801/03.
(49): CEDH, Grande chambre, 29 mars 2010, Brosset et Triboulet et a. c/ France, § 84.
(50): § 4 de la décision. Voy. l'analyse de V. Goesel-Le Bihan, « Acte 2 : la protection de l'environnement, un objectif de valeur constitutionnelle », Actualité juridique Droit administratif, 2 mars 2020, p. 425.
(51): Était en cause, ici, l'interdiction d'exportation de certains produits phytopharmaceutiques concernant des substances actives non approuvées par l'Union européenne, énoncée par le paragraphe IV de l'article L. 253-8 du Code rural et de la pêche maritime.
(52): On rappellera que la liberté d'entreprendre n'est pas comme telle garantie par la Convention européenne.
(53): CEDH, 27 novembre 2007, Hamer c/ Belgique, n° 21861/03, § 79.
(54): CEDH, Grande chambre, 29 mars 2010, Depalle c/ France, n° 34044/02, § 84.
(55): CEDH, 13 juillet 2016, Lazaridi c/ Grèce, n° 31282/04, § 33.
(56): Se trouvait en jeu la conformité de l'article L. 311-5, alinéa 1, du Code de l'énergie à l'article 7 de la Charte de l'environnement.
(57): CEDH, 10 janvier 2012, Di Sarno et a. c/ Italie, n° 30765/08, § 107.
(58): CEDH, Grande chambre, 19 février 1998, Guerra et a. c/ Italie, n° 14967/89.
(59): CEDH, 27 janvier 2009, n° 67021/01, § 118 et § 113.
Citer cet article
Hélène SURREL. « Chronique Conseil constitutionnel et jurisprudence de la CEDH (janvier 2020 à juin 2020) », Titre VII [en ligne], n° 5, La sécurité juridique , octobre 2020. URL complète : https://webview.conseil-constitutionnel.fr/publications/titre-vii/chronique-conseil-constitutionnel-et-jurisprudence-de-la-cedh-janvier-2020-a-juin-2020
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N° 5 - octobre 2020
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