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L'incidence financière des décisions du juge constitutionnel

Didier RIBES - Professeur à l'Université Paul Cézanne Aix-Marseille III - GERJC Institut Louis Favoreu CNRS UMR 6201

Cahiers du Conseil constitutionnel n° 24 (Dossier : Le pouvoir normatif du juge constitutionnel) - juillet 2008

La Constitution, combien ça coûte ? Derrière cette interrogation en apparence simple, peut-être même simpliste, se profilent en réalité de très lourdes problématiques sur les modalités de mise en œuvre des programmes constitutionnels et de concrétisation des droits fondamentaux. Tout particulièrement dans le cadre de constitutions de transformation comme celle d'Afrique du Sud, le pouvoir normatif du juge constitutionnel rencontre tôt ou tard l'obstacle budgétaire ; sa dimension financière est nécessairement interrogée. La question de l'incidence financière des décisions du juge constitutionnel ne peut donc être limitée au contrôle de constitutionnalité des normes budgétaires, même si celui-ci peut se prévaloir d'une certaine spécificité(1). Elle ne saurait d'autant moins être réduite à la dimension budgétaire de la justice constitutionnelle(2).

Toutes les décisions du juge constitutionnel n'ont pas une incidence négative sur les finances publiques, qu'elles étendent, par exemple, le champ d'une imposition ou réduisent la portée d'une prestation. Ainsi, le Conseil constitutionnel a-t-il élargi la base d'imposition de la taxe pesant sur les imprimés gratuits et non demandés en censurant, sur le fondement du principe d'égalité fiscale, l'exemption de ceux qui sont nominativement adressés aux particuliers(3). Mais la problématique, celle qui confronte le plus fortement pouvoir normatif du juge constitutionnel et compétence financière du Parlement, concerne les décisions qui ont une incidence financière négative pour l'État, soit qu'elles génèrent des dépenses, soit qu'elles diminuent les recettes. Si les conséquences financières de certaines décisions du Conseil constitutionnel ont été parfois soulignées ou dénoncées(4), cette question a été peu évoquée par la doctrine française(5). En revanche, elle a suscité et continue de produire dans d'autres pays des débats passionnés(6). Ces débats, comme cette étude au cadre limité, se concentrent sur les implications financières les plus sensibles de l'exercice de la justice constitutionnelle. Ils n'omettent pas pour autant que les rapports entre contrôle de constitutionnalité et enjeux financiers sont bien plus vastes. Le contentieux de la responsabilité de l'État pour inconstitutionnalité soulève des problématiques comparables à celles de la « satisfaction équitable » en droit conventionnel(7). De même, de nombreuses décisions constitutionnelles, comme les arrêts interprétatifs de rejet « à valeur additive » en Italie, ont une incidence financière sans pour autant produire d'impact significatif sur les dépenses publiques en raison de leurs effets inter partes.

Le pouvoir normatif du juge constitutionnel devient-il illégitime dès lors qu'il produit des charges supplémentaires pour les finances publiques ? La réponse doit être négative car, en délimitant les obligations financières de l'État dérivant directement de la Constitution, chaque cour constitutionnelle ne s'attribue pas une fonction spécifique et indue. Le coût financier inhérent à l'application de la Constitution est le fondement de la décision du juge constitutionnel (I). Par ailleurs, le juge constitutionnel, dans le cadre de sa mission, s'attache à fixer le « juste prix » de la constitutionnalité des dispositifs législatifs qui lui sont soumis (II).

I. Le coût de la Constitution, fondement de la décision du juge constitutionnel

L'affirmation d'obligations financières à la charge de l'État par une cour constitutionnelle remettrait en cause le droit budgétaire du Parlement et méconnaîtrait ainsi la réserve de loi. Tel est l'argument spécifiquement avancé en la matière. La reconnaissance du poids financier des politiques constitutionnelles conduit à relativiser la réserve de compétence ainsi reconnue au législateur financier (A). Pour autant, les implications financières tirées de la Constitution ne peuvent s'inscrire que dans un cadre, réaffirmé en droit constitutionnel comparé, celui des ressources effectivement disponibles (B).

A. Une limite relativisée : la réserve de loi

La place du contrôle budgétaire du Parlement dans l'affirmation des démocraties contemporaines explique sans doute la référence appuyée à la réserve de loi en matière financière, notamment en Allemagne(8). La doctrine italienne s'est également interrogée sur le point de savoir si l'article 81 alinéa 4 de la Constitution aux termes duquel « toute autre loi portant création ou aggravation des charges doit préciser les moyens d'y pourvoir » pouvait être opposé à la Cour constitutionnelle(9). L'existence d'une réserve de loi en matière d'autorisation des dépenses publiques interdirait-elle à la Cour de prononcer des arrêts à dimension prestative ? Au-delà d'une assimilation très discutable entre la loi et un arrêt de la Cour(10), certains auteurs ont pu souligner que les arrêts générant des dépenses nouvelles ou accrues sans pouvoir prévoir la couverture financière nécessaire produiraient une inconstitutionnalité dérivée de la loi dès lors que cette dernière, grevée de nouvelles charges, ne respecterait plus les exigences de l'article 81 alinéa 4. Mais l'idée même d'une réserve de loi opposable au juge constitutionnel a été rejetée par la majorité de la doctrine car sa signification opérationnelle s'exprime dans les rapports entre le Gouvernement et le Parlement(11). L'article 81 de la Constitution ne fixe pas « un principe général d'équilibre financier qui opère à 360 degrés··· »(12). Dans cette logique, la Cour constitutionnelle a pu affirmer que « la valeur constitutionnelle de l'équilibre financier, tirée de l'article 81 (···) ne constitue pas (···) une limite dans la prise de décisions qui ont une incidence sur les recettes et les dépenses publiques »(13).

La compétence du législateur en matière financière ne saurait faire obstacle à l'identification, par le juge constitutionnel, de dépenses constitutionnelles obligatoires pour le budget de l'État. Ces dépenses sont nécessaires à la concrétisation de nombreuses normes constitutionnelles, même si le débat se focalise bien souvent sur la réalisation des droits sociaux. La jurisprudence ne fait ainsi que mettre en lumière le coût financier intrinsèque de la Constitution. Il reste que la contrainte constitutionnelle pesant sur le législateur financier est, sans doute, plus importante que la présentation qui en est généralement faite ne le laisse percevoir, et elle ne saurait, en tout cas, se limiter à un encadrement formel de son exercice. « Si la dépense est imposée par la Constitution···, l'équilibre budgétaire qui doit être préservé ne pourrait être utilisé comme argument pour empêcher l'affirmation de la Constitution, mais seulement pour imposer aux organes qui en ont le pouvoir (c'est-à-dire le Gouvernement et le Parlement) d'agir en conséquence, en prenant les mesures nécessaires pour ajuster le budget ou en adoptant de nouvelles dispositions législatives destinées à accroître les ressources »(14). Le raisonnement conduit est similaire à celui du Conseil constitutionnel lorsqu'il impose au Gouvernement de présenter un projet de loi de finances rectificative en cas de bouleversement, en cours d'exercice, de l'équilibre économique et financier prévu(15).

Ainsi, la réserve de loi en matière financière n'altère ni ne diminue la compétence reconnue au juge constitutionnel. Toutefois, l'incidence des décisions de constitutionnalité sur les comptes de l'État est une donnée qui doit être prise en compte dans le jugement de constitutionnalité. La Consulta a souligné que « la valeur constitutionnelle de l'équilibre financier, tirée de l'article 81 de la Constitution (···) représente un élément de la pondération d'ensemble des valeurs constitutionnelles opérée au sein du jugement de constitutionnalité des lois »(16).

Par ailleurs, comme dans d'autres domaines, la sensibilité est ici liée au caractère intrinsèquement politique des décisions qui sont prises par le législateur. C'est donc moins la réserve de loi que la marge d'appréciation du législateur qui est en jeu. En effet, en imposant une charge budgétaire supplémentaire, la juridiction constitutionnelle peut interférer avec la détermination, par les institutions démocratiques, des priorités financières. Il importe donc que le juge constitutionnel ne substitue pas son appréciation à celle du législateur dans la détermination des voies constitutionnelles à suivre et de leurs implications financières. Ces voies sont conditionnées par « la réserve du possible ».

B. Une limite réaffirmée : la « réserve du possible »

Certains textes constitutionnels intègrent explicitement ce que d'aucuns appellent le « principe de réalité ». Ainsi, les articles 26 et 27 de la Constitution sud-africaine définissent des droits « conditionnés » à un logement décent et à la sécurité sociale de la manière suivante : « L'État doit prendre des mesures législatives et toute autre mesure raisonnable, compte tenu de ses ressources disponibles, pour mettre en œuvre la réalisation progressive de ce droit ». Une telle constitutionnalisation ne fait que renforcer le réalisme du juge constitutionnel inhérent à l'application de la Constitution et au respect de ses dispositions(17).

La Cour constitutionnelle fédérale allemande a rappelé, dans le même sens, que la réalisation des droits fondamentaux se heurte à la « réserve du possible » entendue « dans le sens de ce que l'individu peut raisonnablement exiger de la société »(18). Elle a estimé, en conséquence, que le principe de l'État social de l'article 20 de la Loi fondamentale impose à l'État l'obligation de garantir un accès égal à l'enseignement universitaire mais dans les limites des possibilités budgétaires. Si de nombreux textes constitutionnels évoquent la marche vers le progrès économique et social, un tel objectif n'implique pas une linéarité des réformes sociales. Le Tribunal constitutionnel espagnol a pu souligner, à ce titre, que le taux d'augmentation des pensions dépend des circonstances économiques et sociales présentes et qu'en tout état de cause, la nécessité de répartir des ressources limitées interdit de déduire de la Constitution un droit à une augmentation constante(19). Plus largement, le contexte économique influe nécessairement sur les possibilités de concrétisation des droits-créances. Dans son arrêt Grootboom du 4 octobre 2000(20), la Cour constitutionnelle d'Afrique du Sud évoque ainsi une réalisation progressive de ces droits compte tenu des ressources disponibles. La Cour suprême du Canada a même fait référence à l'exception de crise économique pour limiter la protection réclamée de certains droits sociaux(21). Dans chaque affaire, le juge constitutionnel se doit de confronter les implications de la protection des normes constitutionnelles avec les contraintes financières et économiques. Alors sa décision permet d'établir le prix de la constitutionnalité.

II. Le prix de la constitutionnalité, expression de la décision du juge constitutionnel

Le prix de l'élimination d'une norme inconstitutionnelle est le résultat de la conciliation opérée entre l'efficacité donnée aux préceptes constitutionnels et la liberté de configuration financière laissée au Parlement. Afin de préserver cette dernière, le juge constitutionnel fait à la fois œuvre de modération (A) et d'imagination (B).

A. La modération du juge constitutionnel : le contrôle de la dépense de constitutionnalité

Le juge constitutionnel, dans l'exercice modéré de ses pouvoirs, se doit de vérifier l'ampleur et l'adéquation de la dépense de constitutionnalité même s'il ne dispose pas toujours des instruments et des informations nécessaires à une parfaite appréciation.

Dans l'affaire Tsotetsi (22), la Cour constitutionnelle sud-africaine a jugé qu'elle ne pouvait rendre une décision dont les effets financiers seraient démesurés. Dans sa décision National Coalition for Gays and Lesbians Equality and others v. Minister of Home Affairs and others (23), la Cour a pris soin de préciser quelles sont les différentes limites à l'intervention normative du juge constitutionnel. À ce titre, elle a estimé que, même lorsque l'action positive est par ailleurs justifiée, cette intervention ne doit pas être réalisée lorsqu'elle va imposer à l'État de supporter des dépenses supplémentaires non prévues. Ces jurisprudences montrent bien qu'un impact important de la décision juridictionnelle sur les charges publiques peut être considéré comme de nature à porter atteinte au pouvoir financier du Parlement.

Par ailleurs, l'ensemble des cours constitutionnelles reconnaissent aux pouvoirs publics une large marge d'appréciation dans le choix des décisions impliquant des dépenses publiques. Réciproquement, elles expriment toutes un particulier « self restraint » en la matière(24), même si certaines se montrent plus dynamiques, portées par une profonde exigence de transformation sociale.

En tout état de cause, le pouvoir discrétionnaire du législateur trouve sa limite dans le caractère raisonnable des mesures qui doivent être prises pour donner un caractère effectif aux droits et principes constitutionnels. La Cour constitutionnelle d'Afrique du Sud a tout particulièrement affirmé son aptitude à exercer un « reasonnableness review » dans son arrêt Grootboom (25). Elle entend contrôler, à ce titre, la conciliation « raisonnable » entre effectivité minimale des droits sociaux constitutionnels et limitation des ressources publiques(26). Les critères retenus par la Cour constitutionnelle sud-africaine sont ceux d'un programme cohérent, compréhensible et transparent répondant aux besoins à court, moyen et long termes. Pour autant, elle n'a sanctionné l'obligation d'action et de financement que dans les situations les plus graves marquées par l'urgence. La décision de la Cour constitutionnelle du 5 juillet 2002 relative à la distribution des médicaments anti-rétroviraux aux futures mères séropositives a souligné l'impact de l'urgence sur l'obligation positive constitutionnelle de l'État et le contrôle de son respect(27). Dans l'affaire Khosa, la Cour a également estimé que l'État devait mobiliser les ressources financières nécessaires pour étendre le bénéfice de certaines prestations d'assistance sociale à un groupe désavantagé, en l'occurrence les résidents étrangers en situation de grande pauvreté, alors même que le Gouvernement soutenait qu'il était raisonnable de limiter le droit à l'égalité pour des raisons financières(28).

La limitation des ressources financières ne peut plus véritablement constituer aujourd'hui une justification au refus de mettre en œuvre le programme constitutionnel mais elle impose aux pouvoirs publics, sous le contrôle du juge constitutionnel, de déterminer les priorités de l'action étatique en faveur des personnes les plus désavantagées ou vulnérables. Il n'est dès lors pas surprenant que la question posée aux cours constitutionnelles soit aujourd'hui moins celle de la concrétisation primaire des droits-créances que la conformité au principe d'égalité de dispositifs de prestation pré-existants(29). Ce contrôle d'égalité conduit bien souvent la juridiction constitutionnelle à agir sur la « voilure » d'un dispositif législatif. Elle étend le bénéfice de l'avantage patrimonial que la loi réservait à certaines catégories de personnes à d'autres catégories jusque-là expressément ou implicitement non bénéficiaires. Ces décisions sont justifiées par la nécessité de préserver des dispositifs législatifs à dimension patrimoniale par ailleurs conformes aux exigences constitutionnelles. Pour autant, cette action positive peut produire des répercussions financières notables. C'est la raison pour laquelle les juges constitutionnels ont développé différentes techniques contentieuses pour limiter l'impact financier de certaines de leurs décisions.

B. L'imagination du juge constitutionnel : les techniques contentieuses limitant l'impact financier de la décision

En Allemagne, la loi relative à la Cour constitutionnelle fédérale refuse, dans son article 79, alinéa 2, quatrième phrase, tout droit général au remboursement à l'égard de la puissance publique en cas d'inconstitutionnalité d'une loi fiscale(30). L'annulation de la loi est sans effet pour tous les avis d'imposition qui, bien que fondés sur une loi inconstitutionnelle, n'ont pas fait l'objet d'une opposition et ne font plus l'objet d'un litige devant les tribunaux. L'État n'est ainsi pas obligé de rembourser les impôts illicitement collectés.

Mais au-delà de cette hypothèse particulière, les Cours constitutionnelles ont conçu différentes techniques contentieuses pour limiter ou suspendre l'impact financier de certaines de leurs décisions. Les implications financières de l'exercice de la justice constitutionnelle ont été un puissant moteur de diversification des dispositifs décisionnels. Le juge a pu parfois cantonner une déclaration d'inconstitutionnalité à produire un effet ex nunc. En effet, certaines décisions de constitutionnalité, par leurs effets rétroactifs, impliquent le remboursement d'importants arriérés(31). Récemment, la Cour suprême du Canada a ainsi refusé une pleine application rétroactive du droit à pension pour le conjoint survivant au profit des couples de même sexe(32). Déclaration de simple inconstitutionnalité, jugement injonctif, déclaration d'inconstitutionnalité avec délégation au législateur : la variété des dispositifs imaginés montre le souci des juges constitutionnels d'assurer la sanction effective des normes inconstitutionnelles tout en évitant des conséquences financières excessives, et une remise en cause consécutive de leur légitimité. Il n'est pas étonnant que la diversification des dispositifs décisionnels du Conseil constitutionnel, au-delà des réserves d'interprétation, ait eu lieu essentiellement dans le champ budgétaire(33).

En ce domaine, il faut bien souligner que le caractère a priori du contrôle de constitutionnalité atténue sensiblement la problématique financière. Dès lors que la loi n'est pas entrée en vigueur, la suppression d'un avantage économique ou d'une prestation pour inconstitutionnalité ne lèse aucun bénéficiaire. Mais si l' « exception d'inconstitutionnalité » est finalement adoptée en France, la question de l'incidence financière des décisions du Conseil constitutionnel s'imposera tant au législateur organique qu'au juge constitutionnel lui-même.

Conclusion : le juge constitutionnel, gardien des finances publiques ?

Dans la jurisprudence la plus récente du Conseil constitutionnel, l'apparition, bien que timide, d'un contrôle de nécessité des dépenses fiscales sur le fondement du principe d'égalité fiscale ne pouvait que retenir l'attention(34). En effet, les Sages ont estimé qu'un avantage fiscal faisait supporter à l'État des charges disproportionnées par rapport à l'effet incitatif attendu de la mesure(35). La problématique de l'emploi des marges disponibles en période déficitaire peut sans doute s'inscrire en droit constitutionnel mais elle appelle un renforcement des sources et des justifications constitutionnelles dès lors qu'elle est déjà très présente, et non sans légitimité, dans le débat politique. L'ancien Président de la Cour constitutionnelle italienne Mauro Ferri a souligné également l'intérêt que la Cour porte « à la gestion raisonnable et équilibrée des ressources financières, de manière à assurer aussi aux générations futures la pleine jouissance des droits constitutionnellement protégés »(36). Lorsque le juge constitutionnel prend ainsi les traits d'un gardien scrupuleux des finances publiques, lorsqu'il entend réaliser un équilibre entre les droits des générations présentes et ceux des générations futures, peut-être met-il tout autant en question sa légitimité que lorsqu'il adopte des décisions « dépensières ». Mais il souligne heureusement la dimension générationnelle du droit constitutionnel et, en particulier, des droits fondamentaux(37) car, pour paraphraser Léopold Sédar Senghor, nous n'héritons pas de l'État de nos parents, nous l'empruntons à nos enfants.

(1) Philip (Loïc), « La spécificité et l'exemplarité du contrôle de constitutionnalité des lois financières », in Mouvement du droit public. Mélanges en l'honneur de Franck Moderne, Dalloz, Paris, 2004, p. 743. Voir également Valls (Julien), Le contrôle des normes législatives financières par les Cours constitutionnelles espagnole et française, LGDJ, Paris, 2002.
(2) Di Manno (Thierry), « L'autonomie financière des Cours constitutionnelles en Europe », in E. Douat (dir), Les budgets de la justice en Europe, La Documentation française, coll. « Perspectives sur la justice », Paris, 2001, p. 53. Le Conseil constitutionnel a réaffirmé l'autonomie financière qui est la sienne en tant que pouvoir public constitutionnel à l'occasion du contrôle de textes financiers (déc. 2001-448 DC du 25 juillet 2001, Loi organique relative aux lois de finances, cons. 25, Rec. p. 99 et déc. 2001-456 DC du 27 décembre 2001, Loi de finances pour 2002, cons. 45, Rec. p. 180).
(3) Déc. n° 2003-488 DC du 29 décembre 2003, Loi de finances rectificative pour 2003, Rec. p. 480 ; notes Schoettl (Jean-Eric), Les Petites Affiches, 28 janvier 2004, p. 5 ; Philip (Loïc), Dr. fisc., 2004, 782 ; Ribes (Didier), D. 2004, p. 1277. La censure circonscrite à certains termes de la disposition a permis d'assurer sa constitutionnalité par élargissement de la base d'imposition. Dans l'impossibilité de procéder à une telle intervention « chirurgicale » sur des catégories indûment exonérées, le Conseil constitutionnel avait dû, l'année précédente, déclarer inconstitutionnel l'ensemble de ce dispositif fiscal (déc. n° 2002-464 DC du 27 décembre 2002, Loi de finances initiale pour 2003, cons. 55 à 57, Rec. p. 583).
(4) Que l'on pense, par exemple, à la polémique qui a entouré la décision Nationalisations I du 16 janvier 1982, les méthodes d'évaluation préconisées par le Conseil constitutionnel ayant considérablement alourdi le coût de l'opération, ou plus récemment à la décision du 29 décembre 2005 censurant une validation législative pour un coût estimé d'un milliard d'euros.
(5) Citons toutefois Louis Favoreu qui avait pu souligner qu'il « incombe aux neuf sages la tâche délicate d'établir un équilibre entre le respect des droits des individus et des familles et l'intérêt général qui peut être un intérêt financier. Il n'est pas certain qu'il le fasse toujours de manière satisfaisante » (Favoreu (Louis), « Les sages et les deniers publics », Le Figaro, 2 janvier 1998). Voir également Favoreu (Louis) et Escarras (Jean-Claude), Intervention in Carusi (Vittoriana) (dir.), Le sentenze della Corte costituzionale e l'art. 81, u.c., della Costituzione, Actes du séminaire d'étude des 8 et 9 décembre 1991, Palais de la Consulta, Giuffrè, Milan, 1993, pp. 297 et s.
(6) En Italie, voir, entre autres, Donati (Filippo), « Le repercussioni delle pronunce giurisdizionali sull'equilibro di bilancio », in Bassanini (Franco) et Merlini (Stefano) (dir.), Crisi fiscale e indirizzo politico, Il Mulino, Bologne, 1995, p. 585 ; Groppi (Tania), « La quantificazione degli oneri conseguenze sul processo costituzionale », in P. Costanzo (dir.), L'organizzazione e il funzionamento della Corte costituzionale, Giappichelli editore, Turin, 1996, p. 269.
(7) Sur cette question, voir récemment Bîrsan (Corneliu), « Les aspects nouveaux de l'application des articles 41 et 46 de la Convention dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme » et de Salvia (Michele), « La satisfaction équitable au titre des mesures individuelles et la pratique des organes de la Convention européenne des droits de l'homme : qu'en est-il du principe de sécurité juridique ? », in Trente ans de droit européen des droits de l'homme. Études à la mémoire de Wolgang Strasser, Bruylant -- Nemesis, Bruxelles, 2007, pp. 19 et 45.
(8) Gusy (Christoph), « Les droits sociaux sont-ils nécessairement injusticiables ? », in Grewe (Constance) et Benoît-Rohmer (Florence) (dir.), Les droits sociaux ou la démolition de quelques poncifs, Presses universitaires de Strasbourg, 2003, p. 39.
(9) La doctrine italienne s'est divisée sur cette question. Pour une présentation des deux thèses, Di Manno (Thierry), Le juge constitutionnel et la technique des décisions interprétatives en France et en Italie, P.U.A.M. -- Economica, Aix-en-Provence -- Paris, 1997, pp. 423 et s.
(10) Sur ce point, Pizzorusso (Alessandro), « Les décisions de la Cour constitutionnelle et la couverture financière des lois », AIJC, IV-1988, p. 492.
(11) Zagrebelsky (Gustavo), « Problemi in ordine ai costi delle sentenze costituzionali » in Carusi (Vittoriana) (dir.), Le sentenze della Corte costituzionale e l'art. 81, u.c., della Costituzione, Actes du séminaire d'étude des 8 et 9 décembre 1991, Palais de la Consulta, Giuffrè, Milan, 1993, p. 108.
(12) Alesse (Roberto), « Note minime (···e non propriamente tecniche per una sentenza scontata) in tema di bilanciamento tra l'art. 81 e 38 Cost. », note sous Cour const. italienne, arrêt n° 211 du 17 juin 1997, Giur cost. 1997, p. 2137.
(13) Cour const. italienne, arrêt n° 260 du 23 mai 1990, cons. en droit n° 3, Giur. Cost. 1990, p. 1550.
(14) Zagrebelsky (Gustavo), art. cit., p. 113.
(15) Déc. n° 2001-456 DC du 27 déc. 2001, Loi de finances pour 2002, cons. 4, Rec. p. 180.
(16) Cour const. italienne, arrêt n° 260 du 23 mai 1990, cons. en droit n° 3, Giur. Cost. 1990, p. 1550.
(17) Ribes (Didier), « Le réalisme du Conseil constitutionnel », Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 22, 2007, p. 132.
(18) BVerfGE 33, 303, 333 ; 43, 291, 314.
(19) Trib. const. espagnol, arrêt 134/1987 du 21 juillet 1987, B.O.E. n° 191 du 8 novembre 1987.
(20) Governement of Republic of South Africa v. Grootboom, 2001 (1) S.A. 46 (CC), § 38. Voir Philippe (Xavier), Chronique Afrique du Sud, R.F.D.C., 46-2001, p. 402 ; Dixon (Rosalind), « Creating dialogue about socio-economic rights : Strong-form versus weak-form judicial review revisited », I.Con, 2007, p. 391.
(21) Newfoundland (Treasury Board) v. Newfoundland Association of Public Employees (NAPE) (2004) 3 SCR 381. Sur cette décision, voir Choudhry (Sujit) et Hunter (Claire E.), « Measuring Judicial Activism on the Supreme Court of Canada : A Comment on Newfoundland (Treasury Board) v. NAPE », McGill Law Journal, vol. 48, p. 525.
(22) Tsotetsi v. Mutual and Federal Insurance Co Ltd, 12 sept. 1996, § 9.
(23) National Coalition for Gays and Lesbians Equality and others v. Minister of Home Affairs and others, 12 déc. 1999, intégralement traduite en français dans les Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 9, 2000, p. 66. Sur cette décision, Ribes (Didier), « Le juge constitutionnel peut-il se faire législateur ? », Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 9, 2000, p. 84.
(24) Voir par exemple la Cour suprême du Canada dans la décision Provincial Court Judges Association of NB v. NB (Minister of Justice) (2005) 2 SCR 285.
(25) Governement of Republic of South Africa v. Grootboom, 2001 (1) S.A. 46 (CC), § 38 à propos d'un programme d'urgence pour les sans-abri. Voir Philippe (Xavier), Chronique Afrique du Sud, R.F.D.C., 46-2001, p. 402.
(26) Wesson (Murray), « Grootboom and beyond. Reassessing the socio-economic jurisprudence of the South African Constitutional Court », South African Journal on Human Rights, 20, 2004, p. 284.
(27) Minister of Health v. Treatment Action Compaign (TAC), (n° 2) 2002 (5) SA 721, § 39.
(28) Kosa v. Minister of Social Development ; Mahlaule v. Minister of Social Development, 2004 (6) SA 505.
(29) Voir récemment, Liebenberg (Sandra) et Goldblatt (Beth), « The interrelationship between equality and socio-economic rights under South Africa's transformative Constitution », South African Journal on Human Rights, 23, 2007, p. 335. La littérature sud-africaine est abondante sur cette question.
(30) Pour une analyse critique de cette disposition, Schlaich (Klaus) et Korioth (Stefan), Das Bundesverfassungsgericht, C.H. Beck, Munich, 5e éd., 2001, p. 268.
(31) Par exemple Cour constitutionnelle italienne, arrêt n° 240 du 10 juin 1994, Giur. cost. 1994, p. 1970. Cet arrêt a justifié le remboursement d'arriérés de pension de réversion couvrant plus de dix années et bénéficiant à plus de 600 000 personnes.
(32) Canada (AG) v. Hislop (2007) SCC 10. Sur cette décision, Shmitz (Cristin), « Top court's restriction of Charter remedies seen as a major shift », 25, 42, The Lawyers Weekly 1, 24.
(33) Déc. n° 97-395 DC du 30 déc. 1997, Loi de finances pour 1998, RJC I-732, à propos des fonds de concours, et déc. n° 2005-530 DC du 29 déc. 2005, Loi de finances pour 2006, Rec. p. 168, à propos des mono-programmes. Sur cette jurisprudence, Barque (François), « Le Conseil constitutionnel et la technique de la »censure virtuelle" : développements récents », R.D.P., 2006, n° 5, p. 1409.
(34) Déc. n° 2007-555 DC du 16 août 2007, Loi TEPA, cons. 20, JO 22 août 2007, p. 13959.
(35) Le communiqué de presse du Conseil constitutionnel a précisé que le coût de la mesure relative au remboursement des intérêts d'emprunt aux personnes déjà propriétaires depuis moins de cinq ans s'élevait à 7,7 milliards d'euros.
(36) Cité par Pardini (Jean-Jacques), « Principe de gradualità et droits sociaux de prestation (ou l'effectivité partielle de la norme constitutionnelle en Italie) », in L. Gay, E. Mazuyer, D. Nazet-Allouche (dir.), Les droits sociaux fondamentaux. Entre droits nationaux et droit européen, Bruylant, coll. « À la croisée des droits », Bruxelles, 2006, p. 60.
(37) Cette idée a déjà été exprimée par le Professeur Peter Häberle. Cf. Häberle (Peter), La libertad fundamental en el Estado constitucional, Comares, Grenade, 2003, p. 261.