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La notion de " droits-créances " à l'épreuve du contrôle de constitutionnalité

Laurence GAY - Chargée de recherches au CNRS, GERJC (UMR 6201)

Cahiers du Conseil constitutionnel n° 16 (Prix de thèse 2002) - juin 2004

(Résumé)

Recenser dans la production doctrinale relative aux libertés publiques puis aux droits fondamentaux l'emploi de la notion de droits-créances serait chose impossible. Il est en effet peu de travaux qui ne s'y réfèrent, de façon incidente ou à titre principal, pour l'opposer à celle de droits-libertés. Cette fortune ne peut manquer d'étonner au vu de la définition somme toute imprécise qui en est donnée. Selon G. Burdeau, le droit-créance se présente comme « la prétention légitime à obtenir [de la collectivité] les interventions requises pour que soit possible l'exercice de la liberté »(1). Pour R. Pelloux, il confère « à l'individu le droit d'exiger certaines prestations de la part de la société ou de l'État : par exemple droit au travail, droit à l'instruction, droit à l'assistance »(2). Il ressort de ces définitions la prégnance de l'idée d'une dette positive. Le droit-créance est un pouvoir d'exiger, implique une intervention positive, une prestation positive... Alors que les libertés sont « opposables à l'État », les créances sont « exigibles de lui »(3). Ces dernières doivent être mises en oeuvre. J. Rivero soulignait qu'en l'absence de cette concrétisation, le droit « demeure virtuel »(4).

En définitive, ces approches débouchent sur une aporie. Le texte fondamental proclame un droit mais ce droit n'existera éventuellement que dans le cadre de la loi. Quelle est alors la signification de la proclamation constitutionnelle ? La tentation d'en nier la nature juridique a été condamnée par le Conseil constitutionnel, acceptant de faire des alinéas 5 et 10 à 13 du préambule de la Constitution de 1946 des normes de référence pour le contrôle de constitutionnalité des lois. Le professeur Prétot ne manque toutefois pas de relever que sa jurisprudence réintroduit une « distinction radicale »(5). Alors qu'il procède à un contrôle étroit du respect d'une liberté individuelle classique, le Conseil reconnaît « un large pouvoir d'appréciation au Parlement et au gouvernement » lorsqu'il s'agit d'un « véritable droit social, [d']un droit-créance »(6). Les interrogations se déplacent donc, de la question de la nature juridique, à celle de la portée des principes en cause.

En outre, les tentatives d'approche de la notion par distinction ont accru les incertitudes. Une évolution contemporaine voit en effet se développer les interventions étatiques en faveur des droits défensifs. Qu'ils soient proclamés par le texte fondamental ne suffit pas. Les pouvoirs publics sont également sollicités pour les protéger et les promouvoir. L'attitude active de l'État ne caractériserait donc pas les seuls droits-créances. L'interrogation sur le contenu exact des alinéas 5 et 10 à 13 du préambule de la Constitution de 1946 demeurait théorique tant que ces dispositions n'étaient pas appliquées. L'interprétation qu'en délivre désormais le juge constitutionnel permet de constater qu'ils fondent des principes appelant l'intervention de l'État pour mettre en oeuvre un objectif social autonome. S'ils conservent ainsi une certaine spécificité par rapport à des droits principalement défensifs (II), encore faut-il relever la diversité des principes sociaux ainsi déduits du préambule (I), mettant en cause l'unité d'une catégorie de droits-créances constitutionnels.

I. La diversité des principes sociaux déduits du préambule de 1946

L'attitude active du législateur pour mettre en oeuvre les principes sociaux déduits du préambule recouvre deux modalités distinctes de concrétisation. Dans un premier cas, le législateur intervient en adoptant une réglementation poursuivant un objectif social - dégager des emplois, des logements, protéger la santé publique - sans établir corrélativement de prérogative individuelle opposable à l'État. Le caractère collectif des mesures prises justifie de parler de principes portant sur une politique sociale. Dans un second cas, le législateur doit déterminer les modalités selon lesquelles l'individu peut prétendre à l'obtention de prestations concrètes, matérielles, dont la charge pèse en dernier ressort sur la puissance publique. Or, les questions contentieuses soulevées devant le juge de la loi apparaissent aussi sensiblement différentes selon que l'un ou l'autre type de principes est en jeu.

A. Les principes relatifs à une politique sociale

La possibilité de déduire du préambule de 1946 des principes relatifs à une politique sociale trouve une première illustration dans la décision Lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme de 1991. Le Conseil constitutionnel y juge que les mesures visant à interdire ou restreindre la publicité en faveur du tabac et de l'alcool sont « destinées à garantir à tous, conformément au 11e alinéa du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, »la protection de la santé" "(7). Cette dernière disposition est interprétée ici comme visant la santé publique. Sa mise en oeuvre ne se traduit en rien par l'aménagement d'un droit individuel. Il s'agit au contraire d'une mesure d'intérêt général, susceptible de concerner un nombre indéterminé de personnes.

L'alinéa 5 du préambule de 1946, en ce qu'il dispose que « chacun a [...] le droit d'obtenir un emploi » appelle des mesures de concrétisation du même type. Les projets d'organisation du travail de 1848 écartés, c'est un truisme que d'affirmer qu'il ne saurait garantir l'accès à un bien - l'emploi - à toute personne au chômage. Plutôt que de l'écarter des normes de référence de son contrôle en tant « qu'énoncé exigeant quelque chose d'impossible »(8), le Conseil constitutionnel en fait le fondement des politiques législatives visant à favoriser le niveau d'emploi le plus élevé possible. Il en va ainsi d'une mesure de partage du travail comme les trente-cinq heures(9) ou d'une définition plus restrictive du licenciement pour motif économique(10). À défaut d'établir un droit exigible de l'État, ces mesures tendent à agir favorablement sur le marché du travail, par la création ou le maintien d'emplois. Elles interfèrent ce faisant dans des relations de droit privé. Or, si la finalité sociale poursuivie peut légitimer des restrictions aux droits fondamentaux, celles-ci ne sauraient aller jusqu'à leur porter une atteinte substantielle. La nouvelle définition du licenciement pour motif économique sera ainsi censurée comme portant à la liberté d'entreprendre une « atteinte excessive »(11) Les mêmes remarques peuvent être faites à propos de l'objectif de valeur constitutionnelle relatif à la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent, consacré en 1995(12). Cet objectif inspire des mesures telles que celles instituant une taxe sur les logements vacants(13), ou faisant obligation au bailleur de délivrer au preneur, s'il s'agit de son habitation principale, un logement décent(14). Mais la même limite du respect du contenu essentiel des droits fondamentaux s'applique ici, le Conseil constitutionnel censurant les atteintes substantielles portées par exemple à la liberté contractuelle(15). Les principes de politique sociale sont donc le plus souvent invoqués à l'appui de la loi déférée, comme justification de celle-ci. Le contentieux généré devant le juge constitutionnel concerne en grande partie les limites constitutionnellement admissibles de certains droits fondamentaux au nom d'un intérêt social reconnu par le texte constitutionnel.

La similitude des deux normes autorise une première réflexion sur la notion de droit-créance. Une doctrine quasi unanime pense que le recours à un simple objectif sur le logement décent manifeste le refus du Conseil constitutionnel de consacrer un vrai droit-créance. La solution au conflit avec les droits fondamentaux s'expliquerait par cette qualification : l'objectif de valeur constitutionnelle, par nature plus faible que le principe, céderait devant celui-ci(16). Une telle position implique a contrario qu'un droit au logement permettrait de justifier des atteintes substantielles aux droits fondamentaux. Or, le principe écrit du « droit d'obtenir un emploi », regardé comme le droit-créance type, n'autorise pas d'atteintes disproportionnées aux droits fondamentaux, comme le montre la décision sur la loi de modernisation sociale en ce qui concerne la liberté d'entreprendre. Ce constat invite à s'interroger sur la signification qui devrait être donnée à un droit-créance au logement. Mme Papaefthymiou a observé qu'il aurait pour corollaire « un devoir à la charge de l'État », devoir « d'accorder [aux démunis] les moyens d'accéder à un logement décent »(17). En effet, il est peu probable que l'obligation corrélative d'un droit à obtenir un bien - un logement - puisse peser sur un particulier seul. Un tel droit ne peut que reposer sur la solidarité nationale et donc avoir pour débiteur la puissance publique qui l'incarne(18). Cela ne veut pas dire que les mesures consistant par exemple à réglementer les contrats de location dans un sens favorable à la stabilité de la situation du locataire sont inutiles. Simplement, elles correspondent non à un droit au logement mais à des mesures de politique du logement. Outre que l'intérêt général suffirait probablement à les légitimer, elles se verront toujours opposer le respect du contenu substantiel du droit de propriété et de la liberté contractuelle. Il apparaît donc que le rattachement des principes de politique sociale à la catégorie des droits-créances tend à entretenir la confusion sur la signification possible de la notion.

Un second type de principes déduits du préambule de 1946 correspond mieux à l'idée d'une créance opposable à la collectivité. Il s'agit de ceux qui ont pour objet de garantir effectivement l'accès à une prestation matérielle publique. Encore leur statut exact n'est-il pas parfaitement défini par la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

B. Les principes garantissant l'accès à une prestation matérielle publique

L'alinéa 11 du préambule de 1946 vise à consacrer, sans contenir l'expression, le droit à la protection sociale. Saisi de textes instituant ou aménageant des prestations sociales, le Conseil constitutionnel a ainsi accepté de les contrôler au regard de cette disposition. Tel est le cas aussi bien de prestations d'aide sociale(19) que de prestations relevant des branches vieillesse(20), maladie(21) ou famille(22) de la sécurité sociale. On voit que dans cette hypothèse, la disposition constitutionnelle énonce au moins le principe d'un droit, lequel devient exigible dans le cadre des normes de concrétisation. Celles-ci permettent de revendiquer l'octroi d'une prestation matérielle dont la charge pèse en l'état sur la collectivité publique, directement ou par le biais de services publics qu'elle contrôle. Il est essentiel ici de relever l'imprécision de la terminologie habituelle qui fait référence à une obligation positive comme objet du droit. Elle laisse penser que cette obligation réside dans le fait même pour le Parlement d'intervenir, que la prestation consiste en l'édiction d'une réglementation. Or, le vote de la loi n'est qu'une façon d'aménager l'accès à une prestation concrète, laquelle constitue à proprement parler l'objet du droit. La même interprétation doit être faite de l'alinéa 13 du préambule de la Constitution de 1946(23) en ce qu'il énonce d'une part l'obligation d'un service public gratuit de l'enseignement, d'autre part celle d'un égal accès à l'instruction. Rapprochés l'un de l'autre, ces principes impliquent donc le droit à bénéficier sans discrimination des prestations du service public de l'enseignement(24). À l'inverse des principes portant sur une politique sociale, souvent invoqués pour justifier la loi, ceux ayant pour objet l'accès à une prestation matérielle le sont contre les textes déférés, pour contester des modalités d'accès à la prestation trop restrictives. Tout en faisant valoir que ces principes ne sauraient être privés de « garanties légales »(25), le Conseil constitutionnel n'a cependant jamais prononcé d'invalidation sur leur fondement. Dans la décision Égalité Français-étrangers de 1990, il a certes censuré l'exclusion de certains étrangers en situation régulière du bénéfice d'une prestation d'aide sociale mais sur le fondement du principe d'égalité(26).

Ce constat amène à s'interroger sur le contenu normatif exact des alinéas 11 et 13 du préambule de 1946. Ils ont certes pour objet de garantir les droits à des prestations sociales et à l'éducation. Mais ces droits devant être concrétisés, n'existent-ils que dans le cadre des normes de concrétisation et auquel cas, quelle est la signification des principes constitutionnels ? Ou le contenu de ces derniers est-il bien l'énoncé d'un droit fondamental de rang constitutionnel(27)? Une signification possible de telles dispositions est offerte par l'exemple espagnol. Dans ce pays, l'article 41 dispose que « les pouvoirs publics assureront à tous les citoyens un régime public de sécurité sociale garantissant une assistance et des prestations sociales suffisantes dans les cas de nécessité et, tout particulièrement, de chômage ». Selon le Tribunal constitutionnel, cet article consacre l'existence même de prestations sociales en cas de nécessité(28) et plus généralement celle d'un régime public de sécurité sociale. Ces exigences remplies, le droit à la sécurité sociale est un « droit de stricte configuration légale »(29). Autrement dit, la norme constitutionnelle est réduite à une garantie d'institution, limitant les hypothèses de censure à la suppression pure et simple de la sécurité sociale publique, ou en son sein des prestations répondant à une situation devant être protégée. Il est vrai cependant que cette interprétation restrictive peut sembler induite par le texte constitutionnel qui n'accorde que la protection la plus faible aux droits de troisième rang, dont fait partie l'article 41. En outre, l'alinéa 1 de l'article 53 prévoit que la loi doit respecter le contenu essentiel des seuls droits de premier et second rangs.

En l'absence de restrictions de ce type expressément posées par le texte fondamental, la délimitation d'un contenu essentiel du droit, protégé par la norme constitutionnelle, représente l'autre possibilité d'interprétation logique de telles dispositions. En effet, les institutions visant à concrétiser le droit une fois mises en oeuvre, le juge constitutionnel peut enfin se demander si l'aménagement du droit qui leur est opposable répond effectivement aux exigences constitutionnelles. Par exemple, un système d'assurance maladie étant en place, les prestations servies dans tel ou tel domaine permettent-elles véritablement de protéger la santé de l'individu ? Les principes garantissant des prestations en matière de protection sociale et d'enseignement invitent ainsi le juge constitutionnel à procéder, selon une formule italienne, à une « mesure minimale » des droits en cause. Implicite dans la jurisprudence du Tribunal constitutionnel portugais, la nécessité de délimiter un tel contenu minimum est expressément admise dans celle de la Cour constitutionnelle italienne(30). Le contrôle de ces juridictions peut alors porter non seulement sur l'existence même d'un ensemble de prestations mais aussi sur l'étendue du droit à prestation tel qu'aménagé par les normes de concrétisation et son adéquation aux exigences constitutionnelles.

La jurisprudence du Conseil constitutionnel semble pour sa part hésitante dans l'interprétation à donner des alinéas 11 et 13 du préambule de 1946. En matière d'éducation, il a surtout été amené à s'interroger sur les garanties, notamment financières, du service public(31). En matière de protection sociale, alors que de nombreuses saisines l'invitaient en définitive à protéger un contenu minimum des droits, il semble aussi orienter la norme constitutionnelle dans le sens d'une simple garantie institutionnelle. Par exemple, dans la décision sur la réforme des retraites de 2003, il a fait valoir que l'alinéa 11 « implique la mise en oeuvre d'une politique de solidarité nationale en faveur des travailleurs retraités »(32). Et il a constaté que « du point de vue de son économie générale, la loi déférée a mis en oeuvre l'exigence constitutionnelle précitée sans la priver de garanties légales »(33). La motivation semble limiter le contrôle exercé à l'existence d'un système de garanties suffisant, indépendamment de la façon dont le droit à l'assurance vieillesse est aménagé. Pourtant, rien dans le préambule ne justifie de restreindre les alinéas 11 et 13 à une garantie d'institution, en l'absence de limitation expresse de leur portée normative. En outre, un tel choix serait en contradiction avec les nombreuses réserves dont sont fréquemment accompagnées les déclarations de constitutionnalité. Initiée dès la première décision portant sur le droit de la protection sociale(34), cette pratique des réserves tend à proscrire des modalités d'application de la loi contraires à l'alinéa 11. Or, ces modalités concernant souvent les conditions concrètes d'accès à une prestation, le Conseil invite ce faisant à contrôler l'étendue du droit aménagé. Une annulation sur le fondement du préambule reviendrait ainsi à reconnaître que ce texte en protège un contenu minimum, que les autorités publiques doivent mettre en oeuvre et respecter.

Ces hésitations montrent que la distinction entre principes de politique sociale et principes garantissant des droits à prestations matérielles n'est pas clairement conceptualisée dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Elle est pourtant cruciale en termes contentieux et, en définitive, dans la recherche d'une notion opératoire de droits-créances. Avant d'y revenir, il faut noter que malgré leur diversité, les principes ainsi déduits du préambule conservent pour point commun de correspondre à un but social propre, énoncé de façon autonome par le texte constitutionnel. Il convient alors de s'interroger sur leur degré de spécificité par rapport à d'autres normes qui appellent également une concrétisation.

II. La spécificité des principes sociaux déduits du préambule de 1946

Il est désormais largement admis que tous les droits fondamentaux appellent une attitude active de l'État, en vue de leur promotion et de leur protection. Cette évolution n'hypothèque toutefois pas l'intérêt d'une typologie fondée sur la tendance dominante du droit. Une telle typologie peut même contribuer à dissiper certaines erreurs d'interprétation de la jurisprudence, comme celle consistant à considérer que tous les principes déduits des alinéas 5 et 10 à 13 du préambule de 1946 sont des droits-créances. Par ces dispositions, les rédacteurs du préambule visaient certes principalement la consécration de droits sociaux. Leur extrême généralité a toutefois permis au juge constitutionnel d'en déduire aussi des droits-libertés qui, s'ils doivent être concrétisés, n'en ont pas moins pour objet principal de faire obstacle à des ingérences étatiques.

A. Des principes sociaux distincts des obligations positives liées à des droits défensifs

Dans la période contemporaine, la protection juridictionnelle accrue des droits fondamentaux a permis au juge de la loi de mettre en exergue l'exigence non seulement de les respecter mais aussi d'en promouvoir un exercice effectif. Des obligations positives en découlent pour le législateur, dont on trouve des exemples dans la jurisprudence constitutionnelle française. Dans la décision Libertés universitaires de 1984, le Conseil censure ainsi l'institution d'un collège électoral unique pour la désignation des représentants des enseignants-chercheurs dans divers conseils universitaire(35). Il l'estime contraire tant à l'indépendance des professeurs d'université qu'à celle des autres enseignants-chercheurs. L'abrogation de la loi de 1968 à laquelle entendait procéder le texte déféré priverait par conséquent les enseignants des garanties exigées par les principes constitutionnels d'indépendance et de liberté d'expression(36). Il apparaît donc que ceux-ci appellent la mise en oeuvre par le législateur de garanties positives, en l'occurrence un aménagement adéquat des procédures de décision au sein de la communauté universitaire. Des décisions plus connues encore font peser sur le Parlement la charge d'assurer un exercice effectif de la liberté de communication. En matière de liberté de la presse par exemple, un dispositif adéquat doit assurer le pluralisme des quotidiens d'information politique et générale, objectif de valeur constitutionnelle lui-même garant de la liberté d'information des lecteurs(37). Le Conseil constitutionnel n'hésite pas à sanctionner des dispositions jugées insuffisantes pour assurer un réel pluralisme(38). À partir d'une analyse de la jurisprudence constitutionnelle allemande, le professeur Capitant expose les deux objets que recouvre plus précisément cette exigence d'effectivité. Dans un premier cas, l'obligation positive consiste à « créer le cadre nécessaire à l'exercice du droit fondamental invoqué »(39). Cette « obligation d'aménagement » est désignée dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel comme consistant à « adopter les modalités de mise en oeuvre d'un droit fondamental »(40). La décision Libertés universitaires de 1984 précitée l'illustre en ce qui concerne le principe d'indépendance des professeurs d'université, mais l'exercice de nombreux droits suppose un cadre juridique précis : liberté d'association, droit d'asile, liberté de conclure des conventions collectives... Dans un second cas, le législateur doit « assurer la protection des droits contre des dangers provenant de l'extérieur »(41), en particulier de tiers. La garantie du pluralisme vise ainsi à protéger la liberté d'information contre les entraves que sont susceptibles de dresser à son exercice les conditions socio-économiques modernes.

Dans la perspective d'une typologie opératoire des droits fondamentaux, ces observations ne conduisent toutefois pas à nier toute distinction entre droits défensifs et principes sociaux déduits du préambule de 1946. Les droits défensifs conservent principalement pour objet une obligation d'abstention de l'État, lui faisant interdiction de les limiter au-delà d'une certaine mesure. Les obligations positives qui leur sont liées sont toujours dérivées ou secondes, elles doivent faciliter la mise en oeuvre de son droit par le titulaire. À l'inverse, les principes sociaux du préambule contiennent uniquement des prescriptions d'action, qu'il s'agisse de mener une politique sociale ou d'aménager l'accès à certaines prestations concrètes. On ne saurait ainsi souscrire à une thèse comme celle de M. Meindl concluant à l'absence de pertinence de la distinction. Constatant que les droits-créances peuvent être invoqués « en défense »(42) contre les lois, pour faire obstacle à l'entrée en vigueur de celles leur portant atteinte, cet auteur conclut qu'ils peuvent donc « également être des droits de défense »(43). Outre que l'auteur ne précise pas la signification qu'il donne de la notion de droits-créances, ce qui le conduit à rattacher à la catégorie des principes qui n'en relèvent nullement(44), cette conclusion nous paraît excessive. Par exemple, si le législateur réglemente de façon plus restrictive les conditions d'octroi d'une prestation d'aide sociale, l'alinéa 11 pourrait servir de fondement à une censure. Dans ce cas, les principes de sécurité matérielle et du droit d'obtenir de la collectivité des moyens convenables d'existence joueraient effectivement « comme »cran d'arrêt« à l'intervention législative »(45). Il n'en résulte pas que ces principes constitutionnels deviennent des droits défensifs, l'objet du droit demeurant l'obtention d'une prestation matérielle, l'aide sociale en cause. On ne saurait déduire de la conséquence contentieuse du constat d'invalidation - l'obstacle à l'entrée en vigueur d'une loi - le changement de nature du droit.

Il est vrai en revanche qu'en raison des obligations positives qui leur sont désormais liées, l'objet d'un droit principalement défensif peut être à la fois négatif et positif : empêcher des immixtions excessives de l'État dans la liberté de la presse et obtenir de sa part l'édiction d'un dispositif anti-concentration par exemple. Toutefois, ces obligations positives se traduisent le plus souvent par l'adoption d'une simple réglementation. Elles impliquent donc une prestation normative, ce qui les distingue nettement des droits à prestations matérielles. Les hypothèses où l'exercice d'un droit défensif a pour corollaire nécessaire un droit à obtenir de la puissance publique une prestation matérielle semblent quant à elles limitées. À ce titre, on pourrait penser par exemple que la liberté d'enseignement, celle de créer des établissements privés mais aussi celle des parents d'élèves dans le choix d'un établissement, dépende dans son effectivité d'un financement public. Sans exclure l'existence d'une obligation de financement, une décision du Conseil constitutionnel de 1999 exclut toutefois d'en déduire un droit corrélatif pour chacun des établissements privés à une aide de l'État(46). Un autre cas dans lequel le Conseil pourrait décider que l'octroi d'une prestation matérielle est indissociable de l'exercice effectif d'un droit-liberté est celui du droit au recours. Pour les plus démunis, sa mise en oeuvre suppose indubitablement un droit à l'aide juridictionnelle. Mais la Haute juridiction française n'a jamais été saisie de la question(47).

Quoi qu'il en soit de cette question, l'importance d'une typologie opératoire des principes constitutionnels apparaît donc pour rendre compte avec exactitude de la jurisprudence. Il est vrai qu'en France, l'appréhension des principes fondés sur les alinéas 5 et 10 à 13 du préambule de 1946 a été compliquée par l'extrême généralité de ces dernières dispositions. Elle autorise un important travail d'interprétation du juge de la loi, ayant débouché sur la consécration de véritables droits défensifs.

B. Des principes devant être distingués des droits défensifs issus du préambule de 1946

Dès l'entrée en vigueur du préambule de 1946, ses alinéas 5 et 10 à 13 ont été désignés comme ayant pour objet la consécration de droits sociaux qualifiés de droits-créances. Il en est résulté une assimilation prégnante entre ces dispositions et cette notion. L'affirmation selon laquelle des droits-libertés en ont finalement été déduits peut dès lors surprendre. Elle s'explique pourtant aisément par l'intervention du travail d'interprétation du juge, dont l'importance est accrue en l'occurrence par la généralité des alinéas nous intéressant.

Un exemple particulièrement représentatif est fourni par l'alinéa 10 du préambule de 1946, lequel dispose que « la nation assure à l'individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ». En s'inspirant notamment de cette disposition, le Conseil d'État avait consacré en 1978 une norme plus précise relative au droit de mener une vie familiale normale(48). On sait que la décision Maîtrise de l'immigration de 1993 procède à une fidèle transposition de cette jurisprudence au niveau constitutionnel. Le Conseil y reconnaît, sur le fondement de l'alinéa 10, le même droit de mener une vie familiale normale, au bénéfice des nationaux et des étrangers dont la résidence en France est stable et régulière. Il ajoute de même que « ce droit comporte en particulier la faculté pour ces étrangers de faire venir auprès d'eux leurs conjoints et leurs enfants mineurs sous réserve des restrictions tenant à la sauvegarde de l'ordre public et à la protection de la santé publique »(49). Le principe ainsi énoncé va être et continue majoritairement d'être qualifié de droit-créance, au vu du postulat selon lequel l'alinéa 10 sur lequel il se fonde est un droit-créance. Or, cette position ne résiste pas à l'analyse. Il s'agit bel et bien de permettre à l'individu de créer et de développer des relations familiales, à l'abri de restrictions non justifiées de la puissance publique. Dans l'arrêt GISTI de 1978, le Conseil d'État condamnait une ingérence gouvernementale dans le déroulement de la vie familiale - consistant à conditionner l'accès au territoire national des membres de la famille au non exercice d'une activité professionnelle - ingérence que ne justifiait aucun motif d'intérêt général suffisant. De même, le Conseil constitutionnel censure des restrictions non justifiées à la liberté de l'individu de mener une vie familiale, consistant à imposer à l'étranger un délai de deux ans pour faire venir auprès de lui son nouveau conjoint après dissolution ou annulation d'un précédent mariage(50), ou à exclure le renouvellement de plein droit de la carte de résident en raison d'une simple menace pour l'ordre public(51).

À l'instar de nombreux autres droits défensifs, le droit de mener une vie familiale normale peut appeler des mesures positives de l'État. Ainsi, le droit au regroupement familial qui en est un corollaire, en tant qu'il interfère avec les prérogatives de l'État concernant le contrôle de l'entrée et du séjour des étrangers sur son territoire, ne peut être exercé sans que le législateur en définisse les modalités de mise en oeuvre. Le fait que le contentieux constitutionnel mettant en jeu le droit de mener une vie familiale normale concerne presque exclusivement les étrangers a sans doute contribué à mettre l'accent sur cette obligation positive d'aménagement et à pérenniser l'idée d'un droit-créance. Le Conseil constitutionnel a pourtant déduit d'une norme très générale sur la protection des conditions nécessaires au développement de la famille une norme plus précise sur la liberté de mener une vie familiale, liberté que l'on retrouve d'ailleurs à l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'homme.

Plus encore, une seule et même disposition du préambule de 1946 peut se prêter à des lectures normatives distinctes. Le principe de protection de la santé énoncé à l'alinéa 11 a été interprété comme un fondement des politiques de santé publique, telle la lutte contre les fléaux sociaux que sont le tabagisme et l'alcoolisme. Il sert par ailleurs de norme de référence pour le contrôle des lois aménageant le droit à des prestations d'assurance maladie. Enfin, un droit à la protection de la santé peut être entendu comme devant empêcher que des atteintes lui soient portées. C'est bien en ce sens qu'il était invoqué par les requérants dans la décision IVG de 1975. En répondant au moyen, le Conseil constitutionnel accepte de valider cette autre interprétation de l'alinéa 11(52). Et si le moyen est rejeté, c'est uniquement faute pour ce texte de désigner l'embryon comme titulaire d'un tel droit. Paradoxalement, la première décision faisant application d'une disposition vue comme ayant pour objet exclusif la consécration de droits-créances aboutit à la reconnaissance implicite d'un droit défensif.

Cette lecture libérale des alinéas du préambule de 1946 montre la nécessité d'une analyse attentive de la jurisprudence, permettant seule d'identifier les normes qui en sont déduites et les questions contentieuses qu'elles soulèvent. Les quelques hypothèses de consécration de droits défensifs une fois écartées, ces dispositions n'en sont pas moins au fondement de principes sociaux variés. La distinction entre principes de politiques sociales et principes garantissant des prestations matérielles ressort en effet des décisions du juge constitutionnel de façon incidente mais nécessaire, compte tenu de la signification qui pouvait être donnée aux alinéas en cause. La Haute juridiction ne semble pas en tirer toutes les conséquences, mettant plutôt l'accent sur la nécessité, qui leur est commune, d'une concrétisation pour laquelle une grande marge d'appréciation est reconnue au législateur. La doctrine continue de même de voir dans les alinéas 5 et 10 à 13 du préambule une catégorie homogène de droits-créances, décrits le plus souvent comme de simples objectifs. Il ne nous semble pourtant pas que cette notion puisse expliquer l'ensemble de la jurisprudence fondée sur ces dispositions. Dans un premier cas, la norme constitutionnelle pose une finalité sans prédéterminer les moyens à mettre en oeuvre pour l'atteindre. En vue par exemple de faciliter l'accès à l'emploi, le législateur peut aussi bien décider, dans le respect des principes constitutionnels, de restreindre la possibilité de licencier que de favoriser au contraire la flexibilité du travail. S'agissant des principes de politiques sociales, on peut donc si l'on veut parler d'objectifs ou plutôt de principes purement finalistes. À l'inverse, les principes ayant pour objet de garantir l'accès à des prestations matérielles contiennent une prescription d'action précise : mettre en place un système de prestations permettant d'accéder aux soins, se substituant aux revenus du travail en cas de chômage ou de retraite... Bien entendu, on peut ici aussi parler dans une certaine mesure de normes finalisées. Le professeur Alexy relève d'ailleurs que d'une façon générale, tous les droits sociaux, mais aussi toutes les obligations positives liées à des droits fondamentaux « imposent à l'État la poursuite d'objectifs déterminés »(53), à l'inverse des droits de défense qui « ne disent rien quant aux fins qu'il doit poursuivre »(54). Cela étant, dans la mesure où ils impliquent la mise en oeuvre de moyens définis, les droits à prestations matérielles ne sauraient être assimilés à de simples finalités au contenu indéterminé. En définitive, la qualification de droit-créance devrait leur être réservée, si l'on veut en faire une notion opératoire visant des normes aux caractéristiques et au régime contentieux communs. Notons que cette notion de droits-créances au sens strict remonte en fait aux débats constituants des années 1789-1793. Un certain nombre de révolutionnaires entendent conceptualiser des créances individuelles minimales dans les domaines de l'assistance et de l'instruction(55). La fréquente référence à une dette de la société entend en souligner le caractère collectif, seul l'État pouvant alors l'assumer. Ce retour aux origines éclaire l'emploi persistant dans le texte de 1946 de termes comme la nation ou la collectivité pour désigner le débiteur des droits consacrés aux alinéas 10 à 13. Loin de manifester l'imprécision des principes en cause, comme il a souvent été dit, il souligne au contraire une exigence de solidarité nationale que seule la puissance publique peut mettre en oeuvre. À l'heure de déficits sociaux records, la question de savoir si la concrétisation du préambule implique le recours au service public pourrait bien se poser. Une réponse négative, en dehors du cas de l'enseignement seul explicitement tranché par le texte, sonnerait le glas d'une notion de droit-créance entendue comme corrélative d'une dette pesant sur l'ensemble de la collectivité nationale. Sa fortune et sa pérennité dans le vocabulaire doctrinal apparaîtraient dès lors bien singulières au regard de la réalité de ses traductions dans le droit constitutionnel positif.

(1) G. Burdeau, Les libertés publiques, LGDJ, 1961, p. 21.
(2) R. Pelloux, « Vrais et faux droits de l'homme, problèmes de définition et de classification », RD publ., 1981, p. 54.
(3) J. Robert et J. Duffar, Droits de l'homme et libertés fondamentales, Montchrestien, 5e éd., 1994, p. 64.
(4) J. Rivero, Les libertés publiques, t. 1, Les droits de l'homme, PUF, Thémis, 1995, p. 100.
(5) X. Prétot, « Les bases constitutionnelles du droit social », Dr. soc., n° 3/1991, p. 194.
(6) Ibidem, p. 195.
(7) Cons. const., n° 90-283 DC du 8 janv. 1991, Lutte contre le tabagisme et l'alcoolisme, cons. 8, Rec. 11.
(8) O. Pfersmann, in L. Favoreu et al., Droit des libertés fondamentales, Dalloz, 2e éd., 2002, p. 114.
(9) Cons. const., n° 98-401 DC du 10 juin 1998, Loi sur les 35 heures I, cons. 26, Rec. 258 ; Cons. const., n° 99-423 DC du 13 janv. 2000, Loi sur les 35 heures II, cons. 27, Rec. 33.
(10) Cons. const., n° 2001-455 DC du 12 janv. 2002, Loi de modernisation sociale, cons. 46, JO du 18 janv. 2002, p. 1053.
(11) Cons. 50.
(12) Cons. const., n° 94-359 DC du 19 janv. 1995, Diversité de l'habitat, cons. 7, Rec. 176.
(13) Cons. const., n° 98-403 DC du 29 juill. 1998, Taxe d'inhabitation, cons. 10 à 20, Rec. 276.
(14) Cons. const., n° 2000-436 DC du 7 déc. 2000, SRU, cons. 54-56, Rec. 176.
(15) Ibidem cons. 52.
(16) E.-P. Guiselin, « L'accès à un logement décent et le droit de propriété : ni vainqueur, ni vaincu », Petites Affiches, n° 51/2000, p. 12 ; B. Mathieu et M. Verpeaux, note, Petites Affiches, n° 151/1999, p. 32 ; D. Rousseau, Sur le Conseil constitutionnel, La doctrine Badinter et la démocratie, Descartes et Cie, 1997, p. 177 ; L. Favoreu et al., Droit des libertés fondamentales, op. cit., p. 261 ; J.-E. Schoettl, note, AJDA, 20 sept. 1998, p. 706.
(17) S. Papaefthymiou, « De l'inégalité devant le toit, la décision du Conseil constitutionnel relative au logement décent au prisme de la théorie du droit », RFAS, 1998, p. 68.
(18) Outre les mesures de réglementation du secteur privé du logement, le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de rattacher à l'objectif les interventions publiques directes, en particulier en matière de logements sociaux. Il ne s'interdit pas d'examiner des mesures nouvelles au regard de l'objectif mais les principes du contrôle exercé demeurent flous (Cons. const., n° 94-359 DC du 19 janv. 1995, préc., cons. 9 ; Cons. const., n° 95-371 DC du 29 déc. 1995, Loi de finances rectificative pour 1995, cons. 6, Rec. 265). Tout au plus peut-on déduire de la jurisprudence la nécessité d'une concrétisation de l'objectif, lequel ne doit pas être privé de « garanties légales » (Cons. const., n° 94-359 DC du 19 janv. 1995, cons. 8).
(19) V. par ex. en dernier lieu, Cons. const., n° 2003-487 DC du 18 déc. 2003, Loi portant décentralisation en matière de RMI et créant un RMA, cons. 4-9, JO du 19 déc. 2003, p. 21686.
(20) Cons. const., n° 2003-483 DC du 14 août 2003, Loi portant réforme des retraites, JO du 22 août 2003, p. 14343.
(21) V. par ex. Cons. const., n° 99-416 DC du 23 juill. 1999, CMU, Rec. 100.
(22) Cons. const., n° 97-393 DC du 18 déc. 1997, Allocations familiales, Rec. 320.
(23) L'alinéa 12 a aussi pour objet de consacrer un tel droit à prestation matérielle, droit à indemnisation face à des « risques » exceptionnels, tels que la guerre mais aussi les cataclysmes naturels. En l'absence de jurisprudence véritablement pertinente le concernant, nous nous permettons de l'écarter des présents développements.
(24) Sur la question de l'égal accès à l'enseignement, v. Cons. const., n° 2001-450 DC du 11 juill. 2001, DDOSEC, cons. 33, Rec. 82. Sur l'application de cette décision par le juge administratif, v. CAA, Paris, 6 nov. 2003, Union nationale inter-universitaire, n° 02PA02821, note Z. Ait-El-Kadi, AJDA, 24 nov. 2003, p. 2120.
(25) Cons. const., n° 2003-483 DC du 14 août 2003, préc., cons. 7.
(26) Cons. const., n° 89-269 DC du 22 janv. 1990, Égalité entre Français et étrangers, cons. 35, Rec. 33.
(27) Nous écartons l'hypothèse de la consécration d'un simple droit à l'égalité dans la jouissance de prestations publiques, que l'on pourrait être tenté d'établir au vu de la décision de 1990. Il est en effet clair que les alinéas 11 et 13 pourraient faire obstacle à la suppression pure et simple de toute prestation. Notons en revanche que le droit à l'égalité de traitement suffit à expliquer la jurisprudence Gaygusuz de la Cour européenne des droits de l'homme, jurisprudence reprise par les juridictions ordinaires françaises et qui, en qualifiant les droits à prestations sociales de droits patrimoniaux, interdit les discriminations arbitraires dans leurs modalités d'attribution.
(28) STC 103/1983 du 22 nov. 1983, FJ n. 3, Rec. 1983, t. VII, p. 291.
(29) STC 37/1994 du 10 févr. 1994, FJ n. 3, Rec. 1994, t. XXXVIII, p. 429.
(30) Nous nous permettons de renvoyer sur ce point à notre thèse, Les « droits-créances » constitutionnels, Aix-Marseille III, dir. L. Favoreu, 15 déc. 2001, dactyl., pp. 336-369 (à paraître).
(31) V. en dernier lieu Cons. const., n° 2003-471 DC du 24 avr. 2003, Loi relative aux assistants d'éducation, JO du 2 mai 2003, p. 7642 (sur les crédits relatifs aux assistants d'éducation).
(32) Cons. const., n° 2003-483 DC du 14 août 2003, préc., cons. 7.
(33) Cons. 8.
(34) Cons. const., n° 86-225 DC du 23 janv. 1987, Amendement Séguin, cons. 17, Rec. 13.
(35) Cons. const., n° 83-165 DC du 20 janv. 1984, Libertés universitaires, cons. 28, Rec. 30.
(36) Cons. 42.
(37) Cons. const., n° 86-210 DC du 29 juill. 1986, Régime de la presse, cons. 20, Rec. 116.
(38) Cons. 24.
(39) D. Capitant, Les effets juridiques des droits fondamentaux en Allemagne, LGDJ, 2001, p. 207.
(40) Ibidem, p. 208.
(41) Ibidem, p. 239.
(42) T. Meindl, La notion de droit fondamental dans les jurisprudences et doctrines constitutionnelles françaises et allemandes, LGDJ, 2003, p. 219.
(43) Ibidem, p. 216.
(44) C'est-à-dire des principes qui ne sont ni des principes de politique sociale, ni des principes fondant des droits à prestations matérielles si l'on veut maintenir l'appellation générique de droits-créances en ce qui les concerne. Sur le rattachement aux droits-créances de droits qui sont en fait défensifs, v. infra B.
(45) T. Meindl, La notion de droit fondamental..., op. cit., p. 219.
(46) Cons. const., n° 99-414 DC du 8 juill. 1999, Liberté de l'enseignement supérieur, cons. 8 et 11, Rec. 92 ; v. J.-E. Schoettl, note, AJDA, n° 9/1999, pp. 691-692 ; L. Favoreu et L. Philip, Les grandes décisions du Conseil constitutionnel, Dalloz, 12e éd., 2003, pp. 347-348.
(47) On sait en revanche que malgré l'inexistence d'une clause sur le droit à l'aide judiciaire en matière civile dans la Convention européenne des droits de l'homme, la Cour de Strasbourg exige que l'État fournisse l'assistance gratuite d'un avocat si celle-ci est indispensable à un accès effectif au juge. Le célèbre arrêt Airey du 9 octobre 1979 estime cette assistance indispensable si la loi prescrit la représentation par un avocat ou en raison de la complexité de la procédure ou de la cause. V. en ce qui concerne l'appréciation du système français d'aide juridictionnelle les arrêts du 26 févr. 2002, Del Sol c/ France et Essaadi c/ France (n° 46800/99 et 49384/99), qui introduisent semble-t-il une inflexion de la jurisprudence Airey en ce qui concerne l'obligation d'une assistance gratuite en cas de représentation obligatoire par un avocat.
(48) CE, Ass., 8 déc. 1978, GISTI, Rec. 493.
(49) Cons. const., n° 93-325 DC du 13 août 1993, Maîtrise de l'immigration, cons. 70, Rec. 224.
(50) Cons. 75.
(51) Cons. const., n° 97-389 DC du 22 avr. 1997, Certificats d'hébergement, cons. 45, Rec. 45.
(52) Cons. const., n° 74-54 DC du 15 janv. 1975, IVG, cons. 10, Rec. 19.
(53) R. Alexy, Teoria de los derechos fundamentales, Madrid, Centro de estudios constitucionales, 1997, p. 430.
(54) Ibidem, p. 429.
(55) M. Borgetto, La notion de fraternité en droit public français, Le passé, le présent et l'avenir de la solidarité, LGDJ, 1993, pp. 143-198.