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La QPC, le Conseil d'État et la Cour de cassation

Agnès ROBLOT-TROIZIER - Professeur à l'Université d'Évry-Val d'Essonne, Centre Léon Duguit

Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 40 (Dossier : Le Conseil constitutionnel : trois ans de QPC) - juin 2013

Résumé : La QPC tend à produire des effets paradoxaux au regard des choix fondamentaux opéré par le pouvoir constituant en 2008. Alors que le dispositif de la QPC place les juridictions suprêmes sous le regard du Conseil constitutionnel, il a pourtant pour effet de renforcer le Conseil d'État et la Cour de cassation en tant que juridictions suprêmes. Parallèlement, bien que la réforme de 2008 ait écarté l'option d'un contrôle diffus de constitutionnalité des lois, en confiant au seul Conseil constitutionnel le pouvoir d'abroger la loi inconstitutionnelle, il est possible d'affirmer aujourd'hui que ce Conseil est un juge constitutionnel d'exception tandis que Conseil d'État et Cour de cassation sont devenus juges constitutionnels de droit commun.


Après trois ans de QPC, il est évident et banal d'affirmer que cette nouvelle voie de droit a modifié l'office du juge : celui du Conseil constitutionnel certes, mais également celui des juridictions administratives et judiciaires, particulièrement des juridictions suprêmes des deux ordres. Cette évolution était attendue et, à l'heure de la mise en œuvre de l'article 61-1 de la Constitution, chacun avait conscience qu'une révolution allait se produire dans le paysage juridictionnel français. Pourtant, le décalage qui existe aujourd'hui entre les caractéristiques fondamentales de la réforme et ses effets sur l'office des juridictions est frappant.

Le dispositif mis en place par la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008 et la loi organique du 10 décembre 2009 relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution retient deux traits fondamentaux quant aux rôles des juges intervenant dans la procédure. D'une part, le constituant a souhaité maintenir dans notre système juridique le principe d'un contrôle de constitutionnalité concentré : le contrôle de la constitutionnalité des lois est l'apanage du Conseil constitutionnel qui seul peut déclarer que la loi est contraire à la Constitution. D'autre part, le constituant n'a pas souhaité que le Conseil constitutionnel puisse être saisi directement par les justiciables : les questions de constitutionnalité doivent être soulevées devant les juridictions de droit commun et transiter par le Conseil d'État ou la Cour de cassation qui seuls décident s'il y a lieu de les renvoyer au Conseil constitutionnel.

Au regard de ces choix fondamentaux, on peut identifier deux écueils : la transformation du Conseil d'État et de la Cour de cassation en juridictions constitutionnelles suprêmes et la mutation du Conseil constitutionnel en une cour suprême sur les questions de constitutionnalité. À cet égard, un juste équilibre devait être trouvé tant dans le filtrage des QPC, entre le « bouchon »(1) et la « passoire », que dans les relations inter-juridictions, entre l'« impérialisme » et l'« entente cordiale ». Si quelques tensions ont pu se faire jour dans les premiers mois suivant l'entrée en vigueur de la QPC, tous saluent aujourd'hui son succès(2).

C'est que les trois juridictions ont su développer un nouveau mode de collaboration mutuelle au prix d'une évolution, certes inévitable, mais notable, de leur office. Cette évolution met en lumière un double paradoxe.

Alors que, par construction, le dispositif de la QPC place les juridictions suprêmes des deux ordres sous le regard, si ce n'est sous la surveillance, du Conseil constitutionnel, il a pourtant pour effet de renforcer le Conseil d'État et la Cour de cassation en tant que juridictions suprêmes. Tandis que la doctrine soulignait hier les réticences, voire les résistances(3), des juridictions suprêmes, elle tend aussi à mettre en exergue le raffermissement des cours suprêmes s'agissant des questions de constitutionnalité(4).

De même, bien que la réforme de 2008 ait écarté l'option d'un contrôle diffus de constitutionnalité des lois exercé par les juridictions ordinaires et confirmé que le contrôle de constitutionnalité des lois, à la différence du contrôle de leur conventionnalité, est confié à la juridiction spéciale qu'est le Conseil constitutionnel, les juridictions suprêmes administratives et judiciaires sont devenues des juridictions constitutionnelles de droit commun. Sur ce point également le discours doctrinal évolue. Au cours de la première année de la QPC, les juridictions suprêmes étaient communément qualifiées de « juge constitutionnel négatif » afin de mettre en évidence le contrôle de constitutionnalité qu'elles exercent en déclarant la loi conforme à la Constitution, à défaut de pouvoir affirmer l'inverse. Après trois ans de QPC, elles sont qualifiées tantôt de « juges constitutionnels de droit commun »(5), tantôt de « juges de droit commun de l'application de la Constitution »(6).

À la question de savoir si la QPC, par son mécanisme, place les juridictions suprêmes sous la surveillance du Conseil constitutionnel, voire sous une forme de dépendance, on est tenté de répondre qu'au contraire les juridictions suprêmes en sortent renforcées tant comme juridictions suprêmes que comme juridictions constitutionnelles.

I – Des juridictions suprêmes surveillées mais raffermies

Les interactions entre le Conseil constitutionnel et les juridictions suprêmes sont consubstantielles à la procédure mise en place par l'article 61-1 de la Constitution et par la loi organique qui le met en œuvre. Bien que l'exercice de leur mission de filtrage soit placé sous la surveillance du Conseil constitutionnel, les cours suprêmes conservent la maîtrise des renvois des QPC et servent de relais à une application des lois conforme à la Constitution. Loin d'être serviles, Conseil d'État et Cour de cassation sont renforcés dans leur office de juges suprêmes.

A - Un filtrage maîtrisé par les cours suprêmes sous la surveillance du Conseil constitutionnel

Le dispositif de la QPC n'est pas celui d'un double mais d'un triple filtrage des questions de constitutionnalité : à celui exercé par la juridiction saisie du litige s'ajoute certes celui de la juridiction suprême dont elle dépend, mais aussi celui du Conseil constitutionnel qui appréciera s'il y a lieu de statuer. Toutefois, le contrôle par le Conseil du filtrage effectué par les cours suprêmes est doublement limité. D'abord, les décisions de non-renvoi ne sont susceptibles d'aucun recours, de sorte que, évidemment, il ne pourra apprécier le filtrage des QPC qu'à condition d'être saisi. Ensuite, le Conseil constitutionnel se cantonne à un rôle négatif de limitation du champ de la question de constitutionnalité : certes, le Conseil peut soulever d'office d'autres moyens d'inconstitutionnalité, mais son contrôle ne peut porter que sur les dispositions législatives transmises.

Rouage essentiel de la procédure de la QPC, le Conseil d'État et la Cour de cassation remplissent pleinement leur office de juridictions suprêmes en précisant les règles procédurales d'examen des QPC : le renvoi de la QPC dépend de la recevabilité du recours(7), du respect des règles de dépôt(8) ou de forme du mémoire QPC(9) ; il suppose que la requête ne se trouve pas privée d'objet(10) ; il s'accompagne, le cas échéant, d'un renvoi préjudiciel à la Cour de justice de l'Union européenne(11), etc. Ainsi, parce qu'elle n'est qu'un moyen soulevé « à l'occasion d'une instance en cours devant une juridiction »(12), la QPC ne saurait être, avant son renvoi au Conseil constitutionnel, déconnectée du litige dans lequel elle prend corps. Mais cette exigence sert parfois une motivation contestable du non-renvoi de QPC(13).

Incompétent pour juger du rejet d'une QPC par les cours suprêmes quelle qu'en soit la raison, le Conseil constitutionnel joue un rôle essentiellement négatif lorsqu'il apprécie la recevabilité des QPC dont il est saisi. En effet, l'appréciation de la recevabilité des questions est nécessairement subordonnée au contenu de la décision de renvoi. Le Conseil constitutionnel pourra considérer, contrairement aux juridictions suprêmes, que la norme constitutionnelle invoquée ne constitue pas « un droit ou une liberté que la Constitution garantit »(14), que la disposition contestée n'a pas un caractère législatif (15) ou qu'elle a déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif de l'une de ses décisions en écartant notamment le changement de circonstances pris en compte par la juridiction de renvoi(16).

En définitive, parmi les critères de renvoi des QPC appréciés par les cours suprêmes, seul celui de l'applicabilité de la loi au litige semblait échapper au contrôle du Conseil constitutionnel. La première décision QPC était sur ce point parfaitement claire : « il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, de remettre en cause la décision par laquelle le Conseil d'État ou la Cour de cassation a jugé (...) qu'une disposition était ou non applicable au litige ou à la procédure ou constituait ou non le fondement des poursuites »(17).

Or les juridictions suprêmes ont adopté une conception souple de cette notion, particulièrement le Conseil d'État qui, non seulement opte pour une conception large de la notion de « litige » couvrant les différents stades de la procédure contentieuse(18), mais encore y inclut une disposition législative « non dénuée de rapport avec les termes du litige » en estimant que la condition d'applicabilité au litige est satisfaite alors que la disposition législative ne constitue pas le fondement de l'acte administratif attaqué(19). La Cour de cassation semble plus restrictive. Ainsi a-t-elle jugé qu'une disposition législative n'est pas applicable au litige si le demandeur soulève le grief de l'incompétence négative qui porte, selon la Cour, plus sur des dispositions règlementaires que sur la disposition législative elle-même(20) ou lorsque l'applicabilité au litige de la disposition législative « n'est que résiduelle »(21). Par ailleurs, les deux juridictions suprêmes ne semblent pas insensibles à l'effet utile de la QPC pour apprécier l'applicabilité au litige de la disposition législative contestée(22), la Cour de cassation allant jusqu'à se fonder sur l'intérêt qu'a le demandeur à contester la constitutionnalité de la loi(23).

Quoi qu'il en soit, le refus du Conseil constitutionnel de contrôler l'applicabilité de la loi au litige a laissé place à une jurisprudence plus nuancée. Certes, le principe de ce refus a été rappelé(24), mais plusieurs décisions QPC témoignent de ce que le Conseil peut porter un regard sur l'applicabilité de la loi au litige. Le Conseil constitutionnel ne s'interdit pas de délimiter le champ de sa saisine, c'est-à-dire de circonscrire l'objet de la QPC en fonction des moyens invoqués à l'appui de leur inconstitutionnalité(25). Ce « recentrage » des QPC en fonction des griefs d'inconstitutionnalité s'explique par la « prudence » du Conseil, dont les décisions ont un effet erga omnes, qui ne souhaite pas « fermer à l'avance la porte à des QPC futures sur d'autres dispositions »(26). Que les QPC aient été renvoyées par le Conseil d'État ou par la Cour de cassation, il en a fait usage à maintes reprises(27). De la sorte, le Conseil constitutionnel invite les cours suprêmes à circonscrire plus fermement les dispositions législatives faisant l'objet des QPC qu'elles renvoient(28) ; autrement dit, il semble les inciter à opter pour une conception plus restrictive de la notion de disposition législative applicable au litige.

Si la confrontation des griefs d'inconstitutionnalité avec les dispositions législatives contestées ne conduit pas le Conseil constitutionnel à s'intéresser au litige en tant que tel, il en est autrement lorsqu'il s'assure que la disposition législative est bien, dans la rédaction qui lui est renvoyée, applicable au litige. Il est en effet arrivé au Conseil de procéder à une substitution de normes législatives en tenant compte du moment où le litige est né : dans sa décision no 2012-280 QPC du 12 octobre 2012, le Conseil, qui était saisi du contrôle de la constitutionnalité d'une disposition du code de commerce « dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 13 novembre 2008 », affirme que « la question prioritaire de constitutionnalité doit être regardée comme portant sur les dispositions applicables au litige à l'occasion duquel elle a été posée » et en déduit qu'il est saisi de la disposition « dans sa rédaction issue de l'ordonnance de la loi du 23 juillet 2010 »(29). Le Conseil ne s'est donc pas contenté de répondre à la question de constitutionnalité telle qu'elle lui était renvoyée, il a identifié la rédaction de la loi applicable au litige en fonction des données de celui-ci ; il détermine donc de manière autonome la norme législative applicable au litige, sans s'en tenir à l'appréciation faite par la juridiction suprême de renvoi.

De la même manière, il détermine l'interprétation de la loi qu'il convient de retenir sans toutefois négliger celle préalablement dégagée par les juridictions suprêmes.

B - Une interprétation de la loi tantôt subie tantôt sacralisée

Le pouvoir d'interprétation de la loi du Conseil constitutionnel implique qu'il dispose d'un droit de regard, si ce n'est une mainmise, sur la jurisprudence des juridictions suprêmes. Cette emprise apparaît à chaque fois qu'il décide d'assortir sa déclaration de constitutionnalité d'une réserve d'interprétation. Ce pouvoir n'est pas nouveau et, avant la mise en œuvre de la QPC, les réserves d'interprétation étaient autant de directives adressées à l'ensemble des autorités administratives et judiciaires, dès lors que le Conseil constitutionnel indique ainsi la manière dont il convient d'appliquer la loi. L'instauration d'un contrôle a posteriori n'a fait qu'accroître le processus et, à certains égards, il renforce le rôle des juridictions suprêmes dans la mesure où elles deviennent les gardiennes d'une interprétation de la loi constitutionnellement conforme. Le Conseil constitutionnel n'ayant que peu de moyens de contrôler l'application de sa jurisprudence par les autorités administratives et judiciaires, il doit s'en remettre à la collaboration du Conseil d'État et de la Cour de cassation qui, en tant que juridictions suprêmes, pourront censurer une application de la loi non conforme à la Constitution.

Le Conseil constitutionnel s'en remet également aux juridictions suprêmes à chaque fois qu'il utilise leur jurisprudence pour justifier de la constitutionnalité de la loi, de sorte que la constitutionnalité de la loi repose en partie sur l'œuvre jurisprudentielle des cours suprêmes. Ainsi le Conseil constitutionnel a pris en considération la protection du droit de propriété qui, en vertu d'une jurisprudence constante du Conseil d'État, oblige à réparer les dommages éventuellement causés aux propriétés privées lors d'opérations réalisées pour l'exécution de travaux publics en application de la loi du 29 décembre 1892(30). La décision no 2012-210 QPC est à cet égard plus explicite : le Conseil constitutionnel se réfère expressément à la jurisprudence constante du Conseil d'État qui complète le silence de la loi quant aux motifs pour lesquels un maire peut, à titre de sanction, faire l'objet d'une révocation ou d'une suspension(31). De manière pour le moins surprenante au regard du principe de légalité des délits et des peines qui est applicable aux sanctions administratives, le Conseil constitutionnel estime que la jurisprudence administrative peut pallier les carences du législateur. Même en matière pénale, le juge constitutionnel considère que la jurisprudence de la Cour de cassation est de nature à combler l'imprécision des dispositions législatives en dépit du principe constitutionnel de légalité des délits et des peines : aussi le Conseil constitutionnel a-t-il considéré que la notion de « tradition locale ininterrompue », qui permet l'organisation de courses de taureaux et de corridas par dérogation au délit de sévices graves et actes de cruautés envers les animaux(32), est suffisamment précise et non équivoque dans la mesure où il existe une jurisprudence de la Cour de cassation, pourtant fluctuante, permettant d'identifier les critères de reconnaissance d'une telle tradition(33).

Si la prise en compte de la jurisprudence des juridictions suprêmes dans le contrôle de constitutionnalité, qui témoigne de la constitutionnalisation du « droit vivant » chère à la doctrine italienne, est inévitable lorsqu'est instauré un contrôle a posteriori des lois, il faut néanmoins relever qu'elle peut conduire à une forme de démission du Conseil constitutionnel. Dès lors que, pour celui-ci, la jurisprudence du Conseil d'État et de la Cour de cassation est de nature à sauver la loi du grief d'inconstitutionnalité, cette jurisprudence conditionne la constitutionnalité de la loi. Se pose alors la question de l'éventuelle évolution de la jurisprudence des juridictions administratives et judiciaires : se trouve-t-elle figée ou est-elle susceptible d'évoluer ? Dans la mesure où une loi déjà déclarée conforme à la Constitution ne peut, sauf changement des circonstances, faire l'objet d'une nouvelle QPC, les juridictions suprêmes qui assurent le filtrage des QPC peuvent aisément refuser de transmettre une QPC portant sur la disposition législative dont l'interprétation a évolué en ne qualifiant pas cette évolution de « changement de circonstances ». Dès lors que l'inconstitutionnalité d'une loi est présumée être palliée par l'application qui en est faite par le juge, les cours suprêmes se trouvent raffermies dans leur mission.

Elles deviennent les gardiennes de la constitutionnalité de la loi à plusieurs égards : d'abord parce que repose sur elles la mission de vérifier que les réserves d'interprétation des lois formulées par le Conseil constitutionnel sont correctement prises en compte par les juridictions inférieures ; ensuite parce que, la constitutionnalité de la loi étant conditionnée à leurs propres jurisprudences, elles sont ainsi invitées par le Conseil à les maintenir en l'état et donc à vérifier que les juridictions de fond ne s'en écartent pas. Cette invitation les incite également à considérer que leur jurisprudence suffit à pallier l'inconstitutionnalité potentielle d'une loi et, à ce titre, à juger non sérieuses les QPC – nombreuses – portant sur des dispositions législatives dont l'interprétation a fait naître une jurisprudence constante. De la sorte, les juridictions suprêmes se muent en juridictions constitutionnelles de droit commun.

II – Des juges constitutionnels partiels mais de droit commun

Alors que le pouvoir constituant a clairement fait le choix d'un contrôle de constitutionnalité a posteriori concentré dans les mains du Conseil constitutionnel, la procédure de la QPC transforme pourtant les juridictions administratives et judiciaires en juges constitutionnels de droit commun. Bien que Conseil d'État et Cour de cassation ne puissent déclarer la loi contraire aux droits et libertés constitutionnellement garantis, elles peuvent interpréter les normes constitutionnelles, interpréter la loi conformément à la Constitution et déclarer la loi conforme aux droits et libertés constitutionnellement garantis.

A - L'appropriation de la Constitution par les cours suprêmes

Opérant le filtrage des QPC, les deux cours suprêmes apprécient, selon les termes de la loi organique du 10 décembre 2009, le caractère « sérieux » ou « nouveau » de la question de constitutionnalité soulevée devant elles. Cette appréciation les conduit à être juges constitutionnels de droit commun, tandis que le Conseil constitutionnel est un juge constitutionnel d'exception.

L'analyse des décisions de non-renvoi de QPC montre que la notion de « question sérieuse » tend subrepticement à devenir synonyme de « difficulté sérieuse »(34). Bien sûr, cette dernière expression, qui est plus restrictive, n'est pas employée par les cours suprêmes, mais nombre de décisions en témoignent.

En premier lieu, le Conseil d'État et la Cour de cassation s'appuient parfois sur une « théorie de la Constitution claire »(35) au terme de laquelle la question n'est pas jugée sérieuse parce qu'elle peut être réglée sans difficulté par la cour suprême qui, considérant que la Constitution est dépourvue de toute d'ambiguïté, tranchera dans le sens de la conformité de la loi aux droits et libertés constitutionnellement garantis. La « théorie de la Constitution claire », comme sa cousine relative au droit communautaire, permet aux juges de se soustraire à une obligation de renvois préjudiciels et constitue un acte de résistance ou d'émancipation à l'égard d'une juridiction, ici le Conseil constitutionnel, à laquelle les juridictions suprêmes ne souhaitent pas faire allégeance. Celles-ci déterminent ainsi elles-mêmes le sens des dispositions constitutionnelles, tantôt pour refuser la qualification de « droits et libertés que la Constitution garantit »(36), tantôt pour en délimiter la portée(37). Dans cette opération interprétative, les juridictions suprêmes peuvent s'inspirer de la jurisprudence du Conseil constitutionnel(38) ; elles peuvent également s'inspirer de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme compte tenu des fortes similitudes entre le droit européen et le droit constitutionnel.

En deuxième lieu, opérant un contrôle au fond de la constitutionnalité de la disposition législative par rapport à la norme constitutionnelle invoquée, les deux cours suprêmes apprécient en réalité si la question soulève une difficulté sérieuse. Ainsi en est-il lorsqu'elles contrôlent la proportionnalité de l'atteinte aux droits et libertés constitutionnels(39) ou lorsqu'elles estiment que cette atteinte est justifiée(40). En écartant une QPC comme non sérieuse au motif soit que la disposition législative ne porte pas une atteinte excessive aux droits et libertés constitutionnellement garantis, soit qu'elle est suffisamment justifiée au regard de l'objectif d'intérêt général, les juridictions suprêmes opèrent un contrôle de constitutionnalité poussé et substituent leur appréciation à celle que pourrait faire le Conseil constitutionnel. Sans critiquer cette évolution – sans doute inévitable et que l'on jugera même souhaitable –, il faut néanmoins relever que le contrôle de constitutionnalité des lois a posteriori n'est pas un contrôle purement concentré. Il n'est pas pour autant un véritable contrôle diffus dans la mesure où, à quelques exceptions près(41), les juridictions inférieures n'exercent pas un contrôle poussé du caractère sérieux de la question de constitutionnalité. Selon la loi organique de 2009 en effet, outre les conditions d'applicabilité de la disposition législative au litige et d'absence de déclaration préalable de constitutionnalité, il suffit que la question de constitutionnalité ne soit pas « dépourvue de caractère sérieux » pour qu'elle soit transmise par les juridictions inférieures. L'exigence est peu discriminante devant les juridictions inférieures, alors qu'elle suppose l'examen de la pertinence de la question de constitutionnalité devant les cours suprêmes(42).

De la sorte, c'est bien sur les deux cours suprêmes que pèse la mission d'être juge constitutionnel de droit commun ; de fait, en renvoyant au Conseil constitutionnel les questions de constitutionnalité qui posent une difficulté sérieuse, celui-ci devient une juridiction constitutionnelle d'exception.

L'appréciation du caractère nouveau de la question de constitutionnalité, condition alternative devant le Conseil d'État et la Cour de cassation, connaît également une évolution. La notion de « question nouvelle » impliquant le renvoi de la QPC a été explicitée dans la décision du 3 décembre 2009 relative à la loi organique mettant en œuvre l'article 61-1 de la Constitution : le critère de la nouveauté de la question impose que « le Conseil constitutionnel soit saisi de l'interprétation de toute disposition constitutionnelle dont il n'a pas encore eu l'occasion de faire application » et permet, par ailleurs, au Conseil d'État et à la Cour de cassation « d'apprécier l'intérêt de [le] saisir »(43). Fortes de cette interprétation, les cours suprêmes apprécient l'intérêt de saisir le Conseil constitutionnel et lui transmettent les QPC qui posent des questions de principe : soit que le Conseil ne se soit pas encore prononcé sur le sens d'une disposition constitutionnelle(44), soit qu'il n'ait pas encore consacré un principe constitutionnel dont les juridictions suprêmes estiment qu'il pourrait trouver place parmi les droits et libertés constitutionnellement garantis(45), soit que la QPC porte sur une question qu'il est intéressant de voir trancher par le Conseil constitutionnel(46).

En d'autres termes, si le caractère sérieux de la question de constitutionnalité conduit à une appréciation de la pertinence de la question, le caractère nouveau invite à considérer son opportunité, de sorte que le Conseil constitutionnel se mue en une juridiction constitutionnelle d'exception. Or n'est ni pertinente, ni opportune la question de constitutionalité qui peut être résolue par le Conseil d'État ou la Cour de cassation grâce à une interprétation conforme de la loi.

B - L'interprétation conforme de la loi par les cours suprêmes

Le filtrage des QPC opéré par les deux cours suprêmes leur permet de retenir de la loi un sens qui soit conforme à la Constitution et ainsi juger la QPC non sérieuse. L'interprétation conforme est un outil très efficace, à condition que n'existe pas de contradiction flagrante entre les termes de la disposition législative et ceux de la Constitution. Usant de cette technique, Conseil d'État et Cour de cassation se muent, là encore, en juges constitutionnels : par « réserve d'interprétation à usage inversé »(47), elles peuvent interpréter la disposition législative contestée dans un sens qu'elles estiment conforme à la Constitution pour juger, dans le même temps, que la question de constitutionnalité n'est pas sérieuse et qu'il n'y a donc pas lieu à renvoi de la QPC. Pour ce faire, elles peuvent s'inspirer de la jurisprudence constitutionnelle(48) comme des exigences de la Cour européenne des droits de l'homme(49) et proposer des interprétations neutralisantes, constructives, voire correctives, de la loi à l'image de celles que formule le Conseil constitutionnel.

De telles « réserves à usage inversé » sont d'ailleurs favorisées par la jurisprudence de ce dernier en vertu de laquelle il peut être saisi de la constitutionnalité des lois telles qu'interprétées de manière constante par les juridictions administratives et judiciaires. En effet, dans la mesure où le Conseil constitutionnel affirme que tout justiciable a le « droit » de contester « la portée effective d'une interprétation jurisprudentielle constante »(50), il peut être conduit à porter une appréciation sur la jurisprudence des juridictions suprêmes. Or, à l'évidence, les deux cours suprêmes préféreront faire évoluer leur interprétation de la loi si elles doutent de sa parfaite conformité aux droits et libertés, tels qu'identifiés par la jurisprudence du Conseil constitutionnel, plutôt que de voir celui-ci déclarer qu'une jurisprudence constante du Conseil d'État ou de la Cour de cassation est contraire aux droits et libertés constitutionnellement garantis(51). Il leur suffit d'adapter leur interprétation de la loi pour la rendre conforme à la Constitution et de refuser le renvoi de la QPC(52). Non seulement les cours suprêmes évitent ainsi le risque d'une censure de leur jurisprudence par le Conseil constitutionnel, mais encore elles gardent la maîtrise de l'interprétation de la loi, sans laisser à celui-ci le soin de déterminer la manière dont la loi doit être appliquée.

Loin de faire du Conseil constitutionnel une cour suprême, le contrôle des interprétations jurisprudentielles du Conseil d'État et de la Cour de cassation a en définitive pour effet de renforcer leur office de juges constitutionnels suprêmes. Car l'interprétation de la loi retenue dans une décision de non-renvoi de QPC sera ensuite prise en compte, bien qu'elle ne bénéficie que d'une autorité relative de chose jugée(53), par les juridictions de fond(54) : d'abord, pour résoudre le litige qui a donné lieu à la QPC en faisant application de la loi telle qu'interprétée par la cour suprême ; ensuite, pour résoudre d'autres litiges en considérant que cette nouvelle interprétation de la loi s'impose dès lors que pourraient être censurés les jugements des juridictions de fond qui s'en éloignent. Aussi les deux cours suprêmes utilisent-elles le « filtre comme un outil d'évolution de leur jurisprudence »(55) au service d'un meilleur respect des droits et libertés constitutionnellement garantis. En retour, on peut imaginer que les juridictions inférieures utilisent la QPC pour tenter de faire évoluer la jurisprudence constante de la cour suprême dont elles dépendent, la célérité de la procédure permettant d'obtenir rapidement une nouvelle interprétation législative.

À tous égards et malgré la volonté du pouvoir constituant de confier au Conseil constitutionnel le contrôle a posteriori de la constitutionnalité des lois, la question prioritaire de constitutionnalité a fait du Conseil d'État et de la Cour de cassation des juridictions constitutionnelles suprêmes.

() J. Urvoas, 27 mars 2013, < ; www.assemblee-nationale.fr> ;.< ;/www.assemblee-nationale.fr> ;

(1) G. Carcassonne, La Constitution, 11e éd., 2013, Seuil, p. 300.

(2) Cf. notamment les auditions sur la question prioritaire de constitutionnalité devant la commission des lois de l'Assemblée nationale, disponibles sur le site Internet de l'Assemblée nationale.

(3) N. Molfessis, « La résistance immédiate de la Cour de cassation à la QPC », Pouvoirs, no 137, 2011, p. 83. Pour une présentation plus générale des décisions de non-renvoi de QPC après un an, cf. A. Roblot-Troizier, « Le non-renvoi des questions prioritaires de constitutionnalité par le Conseil d'État – Vers la mutation du Conseil d'État en un juge constitutionnel de la loi », RFDA, 2011, p. 691 et J.-B. Perrier, « Le non-renvoi des questions prioritaires de constitutionnalité par la Cour de cassation », RFDA, 2011, p. 711.

(4) Cf. par exemple G. Drago, « La Cour de cassation, juge constitutionnel », RDP, 2011, p. 1438 et N. Maziau, « Nouveaux développements dans la mise en œuvre de la question prioritaire de constitutionnalité : le filtre au service des évolutions jurisprudentielles de la Cour de cassation », Dalloz, 2011, p. 281.

(5) S.-J. Lièber et D. Botteghi, « Le juge administratif, juge constitutionnel de droit commun ? », AJDA, 2010, p. 1355 ; D. Rousseau, audition devant la Commission des lois de l'Assemblée nationale, 4 décembre 2012, compte-rendu no 23, p. 6.

(6) Cf. B. Stirn, audition devant la Commission de lois de l'Assemblée nationale, 21 novembre 2012, compte-rendu no 16, p. 19 : « Le juge national est le juge de droit commun du droit de l'Union ; lorsqu'une difficulté sérieuse se fait jour, il renvoie au juge de l'Union. De même, le juge ordinaire est devenu le juge de droit commun de l'application de la Constitution mais, en cas de difficulté sérieuse, la question est soumise au Conseil constitutionnel ».

(7) Par exemple, s'agissant de l'urgence qui conditionne la recevabilité de certaines procédures de référé, notamment CE, ord., 16 juin 2010, Mme Diakité, no 340250 : si une QPC peut être soulevée devant le juge des référés, celui-ci peut, en toute hypothèse, rejeter la requête pour défaut d'urgence, de sorte qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de renvoi au Conseil constitutionnel. S'agissant du respect du délai de recours en cassation, CE, 1er fév. 2011, SARL Prototech, no 342536 ; pourtant l'irrecevabilité du pourvoi en cassation n'interdit pas au juge suprême d'examiner la QPC : article R. 771-17 du code de justice administrative.

(8) Cass. com., 4 mai 2010, no 09-70-723 ; CE, 28 janv. 2011, Jean-Paul Huchon, no 338199.

(9) Sur l'absence de mémoire QPC : CE, 16 juill. 2010, Mme Mezzi, no 319993 ; CE, 4 oct. 2012, Société Euro Disney Associés, no 350796. Sur l'exigence d'un mémoire distinct, écrit et motivé et ses conséquences : CE, 2 juin 2010, Ponsart, no 338965 ; CE, 16 juill. 2010, Société de brasseries et casinos Les Flots Bleus, no 339292.

(10) Cf. récemment, CE, 4 fév. 2013, M. Laurent, no 362163, AJDA, 2013, p. 320 : non-lieu à statuer parce qu'il avait été entièrement répondu à la demande du requérant, privant sa requête d'objet.

(11) Cass. ass. plén., 29 juin 2010, no 10-40.001 et no 10-40.002 ; CE, 8 oct. 2010, Daoudi, Rec., p. 371.

(12) Article 61-1 de la Constitution.

(13) Par exemple, Cass. com., 26 juin 2012, no 11-27.515 : irrecevabilité d'une QPC portant contestation des conditions d'appel et de cassation contre certains jugements au motif que le pourvoi en cassation est irrecevable, faute de respecter ces conditions.

(14) Par exemple, Cons. const., déc. no 2010-5 QPC du 18 juin 2010, SNC Kimberly Clark.

(15) Par exemple, Cons. const., déc. no 2011-152 QPC du 22 juill. 2011, M. Claude C. Voir également s'agissant des dispositions d'une ordonnance non ratifiée, Cons. const., déc. no 2012-280 QPC du 12 oct. 2012, Société Groupe Canal Plus et autre.

(16) Par exemple, Cons. const., déc. no 2010-104 QPC du 17 mars 2011, Époux B. ; Cons. const., déc. no 2011-142/145 QPC du 30 juin 2011, Département de la Seine-Saint-Denis et autres.

(17) Cons. const., déc. no 2010-1 QPC du 28 mai 2012, Consorts L., Rec., p. 91.

(18) CE, 15 juill. 2010, Blain, no 327512.

(19) CE, 20 juin 2012, Association Comité radicalement anti-corrida Europe, no 357798. Voir également CE, 2 fév. 2012, Mme Marine Le Pen, no 355137 et CE, 21 mars 2011, Mme Lany et autres, no 345194.

(20) Cass. civ. 2e, 6 déc. 2012, no 12-21.855.

(21) Cass. civ. 1e, 5 janv. 2012, no 11-40.084. En l'espèce, la QPC n'était pas jugée sérieuse, mais la Cour de cassation ajoute « qu'en outre son applicabilité n'est que résiduelle ».

(22) Sur ce point, cf. C. Maugüé et J.-H. Stahl, op. cit., p. 59.

(23) Cass. crim., 9 mai 2012, no 12-81.242 ; Cass. crim., 11 juill. 2012, no 11-88.430 : non-renvoi de la QPC dès lors qu'une « déclaration d'inconstitutionnalité, à la supposer encourue, serait sans incidence sur la solution du pourvoi ».

(24) Par exemple, Cons. const., déc. no 2012-227 QPC, 30 mars 2012, M. Omar S.

(25) Cons. const., déc. no 2010-81 du 17 déc. 2010, M. Boubakar B.

(26) Conseil constitutionnel, « QPC – La notion de “disposition applicable au litige” », À la une, oct. 2012, site Internet du Cons. const.

(27) Une liste des décisions concernées figure in op. cit. On ajoutera que dans sa décision no 2012-281 QPC, 12 octobre 2012, Syndicat de défense des fonctionnaires, le Conseil décide de ne pas examiner la constitutionnalité de l'une des dispositions législatives faisant l'objet du renvoi alors que le grief d'inconstitutionnalité portait sur la combinaison des dispositions législatives ; sur ce point, cf. A. Roblot-Troizier, « La Constitution, le service public et le fonctionnaire », AJDA, 2013, p. 584.

(28) « Au regard de la place faite par le Conseil constitutionnel à l'appréciation des cours suprêmes de l'applicabilité au litige de la disposition, il est important que leur décision de renvoi porte seulement sur les dispositions dont la constitutionnalité doit être jugée. », in Conseil constitutionnel, À la une, op. cit.

(29) Cons. const., déc. no 2012-280 QPC, préc.

(30) Cons. const., déc. no 2011-172 QPC du 23 sept. 2011, Époux L. et autres.

(31) Cons. const., déc. no 2011-210 QPC du 13 janv. 2012, M. Ahmed S., cons. 5.

(32) Article 521-1 alinéa 1 du code pénal.

(33) Cons. const., déc. no 2012-271 QPC du 21 sept. 2012, Association Comité radicalement anti-corrida Europe et autre. Sur la prise en compte de la jurisprudence de la Cour de cassation, cf. le commentaire de la décision disponible sur le site Internet du Conseil constitutionnel. Voir également, A. Roblot-Troizier, « Une déliquescence des principes constitutionnels d'égalité et de légalité », RFDA, no 1, 2013, p. 141.

(34) Cf. B. Stirn, audition préc. À cet égard, notons le projet de loi organique relatif à l'application de l'article 61-1 de la Constitution retenait la « difficulté sérieuse » comme condition de renvoi des QPC au Conseil constitutionnel devant le Conseil d'État et la Cour de cassation.

(35) L'expression est utilisée ici par analogie avec la « théorie de l'acte clair » dont usait le Conseil d'État pour refuser de renvoyer à la Cour de justice de l'Union européenne des questions préjudicielles en interprétation de normes de droit communautaire : not. CE, 19 juin 1964, Société des Pétroles Shell-Berre et autres, Rec., p. 344.

(36) CE, 25 juin 2010, Région Lorraine, no 339842 ; CE, 25 juill. 2010, Région Lorraine, no 340492 ; CE, 15 sept. 2010, Thalineau, no 330734 ; CE, 2 mars 2011, Société d'exploitation Marinys, no 345288 ; CE, 21 sept. 2012, no 361632 et no 360602. Cass. ass. plén., 20 mai 2011, Bull. crim., no 7.

(37) CE, 16 avril 2010, Association Alcaly et autres, no 320667 ; CE, 3 nov. 2010, Mme Christine, no 342502 ; CE, 23 déc. 2010, Association Arab Women's Solidarity Association France, no 337899 ; Cass. civ. 1e, 7 nov. 2012, no 12-22.628.

(38) CE, 10 nov. 2010, Société ST informatique, no 327850 ; CE, 19 janv. 2011, EARL Schmittsepel, no 343389.

(39) Par exemple, Cass. com., 8 oct. 2012, no 12-40.058 ; Cass. crim., 22 janv. 2013, no 12-90.065 ; CE, 4 avril 2012, no 356636 ; CE, 23 déc. 2011, no 353113 ; CE, 30 mai 2012, no 357694 ; CE, 13 juill. 2010, Merlin, no 340302 ; CE, 22 oct. 2010, Pere, no 341869.

(40) S'agissant des différences de traitement, quelques ex. récents : Cass. com., 20 mars 2012, no 11-23.812 et no 11-23.822 ; Cass. com., 20 déc. 2012, no 12-40.074 ; CE, 29 oct. 2012, UASF, no 361327 ; CE, 21 sept. 2012, Commune de Vitry-sur-Seine, no 360602.

(41) Sur le caractère hétérogène de l'intensité du contrôle exercé par les juridictions de fond, cf. la chronique semestrielle de L. Briand publiée à la Gazette du Palais.

(42) C. Maugüé et J.-H. Stahl, op. cit., p. 62 et p. 68.

(43) Cons. const., déc. no 2009-595 DC du 3 déc. 2009, Loi organique relative à l'application de l'article 61-1 de la Constitution, cons. 21.

(44) Par exemple, CE, 21 mars 2011, Mme Cécile B. et autres, no 345193 et Cons. const., déc. no 2011-130 QPC du 20 mai 2011, Mme Cécile L. et autres.

(45) Par exemple, CE, 23 juill. 2012, Syndicat de défense des fonctionnaires, no 356381 et Cons. const., déc. no 2012-281 QPC, 12 oct. 2012, Syndicat de défense des fonctionnaires.

(46) Cass. civ. 1e, 16 nov. 2010, no 10-40.042 : à propos de l'interprétation des dispositions du code civil interdisant le mariage entre personnes de même sexe, la Cour considère que « les questions posées font aujourd'hui l'objet d'un large débat dans la société, en raison, notamment, de l'évolution des mœurs et de la reconnaissance du mariage entre personnes de même sexe dans les législations de plusieurs pays étrangers » et « que comme telles, elles présentent un caractère nouveau » ; Cass. crim., 19 janv. 2011, Bull. crim., no 10-85.159 ; CE, 2 fév. 2012, Mme Le Pen, no 355137.

(47) A. Viala, « De la puissance à l'acte : la QPC et les nouveaux horizons de l'interprétation conforme », RDP, 2011, p. 965.

(48) CE, 18 juin 2010, Société Canal Plus, no 338344.

(49) CE, 16 avril 2010, Association Alcaly et autres, no 320667 ; CE, 16 juill. 2010, SCI La Saulaie, no 334665.

(50) Cons. const., déc. no 2010-39 QPC du 6 oct. 2010, Mmes Isabelle D. et Isabelle B. et no 2010-52 du 14 oct. 2010, Compagnie agricole de la Crau.

(51) N. Maziau, art. préc.

(52) Not. Cass. crim., 5 oct. 2011, no 11-90.087.

(53) CE, 21 mars 2011, Syndicat des fonctionnaires du Sénat, no 345216.

(54) N. Jacquinot, « L'utilisation par les juges du fond des arrêts de non-renvoi d'une QPC », AJDA, 2012, p. 2097.

(55) N. Maziau, art. préc.