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Textes à l'appui : extraits de décisions de la Cour constitutionnelle italienne

Cahiers du Conseil constitutionnel n° 6 (Dossier : Italie) - janvier 1999

Ont été sélectionnés pour figurer dans cette partie de la rubrique consacrée à la Cour constitutionnelle italienne trois arrêts récents (1997 et 1999) rendus sur demande de référendum abrogatif. Les deux premiers, traduits dans leur intégralité, concernent l'autonomie des régions par rapport à l'Etat dans leurs actions et leurs relations avec l'étranger, notamment l'Union européenne ; le troisième, rendu en janvier de cette année, déclare recevable une demande de référendum abrogatif portant sur le mode de scrutin des élections à l'Assemblée nationale.

Arrêt n° 19

ANNÉE 1997

RÉPUBLIQUE ITALIENNE

AU NOM DU PEUPLE ITALIEN

LA COUR CONSTITUTIONNELLE

Sur la recevabilité, au regard de l'article 2, premier alinéa, de la loi constitutionnelle n°1 du 11 mars 1953, de la demande de référendum populaire en vue de l'abrogation de l'article 4, alinéa 2, en ce qui concerne les mots « non » et « si ce n'est en accord préalable avec le Gouvernement et dans le cadre des orientations et des actes de coordination prévus à l'alinéa précédent », du décret n°616 du Président de la République du 24 juillet 1977 (Mise en oeuvre de la délégation prévue à l'article 1er de la loi n°382 du 22 juillet 1975), inscrite au n°87 du registre référendaire ;

Vu l'ordonnance des 26-27 novembre 1996 par laquelle l'Office central pour le référendum auprès de la Cour de cassation a déclaré la demande légitime ;

Après avoir entendu le Juge rapporteur Carlo Mezzanotte en chambre du conseil le 8 janvier 1997 ;

Après avoir entendu les avocats Stefano Grassi et Beniamino Caravita di Toritto pour les délégués des Conseils régionaux de la Lombardie, du Piémont, de la Vallée d'Aoste, de la Calabre, de la Vénétie, des Pouilles et de la Toscane.

En fait

L'Office central pour le référendum, constitué auprès de la Cour de cassation, en application de la loi n°352 du 25 mai 1970, modifiée, a examiné la demande de référendum populaire, présentée par les Conseils Régionaux des Régions Val d'Aoste, Toscane, Vénétie, Lombardie, Piémont, Calabre et Pouilles, sur la question suivante : « Voulez-vous que soient abrogés : l'article 4, second alinéa, en ce qui concerne les mots » non « et » si ce n'est avec l'accord préalable du Gouvernement et dans le cadre des orientations et des actes de coordination prévus à l'alinéa précédent « du décret du Président de la République n°616 du 24 juillet 1977 (Mise en S ? uvre de la délégation prévue à l'article 1 de la loi n°382 du 22 juillet 1975) ? ».

Par ordonnance déposée le 27 novembre 1996, l'Office central pour le référendum a déclaré la demande conforme à la loi, en donnant comme dénomination au référendum : Suppression des limites étatiques aux actions de promotion à l'étranger des Régions.

Après réception de la communication faite de l'ordonnance de la part de l'Office central, le Président de cette Cour a fixé le jugement sur la recevabilité de la demande référendaire à l'audience de la chambre du conseil du 8 janvier 1997, et a déterminé notamment les communications prévues par l'article 33, second alinéa, de la loi n°352 de 1970.

Peu avant l'audience de la chambre du conseil, les délégués des Conseils régionaux des Régions qui ont pris l'initiative du référendum ont déposé un mémoire, par lequel ils insistent pour que soit déclarée recevable la demande et expliquent que celle-ci viserait à accorder aux Régions la possibilité d'exercer des actions promotionnelles à l'étranger dans des domaines de leur propre compétence, sans limitations d'origine gouvernementale.

La demande de référendum, selon les délégués des Conseils Régionaux, non seulement représenterait le résultat de l'évolution de l'ordre juridique national et communautaire, mais ne remettrait pas non plus en cause le pouvoir de l'Etat en matière de politique étrangère compte tenu du fait qu'elle concerne exclusivement l'exercice d'actions qui constitueraient la pleine expression de la capacité juridique et de l'autonomie régionales.

En ce qui concerne les autres éléments relatifs à la recevabilité des demandes de référendum, les Régions qui en ont pris l'initiative observent que la question, même si elle est de type « partielle », ne procèderait pas d'une manipulation et, serait inspirée d'une source rationnellement unitaire ; elle respecterait également les conditions d'homogénéité, de clarté, de cohérence et d'absence de caractère équivoque posées par la jurisprudence constitutionnelle.

Selon les délégués des Conseils Régionaux, l'argument selon lequel une issue favorable à la consultation référendaire donnerait lieu à une situation normative inconstitutionnelle ne conduirait pas davantage à rendre irrecevable la demande de référendum. En effet, d'une part face aux actions promotionnelles des Régions à l'étranger qui interféreraient avec la sphère des relations internationales réservée à l'Etat, il y aurait toujours la possibilité d'un conflit d'attribution, et, d'autre part, selon la jurisprudence bien établie de la Cour, l'éventuelle inconstitutionnalité des dispositions législatives résultant du référendum n'aurait aucune incidence en ce qui concerne la recevabilité des demandes de référendum abrogatif.

En droit

La demande de référendum abrogatif sur laquelle cette Cour est appelée à se prononcer concerne l'article 4, alinéa 2, du décret du Président de la République n°616 du 24 juillet 1977, selon lequel les Régions « ne peuvent accomplir à l'étranger des actions promotionnelles relatives aux matières de leur compétence si ce n'est avec l'accord préalable du Gouvernement et dans le cadre des orientations et des actes de coordination » mentionnés au premier alinéa de ce même article qui en confie l'adoption à l'Etat. En raison de la manière dont elle est formulée (est proposée l'élimination des mots « non » et « si ce n'est avec l'accord préalable etc. »), la norme que la question soumise à référendum comporte objectivement, consiste, comme cela ressort d'ailleurs également de la dénomination attribuée par l'Office central pour le référendum de la Cour de Cassation, en l'élimination de toutes limites étatiques à l'activité promotionnelle à l'étranger des Régions de manière à ce que celles-ci puissent librement s'autodéterminer sans devoir être tenues d'obtenir des accords préalables ou d'observer des orientations gouvernementales relatives à la procédure ou au fond.

La demande, dans son sens objectif et évident, est irrecevable. L'accomplissement à l'étranger d'actions promotionnelles revient indubitablement aux Régions en tant qu'actions qui leurs sont propres, et comprend toute action rattachée par un lien instrumental aux matières de compétence régionale, destinée au développement économique, social et culturel de leur territoire (décision n°179 de 1987). Toutefois, contrairement à ce qui est soutenu par les Régions initiatrices du référendum, il s'agit d'une action non pas seulement contigüe, mais qui interfère potentiellement sur la politique étrangère réservée à l'Etat. Celle-ci requiert dès lors des instruments juridiques de coordination propres à éviter que ne se produisent des effets négatifs sur les orientations de politique internationale adoptées par le Parlement et le Gouvernement.

3-La Cour de séans a rappelé plus d'une fois que l'aspect particulier et le caractère réciproque des compétences étatiques et régionales en matière internationale ainsi que leur inévitable interférence mettent en cause le principe de coopération loyale (décisions n° 425 de 1995 n°212 de 1994, n°250 de 1993), lequel impose, comme une véritable obligation constitutionnelle, en premier lieu la connaissance préalable de la part de l'Etat des actions que les Régions isolément entendent dans chaque cas promouvoir (ainsi, il existe un devoir d'information préalable à la charge des Régions : arrêts n°425 de 1995,n°204 de 1993, n°472 de 1992), et, en second lieu, en tant qu'indéfectible instrument de protection de l'exclusivité des orientations étatiques de politique internationale, que soit nettement sauvegardée avant que l'action des Régions ne soit entreprise, la possibilité pour l'Etat d'opposer en temps utile son refus motivé. Ce dernier est alors susceptible d'être porté devant la Cour au titre des conflits de compétence (décision n°204 de 1993).

L'hypothèse, avancée par les Régions initiatrices du référendum, selon laquelle l'Etat devrait invoquer seulement postérieurement et à titre de sanction la contrariété des actions régionales avec ses propres orientations de politique internationale aboutirait à rendre vain le principe constitutionnel de coopération loyale, sur lequel se fondent tant l'obligation d'information préalable de la part des Régions que la possibilité d'un refus préalable motivé de la part de l'Etat.

Puisque la norme inspiratrice de la question n'est pas la substitution d'un modèle de coordination à un autre, différent et équivalent du point de vue de la concrétisation du principe de coopération loyale, mais plutôt l'élimination à la source de toute forme de coordination entre l'Etat et les Régions en matière d'actions promotionnelles à l'étranger, il faut en conclure que la demande de référendum abrogatif, par le biais de l'abrogation des mots « non » et « si ce n'est avec l'accord préalable du Gouvernement et dans le cadre des orientations et des actes de coordination prévus à l'alinéa précédent » contenus à l'article 4, second alinéa, du décret du Président de la République n°616 du 24 juillet 1977, porte atteinte au principe constitutionnel de coopération loyale qui trouve son fondement direct dans l'article 5 de la Constitution, ce qui rend irrecevable la demande.

En conclusion, la limite inhérente à la hiérarchie des normes opposable à un référendum abrogatif et qui a été rendue explicite par cette Cour depuis l'arrêt n°16 de 1978, trouve ici à s'appliquer.

PAR CES MOTIFS

LA COUR CONSTITUTIONNELLE

Déclare irrecevable la demande de référendum populaire en vue de l'abrogation, en ses dispositions indiquées précédemment, du décret n°616 du Président de la République du 24 juillet 1977 (Mise en S ? uvre de la délégation prévue à l'article 1er de la loi n°382 du 22 juillet 1975), demande déclarée conforme à la loi par l'ordonnance des 26-27 novembre 1996 de l'Office central pour le référendum auprès de la Cour de cassation.

Il en a été ainsi décidé à Rome, au siège de la Cour Constitutionnelle, Palais de la Consulta, le 30 janvier 1997

Le Président Renato GRANATA

Le rapporteur Carlo MEZZANOTTE

Arrêt n° 20

ANNÉE 1997

RÉPUBLIQUE ITALIENNE

AU NOM DU PEUPLE ITALIEN

LA COUR CONSTITUTIONNELLE

Sur la recevabilité, au regard de l'article 2, premier alinéa, de la loi constitutionnelle n°1 du 11 mars 1953 n°1, de la demande de référendum populaire en vue de l'abrogation des articles :

4, premier alinéa, en ce qui concerne les mots « et avec la Communauté économique européenne » et 6 du décret du Président de la République n° 616 du 24 juillet 1977 (Mise en S ? uvre de la délégation prévue à l'article 1er de la loi n° 382 du 22 juillet 1975) ;

9 et 11 de la loi n°86 du 9 mars 1989 (Règles générales sur la participation de l'Italie à la procédure normative communautaire et sur les procédures d'exécution des obligations communautaires), inscrite au n°88 du registre référendaire.

Vu l'ordonnance des 26-27 novembre 1996 par laquelle l'Office central pour le référendum auprès de la Cour de cassation a déclaré conforme à la loi la demande ;

Après avoir entendu le Juge rapporteur Carlo Mezzanotte en la chambre du conseil le 8 janvier 1997 ;

Après avoir entendu les avocats Giovanni Motzo et Andrea Comba pour les délégués des Conseils régionaux de la Lombardie, du Piémont, de la Vallée d'Aoste, de la Calabre, de la Vénétie et des Pouilles.

En fait

L'Office central pour le référendum, constitué auprès de la Cour de cassation, en application de la loi n°352 du 25 mai 1970 modifiée, a examiné la demande de référendum populaire, présentée par les Conseils Régionaux des Régions Piémont, Val d'Aoste, Vénétie, Lombardie, Calabre et Pouilles, sur la question suivante : « Voulez-vous que soient abrogés : l'article 4, premier alinéa, en ce qui concerne les mots » et avec la Communauté économique européenne " et l'article 6 du décret du Président de la République n°616 du 24 juillet 1977 (Mise en oeuvre de la délégation prévue à l'article 1er de la loi n°382 du 22 juillet 1975) ; les articles 9 et 11 de la loi n°86 du 9 mars 1989 (Règles générales sur la participation de l'Italie à la procédure normative communautaire et sur les procédures d'exécution des obligations communautaires). Par ordonnance déposée le 27 novembre 1996, l'Office central pour le référendum a déclaré légitime la demande, en attribuant comme dénomination au référendum : Suppression des limites étatiques à la participation des Régions aux actions de l'Union Européenne.

Après réception de la communication faite de l'ordonnance de la part de l'Office central, le Président de cette Cour a fixé le jugement sur la recevabilité de la demande référendaire à l'audience de la chambre du conseil du 8 janvier 1997, et déterminé notamment les communications prévues par l'article 33, second alinéa, de la loi n° 352 de 1970.

A l'approche de l'audience de la chambre du conseil, les délégués des Conseils régionaux des Régions ayant pris l'initiative du référendum ont déposé un mémoire dans lequel ils insistent pour que soit déclarée recevable la demande et soulignent que, dans la mesure où elle tend à l'abrogation des lois qui prévoient des interventions étatiques limitant l'autonomie des Régions dans leurs rapports avec l'Union Européenne, la question posée ne manquerait pas de clarté et d'homogénéité, serait dépourvue de caractère équivoque, et répondrait également au critère du caractère complet.

En ce qui concerne la limite que le référendum rencontre du fait des lois d'autorisation de la ratification de traités internationaux, les délégués des Conseils régionaux observent que l'interdiction constitutionnelle concernerait les seules lois nécessaires à l'introduction des traités dans l'ordre interne et non celles d'adaptation de celui-ci aux traités. En tout état de cause, même si on voulait en étendre l'interprétation, la limite devrait s'entendre comme visant seulement les règles dont l'abrogation entraîne un manquement aux obligations assumées dans le cadre de l'ordre juridique international.

Par ailleurs, les délégués des Conseils Régionaux font valoir que, dans le cadre de l'évolution du droit communautaire, la Région serait désormais considérée comme un destinataire des droits et des obligations, à coté des Etats et des citoyens. Les administrations tenues de mettre en oeuvre les normes communautaires directement applicables seraient également celles des collectivités locales. Les administrations régionales seraient, en outre, elle-même responsables vis-à-vis des citoyens en cas de manquement à des obligations communautaires. Différentes formes de collaboration directe entre les organes communautaires et les Régions, aux fins de décisions, de mise en oeuvre et de contrôle, seraient prévues par ce qu'il convient d'appeler le « partenariat » organisé par de nombreux règlements CEE. Enfin, le traité sur l'Union européenne lui-même, avec la création du Comité des Régions et l'introduction du principe de subsidiarité, semblerait confirmer pour les Régions le statut de sujet relevant directement du droit communautaire.

En conclusion, l'exigence d'une appréhension unitaire des problèmes s'exprimerait, selon les délégués des Conseils Régionaux, au niveau communautaire et non plus haut niveau des Etats pris isolément. La procédure d'intégration européenne ne pourrait pas non plus être considérée comme un simple accord international entre Etats souverains, comme le démontrerait la distinction entre relations internationales et relations communautaires, présente dans la réglementation étatique.

En droit

La demande de référendum abrogatif concerne les articles 4, alinéa 1er, et 6 du décret du Président de la République n°616 du 24 juillet 1977 concernant, l'un, les compétences de l'Etat dans les matières définies par ledit décret et, l'autre, aussi bien les compétences des Régions dans la mise en oeuvre des règlements et directives de la Communauté économique européenne que l'institution au profit de l'Etat de pouvoirs de substitution dans le cas d'une carence de la part des organes régionaux qui entraîne des manquements aux obligations communautaires. La demande référendaire a pour objet, entre autre, les articles 9 et 11 de la loi n°86 du 9 mars 1989 qui ont trait, s'agissant du premier, aux compétences des Régions et des provinces autonomes dans le cadre de l'exécution des obligations communautaires et à la fonction étatique d'orientation et de coordination ainsi qu'aux procédures y afférentes, et, pour ce qui est du second article, aux conséquences du manquement de la part des Régions aux obligations découlant de l'appartenance de l'Italie à la Communauté européenne et à l'attribution corrélative à l'Etat de pouvoirs de substitution.

La demande de référendum est irrecevable.

La technique rédactionnelle adoptée, en visant à l'abrogation partielle du premier alinéa de l'article 4 du décret du Président de la République n°616 de 1977, tout en demandant en revanche l'abrogation de la totalité du texte concernant les autres dispositions susmentionnées, est propre à éclairer et à rendre objective la norme inspiratrice de l'ensemble de la proposition référendaire.

Le premier alinéa de l'article 4 précité, dans sa rédaction présentement en vigueur, dispose que : « L'Etat, dans les matières définies par le présent décret, exerce seulement les fonctions administratives indiquées aux articles suivants, ainsi que la fonction d'orientation et de coordination dans les limites, les formes et selon les modalités prévues par l'article 3 de la loi n°382 du 22 juillet 1975, de même que les fonctions, y compris dans les matières transférées ou déléguées, relatives aux relations internationales et avec la Communauté économique européenne, à la défense nationale et à la sécurité publique ». Les fonctions revenant à l'Etat dans les matières transférées ou déléguées ne sont pas ici énumérées et réglementées d'une manière positive. Leur existence et leur attribution à l'Etat se trouvent au contraire synthétiquement affirmées par une proclamation de caractère général. Dès lors, le fait que la proposition référendaire touche seulement les mots « et avec la Communauté économique européenne » conduit à ce que sa signification objective soit celle de restreindre aux seules relations internationales (sans préjudice de la défense nationale et de la sécurité publique) le champ d'application du principe selon lequel l'Etat possède des compétences dans les matières transférées ou déléguées aux Régions et d'empêcher que ce principe s'applique également dans le cadre des relations communautaires. Il est dès lors évident que la question ne vise pas tant à obtenir une nouvelle formulation des fonctions étatiques afférentes aux relations avec la Communauté économique européenne quand est en cause n'importe quelle compétence régionale, que de s'opposer - par principe, justement- à la possibilité même de fonctions étatiques dans le cadre de telles relations.

3- La manipulation affectant ainsi l'article 4, premier alinéa, du décret du Président de la République n° 616 de 1977, permet de dégager avec la même clarté le fondement objectif de la demande d'abrogation totale des autres dispositions susmentionnées. Il est tout à fait étranger à la proposition dans son ensemble de proposer, au moyen de l'abrogation par voie de référendum, l'énoncé d'une nouvelle réglementation des fonctions étatiques qui font l'objet des dispositions en cause (article 6 du décret du Président de la République n°616 de 1977, et articles 9 et 11 de la loi n°86 de 1989). Tout au contraire, est évidente l'intention, qui se présente ainsi de manière objective dans le libellé de la question, d'éliminer par un référendum se suffisant à lui même, tout à la fois le principe de l'existence de fonctions étatiques dans les relations communautaires (article 4, alinéa 1er, du décret du Pérsdient de la République n°616 de 1977), et la réglementation positive de telles fonctions, de manière à ce que chaque pouvoir et chaque fonction, y compris ceux qui sont afférents à des domaines unitaires et qui ne peuvent être fractionnés, soit en définitive conféré aux Régions. Tel étant le contenu objectif de la demande de référendum, celle-ci doit être déclarée irrecevable.

Même si au stade actuel du processus d'intégration européenne, on assiste à une expansion croissante du rôle des autonomies dans le cadre du droit communautaire, l'ensemble des fonctions que l'Etat est appelé à exercer dans le cadre des relations avec la Communauté européenne ne peut être conféré aux Régions et globalement assumé par elle, car cela contreviendrait au principe d'unité et d'indivisibilité de la République posé à l'article 5 de la Constitution. C'est en effet de ce principe que, selon la jurisprudence de cette Cour (cf. en dernier lieu, décision n°126 de 1996), découle l'attribution à l'Etat de fonctions (qui se concrétisent en des actes d'orientation et de coordination et en l'exercice de pouvoirs de substitution ou supplétifs). Si ces derniers peuvent être réglementés de façon différente dans la perspective d'une valorisation plus importante du principe d'autonomie, ils ne peuvent cependant pas être passés purement et simplement sous silence, selon l'intention objective sous-jacente à la demande de référendum.

PAR CES MOTIFS

LA COUR CONSTITUTIONNELLE

Déclare irrecevable la demande de référendum populaire en vue de l'abrogation, en ce qui concerne les dispositions indiquées ci-dessus du décret du Président de la République n°616 du 24 juillet 1977 (Mise en oeuvre de la délégation prévue à l'article 1er de la loi n°382 du 22 juillet 1975), et de la loi n°86 du 9 mars 1989 n°86 (Règles générales sur la participation de l'Italie à la procédure normative communautaire et sur la procédure d'exécution des obligations communautaires), demande déclarée conforme à la loi par ordonnance des 26-27 novembre 1996 de l'Office central pour le référendum constitué auprès de la Cour de cassation.

Il en a été ainsi décidé à Rome, au siège de la Cour Constitutionnelle, Palais de la Consulta, le 30 janvier 1997

Le Président Renato GRANATA

Le rapporteur Carlo MEZZANOTTE

Arrêt n° 13

ANNÉE 1999

RÉPUBLIQUE ITALIENNE

AU NOM DU PEUPLE ITALIEN

LA COUR CONSTITUTIONNELLE

A prononcé l'arrêt suivant

ARRET

Sur la recevabilité, au regard de l'article 2, alinéa 1er, de la loi constitutionnelle n°1 du 11 mars 1953, de la demande de référendum populaire en vue de l'abrogation des articles ci-après énumérés et de certaines dispositions du décret du Président de la République n°361 du 30 mars 1957 (Approbation du recueil des lois fixant les règles relatives à l'élection de la Chambre des députés), dans sa rédaction résultant des modifications et ajouts successifs apportés, en particulier, par la loi n°277 du 4 août 1993 (Règles concernant l'élection de la Chambre de députés) et par le décret-loi n°354 du 20 décembre 1993 (Modifications apportées au recueil des lois régissant l'élection de la Chambre des députés, approuvé par le décret du Président de la République n°361 du 30 mars 1957)

(omissis)

En fait

L'Office central pour le référendum, constitué auprès de la Cour de Cassation, conformément à la loi n°352 du 25 mai 1970 modifiée, a, par ordonnance en date du 23 juillet 1998, déclaré conforme à la loi les demandes de référendum populaire déposées le 23 juillet 1998 par Mariotto Segni et autres, sur la question suivante, telle que reformulée à la suite de la correction d'une erreur matérielle, par la même ordonnance, laquelle a donné au référendum la dénomination « Election de la Chambre des députés : suppression du vote par liste pour l'attribution selon la méthode proportionnelle de 25 % des sièges » (omissis) 3- A l'approche de la date fixée pour l'audience de la chambre du Conseil, le professeur Augusto Barbera, l'ingénieur Giuseppe Calderisi et le Professeur Mariotto Segni, promoteurs et présentateurs du référendum abrogatif susvisé, se sont constitués. Dans leur mémoire explicatif, ils se sont particulièrement arrêtés aux points suivants :

Recevabilité des référendums en matière électorale.

Une attention particulière a été portée à l'arrêt n° 47 de 1991, par lequel la Cour constitutionnelle a considéré, en premier lieu, que le domaine électoral n'échappait pas, en tant que tel, au référendum abrogatif, en second lieu, que la question soumise au référendum devait être appréciée sous le double aspect de l'absence de caractère équivoque et de l'homogénéité, d'une part, et de la clarté et de la suffisante certitude de la réglementation qui résulterait de l'adoption du référendum, d'autre part, de manière à permettre aux électeurs de voter en toute connaissance de cause (principes posés par l'arrêt n° 32 de 1993 et précédemment par la décision n° 29 de 1987).

Ces principes, confirmés ultérieurement par les arrêts n° 5 de 1995 et n° 6 de 1997, ont été par la suite réaffirmés par une motivation destinée à en renforcer la valeur de précédent sur le plan jurisprudentiel.

- Contenu de la demande.

L'opération référendaire est décrite en déterminant l'objet essentiel de l'abrogation, la définition des abrogations en découlant, les abrogations destinées à une opération de nettoyage du texte, ainsi que la réglementation qui résulterait de l'adoption du référendum.

La réglementation qui résulterait du référendum et son application immédiate, aux fins de garantir le renouvellement de l'organe électif.

Se trouve décrit un système qui, avec l'abrogation espérée, serait d'application immédiate et parfaite.

Clarté et homogénéité de la question.

Sont rappelés différents arrêts de la Cour constitutionnelle, et surtout l'arrêt n° 16 de 1978 qui contient l'énoncé complet des conditions de recevabilité des questions soumises à référendum, afin de démontrer que sont réunies les conditions de clarté, d'absence de caractère équivoque, et d'homogénéité de la question posée.

Caractère présumé de manipulation de la question et irrecevabilité présumée du référendum qui procèderait à une manipulation des textes.

Sur la base des critères élaborés par l'arrêt n° 36 de 1997, il est souhaité que la Cour admette par sa décision la recevabilité de la question référendaire envisagée, laquelle, en abrogeant le vote par liste et par conséquent la répartition proportionnelle qui constitue le critère d'attribution de 25 % des sièges non attribués directement dans les collèges auxquels il est pourvu par scrutin uninominal (disposition déjà existante, même si c'est simplement par référence à des cas résiduels, dans la loi électorale applicable à la Chambre des députés), permet l'extension du critère « alternatif ». Ce dernier, basé sur la possibilité de rattrapage ouverte à ceux des candidats non élus, liés à des listes qui, dans les collèges soumis au scrutin uninominal ont obtenu les meilleurs résultats électoraux individuels, est également contenu dans la loi électorale.

Ainsi, il n'y aurait pas création de nouvelles règles, mais extension d'une règle déjà existante, destinée à permettre, avant comme après l'abrogation, l'attribution de 25 % des sièges non attribués directement dans les collèges auxquels il est pourvu par scrutin uninominal.

Absence d'obstacles et d'inconvénients dérivant de l'application de la réglementation qui résulterait de l'adoption du référendum.

A la lumière de la jurisprudence de 1993, en particulier des arrêts n° 32 et n° 33, il apparaît que dans la réglementation qui résulterait de l'adoption du référendum il n'existe ni obstacles, ni inconvénients tels que ceux énoncés dans l'arrêt n°32 précité.

Critiques, objections et contestations qui se placent sur un terrain différent de celui de la recevabilité de la demande de référendum abrogatif.

Le système qui devrait découler de l'abrogation prononcée par le référendum ne donnerait pas lieu, toujours selon ce qui est affirmé dans le mémoire, à des incohérences ou à des extravagances, et n'apparaîtrait pas non plus contradictoire ; Ces objections sont celles qui ont été avancées au cours du débat politique et juridique qui a suivi la présentation de la demande de référendum.

Les promoteurs du référendum s'attachent à démontrer le caractère infondé des objections précédemment formulées, en relevant qu'elles n'aboutissent pas à remettre en cause la jurisprudence constitutionnelle traditionnelle.

Ainsi, il peut arriver qu'il existe des collèges où sont élus plus de parlementaires qu'il n'y a de sièges à pourvoir, comme cela s'est produit en Angleterre et au Sénat italien, tant avant qu'après la réforme introduisant un système majoritaire.

En tout état de cause, on a toujours recours à un critère qui fait intervenir la volonté du corps électoral dans l'élection des candidats ayant les meilleurs résultats électoraux individuels de la circonscription.

Le principe majoritaire ne serait en aucune manière affecté puisque, au tempérament proportionnel apporté au principe majoritaire qui figure dans la loi actuelle, se substituerait un tempérament différent, correspondant davantage à la logique majoritaire.

Enfin, en ce qui concerne le problème du remplacement des sièges devenus vacants, il n'y aurait rien d'illogique dans le fait que, parfois, puisse être appelé à siéger un candidat appartenant à une formation différente et opposée à celle du député remplacé. En tout cas, la réglementation qui résulterait de l'adoption du référendum permettrait d'assurer le fonctionnement normal de la Chambre.

Certaines incorrections grammaticales résiduelles.

Il resterait dans le texte après l'abrogation demandée des références inappropriées ou d'autres imperfections.

A ce propos, il est rappelé que la Cour a drastiquement exclu l'influence sur la recevabilité des demandes d'imperfections de forme mineures, dès son arrêt n°47 de 1991. De la même façon, dans son arrêt n°63 de 1990 il a été affirmé que « certaines imperfections apparaissent inévitables& et sont habituelles s'agissant du processus normatif ».

Les promoteurs du référendum concluent, par suite, à la recevabilité de la demande de référendum abrogatif.

(Omissis)

Au fond

La demande de référendum abrogatif, sur la recevabilité de laquelle la Cour est appelée à se prononcer, concerne certains articles et certaines dispositions (indiqués tant dans les visas que dans l'exposé des faits du présent arrêt) du Décret du Président de la République n°361 du 30 mars 1957 n°361 (Approbation du recueil des lois fixant les règles pour l'élection de la Chambre des députés) dans sa rédaction résultant des modifications et ajouts successifs apportés, en particulier, par la loi n°277 du 4 août 1993 (Règles pour l'élection de la Chambre des députés) et du décret loi n° 354 du 20 décembre 1993 n°534 (Modifications apportées au recueil des lois établissant les règles pour l'élection de la Chambre des députés, approuvé par décret du Président de la République n°361 du 30 mars 1957).

L'ordonnance du 1er décembre 1998 de l'Office central pour le référendum auprès de la Cour de cassation a attribué au référendum la dénomination suivante : « Election de la Chambre des députés : suppression du vote par liste pour l'attribution par une méthode proportionnelle de 25 % des sièges ».

L'objectif d'ensemble de la question est centré sur la suppression complète de l'actuel système des listes et du vote par liste pour l'attribution de 25 % des sièges par la méthode proportionnelle, système précédemment adopté par le législateur, en vertu de son pouvoir discrétionnaire, parmi les multiples mécanismes possibles, pour tempérer les effets du système majoritaire simple qui régit l'attribution de 75 % des sièges restants.

Une telle suppression, avec l'élimination corrélative du bulletin de vote pour le vote par liste, pour le moment distinct de celui relatif à l'élection du candidat dans chaque collège uninominal majoritaire (inchangé dans le projet référendaire), est complétée par la disparition des références aux listes et au vote par liste, réalisé selon la méthode des coupures.

L'attribution de 25 % des sièges, actuellement régie par la méthode proportionnelle liée au vote par liste par circonscription, se ferait au moyen d'une sorte de repêchage des candidats non élus, présentés dans les collèges uninominaux de la circonscription, qui auraient obtenus les meilleurs résultats. Le classement des candidats et des résultats individuels (art. 77, numéro 3 du décret du Président de la République n°361 de 1957, non concerné par l'abrogation référendaire) s'effectue selon l'ordre en pourcentage du plus grand nombre de voix obtenues, par rapport au nombre d'électeurs votants au sein d'un seul collège uninominal (suffrages obtenus par le candidat multipliés par 100 ; ce produit étant divisé par le nombre de votants du collège uninominal).

Aux fins de l'examen de la recevabilité de la demande de référendum abrogatif ici en cause, il est suffisant de rappeler les principes énoncés plus d'une fois par la Cour, principes dont il n'y a pas lieu de s'écarter, concernant les conditions d'unicité, d'absence d'équivoque et d'homogénéité des questions soumises au référendum (arrêts n°26 de 1997, n°47 de 1991 et n°16 de 1978) et les caractéristiques propres à la matière électorale (arrêt n°429 de 1995 ; voir également l'arrêt n°107 de 1996), avec une référence toute particulière à la nécessité de pouvoir disposer à tout moment d'une réglementation opérationnelle (arrêts n°26 de 1997, n°47 de 1991 et n°29 de 1987).

Dans la question soumise à l'examen de la Cour, on ne retrouve aucune des limites faisant obstacle au recours au référendum, expressément prévues (de manière ponctuelle en tant qu'elles répondent à des choix spécifiques de politique institutionnelle) par l'article 75 de la Constitution. On ne trouve pas non plus d'autres hypothèses implicites d'irrecevabilité, inhérentes aux caractéristiques essentielles et nécessaires du référendum législatif, liées à des exigences d'ordre constitutionnel et se rapportant aux structures ou aux thèmes de la question faisant l'objet de la consultation (voir en particulier l'arrêt n°16 de 1978).

La question ne contient pas de demandes hétérogènes, manquant d'un fondement rationnellement unitaire, incompatibles avec la logique de l'article 75 de la Constitution, et elle se réfère à des actes législatifs de l'Etat ayant force de loi ordinaire, ne possédant pas un contenu imposé par la Constitution (arrêt n°16 de 1978).

En outre, cette question ne peut être considérée comme ayant un caractère équivoque.

L'objet essentiel de la question, telle qu'elle a été énoncée précédemment, consiste en l'abrogation des articles et des dispositions relatives aux listes, au vote par liste et à la répartition de 25 % des sièges par la méthode proportionnelle, le reste correspondant à une opération de polissage normatif pour nettoyer le texte, avec abrogation complète de certaines dispositions ou avec une technique dite de découpage ( voir sur ce point l'arrêt n°26 de 1997).

En réalité, la question est formulée de manière à pouvoir réaliser l'abrogation partielle de la loi électorale sur les bases susmentionnées et en même temps à faire en sorte que la réglementation qui résulterait du référendum, c'est-à-dire celle qui subsiste après l'éventuelle abrogation, soit immédiatement applicable en permettant le renouvellement à n'importe quel moment de l'organe représentatif, condition indispensable exigée des référendums en matière d'élection des assemblées parlementaires (cf. en dernier lieu, l'arrêt n°26 de 1997).

A la différence de l'espèce référendaire qui a fait l'objet de l'arrêt n°26 de 1997, il existe une totale garantie d'applicabilité immédiate du système résultant du référendum du fait que les collèges électoraux qui sont pourvus par le scrutin uninominal resteraient inchangés, sans aucune nécessité de redéfinition de chaque circonscription, tant en ce qui concerne le nombre que l'étendue territoriale. En effet, serait conservée la distinction entre les 75 % de sièges, à chacun desquels correspond un collège uninominal, et les 25 % de sièges restants, n'ayant pas cette correspondance et qui seraient attribués (sur la base du résultat électoral individuel, lequel résulte d'une opération mathématique de rapport en pourcentage entre les votes et les votants dans le collège uninominal : art. 77, alinéa 1, numéro 3 et numéro 4, et art. 78) aux candidats, ayant obtenu le meilleur résultat, non élus dans le cadre du collège uninominal. De cette manière, il existerait un système d'élection des députés correspondant au nombre de sièges fixé par la Constitution, avec la possibilité d'un renouvellement de l'organe à tout moment.

La situation qui résulterait concrètement de l'adoption de la demande apparaît ainsi comme conforme aux exigences décrites plus-haut.

Les considérations qui précèdent permettent entre autres d'exclure que le référendum en cause ait le caractère d'une manipulation ou subrepticement celui d'une proposition de loi. En effet, le référendum, en abrogeant partiellement la règle établie par le législateur pour ce qui touche à la répartition de 25 % des sièges, ne la remplace pas par une autre règle tout à fait différente et étrangère au contexte normatif que la question et le corps électoral ne peuvent créer ex novo, ni établir directement (arrêt n°36 de 1997). Elle utilise un critère qui existe tout à fait dans la législation (même s'il est résiduel) et qui demeure d'application normale dans la partie spécifiquement modifiée de la loi qui fait l'objet du référendum (art. 77, numéro 3).

En définitive, une fois rendues caduques par l'effet de la proposition d'abrogation référendaire, les listes, le vote par liste et la répartition de 25 % des sièges selon la méthode proportionnelle liée aux listes elles-mêmes, continuerait d'exister, dans son acception d'origine, le critère déterminant pour l'attribution des sièges sur la base des résultats individuels de chaque candidat, critère qui continuerait à s'appliquer selon les modalités qui subsisteraient à l'issue de l'adoption du référendum.

PAR CES MOTIFS

LA COUR CONSTITUTIONNELLE

Déclare recevable la demande de référendum populaire en vue de l'abrogation, en ses dispositions indiquées ci-dessus, selon la question modifiée par l'Office central pour le référendum auprès de la Cour de cassation par ordonnances du 1er décembre 1998 et du 14 janvier 1999, du décret du Président de la République n°361 du 30 mars 1957 (Approbation du recueil des lois fixant les règles relatives à l'élection de la Chambre des députés), dans sa rédaction résultant des modifications et ajouts successifs apportés en particulier par la loi n°277 du 4 août 1993 n°277 (Règles pour l'élection de la Chambre des députés) et par le décret loi n°354 du 20 décembre 1993 n°534 (Modifications apportées au recueil des lois régissant l'élection de la Chambre des députés, approuvé par décret n° 361 du Président de la République du 30 mars 1957), demande déclarée conforme à la loi par les ordonnances précitées.

Le Président Renato GRANATA

Le rapporteur Riccardo CHIEPPA