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Entretien avec M. Valery Zorkine, Président de la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie

Valéry ZORKINE

Cahiers du Conseil constitutionnel n° 28 (Dossier : Russie) - juillet 2010

Traduit du russe par Madame Diane Skoda


Biographie de Monsieur ZORKINE Valéry Dmitriévitch,
Président de la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie

Né le 18 février 1943 à Konstantinovka, petit village du district Oktiabrski du Territoire de Primorie (Russie orientale).

Après des études à la faculté de droit de Moscou (MGU), il enseigne comme maître de conférences au sein de cette même université ( 1964 à 1979). À partir de 1979, il est nommé professeur à la chaire de droit constitutionnel de l'Académie du ministère de l'intérieur, puis à la chaire des disciplines du droit public de la Haute école juridique de ce même ministère.

En 1990 et 1991, il dirige le groupe d'experts de la Commission constitutionnelle de la Fédération de Russie et travaille à une révision de la Constitution visant à la faire évoluer vers un régime présidentiel de type républicain.

Le 29 octobre 1991, il est élu juge à la Cour constitutionnelle sur proposition du groupe des députés « communistes pour la démocratie ». Il est alors nommé une première fois à la présidence de la Cour constitutionnelle le 1er novembre 1991. Il reste juge à la Cour constitutionnelle après sa démission de ses fonctions de président le 6 octobre 1993. Il est réélu à la présidence de la Cour en 2003, puis en 2006 et 2009.

Auteur de plusieurs ouvrages, notamment sur le penseur libéral russe Boris Nickolaevitch Tchitcherine, « Le pouvoir et le droit » ainsi que « l'État de droit ».


  • Monsieur le Président, vous avez été élu premier président de la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie en 1991-1993, avant d'être réélu à ce poste successivement en 2003, 2006 et 2009. Quel rôle et quelle place accorderiez-vous à la Cour Constitutionnelle au sein des institutions étatiques et comment évalueriez-vous sa contribution à la création et au développement d'un État de droit en Russie ?

Valéry Zorkine : La Cour constitutionnelle russe ne constitue pas seulement l'une des trois instances judiciaires suprêmes de la Russie. Il s'agit en réalité d'un organe du pouvoir d'État destiné à renforcer l'intégrité du pouvoir étatique en Russie et à protéger les droits constitutionnels et les libertés de ses citoyens et ce, en défendant la Constitution et en prenant position sur les problèmes les plus aigus qui apparaissent dans le domaine constitutionnel.

La Cour constitutionnelle occupe une place tout à fait spécifique au sein des institutions politiques de l'État russe. Dans la mesure où elle constitue un organe de justice constitutionnelle à l'échelle nationale, elle détient une compétence exclusive en matière d'interprétation des dispositions constitutionnelles ou des normes juridiques.

De ce point de vue, il est pratiquement impossible d'évaluer l'apport de la Cour à l'édification de l'État russe des points de vue démocratique, fédéral, juridique et social. En réalité, la Cour constitutionnelle a véritablement contribué à ce que la disposition constitutionnelle relative à l'État de droit devienne la norme en termes de défense des droits constitutionnels.

Soulignons ici que, d'un point de vue pratique, la Cour constitutionnelle russe s'oriente vers un recours croissant aux mécanismes consacrés à la protection des droits subjectifs individuels sur la base d'une affaire concrète et ce, conformément à la tendance dominante à l'échelle mondiale. En outre, le contrôle concret de constitutionnalité est non seulement un moyen de défense des droits constitutionnels, mais aussi un instrument efficace de protection de l'ordre juridique constitutionnel.

Car le passage brutal du régime communiste totalitaire à la démocratie naissante, à la fin des années 1980 et au début des années 1990, a eu pour effet que, dès sa création, notre modèle de justice constitutionnelle a eu comme objectif d'offrir le plus haut niveau possible de protection des droits constitutionnels et des libertés des citoyens. Par conséquent, on a inséré, dans le cadre de la justice constitutionnelle, les possibilités les plus larges de réalisation et de protection de ces droits et libertés. Ces possibilités sont donc le plus souvent plus importantes que celles qu'offrent les démocraties occidentales traditionnelles, dont certaines viennent d'introduire à leur tour des mécanismes semblables, tels que le droit du citoyen de contester de manière individuelle, dans une affaire qui le concerne, la constitutionnalité d'une disposition législative. Or ces mécanismes sont apparus chez nous il y a presque deux décennies déjà.

J'attirerai l'attention sur le fait que la Cour constitutionnelle adopte ses décisions en interprétant l'ensemble des valeurs constitutionnelles et en prenant en considération le stade de développement de la société à un moment historique précis. Elle assure la concordance des principes, valeurs et institutions garantis au niveau constitutionnel et, finalement, elle garantit leur équilibre. C'est donc de cette manière que nous définissons la place et le rôle de notre Cour constitutionnelle, ainsi que sa contribution à l'instauration de la primauté du droit et de la légalité constitutionnelle.

  • L'article 125 de la Constitution russe procède à l'énumération des compétences de la Cour. Cette énumération n'est-elle pas trop importante ? Comment la Cour arrive-t-elle à combiner dans la réalité des compétences aussi variées ?

V.Z : Je ne pense pas que l'on puisse juger l'ensemble des compétences dévolues à la Cour constitutionnelle russe comme étant trop important. D'une manière générale, ces compétences sont tout à fait caractéristiques des Cours constitutionnelles contemporaines. Soulignons de plus que, conformément à la loi relative à la Cour constitutionnelle auparavant en vigueur, dans les années 1991-1993, la Cour était investie d'une compétence bien plus large encore. En particulier, il nous incombait alors de trancher la question de la constitutionnalité des partis politiques. En outre, à la différence de la situation actuelle, la Cour pouvait introduire des recours de sa propre initiative, ce qui a suscité diverses interprétations ···

On peut estimer qu'aujourd'hui le champ des compétences dont notre organe est investi est désormais plus cohérent. Une lecture rationnelle des normes de contrôle abstrait (limité quant au nombre de requérants) et concret (limité quant aux conditions d'application des dispositions contestées dans une affaire spécifique) me paraît bien meilleure. L'équilibre des compétences propres à la Cour en matière de résolution des litiges relatifs à la compétence entre les différents organes des pouvoirs publics permet également de toujours garantir la constitutionnalité des fonctions du pouvoir étatique. Actuellement, même si ces litiges surviennent beaucoup plus rarement que pendant les années 1990, la Cour reste susceptible d'être sollicitée dans ce domaine.

En ce qui concerne les compétences relatives à l'interprétation de la Constitution, elles suscitent en théorie des discussions précises sur la question de savoir dans quelle mesure l'interprétation de cette source supérieure du droit, indépendamment de toute affaire précise, garantit une mise en application réelle et adéquate du contenu des dispositions constitutionnelles. Cependant, une série d'exemples révélateurs montre bien que c'est précisément l'interprétation abstraite menée par la Cour constitutionnelle qui a contribué à faire disparaître les controverses relatives aux questions de droit constitutionnel (par exemple, les questions relatives à l'activité législative, aux révisions de la Constitution, à la définition du statut des districts autonomes en tant que membres de la Fédération de Russie, etc.).

En ce qui concerne le problème de la coexistence des diverses compétences, celles-ci ne sont déjà plus si différentes les unes des autres. Car leur esprit demeure le même. Ainsi, il incombe à la Cour constitutionnelle de garantir la constitutionnalité des actions et des décisions de tous les organes des pouvoirs publics en Russie. Donc le champ de compétences de la Cour, qui peut nous sembler parfois hétéroclite, ne fait en réalité que refléter les multiples voies de cette obligation constitutionnelle.

  • Chaque année, il incombe à la Cour de statuer sur des milliers de requêtes. De quelle manière la Cour assure-t-elle l'examen d'un tel afflux de plaintes ?

V.Z : Le nombre de requêtes déposées auprès de la Cour constitutionnelle est en constante augmentation. Ainsi, en 2009, pour la première fois depuis la création de notre organe de justice constitutionnelle, ce chiffre annuel a excédé les 20 000.

Il va de soi que seul un faible nombre de plaintes, de demandes et de requêtes suscite une décision judiciaire qui va revêtir une dimension constitutionnelle. Dans ces conditions, le rôle de l'examen préliminaire des requêtes est devenu très important. Il incombe au greffe de la Cour constitutionnelle. Ce dernier est investi de la fonction de filtre des documents qui sont déposés conformément aux conditions formelles exigées. Il examine leur conformité au regard des exigences de la loi. Notons que ces exigences ne sont pas très élevées et que les droits avoisinent environ cent roubles c'est-à-dire à peine plus de deux euros.

De plus, la loi autorise les requérants à contester le résultat de l'examen du greffe et à exiger l'adoption d'une décision relative à l'admissibilité ou la non-admissibilité d'une requête directement auprès de la Cour constitutionnelle.

Afin de faciliter l'examen des requêtes, nous avons développé un système électronique moderne dans le cadre de la procédure judiciaire. Il revêt une importance non négligeable puisqu'il permet d'alléger le travail de manière considérable, compte tenu du très grand volume de documents brassés.

  • Quelles sont les modifications qui sont apparues au fur et à mesure que le nombre de requêtes déposées auprès de la Cour était en constante augmentation ? Quels sont les droits et les libertés sur lesquels les requérants fondent le plus souvent leurs demandes ?

V.Z : Au cours de la première phase du fonctionnement de la Cour, qui coïncide avec l'instauration du nouvel État russe, l'accent a été mis d'une manière prépondérante sur les droits civils et politiques. C'est pourquoi notre organe de justice constitutionnelle a été perçu, la plupart du temps, comme étant une sorte de « cour politique ».

Parallèlement, l'idée selon laquelle la Cour constitutionnelle constituait également un organe voué à la protection des droits économiques et sociaux ainsi que des autres droits s'est développée.

À l'heure actuelle, au sein de l'ensemble des requêtes, les requérants mettent l'accent principalement sur la protection des droits des travailleurs en matière de droit du travail, de retraites et d'autres droits économiques et sociaux, ainsi que sur la protection du droit de propriété et des autres droits patrimoniaux des citoyens et des personnes morales. Le nombre des requêtes relatives aux droits et garanties des libertés individuelles en matière pénale est traditionnellement élevé.

En ce qui concerne les évolutions relatives aux différents types de requérants, par exemple (notamment ces dernières années), les personnes à la tête d'une activité commerciale sont entrées dans la catégorie des requérants privés par une mesure spécifique, afin de protéger leurs droits économiques et financiers. De plus, la pratique a fait surgir un groupe particulier de requérants tels que les organes d'auto-administration locale qui déposent des requêtes au nom des habitants des municipalités (comme les associations territoriales de citoyens). Bien que la législation ne consacre pas directement ce droit pour les organes de l'auto-administration locale, la Cour constitutionnelle leur a accordé cette possibilité en ayant recours à une interprétation extensive, fondée sur le droit déjà accordé aux associations de citoyens de déposer une requête auprès de notre organe de justice constitutionnelle.

  • Les décisions rendues par la Cour constitutionnelle sont définitives et sans appel. Comment assurer leur exécution ?

V.Z : Notons avant tout que toute décision de la Cour constitutionnelle entraîne automatiquement la caducité de l'acte juridique ou de la norme entachés d'inconstitutionnalité.

Cependant, afin d'améliorer la qualité du système juridique, il convient de s'assurer que les dispositions en question disparaissent du corpus législatif.

Dans ces conditions, c'est précisément aux organes du pouvoir étatique, notamment au Gouvernement russe, qu'incombe l'obligation d'élaborer les projets de loi et les autres actes normatifs qui assurent la mise en conformité du dispositif juridique avec les décisions de la Cour constitutionnelle.

Non seulement la Cour reconnaît l'inconstitutionnalité des dispositions juridiques, mais elle est aussi en droit de procéder à l'interprétation de la véritable signification constitutionnelle d'une norme. Tous ceux auxquels incombe l'application du droit doivent se conformer à cette interprétation et ce, conformément à la loi fédérale constitutionnelle « De la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie ».

La Cour constitutionnelle russe n'est pas elle-même investie des fonctions d'exécution de ses propres décisions. Cependant, la doctrine russe considère comme une évidence que ses décisions, au même titre que la législation, sont exécutoires de plein droit.

Toutefois, nous n'en jugeons pas moins possible, si besoin est, d'informer les autres organes supérieurs du pouvoir étatique russe du fait que telle décision que nous avons adoptée n'a pas été transposée dans les amendements législatifs, afin d'insister sur l'adoption des mesures exigées par la Constitution.

Les listes des décisions de la Cour constitutionnelle que les organes normatifs ont omis d'exécuter font l'objet d'envois réguliers à la Douma d'État et au Gouvernement russe. Il convient de souligner que le nombre de décisions non exécutées est très faible.

  • Comment évaluez-vous le rôle de la Cour constitutionnelle, notamment en ce qui concerne l'interprétation des dispositions de la Constitution ? Quelle place ses prises de position juridiques occupent-elles dans le système juridique russe ?

V.Z : Je souhaiterais notamment attirer l'attention sur les spécificités de l'interprétation donnée par la Cour constitutionnelle et ce, au risque de me répéter par rapport à mes réponses précédentes.

Il existe une interprétation officielle de la Constitution, réalisée dans le cadre de la procédure spécifique d'interprétation abstraite (par le biais de l'adoption d'arrêts de la Cour à ce sujet). Ce type d'interprétation de la Constitution russe actuelle n'a eu lieu que dans douze cas. Différents points de vue coexistent à propos de l'autorité de cette interprétation, mais dans son ensemble, la doctrine reconnaît que les décisions adoptées par la Cour dans ce domaine ont une autorité égale à celle de la Constitution elle-même. En outre, je pense que dans le cadre de cette interprétation abstraite, le problème le plus important consiste, pour la Cour, à ne pas outrepasser ses compétences et à ne pas s'arroger un pouvoir normatif dans le domaine constitutionnel. J'estime que nous avons évité cet écueil···

En outre, pour toute décision comportant une dimension constitutionnelle, nous nous livrons à une interprétation des dispositions constitutionnelles applicables à une affaire donnée. Suite à cette interprétation, la Cour reconnaît les dispositions législatives comme étant conformes ou non-conformes à la Constitution, ou encore elle se livre à une véritable interprétation des dispositions contestées.

Dans ces conditions est apparue une doctrine relative aux prises de positions juridiques de la Cour constitutionnelle. Conformément à l'article 6 de la loi constitutionnelle fédérale « De la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie », l'application desdites positions juridiques, conçues comme formant une partie indissociable de la décision de la Cour constitutionnelle, fondée directement sur la Constitution de la Fédération de Russie, s'impose aux organes créateurs de droit et aux organes d'application du droit.

Notons que, dans l'ensemble, cette obligation est respectée. L'idée selon laquelle la définition de la Cour constitutionnelle revêt un contenu positif est déjà bien ancrée dans le système juridique russe. Dans ce type de décisions, la Cour éclaircit le sens constitutionnel de la norme.

Il va de soi qu'une telle approche ne trouve pas toujours une appréciation uniforme auprès des autres organes judiciaires russes, notamment les organes judiciaires suprêmes. Cependant, dans l'ensemble, nous jugeons tout à fait réussie notre collaboration avec les autres organes judiciaires afin de mettre en œuvre les décisions de la Cour constitutionnelle.

  • L'article 15 alinéa 4 de la Constitution de la Fédération de Russie dispose que « les principes généraux et les normes du droit international, ainsi que les traités internationaux auxquels la Russie est partie, font partie intégrante du système juridique de la Fédération de Russie ». Quelle place les traités internationaux occupent-ils dans le cadre du contrôle constitutionnel exercé par la Cour constitutionnelle russe ?

V.Z : Dans le cadre de son activité, la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie se fonde, avant tout, sur la Constitution de la Fédération de Russie qui a primauté sur les autres lois dans la hiérarchie des normes. En même temps, conformément à notre Constitution, les droits et les libertés de l'homme et du citoyen dans la Fédération de Russie sont reconnus et garantis conformément aux principes généraux et aux normes du droit international. Ces principes et ces normes, ainsi que les traités internationaux, font partie intégrante du système juridique de la Fédération de Russie (de plus, le traité international a primauté sur la loi en cas de conflit).

La tâche qui incombe à la Cour constitutionnelle consiste ici, en ayant recours, dans ses décisions, aux normes et aux principes du droit international, ainsi qu'aux dispositions des traités internationaux, à assurer l'adaptation des normes de droit international sur le sol juridique national, leur bonne concordance avec les traditions juridiques nationales et avec la société. Ainsi, la Cour constitutionnelle devient une sorte de vecteur des principes et normes internationaux sur le sol juridique national.

Soulignons notamment à cet égard le rôle tout à fait unique que joue la Convention européenne de protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales de 1950 par rapport aux normes traditionnelles du droit international et aux traités internationaux. On peut affirmer que, conformément aux dispositions constitutionnelles russes, cette Convention fonctionne de fait comme un instrument constitutionnel de reconnaissance et de protection des droits et des libertés de l'homme et du citoyen. La Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie qui, dans le cadre de ses raisonnements, se fonde sur les dispositions constitutionnelles, a également en même temps souvent recours à la Convention européenne, lorsqu'elle cherche des fondements juridiques supplémentaires afin d'étayer sa position juridique.

En même temps, la Cour constitutionnelle part du principe que la Constitution russe peut établir un niveau de protection des droits et des libertés encore plus élevé que celui offert par les actes juridiques internationaux.

Par exemple, en 2000, le fait que des dispositions de la Convention européenne relatives à l'auto-administration locale soient insérées dans les statuts de la région de Kursk n'a pas empêché le fait que les mêmes dispositions contenues dans la loi fondamentale de ce membre de la Fédération de Russie soient jugées non-conformes à la Constitution russe, car ces normes de droit international avaient été interprétées à l'échelle régionale de manière inconstitutionnelle, en diminuant le niveau des garanties relatives à l'auto-administration locale, consacrées à l'échelle constitutionnelle.

  • Comment les Russes perçoivent-ils la Cour constitutionnelle ?

V.Z : Voici la question qui se pose : les citoyens qui ont recours à la Cour sont nettement moins nombreux que ceux qui s'adressent aux autres organes judiciaires. De plus, on accueille généralement comme un processus qui va de soi l'augmentation du niveau de protection des droits des citoyens ou celle du nombre de garanties sociales, due aux décisions de notre Cour et aux spécificités d'exécution des décisions de notre organe, décrites ci-dessus et sont dites « de plein droit ». Et la population n'effectue pas toujours le lien direct avec notre activité. En revanche, les personnes qui accordent souvent de l'attention à notre Cour sont celles dont la requête a été rejetée lors de l'examen préalable ou celles insatisfaites des décisions de la justice constitutionnelle.

Cependant, d'après les échos de l'opinion publique qui nous parviennent, nous pouvons affirmer que la confiance attribuée par les citoyens à la Cour constitutionnelle ne se situe pas à un niveau plus bas que celle qu'ils accordent au système judiciaire pris dans sa totalité. Et les experts accordent fréquemment à la Cour une plus grande confiance. Notons que nous aspirons absolument dans notre travail à nous opposer à toute dérive populiste, dans la mesure où nous estimons qu'elle constituerait une menace importante pour notre procédure constitutionnelle.

  • Comment envisagez-vous l'avenir de la Cour constitutionnelle de la Fédération de Russie ?

V.Z : La Cour constitutionnelle est un organe qui assure la défense de la Constitution.

Ainsi, elle est investie aussi bien d'une fonction noble que d'une fonction tout à fait pragmatique, de routine, vouée à la protection de l'ordre constitutionnel.

C'est pourquoi je ne vois aucune raison qui justifierait à l'avenir une quelconque diminution du rôle de la Cour. En revanche, compte tenu de la crise économique et sociale qui sévit à l'échelle mondiale actuellement, crise liée en partie, sinon entièrement, à l'oubli des valeurs juridiques constitutionnelles qui font l'objet d'une reconnaissance universelle et à la perte de l'équilibre socio-économique fondé sur ces valeurs, la Cour a plus que jamais la capacité fondamentale d'être le gardien de cet équilibre au sein de la société et ce, en garantissant une base constitutionnelle solide.

Le maintien d'un tel équilibre se révélera indispensable à l'issue de la crise. C'est pourquoi la société, l'État et les citoyens seront toujours susceptibles d'avoir recours, à l'avenir, aux potentialités offertes par notre organe de justice constitutionnelle.