Page

Le Conseil constitutionnel et le droit de la famille

Jean HAUSER - Professeur à l'Université Montesquieu - Bordeaux IV - Directeur du CERFAP

Cahiers du Conseil constitutionnel n° 16 (Dossier : le Conseil constitutionnel et les diverses branches du droit) - juin 2004

Si l'on s'interroge sur l'intervention effective du Conseil constitutionnel sur le droit de la famille, quelques décisions phares(1) et quelques articles ou ouvrages non moins lumineux(2) jalonnent le parcours du juriste « familialiste ». Il faudrait toutefois bien s'entendre sur le terme lui-même de « droit de la famille » lequel, curieusement, ne figure pas dans le code civil. Les règles de droit familial y sont en effet fondues dans un livre I, « Des personnes »(3) d'où il faut extraire, non sans arbitraire, ce qui constituerait le corpus du « droit de la famille » que les juristes spécialistes considèrent pourtant comme évident(4). Si le mariage, le divorce, la filiation, l'autorité parentale sont certainement du droit de la famille(5), on doutera plus nettement pour le titre XII du livre sur le PACS et tout ce qui concerne les incapacités n'est qu'en partie familial, la finalité étant personnelle mais les instruments encore largement familiaux. On s'en tiendra donc à une conception suffisamment large en excluant toutefois ce qui dépend désormais du droit des personnes au sens « individuel » du terme qui rendrait d'ailleurs cette étude interminable puisqu'il faudrait y comprendre nombre de libertés.

Si maintenant l'on examine ce que le Conseil constitutionnel a pu appréhender des textes de réforme de droit de la famille on voit bien vite que la moisson n'est pas très riche. Dans l'ouvrage classique des Grandes décisions du Conseil constitutionnel (6) le mot « droit de la famille » ne figure pas à titre autonome dans la table alors qu'y figurent droit économique, droit de propriété, droit européen, droit fiscal, etc. Il faut aller chercher à « Libertés et droits fondamentaux » pour trouver en sous-rubrique « droit de la famille » avec une référence très générale à la constitutionnalisation des libertés et droits fondamentaux mais qui n'atteint en rien le fond du droit de la famille, ou encore à la critique du droit à l'insémination artificielle ce qui mettrait en cause les droits de la famille consacrés par le préambule de la Constitution de 1946 ou enfin - ce qui n'est pas sans signification - sur le droit aux allocations familiales.

Alors que les vrais débats de notre temps en droit de la famille concernent assez majoritairement le droit de la filiation (suppression de la distinction filiation légitime - filiation naturelle, adoption par un couple homosexuel, accouchement anonyme et droit de connaître ses origines, interdiction d'établir la filiation incestueuse, etc.) ou le droit du divorce (création d'un divorce sur simple séparation, suppression ou non du divorce pour faute, etc.) on ne trouve presque rien qui, de près ou de loin, permettrait de prévoir ce que pourrait être une saisine et une décision sur ces points(7). Pourtant la probabilité des réformes et leur importance rendraient essentielle, pour le pouvoir législatif, la possession d'un instrument de prévision. La raison tient évidemment à l'étrangeté de notre contrôle constitutionnel limité aux lois d'avenir mais incompétent sur les lois du passé, limité à la saisine parlementaire ou gouvernementale mais fermé à la saisine individuelle. Or, si sur le premier point on peut à la rigueur admettre que la révision globale de notre système juridique pourrait poser problème(8), sur le second on peut être plus dubitatif. La saisine du Conseil constitutionnel par les parlementaires sur les lois de droit de la famille apparaît aléatoire, arbitraire et pour tout dire abusivement politisée ou médiatisée et les réponses du Conseil sur les rares questions de droit de la famille qui lui sont posées ne paraissent pas, pour le dire sans fard, à la hauteur de ce qu'est son raisonnement dans d'autres matières plus marquées par le droit public(9). Il n'est guère défendable que la loi PACS ait fait l'objet d'un déluge de recours alors que son impact pratique, et même de principe, était loin de mériter un tel activisme, que les recours sur la liberté du mariage ne portent que sur les dispositions concernant les mariages blancs, parce qu'il s'agit alors de police des étrangers, lieu traditionnel d'opposition politique, alors que, dans le même temps, la loi sur les successions du 3 décembre 2001 a laissé tout le monde sans réaction bien que les enfants adultérins puissent maintenant venir en concours à égalité avec le conjoint, pourtant victime de l'adultère (ce qui, même si on est d'accord, aurait mérité au moins discussion), la loi du 30 juin 2000 sur le divorce a prévu certaines dispositions étranges quant au droit de propriété, les deux lois sur le nom, non encore appliquées, contiennent une disposition qui est une infraction visible à l'égalité des sexes, etc. L'excessive « politisation » des recours en matière de droit de la famille laisse sans contrôle des pans entiers des réformes récentes et concentre abusivement sur quelques points, parfois juridiquement secondaires, le contrôle du Conseil. La famille mérite mieux que cela car, « s'interroger sur la famille c'est s'interroger sur le fondement de l'ordre social »(10).

Il faut ajouter que ces trous noirs du contrôle constitutionnel dans notre matière conduisent à développer abusivement le contrôle des juridictions supranationales

Il nous a donc semblé que, selon une méthodologie dont le danger est évident mais dont l'intérêt ne l'est pas moins, il serait au moins curieux de revisiter rapidement certains aspects du droit de la famille pour voir ce qui existe mais aussi ce qui aurait pu exister ou pourrait exister si, dans ce domaine, un contrôle modernisé nous permettait d'élaborer nos principes généraux plutôt que de les faire très abondamment élaborer à Strasbourg ou à Luxembourg.

La famille c'est d'abord un couple et ensuite des enfants.

I. Le couple et le Conseil constitutionnel

Étrangement, alors que la décadence du mariage est un fait non contesté, même si la question doit être prise avec beaucoup de précautions, c'est à son occasion que l'on trouve de la jurisprudence positive du Conseil mais dans un domaine fort étroit, et somme toute marginal, qui est celui du mariage des étrangers avec un citoyen français et ses conséquences quant à la nationalité. Faudrait-il en déduire que tout le reste de nos articles de lois sur le mariage sont en conformité avec les plus simples principes constitutionnels ? On en serait bien loin et quelques questions méritent donc d'être posées.

Par contre le divorce, ou plus largement le « découplage »(11) est un désert constitutionnel et pourtant...

A. L'établissement du couple

1) Le mariage a eu l'honneur de deux grandes décisions du Conseil à 10 ans d'intervalle en 1993 et en 2003. Dans les deux cas il s'agissait d'une modification projetée de la loi sur le statut des étrangers et de la lutte contre les mariages fictifs ou encore mariages blancs(12) et, dans les deux cas, de fournir aux officiers d'état civil suspectant un détournement et aux parquets un moyen efficace pour retarder le mariage, en pratique le temps d'effectuer une enquête sur la réalité des intentions des prétendants à l'union. En 1993 c'est un article 175-2 projeté dans le code civil qui suscite la censure(13) alors qu'il permet aux autorités de surseoir à célébrer un mariage lorsqu'il y a des indices sérieux de détournement, l'officier d'état civil saisissant le procureur lequel disposait d'un délai de quinze jours pour décider d'un sursis à statuer pouvant aller jusqu'à trois mois, sa décision n'étant pas susceptible de recours. La disposition est déclarée inconstitutionnelle sans qu'on sache bien exactement ce qui, dans cet arsenal était frappé : était-ce l'ensemble, sursis à statuer, délai de trois mois, absence de recours ou seulement cette dernière particularité ? Le Conseil constate seulement « qu'en subordonnant la célébration du mariage à de telles conditions préalables, ces dispositions méconnaissent le principe de la liberté du mariage, qui est une des composantes de la liberté individuelle ». On peut trouver la réponse un peu courte car enfin, sauf à sombrer dans l'angélisme, on sait fort bien qu'un certain nombre de mariages de ce type sont des mariages fictifs, que leur dépistage est, comme pour toute fraude, particulièrement délicat, et que la liberté du mariage a plus à perdre qu'à gagner dans pareille utilisation(14). Le principe même d'un délai raisonnable avec un contrôle du parquet était donc difficilement contestable alors que l'absence de voie de recours l'était beaucoup plus. Aussi bien l'article 175-2 du code civil, issu de la réécriture par la loi du 30 décembre 1993, a réservé un droit de recours et d'ailleurs diminué la durée du sursis.

On s'étonnera que, dans ces conditions, le Conseil ait eu à se prononcer de nouveau en 2003(15) contre un texte inspiré du même souci. Cette fois ce sont ces « indices sérieux », base de la suspicion de fictivité, qui étaient en cause et plus particulièrement l'article 76 du texte qui modifiait, une fois de plus, l'article 175-2 du code civil. Désireux de définir ces indices, le législateur avait cru possible de les déduire du seul fait, pour un ressortissant étranger, de ne pas justifier de la régularité de son séjour, lorsqu'il y a été invité par l'officier d'état civil qui doit célébrer le mariage. Le Conseil ne conteste pas le procédé en général mais la technique de définition de l'indice sérieux : « Considérant, toutefois, que le respect de la liberté du mariage, composante de la liberté personnelle(16) protégée par les articles 2 et 4 de la Déclaration de 1789, s'oppose à ce que le caractère irrégulier du séjour d'un étranger fasse obstacle, par lui-même (17), au mariage de l'intéressé. » On comprend bien, on peut être étranger en situation irrégulière et vouloir tout de même se marier réellement et c'est un faisceau d'indices qu'il fallait exiger, de même que l'obligation faite de signaler à l'autorité préfectorale la situation irrégulière d'un étranger désirant se marier était de nature à dissuader les intéressés de se marier(18). On appréciera moins la référence par le Conseil à « l'absence de consentement » que, prétendument, révélerait l'indice sérieux, alors que le consentement n'est pas douteux, mais que c'est la cause de l'acte juridique et la fausse cause ou le détournement qu'il fallait viser(19). On ne peut s'empêcher de remarquer combien ces recours doivent plus au « politique » qu'au « juridique », le droit des étrangers et celui de la nationalité étant depuis longtemps habités par l'alternance. À côté de cela de nombreuses dispositions, souvent plus importantes, restent sans contrôle parce qu'elles n'ont pas d'intérêt dans le jeu politique. On est très loin, dans notre domaine, d'une construction constitutionnelle raisonnable(20).

Le droit classique du mariage reste habité par de nombreuses dispositions qui ne trouveraient pas grâce devant le Conseil constitutionnel. Citons, sans nous étendre, l'article 179 du code civil qui écarte toute responsabilité des ascendants s'opposant indûment à un mariage(21), l'article 228 qui impose à la femme un délai de viduité avant toute autre union alors qu'aucune justification ne vient à l'appui de ce texte dépassé et discriminatoire(22). Plus grave apparaît le vide surprenant de l'article 171 du code civil qui permet depuis 1959 au président de la République d'accorder une dispense en vue d'un mariage posthume(23), qui ne prévoit aucun contrôle d'aucune sorte sur cette autorisation et donne lieu à un étrange conflit négatif entre les deux ordres, la Cour de cassation s'estimant incompétente pour contrôler et le Conseil d'État également. Or, contrairement à ce qu'on pourrait penser, les recours, notamment des familles du défunt qui contestent la réalité du consentement du défunt, ne sont pas rares et se heurtent pourtant à ce refus d'un autre âge qui paraît bien contraire au principe élémentaire du droit au juge(24).

2) La décision PACS du 9 novembre 1999 conduit à une toute autre interrogation sur laquelle on ne pourra s'étendre(25). Tout d'abord le PACS est-il une « affaire familiale » ? L'affirmation liminaire de l'article 515-1 du code civil affirme sa nature contractuelle mais on n'a pas manqué immédiatement de remarquer que plusieurs de ses conditions en appelaient à la structure familiale, reflet des contradictions d'un texte juridiquement bâclé. La décision ne nous éclaire guère sur cet objet juridique non identifié, mais le pouvait-elle, puisque le Conseil a finalement constaté que « l'objet des articles 515-1 à 515-7 du code civil est la création d'un contrat spécifique... ». Le privatiste restera perplexe sur la notion de contrat spécifique mais il est vrai que l'avenir a fait naître nombre de ces accords ou conventions dans le droit familial où ils étaient quelque peu inconnus(26). Pour autant ce flou maintenu sur la nature juridique du pacte lui-même et sur l'opération d'enregistrement commence à poser d'importants problèmes(27)sans compter ceux qui ne manqueront pas d'arriver quand on s'interrogera sur le contenu exact de ces obscures obligations(28).

Plus généralement, les efforts du Conseil pour écarter le grief d'incompétence négative, pour louables qu'ils aient été dans une question fort délicate(29) et face aux débats politiques paroxystiques, ont peut-être été un mauvais service rendu au législateur. L'annulation de tout ou partie du texte aurait permis au pouvoir exécutif de reprendre une initiative qu'il avait voulu laisser, au mieux par naïveté au pire par absence de courage, aux parlementaires et de refaire un texte digne du droit français. Désormais, réputée dangereuse et explosive, cette législation inadaptée, à l'application obscurcie par l'absence de toute réflexion préalable sérieuse, dont les inconvénients majeurs vont apparaître au fur et à mesure des séparations, ne sera plus retouchée avant fort longtemps. La France a manqué là une occasion que d'autres pays européens ont saisie et il faudra sans doute, pour l'avenir, exploiter plus les réserves d'interprétation du Conseil que la loi elle-même : est-ce bien normal et que fera la Cour de cassation de ces réserves quand les interrogations vont lui arriver(30) ? Le risque d'une confusion majeure dans la hiérarchie des normes est à nos portes.

Il n'est même pas certain que les avantages fiscaux accordés au titre du PACS, et notamment sur les droits de mutation, soient si évidemment conformes à l'égalité des citoyens devant la loi. Si le fondement de ces avantages repose sur la communauté de vie à laquelle le législateur accorderait une valeur en elle-même, les conditions restrictives du PACS tenant à la prohibition d'un inceste présumé, mettent les communautés familiales, que l'on ne peut a priori taxer d'inceste, dans une situation discriminatoire : pourquoi, par exemple, la coexistence honorable d'un oncle et d'un neveu dans une exploitation commune leur interdirait toute structure permettant d'accéder à cet avantage fiscal alors qu'a priori leur communauté n'est ni plus ni moins défendable que celle des pacsés(31) ? Un statut égalitaire de la cohabitation était incompatible avec les a priori du texte d'origine.

B. La dissolution du couple

Il n'y a, à notre connaissance, aucune jurisprudence du Conseil sur le divorce. En 1975, date de la dernière grande réforme du divorce, les conditions de saisine du Conseil n'étaient guère favorables et d'ailleurs, ce qui est plus fréquent qu'on ne pense en droit de la famille, cette réforme s'est faite à partir d'un large consensus qui excluait toute velléité de recours(32). Pourtant on peut imaginer ce qu'aurait été un recours contre la création du divorce pour rupture de la vie commune, lequel a fait l'objet d'importantes tractations, qui avait tout de même pour effet d'obliger un époux, par hypothèse exempt de torts, au moins prouvés, à divorcer. L'occasion pourrait être ressaisie à l'occasion de la réforme en cours (avr. 2004) puisque le projet de loi adopté le 8 janvier 2004 par le Sénat et en discussion à l'Assemblée nationale prévoit de banaliser cette forme de divorce en ramenant le délai de séparation de 6 ans à 2 ans et en supprimant toutes les charges imposées au demandeur. Toutefois, comme en 1975, cette libéralisation étant présentée par une majorité qui serait pourtant susceptible idéologiquement de la critiquer, on ne voit guère comment un tel recours pourrait être formé. De nouveau le consensus sur certaines réformes du droit de la famille le met à l'abri des précisions qu'on pourrait attendre et de l'autorité que conférerait une validation.

Par contre l'occasion eût pu être saisie lors du vote de la loi du 30 juin 2000 sur la prestation compensatoire, à l'issue d'une proposition parlementaire largement inspirée par les groupes de pression des débiteurs de prestation. Afin d'accentuer le paiement en capital, et ceci jusqu'à l'excès, les parlementaires se sont laissés aller à modifier l'article 275 du code civil en prévoyant dans le 2 ° de l'article la possibilité pour le juge d'imposer l'abandon en propriété d'un bien au titre du paiement de la prestation. La version 1975 du texte n'avait retenu que l'abandon en usufruit ou en droit d'usage, le législateur de l'époque refusant d'accorder au juge un véritable droit d'expropriation d'utilité privée. Le nouveau texte prévoit même que le jugement opère cession forcée en faveur du créancier. Posons simplement la question : ce droit d'expropriation accordé au juge ressortissait-il d'une nécessité publique (la protection du créancier de la prestation ?), était-il proportionné au but poursuivi et, d'une façon générale, conforme au caractère fondamental du droit de propriété ? Personne n'a posé la question au moment de la promulgation de la loi. La réticence extrême des juges judiciaires à utiliser le procédé limite les risques mais qu'un transfert important soit ainsi, un jour ou l'autre, imposé, sur lequel la Cour de cassation n'aura aucun contrôle puisqu'il s'agit à l'évidence de fait, et le débiteur ainsi spolié n'aura que le recours devant une juridiction supranationale alors que la constitutionnalité même du texte eût pu être discutée en amont. L'issue est fort probable et la meilleure doctrine a déjà commencé à examiner l'inconventionnalité éventuelle de cette disposition(33).

Les modes de couple font l'objet de la part du législateur français d'un activisme législatif souvent brouillon et éclaté sans qu'on vérifie sérieusement et régulièrement la conformité de ces textes aux normes constitutionnelles. L'insuffisance grave de notre contrôle éclate particulièrement dans ces matières où l'addition des intérêts individuels et des groupes de pression annihile souvent toute velléité de saisine du Conseil. On peut le regretter quand on compare l'efficacité des contrôles opérés dans d'autres pays et quand on sait l'importance souvent considérable pour le citoyen de ces dispositions qui pèsent sur sa vie quotidienne. C'est là un appui de l'opinion publique qui s'est transporté sur d'autres juridictions.

Le manque n'en est pas moins criant quant aux enfants.

II. L'enfant et le Conseil constitutionnel

Il n'y a aucune jurisprudence directe du Conseil constitutionnel sur le droit de l'enfance qu'il s'agisse du droit de la filiation ou du statut de l'enfant. Certes, sur ce dernier point, la décision bioéthique du 27 juillet 1994(34) a-t-elle implicitement atteint le statut de l'enfant à travers le statut de l'embryon mais, sauf à déduire que l'embryon serait déjà un enfant, ce que ne révèle pas la décision, la question est plus du domaine de la définition de la personne que de celle de la famille(35). À cela de nouveau on retrouve les mêmes explications. L'essentiel des textes sur le droit de la filiation date de 1972(36) et ne peut donc être critiqué. Sur le statut même de l'enfant au contraire beaucoup de textes sont intervenus, par exemple sur l'adoption que l'on réforme en moyenne tous les deux ou trois ans sous la pression des groupes intéressés, ou encore sur l'autorité parentale dont la dernière réforme date du 4 mars 2002. Or, malgré des angles d'attaque intéressants(37), les recours ne sont jamais exercés soit parce que la loi est au fond consensuelle, ce qui ne suffit pas à justifier cette exclusion, soit parce que, n'ayant suscité aucun engouement médiatique, elle est plus ou moins passée inaperçue. Pourtant, dans l'ensemble textuel passé, présent et peut-être à venir, il y aurait à dire sur la constitutionnalité de certains textes tant sur le principe de parité entre les sexes que sur le principe d'égalité entre les enfants. On ne prendra, bien entendu, que quelques exemples.

A. La parité entre les sexes et le statut de l'enfant

1) Le nom de l'enfant

On peut s'étonner particulièrement que les deux lois sur le nom, la première du 4 mars 2002, modifiée avant sa date d'application par la loi du 18 juin 2003, n'aient pas fait l'objet d'un recours. Il est vrai, qu'à l'une, présentée par la majorité d'hier, répond l'autre, présentée par celle du lendemain, les deux textes ayant en commun leur extrême médiocrité résultant d'une préparation insuffisante. Or l'article 311-21 du code civil(38) prévoit, entre autres dispositions, que si les parents n'ont pas exprimé leur choix par une déclaration conjointe à l'état civil, l'enfant prend le nom du premier parent qui a établi la filiation et, s'ils l'ont établie ensemble, le nom de son père. Il n'est pas nécessaire d'être grand juriste pour comprendre ce qui va se passer. La disposition qui ne figurait pas dans la première proposition a été introduite par le Sénat. Comme, selon toute vraisemblance, et l'expérience étrangère est là pour le montrer, les parents n'effectueront que rarement cette déclaration, la disposition, apparemment prévue à titre subsidiaire, deviendra encore pour longtemps la règle. Le nom du père a donc encore de belles décennies devant lui et on mesure de nouveau que le subsidiaire en droit est toujours chargé d'une signification.

Or le droit allemand fournit un précédent intéressant qui montre que cette disposition déférée à notre Conseil constitutionnel aurait pu avoir un avenir discuté(39). La préférence pour l'unicité du nom conjugal avait conduit le législateur allemand à décider en 1976 que, faute de choix au moment du mariage en faveur du nom de la femme, c'était le nom du mari qui serait retenu ce qui concernait finalement 90 % des cas. Or la Cour constitutionnelle fédérale le 5 mars 1991(40) devait considérer la disposition comme contraire à l'article 2, alinéa 3 de la loi fondamentale sur l'égalité des sexes ce qui contraignit le législateur à modifier la règle le 16 décembre 1993. Désormais le § 1617, alinéa 2 nouveau du BGB prévoit que le tribunal de la famille confère le pouvoir de décision, dans ce cas, à l'un ou l'autre des parents.

Qui pourrait soutenir que, dans le cas d'un contrôle de constitutionnalité qui malheureusement ne s'est pas produit, pareille disposition du droit français aurait été maintenue ? Gageons que tôt ou tard, si la loi doit s'appliquer un jour, la France risquera la condamnation devant la Cour EDH dont la jurisprudence est bien connue depuis l'arrêt Burghartz c/ Suisse du 22 février 1994(41). C'est bien ici une nouvelle occasion manquée(42).

2) La curiosité de l'action à fins de subsides

Créée en 1972 l'action à fins de subsides(43) ne peut être exercée que par la mère de l'enfant contre celui qui a eu des relations avec elle pendant la période de la conception. L'exclusivité ainsi donnée à l'origine à un sexe reposait sur l'idée que la mère est toujours certaine mais qu'au contraire la paternité restait, à l'époque, encore du domaine de l'hypothétique malgré des progrès déjà importants de la biologie. Or aucune de ces deux conditions qui justifiaient à elles seules cette importante dérogation à l'égalité des sexes n'est aujourd'hui intacte. La consécration imprudente en 1993 dans le code civil de la possibilité pour la mère de réclamer l'anonymat lors de l'accouchement(44) a détruit le premier argument : pourquoi, sous prétexte d'anonymat ne pourrait-on pas agir à fins de subsides contre la mère qui a accouché et pourquoi pourrait-elle s'échapper ? Inversement, à l'égard de l'homme, l'hypothèse est devenue tout à fait obsolète car il n'y a plus de cas où la paternité ne pourrait être prouvée. De quelque côté que l'on se tourne donc la dérogation à l'égalité des sexes n'a plus aucune justification. Certains auteurs ont toutefois soutenu que son utilité se serait déplacée au profit des mères, notamment de confession musulmane, dont le statut personnel exclut l'action en recherche de paternité et qui pourraient ainsi se replier sur cette action à fins de subsides. Mais il nous semble que le raisonnement pose alors un autre problème constitutionnel qui serait celui de conserver dans le code civil des Français des dispositions dont la finalité ne concernerait que les citoyens étrangers ? La solution est sans doute plutôt du côté du droit international privé dans la qualification de l'action en recherche de paternité et dans le jeu de l'exception d'ordre public.

B. Le principe d'égalité des enfants

1) L'égalité dans l'établissement de la filiation

a) L'enfant incestueux a-t-il droit à l'égalité ?

La réforme de la filiation qui est en cours mais dont l'avenir reste incertain ne devrait guère soulever de difficultés si un recours constitutionnel était dirigé contre le texte tel qu'il se dessine. L'égalité complète des enfants dans l'établissement de leur filiation devrait briller de tous ses feux comme c'est le cas dans la plupart des législations. Pourtant une grave question pourrait rester posée si l'article 334-10 du code civil devait rester tel qu'il est(45). L'article en question, dont le contenu date de 1972, interdit d'établir la filiation d'un enfant à l'égard d'un parent si, sa filiation étant établie à l'égard de l'autre, ce nouvel établissement ferait apparaître une filiation incestueuse. En pratique la solution constituait déjà un progrès sur le droit antérieur puisque, au moins selon certaines opinions, ce sont les deux liens de filiation qui devaient se trouver anéantis. En consacrant la divisibilité le législateur de 1972 accordait à l'enfant incestueux au moins une filiation. Si l'on n'était pas allé plus loin c'est qu'on estimait alors que l'intérêt de l'enfant ne commandait point que l'inceste apparût légalement.

Or la question vient de se reposer à la suite d'une reconnaissance effectuée par un père incestueux, alors que l'enfant avait déjà une filiation maternelle, reconnaissance annulée sur action du ministère public. Le père ayant ensuite, sans doute pour des raisons successorales et fiscales, cherché à adopter son enfant, l'adoption a été successivement refusée par le tribunal, puis accordée par la cour d'appel et l'arrêt a été cassé par la Cour de cassation(46) La question, au niveau où nous nous plaçons, reste désormais de savoir si l'atteinte à l'égalité de l'enfant est encore justifiée par son intérêt et le secret alors que, d'une part, en l'espèce, le mal était fait puisqu'il y avait eu reconnaissance et contentieux, et que d'autre part le père ne prétendait pas établir un lien biologique mais un simple lien d'adoption simple. L'adoption simple est d'ailleurs, dans des cas plus discrètement organisés, assez souvent utilisée dans une telle hypothèse(47). Si, comme c'est fort possible, la solution de l'article 334-10 était reprise dans la future loi nouvelle, on se prend à rêver d'un recours constitutionnel qui permettrait de préciser les fondements exacts et les limites d'une exception au principe d'égalité des enfants dans l'établissement de leur filiation qui, en dernière analyse, leur fait supporter la faute de leurs parents(48).

b) L'enfant a-t-il droit à une mère et à un père ?

Le législateur de 1993, là encore sans qu'aucun parlementaire ne s'en émeuve (mais le besoin d'enfants adoptifs était derrière), a cru bon d'introduire dans le code civil une disposition(49), fort peu répandue dans les autres droits, permettant à la mère de revendiquer l'anonymat lors de l'accouchement, ce qui excluait tout établissement de la maternité, alors que la France venait de signer la Convention sur les droits de l'enfant affirmant le droit de l'enfant à connaître ses origines. Les considérables difficultés issues du texte, et le risque d'une condamnation par la Cour EDH, ont amené à entrouvrir par la loi du 22 janvier 2002, au prix d'un compromis laborieux, une certaine conservation des renseignements pour permettre de revenir sur cette anonymat mais, en pratique, seulement si la mère le décide(50). Hélas les difficultés n'ont pas disparu pour autant et atteignent désormais les principes mêmes de notre droit. Comme on pouvait s'en douter la disparition de toute liaison entre l'enfant et la mère ne permet plus au premier d'être identifié puisque cette identification ne peut, par nature, être effectuée que par la mère, ce qui conduit désormais à priver l'enfant également d'une paternité puisqu'on ne peut pas le retrouver parmi les enfants qui sont nés ! La question est en train de se développer en jurisprudence de façon fulgurante(51). Elle met en cause plusieurs principes antagonistes, droit à la filiation, liberté de la femme(52), droit à la paternité... dont les contours auraient sans doute mérité mieux qu'une loi obtenue en grande partie par les lobbys de l'adoption et on regrettera de nouveau que l'occasion n'ait pas été saisie en 1993 d'offrir au Conseil constitutionnel l'occasion de se prononcer.

2) L'égalité dans le statut

La loi du 3 décembre 2001 sur les successions n'a pas non plus été déférée au Conseil et il est vrai qu'elle mettait, tardivement(53), notre droit en accord avec le principe d'égalité des enfants alors que la persistance des inégalités qui frappaient les enfants adultérins avait valu à la France une condamnation devant la Cour EDH dans le célèbre arrêt Mazurek.

Pourtant, pour un groupe de parlementaires attentifs et hostiles à la loi (il n'en manquait pas), l'attention aurait pu être attirée sur l'étrange situation résultant de la réforme sommaire de l'article 1527 du code civil. L'article, issu du lointain édit des secondes noces, visait à protéger les enfants issus d'un précédent mariage contre les largesses consenties par leur auteur à son second conjoint, au moyen d'avantages matrimoniaux, essentiellement une communauté universelle avec clause d'attribution. N'héritant point du second (ou xième) conjoint de leur auteur ces enfants non communs disposaient donc d'un moyen, très utilisé, pour faire réduire cet avantage lésionnaire. Pareil moyen n'était offert ni aux enfants naturels nés avant un mariage ni, a fortiori, aux enfants adultérins nés pendant une union bien qu'ils fussent susceptibles de supporter les mêmes inconvénients, ce qui avait conduit la Cour de cassation à leur offrir des moyens techniquement discutables. La loi de 2001, par souci d'égalité, leur a donc étendu le bénéfice de l'action. Mais, et là le respect du principe d'égalité devient paradoxal, qu'en était-il des enfants communs ? Rien n'est prévu en leur faveur sous l'argument classique que, même si le conjoint prend toute la communauté, ils en hériteront au final puisqu'ils sont enfants communs. Mais ce raisonnement est daté. Il repose sur l'hypothèse d'époux d'âge sensiblement égal, assez vieux tous les deux pour que les enfants communs attendent le décès du dernier vivant, ce qui en pratique se fait souvent. Mais quid du cas, assez fréquent, où la différence importante d'âge entre les époux met les enfants héritiers en présence d'un père ou d'une mère encore jeune, susceptible de se remarier et... de transmettre à un nouveau conjoint l'intégralité du patrimoine du premier ? La loi de 2001, en se contentant d'une extension du bénéfice de l'article 1527 aux enfants naturels, sans s'interroger sur la justification moderne de ces avantages matrimoniaux a, très paradoxalement, rendu la situation des enfants légitimes communs désormais pire que celle des enfants naturels ou non issus des deux époux, renversant l'inégalité ancienne pour la recréer de l'autre côté. On peut s'étonner que les groupes de députés ou de sénateurs, défenseurs de la légitimité, qui se sont polarisés sur les droits nouveaux de l'enfant adultérin (mais ne sont pas allés jusqu'à un recours constitutionnel), n'aient pas vu venir cet argument intéressant qui révèle bien la confusion qu'entretiennent ces principes souvent vagues d'égalité ou de parité. Faudra-t-il un nouveau recours d'un enfant légitime lésé par un parent survivant pour que la Cour EDH apprécie la législation française sur ce point ?

Bien d'autres exemples de l'opportunité d'un contrôle constitutionnel sur les lois de droit de la famille pourraient être fournis. Même si l'on met à part les lois anciennes, encore que le refus de réforme ou la négligence à réformer pourrait donner prise à discussion, on ne peut qu'être frappé, sans même s'interroger sur l'effet d'une ouverture aux recours individuels, par la relative indifférence des parlementaires ou des gouvernements à l'égard de ce type de texte. L'optimiste y verra le signe d'un consensus heureux sur les problèmes de société que recèle le droit de la famille, le pessimiste le signe d'une acculturation juridique croissante de la machine parlementaire(54). De toute façon, cette vision d'un État paternel traitant de la famille au moyen d'une législation émolliente ne répond pas au vrai problème. Incapable désormais d'une vision d'ensemble, le législateur français, saisi d'une frénésie de réformes, jette à bas des pans entiers de la législation familiale pour reconstruire sans souci de cohérence certaines parties que d'ailleurs il jette de nouveau à bas quelques années plus tard(55). D'où pourrait venir cette cohérence perdue sinon d'un contrôle sage des foucades et emballements législatifs et d'une vision générale et dotée de recul que seule désormais peut avoir une vraie juridiction. Faute de ce contrôle interne les normes organisatrices sont de plus en plus importées au risque d'une inadaptation flagrante dans de nombreux cas. Il est inutile de se lamenter sur le déclin du code civil à l'occasion de son bicentenaire, il n'est plus le code des principes généraux qu'il était et celui qu'on attendait n'est pas encore arrivé parce qu'il y a un manque dans notre pyramide normative. Il est peut-être trop tard, d'autres le feront pour nous.

(1) Il est probable que la décision « PACS » du 9 novembre 1999 est celle qui a le plus frappé les spécialistes de droit des personnes et de la famille puisqu'elle conduisait à réécrire une loi discutée.
(2) Il faut certainement saluer l'article précurseur, au moins auprès des privatistes, de F. Luchaire, « Les fondements constitutionnels du droit civil », RTD civ. 1982.248 et s. qui accorde une place importante au droit de la famille et l'ouvrage inégalé de N. Molfessis, Le Conseil constitutionnel et le droit privé, préf. M. Gobert, Bibl. de droit privé, LGDJ 1997.
(3) Sur le caractère désormais insuffisant de ce classement, v. J. Hauser, « Les difficultés de la recodification : les personnes », i_n Le code civil, Le livre du bicentenaire_, pp. 201 et s., Dalloz, Litec 2004.
(4) Les intitulés même des revues spécialisées traduisent cette incertitude. Si la revue Droit de la famille (Litec) inverse franchement l'ordre du code en y incluant le droit des personnes, la revue Personnes & famille (Lamy) (on notera le singulier pour les familles) affiche prudemment les deux branches sans respecter la hiérarchie du code et la dernière née, Actualité juridique Famille (Dalloz) procède à l'assimilation : l'affiche « famille » serait-elle plus vendable que l'affiche « personnes » ?
(5) Encore que la finalité familiale du mariage, si l'on entend le mot famille au sens classique, pourrait bien donner du fil à retordre à nos futurs interprètes si on l'ouvre aux couples homosexuels.
(6) L. Favoreu, L. Philip, Dalloz.
(7) Sur la filiation seule la décision « bioéthique » de 1994 a très vaguement statué sur les dispositions concernant la filiation, sans vraiment apporter d'éclaircissement (v. infra).
(8) Encore que commence à apparaître la question de la responsabilité du législateur pour n'avoir pas mis notre législation en conformité avec des normes supérieures.
(9) Il est assez caractéristique que la décision « bioéthique » du 27 juillet 1994 ait été très laconique sur les dispositions relatives à la filiation des articles 311-19 et 311-20 du code civil, pourtant assez extraordinaires, alors qu'il était répondu nettement sur l'absence de responsabilité du tiers donneur, question bien moins importante.
(10) Rémi Lenoir, Généalogie de la morale familiale, p. 483, Le Seuil 2003.
(11) Le vocabulaire sur ce point devient délicat. Le « démariage » que l'on doit à Carbonnier visait à comprendre sous un même vocable le divorce et la nullité du mariage. Par la suite il a fallu inventer « déconcubinage » pour la rupture du concubinage puis le dépacsage, encore non officiel, mais rien de permet de regrouper sous une même appellation ce qui serait la fin du « couple », notion moderne maintenant bien étudiée par les spécialistes, sauf à admettre « découplage »...
(12) V. en dernier lieu, E. Ralser, « La maladie du mariage blanc », Dr. famille 2004, chron. 4.
(13) Déc. n° 93-325 DC 3 août 1993 (JCP 1992.III.66372).
(14) V. encore, par e., Paris, 14 mars 2003, RTD civ. 2003.481, obs. Hauser. Il est bien entendu impossible de chiffrer ces détournements qui, par définition, sont peu visibles et on peut renvoyer dos à dos ceux qui en voient partout et ceux qui n'en voient nulle part... Le phénomène n'est pas niable et appelle une certaine vigilance.
(15) Déc. n° 2003-484 DC du 20 nov. 2003, v. notre commentaire RTD civ. 2004.65
(16) La liberté individuelle de 1993 est devenue la liberté personnelle en 2003, faut-il y voir plus qu'une différence de vocabulaire ? En tout cas on ne peut que s'en féliciter car la liberté du mariage engage forcément... deux personnes et paraît plus à sa place dans la liberté personnelle que dans la liberté individuelle puisque son but est bien l'union de deux personnes et non l'exercice de deux prérogatives individuelles.
(17) C'est nous qui soulignons
(18) Les institutions républicaines ont toujours vu le mariage avec sympathie, v. la survivance de la loi du 10 décembre 1850, mod. par la loi du 31 mars 1929, sur le mariage des indigents et prévoyant la réunion des pièces par l'officier d'état civil et la dispense de droits de timbre et d'enregistrement !
(19) Il est vrai que la Cour de cassation, persistait dans la même analyse étrange qu'elle paraît avoir abandonné récemment (Cass. civ. 1re, 28 oct. 2003, D. 204.21, note Gridel ; RTD civ. 2004.66, obs. Hauser).
(20) La comparaison, de ce point de vue, avec l'intervention de la Cour constitutionnelle allemande est éclairante.
(21) Quid de la compatibilité avec la jurisprudence du Conseil sur le droit à réparation et l'importance de l'article 1382 du code civil ? V. encore, Paris, 29 avr. 2003, RTD civ. 2003.483, obs. Hauser.
(22) La réforme du divorce devrait - enfin - faire disparaître ces dispositions.
(23) L'intervention obsolète du président de la République dans des problèmes d'état civil (comp. art. 164 du code civil sur les dispenses en matière de mariage), résidu d'un pouvoir régalien des rois, pourrait, dans son ensemble susciter discussion : quelle garantie de jugement, quelle garantie d'objectivité, quels recours, etc.?
(24) V. encore, Grenoble, 5 sept. 2001, RTD civ. 2002.272 et, sur l'ensemble, RTD civ. 1995.865, obs. Hauser. Les droits de la défense et le droit à un recours, déc. du 23 janv. 1987, Conseil de la concurrence et 17 janv. 1989, Conseil supérieur de l'audiovisuel, pourraient servir de base à la critique.
(25) Déc. 99-419 DC du 9 nov. 1999. Sur les commentaires, très nombreux, v. not. N. Molfessis, « La réécriture de la loi PACS par le Conseil constitutionnel », JCP 2000.I.210 ; Ph. Blacher et J.-B. Seubé, « Le PACS à l'épreuve de la Constitution », RD publ. 2000.204.
(26) V. sur l'ensemble, « La contractualisation de la famille » sous la dir. de D. Fenouillet, P. de Vareilles-Sommières, Economica 2001.
(27) Pour la Cour de Douai, 27 févr. 2003, le PACS n'est pas une affaire familiale et le juge aux affaires familiales est donc incompétent pour juger de sa dissolution qui dépend du juge du contrat, soit le tribunal de grande instance (AJF 2003.313 ; RTD civ. 2003.684, obs. Hauser). Le Conseil d'État, quant à lui, dénie la compétence administrative en recours contre le refus du greffier d'enregistrer (23 mai 2003, D. 2003.1666 et 2004.295 ; RJPF 2003-9/33 ; RTD civ. 2003.685, obs. Hauser) sans préciser si c'est alors une opération d'état civil ?
(28) Le Conseil d'État (avis du 9 juill. 2003) ne semble pas vouloir s'embarrasser de nuances en affirmant que la dette de trop perçu d'aide personnalisée au logement pesant sur un des concubins pèse solidairement sur l'autre qu'il soit concubin ordinaire ou pacsé (RTD civ. 2004.69, obs. Hauser).
(29) V. pour une comparaison, la décision du 16 février 2001 de la Cour constitutionnelle allemande à propos de la loi sur la communauté de vie, BGBL I, p. 266 ; sur quoi, R. Arnold, RIDC 2003.679.
(30) Sur la question, v. A. Derrien, Les juges français de la constitutionnalité, Étude sur la construction d'un système contentieux, thèse Bordeaux 2000, spéc. pp. 236 et s.
(31) L'abattement prévu entre frères et soeurs cohabitant, célibataires, veufs ou divorcés, âgés de plus de 50 ans ne s'étend pas aux autres cas de parenté (CGI, art. 388-1). Dans la décision PACS le Conseil a rapidement glissé sur cette contradiction en invoquant la légitime prohibition de l'inceste mais n'était-ce pas inverser le problème ?
(32) Encore que le consensus ne devrait pas dispenser de vérifier la constitutionnalité, celle-ci n'étant pas disponible, même après consentement mutuel.
(33) V. ainsi, J.-P. Marguenaud, « Les conséquences patrimoniales du divorce au regard de la Convention EDH », Defrénois 2003, pp. 1596 , spéc. pp. 1606.
(34) Déc. n° 94-343-344 DC, Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, préc., n° 47, p. 854.
(35) La réponse sur l'anonymat des donneurs de gamètes aurait mérité plus de développements alors que la question divise beaucoup les différentes législations, v. ainsi, F. Furkel, « Le droit à la connaissance de ses origines en RFA », RIDC 1997.931.
(36) Sauf la preuve de la filiation naturelle par la possession d'état qui date de 1982.
(37) Les dispositions successives sur l'adoption internationale auraient mérité un examen attentif...
(38) Théoriquement applicable au 1er janvier 2005... si elle n'est pas abrogée auparavant !
(39) F. Furkel, « La réglementation du nom en République fédérale d'Allemagne », in L'identité de la personne humaine, sous la dir. de J. Pousson-Petit, pp. 671 , Bruylant 2002.
(40) BverfG, 5 mars 1991, BverfGE 84.9 et s.
(41) JCP 1995.I.3823, n° 31, chron. Sudre ; RTD civ. 1994.563, obs. Hauser.
(42) Dans l'hypothèse parfois soulevée d'un droit constitutionnel européen commun, la jurisprudence constitutionnelle française risque de ne pas supporter la comparaison sur le plan, par exemple, du principe de libre développement de la personnalité, v. sur ce point X. Boy, RIDC 2003.123.
(43) Art. 342 , c. civ.
(44) V. infra.
(45) Ce qui n'est pas exclu car les opinions paraissent très opposées et très divisées.
(46) Cass. civ. 1re, 6 janv. 2004, D. 2004.262, concl. Sainte-Rose, note Vigneau ; RTD civ. 2004.75, obs. Hauser. Il convient de remarquer que la cassation, qui aurait pu être opérée sans renvoi, puisqu'il n'y avait plus rien à juger, a pourtant été suivie d'un renvoi devant la cour de Paris. La cassation sans renvoi n'est certes qu'une faculté mais elle est souvent utilisée et si elle ne l'a pas été ici c'est sans doute que la Cour a voulu ouvrir une possibilité de rediscussion.
(47) J. Hauser, « Le droit de travers », in Drôles de Droits, Mélanges Alfandari, Dalloz 2000. L'intérêt de l'adoption est alors, sous certaines conditions, d'appliquer à la succession du parent incestueux mais devenu adoptif, les barèmes en ligne directe qui sont beaucoup plus intéressants que les barèmes entre oncle et neveu par exemple.
(48) Les législations européennes sont variables : plusieurs permettent l'établissement de la filiation sans réserve (Allemagne, Autriche, Grèce, Portugal, Suisse), d'autres l'interdisent globalement, d'autres enfin, comme le droit français, acceptent de diviser le lien, sur quoi, F. Granet, RTD eur. 1997.643.
(49) Qui n'existait que dans le code de la santé publique à titre de mesure de protection sociale.
(50) Ce qui a permis à la France, d'éviter, de justesse, la condamnation, dans l'affaire Odièvre, CEDH, 13 févr. 2003, JCP 2003.II.10049, note Gouttenoire ; RTD civ. 2003.276, obs. Hauser.
(51) Le jugement du TGI de Nancy du 16 mai 2003, RTD civ. 2003.488, obs. Hauser a été réformé par la Cour de Nancy mais la question paraît devoir se reposer dans d'autres procès en cours (v. encore Riom, 16 déc. 2003, RTD civ. 2004.74, obs. Hauser).
(52) Poser le problème en termes de « liberté de la femme », est douteux toute l'histoire de la filiation ayant consisté à faire régresser la liberté des géniteurs - jadis essentiellement l'homme - pour faire progresser le droit de l'enfant à des parents. Il est paradoxal que, sous la pression du droit des femmes, on soutienne désormais un tel droit de « retrait » de la femme : que penserait-on si, hic et nunc, les associations d'homme réclamait le droit de procréer sous X... ruinant ainsi de siècles d'efforts pour les responsabiliser (1912, 1993)? De plus la mère, si elle est libre d'établir ou non la filiation, n'est pas libre d'identifier ou non l'enfant car cette fois ce n'est plus une question de droit mais une question de nature ce qui explique que l'accouchement sous X... apparaisse extraordinaire à de nombreux juristes de pays voisins. Qu'en penserait le Conseil constitutionnel saisi d'un recours ?
(53) La Cour constitutionnelle fédérale allemande s'était prononcée le 3 nov. 1981 sur des dispositions réduisant le droit des enfants adultérins en confirmant la constitutionnalité de ces dispositions (Fam. RZ 1982.136) mais l'Erbrechtsgleichstellungsgesetz du 25 septembre 1997 a supprimé ces discriminations.
(54) Question naïve ? Quel groupe parlementaire possède des juristes assez pointus, en droit de la famille, pour pouvoir apprécier l'opportunité d'un recours constitutionnel ?
(55) L'autorité parentale est un exemple assez effrayant : 1970, 1975, 1985, 1987, 1993, 2002 et encore en ne comptant que les textes principaux !