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La prise en compte de la Convention européenne des droits de l'homme par le Conseil constitutionnel, continuité ou évolution ?

Joël ANDRIANTSIMBAZOVINA - Professeur à l'Université de Limoges - Observatoire des Mutations Institutionnelles et Juridiques

Cahiers du Conseil constitutionnel n° 18 (Dossier : Constitution et Europe) - juillet 2005

Ouverture : l'extériorisation de la prise en compte de la Convention européenne des droits de l'homme

Incontestablement, en citant la Convention européenne des droits de l'homme et la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme à la fois dans ses visas et dans ses considérants, la décision du 19 novembre 2004 sur le « traité établissant une Constitution pour l'Europe » modifie la pratique et la politique jurisprudentielles du Conseil constitutionnel en matière de prise en compte de la Convention européenne des droits de l'homme (CEDH). Certes, depuis le milieu des années mille neuf cent quatre-vingt, le Conseil constitutionnel prend en compte la Convention européenne des droits de l'homme dans l'interprétation des normes de référence du contrôle de constitutionnalité(1). Toutefois, il le faisait de manière implicite, la Convention européenne ne faisant pas partie des normes de référence de son contrôle(2). De ce point de vue, l'affichage et l'explicitation de la référence à la Convention européenne des droits de l'homme constituent assurément un changement.

Cette modification ne serait-elle cependant qu'un trompe-l'oeil ? Par sa solennité, ne manifeste-t-elle pas au contraire la continuité de l'utilisation de la Convention européenne des droits de l'homme par le Conseil constitutionnel dans l'exercice du contrôle de constitutionnalité ? Une officialisation en quelque sorte d'une pratique ancienne bien que peu visible ?

Au vu de l'importance par le passé de la prise en compte de la Convention européenne des droits de l'homme par la jurisprudence constitutionnelle tant en matière de contrôle de constitutionnalité de la loi qu'en matière de contrôle de constitutionnalité des traités et engagements internationaux de la France(3), il serait tentant d'adopter la thèse de la continuité et de l'officialisation. Cela d'autant que les rapprochements de la jurisprudence du Conseil constitutionnel et celle de la Cour européenne des droits de l'homme avaient été préconisés par la doctrine, il y a plus d'une décennie (4).

À la lecture de la décision du 19 novembre 2004, du dossier documentaire qui l'accompagne et du commentaire du secrétaire général du Conseil constitutionnel(5), cette thèse mérite d'être nuancée concernant la fonction assignée par le Conseil constitutionnel à la Convention européenne des droits de l'homme.

L'usage implicite et discret de la Convention permet au Conseil constitutionnel d'enrichir les principes et les objectifs de valeur constitutionnelle(6). En quelque sorte, il s'en sert comme catalyseur de convergence positive et offensive de la Constitution et de la Convention européenne des droits de l'homme. L'usage explicite et visible de la Convention européenne semble avoir un rôle inverse de mise en convergence négative et défensive de la Constitution et de la Convention.

Dans les deux cas cependant, la Convention européenne des droits de l'homme ne perd pas son rôle d'instrument d'interprétation de la Constitution. Il faut même se féliciter que, par la voie prétorienne, le Conseil constitutionnel ait réussi à mettre notre Constitution dans le peloton des constitutions ouvertes explicitement sur les normes internationales relatives à la protection des droits de l'homme, à l'instar par exemple de l'article 10-2 de la Constitution espagnole qui dispose : « Les normes relatives aux droits fondamentaux et aux libertés que reconnaît la Constitution seront interprétées conformément à la Déclaration universelle des droits de l'homme et aux traités et accords internationaux portant sur les mêmes matières ratifiées par l'Espagne ». Quelle que soit la forme qu'elle prend, la prise en compte de la Convention européenne des droits de l'homme manifeste donc le souci d'ouverture du Conseil constitutionnel aux normes européennes en matière de protection des droits fondamentaux. De ce point de vue, la décision du 19 novembre 2004 augure un bel avenir de l'interprétation de la Constitution à la lumière explicite de la Convention européenne des droits de l'homme.

Il en va ainsi pour deux raisons objectives. En tant qu'« instrument constitutionnel de l'ordre public européen »(7), la Convention européenne des droits de l'homme constitue l'outil idéal de convergence entre droit constitutionnel national et droit communautaire(8). De plus, dès à présent, la protection des droits fondamentaux en Europe se fait dans le cadre d'un système faisant cohabiter la protection nationale, la protection européenne (CEDH) et la protection communautaire (9). Le traité établissant une Constitution pour l'Europe institutionnalise un tel système (10). L'adhésion annoncée de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme fait de celle-ci la plaque tournante de ce système (11). Déjà pressenti avant la signature du traité établissant une Constitution pour l'Europe, le système en question est fait de normes de protection et de juges (12). Son bon fonctionnement nécessite une conciliation des normes et un dialogue des juges : entre juges européens et juges nationaux, cela va de soi (13), et entre les cours constitutionnelles nationales et les juridictions ordinaires tout aussi naturellement (14).

Muni de la Convention européenne des droits de l'homme, le Conseil constitutionnel est bien rentré dans ce schéma en tentant tout à la fois de concilier la Constitution française et la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne (I) et de dialoguer avec la Cour de justice des Communautés européennes et la Cour européenne des droits de l'homme (II).

I. La Convention européenne des droits de l'homme, instrument de conciliation de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de la Constitution française

La conciliation de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de la Constitution européenne prend deux formes superposées. La première est une conciliation - européanisation en ce qu'elle résulte de l'émergence d'un système européen de protection des droits fondamentaux (A). La seconde est une conciliation - protection en ce qu'elle vise à préserver certaines valeurs et intérêts de la République (B).

A. Une conciliation résultant de l'européanisation de la protection des droits fondamentaux

On peut trouver paradoxal que le Conseil constitutionnel fasse référence à la Convention européenne des droits de l'homme pour assurer le contrôle de constitutionnalité d'une norme extérieure à l'ordre juridique national(15). Le paradoxe n'est qu'apparent. En matière de protection des droits fondamentaux, singulièrement en Europe, l'étanchéité des instruments de protection et des ordres juridiques a laissé la place à l'interpénétration des uns et des autres, pareille interpénétration constituant même un des éléments de l'identité de l'Union européenne élargie(16). La Constitution pour l'Europe constitue le point d'orgue de l'institutionnalisation de cette situation. Elle grave dans le marbre un système européen de protection des droits fondamentaux. Dans sa deuxième partie, la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne renvoie expressément à la Convention européenne des droits de l'homme pour son interprétation. Par ailleurs, sur le plan matériel, les convergences des droits fondamentaux au niveau national, au niveau communautaire et au niveau européen incitent naturellement à interpréter la Constitution nationale et la Charte des droits fondamentaux à la lumière de la Convention européenne des droits de l'homme.

Les liens étroits entre la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la Convention européenne des droits de l'homme sont connus. Dès son préambule, la Charte réaffirme les droits qui résultent des traditions constitutionnelles communes, de la Convention européenne des droits de l'homme et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. L'article II-112, paragraphe 3, du traité établissant une Constitution pour l'Europe indique clairement : « Dans la mesure où la présente charte contient des droits correspondant à des droits garantis par la Convention européenne des droits de l'homme, leur sens et leur portée sont les mêmes que ceux que leur confère ladite Convention ». Dans la mesure où le Conseil constitutionnel a déjà par le passé intégré dans sa jurisprudence des formules, des principes et des droits inspirés de la Convention européenne des droits de l'homme, il est logique qu'il s'appuie sur celle-ci pour concilier la Charte et la Constitution.

Cela d'autant que les convergences des droits fondamentaux ne peuvent pas être limitées au droit national et à la Charte. C'est justement la Convention européenne des droits de l'homme qui constitue le pivot de cette convergence comme le montre un tableau inséré dans le dossier documentaire et surtout de nombreux rapports nationaux présentés lors de la 9e conférence des cours constitutionnelles européennes (17).

C'est donc assez logiquement que le Conseil constitutionnel use explicitement de la Convention européenne des droits de l'homme comme instrument de conciliation entre la Charte et la Constitution. Dans la décision du 19 novembre 2004, son utilisation vise à préserver certaines valeurs et intérêts de la République française.

B. Une conciliation visant à préserver certaines valeurs et intérêts de la République française

Les convergences ainsi constatées permettent au Conseil constitutionnel de se servir de la Convention européenne des droits de l'homme comme caution des valeurs de la République et des intérêts fondamentaux de la nation.

L'habileté de la démarche du Conseil constitutionnel est de se servir au grand jour de la Convention européenne des droits de l'homme pour désamorcer des conflits potentiels entre la Charte et les valeurs de la République. Il en est ainsi de la laïcité, valeur caractéristique de la République affirmée par l'article 1er de la Constitution. L'interprétation de celle-ci a pu varier dans le temps. Ouverte dans la jurisprudence du Conseil d'État de la décennie passée, elle est devenue restreinte dans la loi du 15 mars 2003(18). N'ayant pas eu l'occasion de donner son interprétation du principe de laïcité, le Conseil constitutionnel a saisi celle offerte par le contrôle de conformité à la Constitution du traité établissant une Constitution pour l'Europe pour donner la sienne en s'appuyant sur la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Opportunément, celle-ci n'a pas une conception absolutiste de la liberté de religion et admet la limitation du port du foulard islamique, si le port de celui-ci nuit à l'objectif visé de protection des droits et libertés d'autrui, de l'ordre et de la sécurité publique. Prenant acte de ce que la Cour européenne des droits de l'homme a admis, dans son arrêt Leyla Sahin c/ Turquie du 29 juin 2004, qu'une conception de la laïcité faisant de celle-ci un garant des valeurs démocratiques et des principes d'inviolabilité de la liberté de religion pour autant qu'elle relève du for intérieur, et de l'égalité des citoyens devant la loi, est respectueuse des valeurs sous-jacentes à la Convention, le Conseil constitutionnel constate la compatibilité de l'article II-70 du traité établissant une Constitution pour l'Europe avec le principe de laïcité. Chemin faisant, le Conseil constitutionnel estime ainsi que, conformément aux directives d'interprétation données par le Praesidium de la Convention qui a élaboré la Charte, l'interprétation de la liberté de religion dans la Charte devra être calquée sur celle de l'article 9 de la Convention européenne des droits de l'homme. Dans la mesure où cette interprétation est respectueuse d'une conception de la laïcité qui sied au Conseil constitutionnel, le conflit éventuel entre l'article II-70 du traité constitutionnel et de l'article 1er de la Constitution française est écarté.

L'évacuation de conflits entre la Charte et les intérêts primordiaux de la République s'appuie aussi sur une utilisation discrète et en creux de la Convention européenne des droits de l'homme et de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. La neutralisation de deux articles du traité constitutionnel - l'article II-107 relatif au droit à un recours effectif et à un tribunal impartial garantissant entre autres la publicité des audiences, l'article II-110 relatif au principe non bis in idem - est basée ainsi sur l'acceptation sous conditions par la jurisprudence européenne de la limitation étatique des droits garantis par la Convention européenne des droits de l'homme. Le dossier documentaire fait état de deux arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme pour conforter sa position : l'arrêt Ernst du 15 juillet 2003 qui confirme l'admission de la limitation de la transparence et de la publicité de la procédure, l'arrêt Oliveira du 30 juillet 1998 qui considère que deux juridictions distinctes peuvent connaître d'infractions différentes, fussent-elles les éléments d'un même fait pénal. Ces deux arrêts sont exploités implicitement pour justifier la marge de manoeuvre reconnue par le Conseil constitutionnel aux autorités nationales pour protéger divers intérêts mentionnés au paragraphe 2 de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme (intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale, intérêts des mineurs, intérêts de la justice) et les intérêts fondamentaux de la Nation prévus au titre premier du livre IV du code pénal.

La démarche globale du Conseil constitutionnel en matière de prise en compte de la Convention européenne des droits de l'homme apparaît plutôt défensive. Le Conseil constitutionnel semble vouloir indiquer ainsi aux deux Cours européennes, de Luxembourg et de Strasbourg, son attachement à un certain nombre de valeurs et principes et son désir et son souhait de voir ceux-ci respectés par elles dans la conciliation qu'elles auront à opérer des droits fondamentaux proclamés par les jurisprudences et les textes européens et des droits fondamentaux protégés par les jurisprudences et constitutions nationales.

II. La Convention européenne des droits de l'homme, instrument de dialogue avec la Cour de justice des Communautés européennes et la Cour européenne des droits de l'homme

En l'absence d'un instrument formalisé et institutionnalisé de dialogue entre les juridictions nationales et la Cour européenne des droits de l'homme, et devant l'inadaptation de la procédure devant le Conseil constitutionnel du renvoi préjudiciel devant la Cour de justice des Communautés européennes (art. 234 TCE), la méthode d'engagement du dialogue choisie par le Conseil constitutionnel n'est pas en soi condamnable. Le dialogue du Conseil constitutionnel avec les Cours européennes ne peut être qu'un « dialogue spontané »(19). Non institutionnalisé, il est forcément « décalé » dans le temps. En revanche, la manière avec laquelle le Conseil constitutionnel a exploité la Convention européenne des droits de l'homme n'est pas d'une grande rigueur juridique(20). Interprète de droit commun de la Convention européenne des droits de l'homme, comme toute juridiction nationale, le Conseil constitutionnel a légitimement tenté de fournir son interprétation de certains articles de la Convention européenne des droits de l'homme. Il l'a cependant fait en manipulant la Convention européenne des droits de l'homme (A). Cette manipulation au sens interprétatif du terme n'étant pas dépourvue d'approximations, la réussite du dialogue souhaité est pavée d'incertitudes (B).

A. Un dialogue fondé sur une manipulation de la Convention européenne des droits de l'homme

On peut approuver totalement le souci du Conseil constitutionnel de favoriser la méthode d'interprétation conforme pour mettre en harmonie la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la Constitution via la Convention européenne des droits de l'homme. Cela d'autant qu'une telle méthode lui a permis d'apaiser les relations que certains espèrent tumultueuses entre la Charte et la Constitution, de faire l'économie de certaines révisions douloureuses de la Constitution et de couper court à toutes autres espérances de débats polémiques et irrationnels lors de la campagne du référendum de ratification du traité constitutionnel.

On peut regretter cependant que la tactique jurisprudentielle teintée de politique adoptée n'ait pas été accomplie avec la rigueur juridique qui s'impose, a fortiori lorsque l'on engage un dialogue. On peut admirer et louer les fameux « jeux de miroirs »(21), on ne saurait souscrire aux jeux de pistes lorsque les règles sont faussées dès le départ. En l'occurrence le Conseil constitutionnel a procédé à la fois à une manipulation - déviation et à une manipulation - stérilisation de la Convention européenne des droits de l'homme.

On peut parler de manipulation - déviation en ce que le Conseil constitutionnel a quelque peu forcé la convergence de la Convention européenne des droits de l'homme et de la Constitution française. Cette conciliation forcée apparaît à plusieurs niveaux. Le niveau le plus regrettable est celui de l'erreur juridique. Politiquement opportun, le choix de l'arrêt Leyla Sahin pour concilier la laïcité et la liberté de religion est une erreur que l'on ne saurait minimiser. Le qualifier de seulement « malheureux »(22) ne saurait suffire à effacer le fait qu'une décision juridictionnelle d'une cour constitutionnelle s'étant prononcée la première sur la conformité avec une constitution nationale du traité constitutionnel de l'Union européenne est fondée sur un arrêt de chambre frappé d'un renvoi devant la Grande chambre de la Cour européenne des droits de l'homme, c'est-à-dire un arrêt qui n'existe pas juridiquement(23) ! Peu importe l'éventuelle confirmation de cet arrêt par la Grande chambre. Par ailleurs, l'arrêt Leyla Sahin est assez marqué par le contexte turc comme le montrent les paragraphes 99 et 105 cités dans le dossier documentaire accompagnant la décision du 19 novembre 2004(24) . Pour aboutir au même résultat, il eût été plus judicieux, à notre avis, de se référer à l'arrêt de Grande chambre Refah Partisi du 13 février 2003 qui comporte des « principes généraux » relatifs à la place de la religion dans une société et dans un État démocratiques. Les paragraphes 90 à 93 sont suffisamment clairs pour ne pas avoir besoin de citer un arrêt de chambre même s'il s'agit d'un arrêt concernant directement le port du voile islamique. Notamment, le paragraphe n° 92 de l'arrêt Refah Partisi dit nettement que : « Dans une société démocratique, l'État peut limiter la liberté de manifester une religion, par exemple le port du foulard islamique, si l'usage de cette liberté porte atteinte à l'objectif visé de protection des droits et libertés d'autrui, de l'ordre et de la sécurité publics. »

À un niveau moins grave, ne serait-ce que parce que la Convention européenne des droits de l'homme n'est visée qu'implicitement, si on peut comprendre le considérant relatif au principe non bis in idem, l'incise sur la publicité des audiences est pour le moins curieuse car la différence de champ d'application entre l'article II-107 du traité constitutionnel et l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne des droits de l'homme ne doit pas faire oublier que le champ d'application de ce dernier a été étendu de façon telle par la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme que beaucoup s'interrogent sur la nécessité du maintien des concepts de « droits et obligations de caractère civil » et d'« accusation en matière pénale »(25) . De plus, la jurisprudence européenne a toujours admis la possibilité de limiter la publicité des audiences lorsque l'une des conditions énumérées par l'article 6, paragraphe 1, lui-même est remplie(26) .

Enfin, le silence du Conseil constitutionnel concernant la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme relative à la protection des minorités est significatif de la déviation de cette jurisprudence et du caractère à la fois politique et forcé de la conciliation de la Charte et de la Constitution. Bien que la jurisprudence européenne ne soit pas allée jusqu'à reconnaître les droits des minorités(27) , elle n'exige pas moins des États le respect du mode de vie des minorités(28) . Ne valait-il pas mieux faire référence explicitement à une jurisprudence actuellement équilibrée de la Cour européenne des droits de l'homme qui semble conciliable avec le refus républicain du communautarisme et avec l'article I-2 du traité constitutionnel qui ne reconnaît pas les droits des minorités, mais « les droits des personnes appartenant à des minorités » ? Il s'agit ici de droits individuels et non de droits de groupe.

La manipulation de la Convention européenne des droits de l'homme, qu'elle soit explicite, qu'elle soit implicite ou qu'elle soit en creux, tend donc à inviter les cours européennes à prendre en compte l'interprétation de la Convention européenne des droits de l'homme par le Conseil constitutionnel. Une telle approche peut être critiquée, mais elle n'est pas forcément condamnable dès lors qu'elle est rigoureuse et qu'elle ne fige pas la protection des droits fondamentaux en Europe. Dans le cas contraire, c'est-à-dire lorsqu'elle prend la forme de la stérilisation des droits fondamentaux, elle ne saurait être approuvée.

Cette forme de manipulation de la Convention européenne des droits de l'homme n'apparaît pas directement dans la décision du 19 novembre 2004. Implicitement, elle transparaît au considérant 21 où le Conseil constitutionnel neutralise le principe de proportionnalité énoncé à l'article II-112 du traité constitutionnel au nom du respect des fonctions essentielles de l'État, notamment celles qui ont pour objet d'assurer son intégrité territoriale, de maintenir l'ordre public et de sauvegarder la sécurité nationale, mentionnées à l'article I-5 du même traité constitutionnel. Sans doute peut-on supposer que le Conseil constitutionnel pense ici à la théorie de la marge d'appréciation qui permet à la Cour européenne des droits de l'homme de ne pas condamner une ingérence étatique dans une liberté, toutefois un tel renversement d'un des principes de base de l'interprétation juridictionnelle est surprenant de la part d'un juge des libertés ! L'on sait en effet qu'en matière de protection des droits fondamentaux, la liberté est la règle et sa limitation l'exception ! De surcroît, au vu de la jurisprudence européenne, évincer aussi facilement le principe de proportionnalité constitue un risque tant pour les droits fondamentaux que pour la France car « le principe de proportionnalité, qui traduit une exigence d'adéquation entre un objectif légitime et les moyens utilisés pour l'atteindre, se situe donc au coeur du contrôle de la marge nationale d'appréciation » (29).

En marge de la décision du 19 novembre 2004, certains commentateurs ainsi que le président du Conseil constitutionnel et le secrétaire général de celui-ci ont interprété les considérants relatifs à la Charte des droits fondamentaux comme un « double avertissement » (30) à la Cour européenne des droits de l'homme et à la Cour de justice des Communautés européennes. L'une et l'autre sont averties. Le président du Conseil constitutionnel prévient lors de la cérémonie de présentation de ses voeux au président de la République, le 3 janvier 2005 : « Non, la Charte des droits fondamentaux de l'Union ne nous engage pas au-delà de ce que permet la Constitution française, pour peu qu'on fasse de cette Charte la lecture naturelle et raisonnable qu'en fait notre décision du 19 novembre 2004. Mais oui, il y aurait vice de consentement de la France si, le traité une fois entré en vigueur, les Cours de Luxembourg ou de Strasbourg allaient au-delà de cette lecture naturelle et raisonnable. » Le commentaire non signé de la décision destiné à paraître aux Cahiers du constitutionnel est tout aussi catégorique : « Il est cependant clair que toute interprétation jurisprudentielle future des Cours de Luxembourg ou de Strasbourg allant au-delà des dispositions de la Charte ou restreignant la portée de ses clauses de limitation particulières ou générales conduirait à altérer les données au vu desquelles s'est prononcé le Conseil constitutionnel pour arriver à la conclusion que la deuxième partie du traité n'appelait pas de révision. »

Paradoxe d'une institution qui n'a eu de cesse d'élargir le catalogue jurisprudentiel des droits fondamentaux dans l'ordre constitutionnel français et qui somme les Cours européennes de figer l'interprétation de textes spécialement adoptés pour la protection des droits fondamentaux !

Un dialogue engagé dans ces conditions est-il voué au succès ? Rien n'est moins sûr !

B. Un dialogue à l'issue incertaine

D'emblée, disons que la concrétisation même de la menace laisse juridiquement perplexe. Dans la mesure où le Conseil constitutionnel ne peut être saisi de la constitutionnalité d'un engagement européen de la France qu'a priori, on voit mal comment il pourrait lui-même constater le franchissement de la ligne jaune par les deux juridictions européennes. La lourde charge de le faire pèse alors sur les autres autorités nationales et notamment les juridictions ordinaires, mais celles-ci seront tiraillées entre le souci de respecter la jurisprudence du Conseil constitutionnel dont le non-respect n'entraîne pas aujourd'hui de sanction et l'obligation de respecter l'autorité des décisions des cours européennes dont le non-respect peut conduire à la condamnation de la France pour manquement au droit européen.

Sans chercher à résoudre ici ce dilemme, on regrette que le Conseil constitutionnel adopte une telle position en décalage avec certains de ses homologues des autres États membres de l'Union européenne, les cours constitutionnelles européennes.

Il est ainsi curieux que le dossier documentaire ne mentionne que la décision Maastricht de la Cour constitutionnelle allemande en date du 12 octobre 1993 alors que cette Cour a sensiblement apaisé sa position dans son arrêt du 7 juin 2000(31), favorisant ainsi la coopération et non la menace d'affrontement.

Certes, les cours constitutionnelles européennes veulent légitimement préserver leur autonomie et celle de leur ordre juridique constitutionnel respectif, mais dans l'ensemble elles semblent plutôt désireuses de renforcer la coopération avec les Cours européennes. Vis-à-vis de la Convention européenne des droits de l'homme, érigée en instrument de conciliation de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de la Constitution française, le double avertissement précité n'augure pas une coopération facile avec les Cours européennes au moment où une juridiction constitutionnelle comme la Cour constitutionnelle allemande accepte l'autorité des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme. En effet, dans son importante décision du 14 octobre 2004(32), la Cour constitutionnelle a annulé le jugement de l'Oberlandesgericht Naumburg en ce qu'il ne lui pas permis d'apprécier de quelle manière et jusqu'à quel point un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme du 26 février 2004 a été pris en compte(33). Pour elle, la Convention européenne des droits de l'homme et ses protocoles possèdent, dans l'ordre juridique allemand, la valeur d'une loi fédérale. Tout en limitant les effets des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme à ceux de l'autorité de la chose jugée (res judicata), elle a considéré que, au sein de l'État allemand, tous les pouvoirs publics, parmi lesquels figurent les juridictions, sont liés par les arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme. La prise en compte d'un arrêt de cette Cour de manière perceptible est une obligation pour les juridictions allemandes. Au cas où celles-ci n'épousent pas un arrêt de la Cour européenne des droits de l'homme, elles sont obligées de fournir par des motivations claires les raisons de cette dissidence. Lorsqu'une juridiction allemande statue à nouveau sur une affaire ayant fait l'objet d'un arrêt de condamnation prononcé par la Cour européenne des droits de l'homme, en dernière instance, lorsque le droit processuel applicable le permet, il est important que la juridiction allemande prenne en compte l'arrêt subséquent de la Cour européenne des droits de l'homme.

Dans l'intérêt de la protection des droits fondamentaux des personnes se trouvant sous la juridiction de la France, dans l'intérêt de la protection des droits fondamentaux en Europe, il est préférable que le Conseil constitutionnel abandonne la posture défensive adoptée dans la décision du 19 novembre 2004 et s'inspire positivement et non négativement de la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme. Celle-ci étant déjà suivie scrupuleusement par la Cour de justice des Communautés européennes, les justiciables et les individus y gagneront. C'est une bonne manière de ne dilapider ni le passé enrichissant d'exploitation de la Convention européenne des droits de l'homme par le Conseil constitutionnel, ni la plus-value résultant de l'insertion de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dans le traité établissant une Constitution pour l'Europe et de l'adhésion future de l'Union européenne à la Convention européenne des droits de l'homme.

(1) B. Genevois, « Le Conseil constitutionnel et le droit né de la Convention européenne des droits de l'homme », in H. Thierry et E. Decaux (dir.), Droit international et droits de l'homme, Paris, Montchrestien, 1990, pp. 251-268 ; « Protection constitutionnelle et protection internationale des droits de l'homme : concurrence ou complémentarité ?, Rapport présenté par la délégation française à la 9e conférence des cours constitutionnelles européennes », RFD adm. 1993, pp. 849-869 ; P. Gaïa, « Les interactions entre les jurisprudences de la Cour européenne des droits de l'homme et du Conseil constitutionnel », RFD const. 1996, pp. 725-745.
(2) Cons. const., n° 74-54 DC du 15 janv. 1975, Loi relative à l'interruption volontaire de grossesse, Rec. 19.
(3) Cons. const., n° 98-408 DC du 22 janv. 1999, Traité portant statut de la Cour pénale internationale, Rec. 29 : le considérant 25 parle des « exigences constitutionnelles relatives au respect des droits de la défense et à l'existence d'une procédure juste et équitable, garantissant l'équilibre des droits des parties », s'inspirant ainsi d'une jurisprudence constante de la Cour européenne des droits de l'homme en matière de procès équitable. V. en ce sens, B. Genevois, « Le Conseil constitutionnel et le droit pénal international. À propos de la décision n° 98-408 DC du 22 janvier 1999 », RFD adm. 1999, pp. 285-313, spéc. p. 307, 1re col.
(4) D. Rousseau et F. Sudre (dir.), Conseil constitutionnel et Cour européenne des droits de l'homme, Actes du colloque de Montpellier des 20-21 janv. 1989, Paris, Éditions STH, 1990.
(5) J.-E. Schoettl, « La ratification du traité établissant une Constitution pour l'Europe appelle-t-elle une révision de la Constitution française ? », Les petites affiches 29 nov. 2004, n° 238, pp. 3-25.
(6) L'exemple du pluralisme est significatif. Alors même que notre Constitution et les textes auxquels son Préambule renvoie sont muets sur la notion de pluralisme, s'inspirant de la jurisprudence européenne (Handyside du 7 déc. 1976, in F. Sudre, J.-P. Marguénaud, J. Andriantsimbazovina, A. Gouttenoire, M. Levinet, Les grands arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme (ci-après GACEDH), Paris, PUF, 2e éd., 2003, n° 7) qui fonde la démocratie sur le pluralisme, la tolérance et l'esprit d'ouverture, le Conseil constitutionnel affirme que « le respect des courants d'expression socioculturels est en lui-même un objectif de valeur constitutionnelle » et que « le respect de ce pluralisme est une des conditions de la démocratie » (Cons. const., n° 86-217 DC du 18 sept. 1986, Loi relative à la liberté de communication, cons. 11). Le pluralisme constitue aujourd'hui une « exigence constitutionnelle », Cons. const., n° 2004-497 DC du 1er juill. 2004, Loi relative aux communications électroniques et aux services de communication audiovisuelle, cons. 13, JORF 12 juill. 2004, p. 12506.
(7) Cour EDH, Gd. Ch., 23 mars 1995, Loizidou c/ Turquie, § 75 ; GACEDH, n° 1.
(8) J. Andriantsimbazovina, « La Convention européenne des droits de l'homme, instrument de convergence des droits constitutionnels nationaux et du droit communautaire », in H. Gaudin (dir.), Droit constitutionnel, droit communautaire. Vers un respect constitutionnel réciproque ?, Actes du colloque de La Rochelle des 6-7 mai 1999, Paris, Economica, 2001, pp. 169-204.
(9) H. Labayle, « Droits fondamentaux et droit européen », AJDA, n° spécial, 1998, pp. 75-91 ; J. Rideau, « La coexistence des systèmes de protection des droits fondamentaux dans la Communauté européenne et ses États membres », AIJC 1991, pp. 11-69.
(10) J. Andriantsimbazovina, « Constitution européenne et droits fondamentaux. Au fondement d'une »Statocratie constitutionnelle" ", à paraître, Annuaire de Droit européen I, 2003, Bruxelles, Bruylant, 2005.
(11) H. C. Krüger, J. Polakiewicz, « Propositions pour la création d'un système cohérent de protection des droits de l'homme en Europe. La Convention européenne des droits de l'homme et la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne », RUDH, vol. 13, n° 1-4, 30 oct. 2001, pp. 1-14.
(12) H. Labayle, F. Sudre (dir.), Réalité et perspectives du droit communautaire des droits fondamentaux, Bruxelles, Bruylant, 2000.
(13) F. Lichère, L. Potvin-Solis, A. Raynouard (dir.), Le dialogue des juges européens et nationaux. Incantation ou réalité ?, Bruxelles, Bruylant, 2004. En droit comparé, le dialogue que la Cour constitutionnelle allemande entretient avec la Cour de justice des Communautés européennes et la Cour européenne des droits de l'homme constitue un exemple ; v. l'étude de son ancienne présidente J. Limbach, « La coopération des juridictions dans la future architecture européenne des droits fondamentaux. Contribution à la redéfinition des rapports entre la Cour constitutionnelle fédérale allemande, la Cour de justice des Communautés européennes et la Cour européenne des droits de l'homme », RUDH, vol. 12, n° 10-12, 31 déc. 2000, pp. 369-372.
(14) A. Alen, M. Melchior, « Les relations entre les cours constitutionnelles et les autres juridictions nationales, y compris l'interférence en cette matière, de l'action des juridictions européennes », Rapport général de la XIIe conférence des cours constitutionnelles, Bruxelles, 14-16 mai 2002, RUDH, vol. 14, n° 9-12, 31 déc. 2002, pp. 333-360.
(15) En ce sens, O. Dord, note sous Cons. const., n° 2004-505 DC du 19 nov. 2004, AJDA 2005, pp. 211-219, spéc. p. 217, 2e col.
(16) P. C. Müller-Graff, « L'identité de l'Union européenne élargie en matière de droits de l'homme et de droits fondamentaux », in J. Andriantsimbazovina, C. Geslot (éd.), Les Communautés et l'Union européennes face aux défis de l'élargissement, Paris, La Documentation française, 2005, pp. 223-238.
(17) Cons. const., Protection constitutionnelle et protection internationale des droits de l'homme : concurrence et complémentarité ?, IXe conférence des Cours constitutionnelles européennes, Paris, 10-13 mai 1993, Paris, 1994, 2 vol. V. le rapport général de J. Robert publié à la RUDH 1995, pp. 269-293.
(18) Loi n° 2004-228 du 15 mars 2004 encadrant, en application du principe de laïcité, le port de signes ou de tenues manifestant une appartenance religieuse dans les écoles, collèges et lycées publics, JORF, 17 mars 2004, p. 5190.
(19) ur cette notion, v. notre thèse L'autorité des décisions de justice constitutionnelles et européennes sur le juge administratif français, Paris, LGDJ, 1998, préface de Bernard Pacteau, pp. 497 et.
(20) Ce qui a été dénoncé avec vigueur par les spécialistes du droit de la CEDH lors de la journée d'étude de l'Annuaire de droit européen, du 29 janv. 2005, qui a eu lieu au Centre Panthéon avec les concours des universités de La Rochelle, Limoges, Paris II, Paris I. V. notamment les observations critiques des professeurs Henri Labayle et Frédéric Sudre et de l'auteur de ces lignes dans les actes à paraître prochainement.
(21) A. Levade, « Le Conseil constitutionnel aux prises avec la Constitution européenne », RD publ. 2005, pp. 19-50, spéc. p. 25.
(22) M. Gautier, note sous Cons. const., n° 2004-505 DC du 19 nov. 2004, JCP A 2005, n° 1025, pp. 255-259, spéc. p. 259, 2e col.
(23) D. Rousseau, « Chronique de jurisprudence constitutionnelle 2004 », RD publ. 2005, pp. 267-311, spéc. p. 301, note 67.
(24) V. F. Sudre, JCP G 2004, I, 1321, § 11 ; J.-F. Flauss, AJDA 2004, p. 1817.
(25) V. notamment P. Tavernier, « Faut-il réviser l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ? (À propos du champ d'application de l'article 6) », in Mélanges en hommage à Louis-Edmond Pettiti, Bruxelles, Bruylant, 1998, pp. 707-720.
(26) V. le commentaire de Cour EDH, arrêt Prieto c/ Italie du 8 déc. 1983, GACEDH, n° 27, et, par ex., Cour EDH, arrêts T. et V. c/ Royaume-Uni du 16 déc. 1999, Dr. fam, 2000, comm. n° 46, obs. A. Gouttenoire.
(27) Ce que l'on a pu déplorer, M. Levinet, « Juges de Strasbourg, encore un effort si vous voulez devenir des défenseurs de l'identité minoritaire ! », L'Europe des libertés, n° 5, mai 2001, pp. 2-5.
(28) Sans avoir condamné la Pologne la Cour a pu néanmoins affirmer dans Cour EDH, Gd. Ch., arrêt Gorzelik c/ Pologne du 17 févr. 2004, § 57 : « une société pluraliste et véritablement démocratique doit non seulement respecter l'identité ethnique, culturelle, linguistique et religieuse de toute personne appartenant à une minorité nationale, mais également créer des conditions propres à permettre d'exprimer, de préserver et développer cette identité » ; Cour EDH, arrêt Connors c/ Irlande du 27 mai 2004 où la Cour impose au Royaume-Uni l'obligation positive de faciliter le mode vie tsigane. Pour une étude de synthèse, F. Hoffmann, J. Ringelheim, « Par delà l'universalisme et le relativisme : la Cour européenne des droits de l'homme et les dilemmes de la diversité culturelle », Revue interdisciplinaire d'études juridiques, 2004, n° 52, pp. 109-142.
(29) F. Sudre, « Commentaire de l'arrêt Handyside du 7 décembre 1976 », GACEDH, n° 7, p. 69.
(30) A. Levade, op. cit., p. 42.
(31) C. Grewe, « Le »traité de paix« avec la Cour de Luxembourg : l'arrêt de la Cour constitutionnelle allemande du 7 juin 2000 relatif au règlement du marché de la banane », RTD eur. 2001, pp. 1-17.
(32) BVerfG 2BvR 1481/04, 14 oct. 2004, Neuejuristische Wochenschrift 2004, pp. 3401-3412 ; une traduction en langue anglaise est disponible sur http://www.bverfg.de.entscheidungen/rs20041014_2bvr148104e.htm
(33) Cour EDH, 26 févr. 2004, Görgülü c/ Allemagne: condamnation de l'Allemagne pour violation de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme relatif au droit à la vie familiale normale en raison du refus à un père biologique d'un enfant de l'autorité parentale et du droit de visite.