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Chronique de droits fondamentaux et libertés publiques

Julien BONNET - Professeur à l'Université de Montpellier CERCOP

Agnès ROBLOT-TROIZIER - Professeur à l'École de droit de la Sorbonne Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne Membre du CRDC - ISJPS (UMR 8103)

Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n° 52 - juin 2016 - p. 71 à 91

Une redéfinition des droits et libertés utile à la validation partielle de la loi sur l'Etat d'urgence

Conseil constitutionnel, 19 février 2016, Ligue des droits de l'homme, n° 2016-535 QPC

Conseil constitutionnel, 19 février 2016, Ligue des droits de l'homme, n° 2016-536 QPC

Le régime législatif de l'état d'urgence est globalement conforme à la Constitution. Telle est la conclusion qui peut être tirée des décisions du Conseil constitutionnel sur les mesures prises en application de l'état d'urgence depuis les attentats du 13 novembre 2015.

Le Conseil s'est d'abord prononcé sur la constitutionnalité de l'article 6 de la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence, telle que modifiée le 20 novembre 2015, portant sur les mesures d'assignations à résidence prises dans le cadre de l'état d'urgence par le ministre de l'Intérieur(1). Il a jugé alors que la disposition législative ne méconnaît pas les droits et libertés que la Constitution garantit compte tenu essentiellement du contrôle qu'opère le juge administratif sur de telles mesures de police administrative. Cette décision ayant fait l'objet d'un commentaire dans notre précédente chronique, il n'en sera question ici qu'à titre de comparaison.

Le Conseil constitutionnel s'est prononcé ensuite sur les articles 8 et 11, paragraphe I, de la loi du 3 avril 1955 dans leur rédaction résultant de la loi du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit qui autorisent certaines autorités administratives à, respectivement, ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacle, débits de boissons et lieux de réunion de toute nature dans les zones couvertes par l'état d'urgence et ordonner des perquisitions en tout lieu, y compris un domicile, de jour et de nuit. S'il déclare le paragraphe I de la loi partiellement contraire à la Constitution en ce qu'il permet à l'autorité administrative de copier toutes les données informatiques auxquelles il aura été possible d'accéder au cours de la perquisition, le reste du dispositif législatif est, en ce qui concerne tant les interdictions de réunion que les perquisitions administratives, déclaré conforme à la Constitution pour des motifs similaires à ceux mobilisés à propos des assignations à résidence décidées dans le cadre de l'état d'urgence.

Les QPC portées devant le Conseil constitutionnel avaient été soulevées à l'occasion de recours pour excès de pouvoir présentés par la Ligue des droits de l'homme : le premier était dirigé contre le décret n° 2015-1478 du 14 novembre 2015 qui étend à l'ensemble du territoire la possibilité de prendre certaines mesures administratives dans le cadre de l'état d'urgence, telles que les assignations à résidence, les perquisitions et interdictions de réunion ; le second était dirigé contre une circulaire du ministre de l'Intérieur du 25 novembre 2015 par laquelle il a adressé des instructions aux préfets quant à la mise en œuvre des perquisitions administratives en état d'urgence.

À l'encontre du décret, la Ligue des droits de l'homme soulevait deux questions de constitutionnalité : la première contre l'article 6 de la loi du 3 avril 1955 sur l'état d'urgence relatif aux assignations à résidence, la seconde contre l'article 8 de cette même loi qui permet des perquisitions administratives de jour comme de nuit. Seule la seconde est renvoyée au Conseil constitutionnel dès lors que l'article 6 de la loi a déjà été déclaré conforme à la Constitution par la décision du 22 décembre 2015 et qu'il n'est advenu aucun changement de circonstances depuis cette décision de nature à justifier que le Conseil constitutionnel soit à nouveau saisi. En revanche, le Conseil d'État décide de renvoyer la QPC en ce qu'elle porte sur l'article 8 de la loi du 3 avril 1955 dans la mesure où les conditions de son renvoi au Conseil constitutionnel sont remplies : la disposition est applicable au litige, elle n'a pas déjà fait l'objet d'une déclaration de constitutionnalité et la question de sa conformité aux droits et libertés constitutionnellement garanties présente, selon le Conseil d'État, un caractère nouveau.

À l'appui du recours pour excès de pouvoir contre la circulaire du ministre de l'Intérieur du 25 novembre 2015, ce sont les dispositions de la loi de 1955, telles que modifiées par la loi du 20 novembre 2015, relatives aux perquisitions administratives qui font l'objet de la QPC. Constatant que les dispositions législatives sont applicables au litige, dès lors que, par la circulaire attaquée, « le ministre de l'Intérieur a adressé aux préfets des instructions quant à la mise en œuvre des perquisitions administratives dans le cadre de l'état d'urgence», et qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution, le Conseil d'État décide de renvoyer la QPC au Conseil constitutionnel en considérant que « le moyen tiré de ce qu'elles mettent en cause l'inviolabilité du domicile en méconnaissance des exigences résultant de l'article 66 de la Constitution ou de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 soulève une question sérieuse».

Devant le Conseil constitutionnel, divers droits et libertés constitutionnellement garantis étaient invoqués au soutien des QPC présentées par la Ligue des droits de l'homme : la liberté d'expression et de communication, le droit d'expression collective des idées et des opinions, la liberté de manifestation, la liberté d'association, la liberté du commerce et de l'industrie, la liberté d'entreprendre ainsi que le droit au recours effectif (2016-535 QPC) ; mais aussi la liberté individuelle dont l'autorité judiciaire est la gardienne et le droit au respect de la vie privée, qui garantissent l'inviolabilité du domicile, et le droit à un recours juridictionnel effectif (2016-536 QPC). En outre, dans les deux QPC, était invoquée l'incompétence négative du législateur qui n'aurait pas pris les garanties suffisantes propres à éviter une violation des droits et libertés constitutionnels.

Les QPC donnent l'occasion au Conseil constitutionnel d'apporter quelques précisions sur les droits et les libertés constitutionnellement garantis que sont le droit d'expression collective des idées et des opinions et le droit à l'inviolabilité du domicile : sous couvert d'une certaine stabilité de sa jurisprudence(2), le juge semble en réalité faire évoluer leur définition et leur portée pour adapter les exigences constitutionnelles au contexte de l'état d'urgence dont il ne semble définitivement pas enclin à condamner le régime. Elles lui donnent en outre l'occasion de confirmer la fonction du juge administratif, et in fine du Conseil d'État qui, par son contrôle des mesures de police administrative, apparaît comme le rempart assurant la protection des droits et des libertés fondamentaux dans le cadre de l'état d'urgence.

I - Sens et portée du droit d'expression collective des idées et des opinions

Le Conseil constitutionnel était invité par le Conseil d'État à préciser les sens et la portée du droit d'expression collective des idées et des opinions. Le Conseil d'État avait en effet retenu le moyen selon lequel « le dispositif d'interdiction administrative de réunion dans le cadre de l'état d'urgence» tel que prévu par l'article 8 de la loi sur l'état d'urgence ne serait pas assorti de « garanties appropriées au regard notamment des exigences tenant à la protection du droit d'expression collectives des idées et des opinions »(3). Considérant que ce moyen d'inconstitutionnalité posait une question nouvelle, il décide de renvoyer la QPC au Conseil constitutionnel dès lors que la disposition législative était en outre applicable au litige et qu'elle n'avait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution.

La nouveauté de la question en l'espèce ne résulte pas de ce que le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application du droit constitutionnel invoqué puisque le droit d'expression collective des idées et des opinions, découlant de la liberté d'expression consacrée à l'article 11 de la Déclaration de droits de 1789, a été consacré et appliqué, bien que rarement, dans de précédentes décisions du Conseil(4). Pourtant, le sens et la portée de ce droit méritaient d'être précisés, et ce d'autant plus que, dans la motivation de la décision du 22 décembre 2015 Cédric D., le Conseil constitutionnel ne s'était pas référé à ce droit en dépit du fait que le requérant avait invoqué la liberté de manifestation et la liberté de réunion et que les assignations à résidence avaient précisément pour objectif d'empêcher des militants écologiques de participer à des manifestations ou de se réunir pendant la « COP 21 ». À cet égard, on a pu souligner l'ambiguïté de la motivation de cette décision qui pouvait être de nature à faire douter du maintien de la valeur constitutionnelle du droit d'expression collective des idées et des opinions issu de la jurisprudence(5). Aussi le Conseil d'État pouvait-il considérer que la question soulevée par la Ligue des droits de l'homme à l'encontre de l'article 8 de la loi sur l'état d'urgence soulevait une question nouvelle, à tout le moins une question de principe, sur l'existence ou non d'un droit constitutionnel de se réunir et/ou de manifester qu'il était opportun que le juge constitutionnel tranche.

Quant à l'existence même du droit d'expression collective des idées et des opinions, le Conseil constitutionnel confirme, dans sa décision n° 2015-535 QPC, son appartenance aux droits constitutionnellement garantis. Répondant à l'argumentation présentée par la Ligue des droits de l'homme, il juge en effet « qu'en ce qu'elles restreignent la liberté de se réunir, ces dispositions portent atteinte au droit d'expression collective des idées et des opinions »(6).

Mais la décision ne lève pas toutes les ambiguïtés. D'abord le Conseil constitutionnel considère que les dispositions législatives contestées n'ont « ni pour objet ni pour effet de régir les conditions dans lesquelles sont interdites les manifestations sur la voie publique »(7). Cette affirmation signifie que la possibilité de manifester n'est pas mise en cause par l'article 8 de la loi sur l'état d'urgence et que s'applique en la matière le droit commun. Reste que la décision du 19 février 2016 n° 2016-535 QPC ne permet pas de déterminer si la liberté de manifestation est, en tant que telle, garantie avec valeur constitutionnelle par le biais du droit d'expression collective des idées et des opinions. Aussi l'ambiguïté demeure-t-elle quant à la valeur constitutionnelle de la liberté de manifester d'autant que, on l'a dit, la portée de la décision du 22 décembre 2015, Cédric D., était déjà incertaine dès lors que le Conseil constitutionnel n'a pas examiné explicitement la question de l'atteinte à la liberté de manifester qu'induisent les assignations à résidence décidées dans le cadre de l'état d'urgence(8).

En revanche, la liberté de réunion semble bien constitutionnellement consacrée au travers du droit d'expression collective des idées et des opinions. C'est ce dont témoigne la décision commentée puisque le Conseil constate que « les dispositions contestées permettent à l'autorité administrative d'ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacle, débits de boissons et lieux de réunion de toute nature ainsi que d'interdire les réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre» et en déduit « qu'en ce qu'elles restreignent la liberté de se réunir, ces dispositions portent atteinte au droit d'expression collective des idées et des opinions». Ce droit est donc le vecteur d'intégration de la liberté de réunion au sein des droits et libertés constitutionnellement garantis sur le fondement de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789. Il peut être remarqué que le Conseil constitutionnel a préféré fonder la liberté de réunion sur une interprétation extensive et constructive d'une disposition constitutionnelle consacrant la liberté d'expression plutôt que sur la consécration d'un principe fondamental reconnu par les lois de la République, comme il aurait pu le faire en se fondant sur les lois républicaines reconnaissant cette liberté(9).

Les autres griefs d'inconstitutionnalité soulevés à l'encontre de l'article 8 de la loi sur l'état d'urgence sont écartés par le Conseil constitutionnel : il juge que la disposition législative opère une conciliation qui « n'est pas manifestement déséquilibrée entre la liberté d'entreprendre et l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public» ; qu'elle ne prive pas de « la possibilité de la contester devant le juge administratif, y compris par la voie du référé » et qu'elle ne porte « aucune atteinte au principe fondamental reconnu par les lois de la République de la liberté d'association»(10).

II - Les fondements constitutionnels de l'inviolabilité du domicile

La décision n° 2016-536 QPC du 19 février 2016 atteste, à nouveau, de la restriction du champ de la liberté individuelle. Déjà dans une décision de 1999, le Conseil constitutionnel avait dissocié la liberté d'aller et venir de la liberté individuelle à laquelle elle était traditionnellement rattachée(11), ce qu'il a confirmé explicitement en la rattachant aux articles 2 et 4 de la Déclaration des droits de l'homme(12). Ensuite c'est l'inviolabilité du domicile qui a été détachée de la liberté individuelle pour être rattachée à l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en lien avec le droit au respect de la vie privée : « la liberté proclamée par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 implique le droit au respect de la vie privée et, en particulier, de l'inviolabilité du domicile »(13).

Reste que la jurisprudence constitutionnelle pouvait sembler encore incertaine quant au plein détachement de l'inviolabilité du domicile et de la liberté individuelle ; c'est ce dont témoigne au demeurant la présentation de ces droits et libertés dans les tables analytiques de jurisprudence disponibles sur le site internet du Conseil constitutionnel(14).

Cette incertitude apparaît également dans la décision de renvoi de QPC du Conseil d'État(15) qui juge sérieuse la question de constitutionnalité au regard du principe d'inviolabilité du domicile sans toutefois trancher la question de son fondement textuel : il considère en effet que le moyen tiré de ce que les dispositions législatives contestées « mettent en cause l'inviolabilité du domicile en méconnaissance des exigences résultant de l'article 66 de la Constitution ou de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 soulève une question sérieuse». En employant la conjonction de coordination « *ou *», le Conseil d'État laisse au Conseil constitutionnel le soin de préciser le fondement textuel de l'inviolabilité du domicile. L'identification de ce fondement n'a pas qu'un intérêt théorique dès lors que si l'inviolabilité du domicile est rattachée à l'article 66 de la Constitution, c'est qu'il reste un élément de la liberté individuelle dont l'autorité judiciaire assure la protection en tant que gardienne de cette liberté. Aussi le fondement textuel de l'inviolabilité du domicile a-t-il des conséquences pratiques en termes d'exigences constitutionnelles et de répartition des compétences juridictionnelles.

Or, précisément, la jurisprudence constitutionnelle manquait encore de clarté à cet égard. Si le Conseil constitutionnel exigeait que toute perquisition ou visite domiciliaire devait être soumise au contrôle d'un juge, il n'avait pas indiqué s'il pouvait s'agir d'un juge administratif ou s'il devait nécessairement s'agir du juge judiciaire, d'où l'ambiguïté du lien entre la liberté individuelle et l'inviolabilité du domicile.

La décision n° 2016-536 QPC du Conseil constitutionnel résout cette incertitude et cette ambiguïté : en jugeant que les mesures de perquisitions administratives relèvent de la seule police administrative, y compris lorsqu'elles ont lieu dans un domicile et qu'elles n'affectent pas la liberté individuelle au sens de l'article 66 de la Constitution, le juge constitutionnel dissocie l'inviolabilité du domicile - nécessairement mise en cause par une perquisition domiciliaire - de la protection de la liberté individuelle et la fait échapper à la compétence et au contrôle de l'autorité judiciaire. Le Conseil en déduit que les perquisitions administratives « n'ont pas à être placées sous la direction et le contrôle de l'autorité judiciaire» et il écarte le grief tiré de la méconnaissance de l'article 66 de la Constitution.

Dorénavant, il apparaît clairement que l'inviolabilité du domicile est un droit dont la protection peut être confiée au juge administratif. Comme dans la décision Cédric D. portant que les assignations à résidence décidées dans le cadre de l'état d'urgence, le Conseil constitutionnel motive la constitutionnalité des dispositions de la loi sur l'état d'urgence par le contrôle qu'opère, a posteriori, le juge administratif sur les mesures prises.

III - La protection des droits et libertés par le juge administratif

Dans les deux décisions QPC analysées et à l'instar de sa précédente décision sur les assignations à résidence, le Conseil constitutionnel s'en remet au contrôle du juge administratif, tout en l'invitant, au moyen de ce qui peut être nommé une « réserve d'interprétation implicite »(16), à opérer un contrôle poussé de proportionnalité des mesures administratives prises dans le cadre de l'état d'urgence.

S'agissant de l'interdiction de réunion, le Conseil constitutionnel constate d'abord que les mesures sont limitées dans le temps en raison de leur caractère provisoire et dans l'espace puisqu'elles concernent uniquement les lieux situés dans les zones couvertes par l'état d'urgence. Sur ce point, il peut toutefois être remarqué que rien ne s'oppose à ce que lesdites zones correspondent à l'ensemble du territoire national. Le Conseil constitutionnel juge ensuite que les mesures de fermeture provisoire décidées sur le fondement de l'article 8 de la loi sur l'état d'urgence doivent « être justifiées et proportionnées aux nécessités de la préservation de l'ordre public ayant motivé une telle fermeture», tandis que la mesure d'interdiction de réunion doit être « justifiée par le fait que cette réunion est « de nature à provoquer ou entretenir le désordre » et proportionnée aux raisons l'ayant motivée »(17). Il conclut enfin : « le juge administratif est chargé de s'assurer que chacune de ces mesures est adaptée, nécessaire et proportionnée à la finalité qu'elle poursuit »(18).

De la sorte, si le Conseil constitutionnel insiste sur l'exigence du caractère proportionné des mesures prises par les autorités administratives dans le cadre de l'état d'urgence, c'est sur le juge administratif que repose in fine le contrôle du respect de cette exigence. Ainsi le Conseil constitutionnel n'exerce pas lui-même le contrôle de proportionnalité de la disposition législative dans le cadre de son contrôle de constitutionnalité. À cet égard, il peut être relevé que le droit d'expression collective des idées et des opinions, bien qu'il soit déduit de l'article 11 de la Déclaration des droits de l'homme, ne reçoit pas la même protection constitutionnelle que la liberté d'expression énoncée par ce même article lorsqu'elle est exercée à titre individuel. En effet, dans sa décision n° 2015-512 QPC du 8 janvier 2016, M. Vincent R., le Conseil constitutionnel opère lui-même un contrôle approfondi de la proportionnalité des dispositions législatives sanctionnant pénalement la négation de crimes contre l'humanité(19). Il constate dans cette décision que le « législateur a entendu sanctionner des propos qui incitent au racisme et à l'antisémitisme », que « les dispositions contestées ont pour objet de réprimer un abus de l'exercice de la liberté d'expression et de communication qui porte atteinte à l'ordre public et aux droits des tiers » et que « seule la négation, implicite ou explicite, ou la minoration outrancière de ces crimes est prohibée » sans que les dispositions législatives n'aient « ni pour objet ni pour effet d'interdire les débats historiques». Il en déduit « qu'ainsi, l'atteinte à l'exercice de la liberté d'expression qui en résulte est nécessaire, adaptée et proportionnée à l'objectif poursuivi par le législateur »(20).

La comparaison entre la décision n° 2015-512 QPC sur la négation de crimes contre l'humanité et la décision n° 2016-535 QPC portant sur les interdictions administratives de réunion dans le cadre de l'état d'urgence semble indiquer que la liberté d'expression est mieux protégée, au niveau constitutionnel, dans son exercice individuel que collectif. C'est seulement a posteriori, lorsque les autorités administratives ont décidé de restreindre l'exercice collectif de la liberté d'expression en interdisant des réunions, que s'opère le contrôle de la proportionnalité de l'atteinte aux droits et libertés constitutionnels.

La même logique préside à l'examen de la constitutionnalité des dispositions législatives autorisant les perquisitions administratives de jour comme de nuit pendant l'état d'urgence. Pour l'essentiel, l'intervention du juge administratif a posteriori est, selon le Conseil constitutionnel, un argument au service de la constitutionnalité de la disposition législative contestée.

Certes, le Conseil relève la présence d'un officier de police judiciaire pendant la perquisition et l'information du Procureur de la République en amont et en aval de celle-ci(21), de sorte que l'officier de police judiciaire puisse constater l'existence d'infractions qui ouvrira une phase judiciaire(22). L'opération de police administrative réalisée, dans le cadre de l'état d'urgence, parce qu'il existe des raisons sérieuses de penser que le lieu est fréquenté par une personne dont le comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics, pourra ainsi se transformer en une opération de police judiciaire liée à une infraction déterminée.

Mais, pour le reste et à l'instar de sa décision QPC du 22 décembre 2015, Cédric D., à propos des assignations à résidence, le Conseil constitutionnel se contente de formuler une « réserve d'interprétation implicite » aux termes de laquelle, d'une part, « la décision ordonnant une perquisition sur le fondement des dispositions contestées et les conditions de sa mise en œuvre doivent être justifiées et proportionnées aux raisons ayant motivé la mesure dans les circonstances particulières ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence» et, d'autre part, « une perquisition se déroulant la nuit dans un domicile doit être justifiée par l'urgence ou l'impossibilité de l'effectuer le jour »(23). Puis il ajoute « le juge administratif est chargé de s'assurer que cette mesure qui doit être motivée est adaptée, nécessaire et proportionnée à la finalité qu'elle poursuit ». Là encore, le Conseil constitutionnel invite le juge administratif à opérer un contrôle entier des motifs et des conditions des perquisitions administratives.

Pourtant, ce contrôle sera exercé nécessairement, a posteriori : à la différence de l'assignation à résidence, la perquisition sera exécutée dans un laps de temps trop bref pour envisager que le juge administratif soit en mesure d'y mettre fin en dépit de son caractère injustifié et disproportionné. Même le référé-liberté qui permet au juge de prendre en 48 heures toutes mesures propres à faire cesser une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale est inefficace à stopper une perquisition administrative manifestement illégale.

Conscient de cette difficulté, mais néanmoins peu enclin à déclarer contraire à la Constitution le régime législatif de l'état d'urgence ayant pour effet de placer sous le contrôle du juge administratif des atteintes au domicile, le Conseil constitutionnel se satisfait d'un contrôle a posteriori du juge administratif qui ne pourra, en cas d'illégalité constatée, qu'engager la responsabilité de l'État et accorder, aux personnes illégalement perquisitionnées, réparation du préjudice subi. Le Conseil en déduit « qu'ainsi les personnes intéressées ne sont pas privées de voies de recours, lesquelles permettent un contrôle de la mise en œuvre de la mesure dans des conditions appropriées au regard des circonstances particulières ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence»(24).

Comme d'autres avant nous l'ont écrit, on pourra trouver le remède peu satisfaisant(25). D'abord les conditions d'exercice d'une action en responsabilité de l'État ne rendent pas aisée la tâche des justiciables souhaitant obtenir réparation de leur préjudice : le ministère d'avocat obligatoire, la règle de la décision préalable, la nécessité d'apporter la preuve d'un préjudice qui pourra ne pas être seulement matériel(26) constituent autant d'obstacles sur la voie de la réparation. Ensuite il appartiendra aux justiciables de démontrer que les autorités de police ont commis une faute en décidant de perquisitionner leur domicile. Or celle-ci doit être appréciée par le juge administratif au regard des « circonstances particulières ayant conduit à la déclaration de l'état d'urgence ». Dans ces conditions, le juge pourrait hésiter, si ce n'est rechigner, à reconnaître l'existence d'une faute de la part des autorités de police.

En dépit de l'inefficacité évidente du contrôle exercé a posteriori, le Conseil constitutionnel estime que l'existence d'une telle possibilité de recours suffit à satisfaire le droit au recours et plus globalement les exigences constitutionnelles.

Pourtant, tout n'est pas validé par le Conseil. Il constate en effet que la loi sur l'état d'urgence - seconde phrase du troisième alinéa du paragraphe I de l'article 11 de la loi du 3 avril 1955 - permet « à l'autorité administrative de copier toutes les données informatiques auxquelles il aura été possible d'accéder au cours de la perquisition ». Considérant que cette « copie » est assimilable à une saisie, le Conseil déclare la disposition législative qui l'autorise contraire à la Constitution dès lors que « ni cette saisie ni l'exploitation des données ainsi collectées ne sont autorisées par un juge, y compris lorsque l'occupant du lieu perquisitionné ou le propriétaire des données s'y oppose et alors même qu'aucune infraction n'est constatée » et que « peuvent être copiées des données dépourvues de lien avec la personne dont le comportement constitue une menace pour la sécurité et l'ordre publics ayant fréquenté le lieu où a été ordonnée la perquisition ». Au regard de ces considérations, le Conseil juge que le législateur n'a pas prévu des garanties légales propres à assurer une conciliation équilibrée entre le respect de la vie privée d'une part et l'objectif de sauvegarde de l'ordre public d'autre part.

Seule cette disposition législative de la loi sur l'état d'urgence telle qu'elle a été modifiée en 2015 est donc abrogée. Pour l'essentiel le Conseil constitutionnel valide donc l'ensemble du dispositif législatif, en confiant au juge administratif le soin de remédier aux éventuels abus des autorités de police administrative.

Ambiguïté autour du changement de circonstances prétoriennes

Cass., crim., 9 mars 2016, Gaston X., n° 15-83517

Face à une disposition législative expressément déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel, le justiciable doit démontrer la présence d'un changement de circonstances de droit ou de fait. Outre le changement de circonstances textuelles issues d'une révision constitutionnelle ou d'un changement de contexte législatif, une évolution de jurisprudence peut-elle constituer un changement de circonstances ?

En présence d'un changement de jurisprudence du Conseil constitutionnel, le Conseil d'État et la Cour de cassation apprécient la teneur et l'impact de la nouvelle norme prétorienne et peuvent accepter que la disposition soit examinée à nouveau(27). L'incertitude demeure, cependant, au regard de l'absence de critère objectif permettant à une jurisprudence nouvelle d'accéder au rang de changement de circonstances(28).

En présence d'un arrêt de la CEDH, condamnant ou non la France, la Chambre criminelle de la Cour de cassation peut retenir un changement de circonstances(29), sans que le Conseil d'État ait clairement pris position(30) et sans que le Conseil constitutionnel ait officiellement admis le procédé bien qu'il ait jugé au fond et abrogé les dispositions ainsi renvoyées(31).

Qu'en est-il du changement de circonstances issu d'une jurisprudence de la Cour de cassation ou du Conseil d'État ? En principe, la réponse semble inéluctable : dès lors que l'interprétation constante conférée par ces deux juges à une disposition législative peut faire l'objet d'une QPC, c'est qu'elle affecte la portée de la loi et peut donc constituer par ailleurs un changement de circonstances justifiant son réexamen au regard de la Constitution. Le Conseil constitutionnel a d'ailleurs implicitement admis un tel changement de circonstances(32).

L'arrêt de la Chambre criminelle du 9 mars 2016 illustre cependant l'ambiguïté de la politique jurisprudentielle des juges du filtrage sur ce point qui consiste à admettre le principe tout en s'abstenant de le mettre en œuvre positivement. Parmi les dispositions contestées en l'espèce par le mémoire QPC, l'article 497-3 ° du code de procédure pénale, relatif au droit d'appel des jugements rendus en matière correctionnelle, avait été déclaré conforme dans une décision du Conseil constitutionnel du 31 janvier 2014(33). Or, le justiciable invoquait la présence d'un changement de circonstances issu d'un revirement de jurisprudence de la Cour de cassation du 5 février 2014(34) concernant la réparation du dommage subi par la partie civile seule appelante d'un jugement de relaxe. Dans l'arrêt commenté du 9 mars 2016, la Chambre criminelle estime « qu'aucun changement de circonstances, au sens de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, ne saurait résulter de la décision de la Cour de cassation, en date du 5 février 2014, (pourvoi n° 12-80154) relative aux conditions de fond de la réparation des conséquences dommageables qui peuvent résulter de la faute civile d'un prévenu définitivement relaxé». En effet, le revirement opéré ne concernait qu'indirectement la portée de l'article 497-3 ° du code de procédure pénale. Mais au-delà de la question de fond, le changement de circonstances prétoriennes issu d'une jurisprudence de la Cour de cassation n'est une nouvelle fois pas retenu(35). L'hypothèse s'est produite, au moins à une reprise, mais sans que la question ne soit renvoyée au Conseil constitutionnel, ce qui est pour le moins révélateur : le 12 mars 2014(36), la Chambre sociale qualifie sa propre jurisprudence de changement de circonstances de droit, à propos de la reconnaissance de la compétence de la juridiction prud'homale pour connaître des demandes indemnitaires présentées au titre du préjudice d'anxiété, mais ne retient pas le sérieux de la question.

Sans être opposés par principe à un tel changement de circonstances, le Conseil d'État et la Cour de cassation peinent donc à relever des cas positifs d'application. Il est probable que la responsabilité incombe également aux justiciables coupables de ne pas suffisamment soulever ce motif. Mais les justiciables ont parfaitement conscience des enjeux stratégiques à l'origine des réticences du Conseil d'État et de la Cour de cassation à retenir un changement de circonstances de cette nature qui, en définitive, permettrait la plupart du temps au Conseil constitutionnel d'apprécier la constitutionnalité de leurs jurisprudences.

La substitution de motifs du refus de transmission

CE, 15 février 2016, n° 392083

Le Conseil d'État enrichit son office de juge du filtrage en opérant une substitution de motifs de refus de transmission d'une QPC par les juges du fond. La Cour administrative d'appel de Paris avait en effet saisi le Conseil d'État d'une QPC visant l'article L. 212-13 du code du sport, issu d'une codification à droit constant par l'ordonnance du 23 mai 2006. Certes, un projet de loi de ratification avait été déposé à l'Assemblée nationale mais sans être voté, l'ordonnance ne pouvait donc pas être dotée d'une valeur législative. De plus, depuis 2008 seules les ratifications expresses des ordonnances sont admises, les ratifications implicites ne valant que pour les cas antérieurs à la révision constitutionnelle(37). En l'absence de ratification, les dispositions d'une ordonnance ne peuvent faire l'objet d'une QPC, comme la Chambre criminelle l'avait rappelé à propos d'une disposition du code du sport(38).

Pourtant, l'arrêt du 26 mai 2015 de la Cour administrative d'appel de Paris(39) transmet la QPC au Conseil d'État en affirmant que « nonobstant l'absence de ratification de l'ordonnance du 23 mai 2006, la disposition de l'article L. 212-13 du code du sport constitue une disposition législative au sens de l'article 61-1 de la Constitution et est susceptible de faire l'objet d'une question prioritaire de constitutionnalité ». L'affirmation, étonnante à première vue, s'explique en réalité par une précision apportée par la Cour : la disposition contestée issue d'une ordonnance non ratifiée « reprend sans les modifier les dispositions de l'article L. 463-6 du code de l'éducation dans leur rédaction issue de la loi du 9 décembre 2004 de simplification du droit ». Formellement identique à une disposition législative abrogée, la disposition de l'ordonnance non-ratifiée est qualifiée de « disposition législative au sens de l'article 61-1 de la Constitution ». Pour autant, la question n'est pas renvoyée pour défaut de caractère sérieux.

Le Conseil d'État va démentir la motivation adoptée par la Cour administrative afin de préserver une certaine cohérence entre les notions de « loi » et de « disposition législative » au sens de l'article 61-1 de la Constitution. Par un syllogisme classique, l'arrêt du 15 février 2016 indique sobrement que les dispositions contestées résultent d'une ordonnance qui « a abrogé les dispositions législatives antérieures et les a édictées à nouveau sous forme codifiée ». Or, « cette ordonnance n'a pas été ratifiée ». Dès lors, « les dispositions contestées, qui ont un caractère réglementaire » ne peuvent faire l'objet d'une QPC. Le Conseil d'État opère alors une substitution de motifs en estimant que « ce motif, qui justifie le dispositif de l'arrêt attaqué en ce qu'il refuse de transmettre au Conseil d'État la question prioritaire de constitutionnalité soulevée, doit être substitué au motif retenu par la cour administrative d'appel ». Autrement dit, alors que la Cour administrative d'appel de Paris n'avait pas transmis la QPC pour défaut de caractère sérieux, le Conseil d'État en tant que juge de cassation ne renvoie pas au Conseil constitutionnel la QPC et substitue le motif tiré du caractère réglementaire de la disposition contestée.

L'usage de la substitution de motifs en QPC est donc une nouveauté, bien que le maniement en l'espèce semble en adéquation avec les conditions classiquement exigées devant le juge de cassation, à savoir l'absence d'appréciation sur la situation de faits et l'invocation devant les juges du fond du motif substitué(40). La technique permet en l'espèce au Conseil d'État d'éviter un afflux de requêtes infondées nées d'un doute sur la valeur de certaines dispositions du code du sport, tout en ouvrant plus largement la voie de la contestation d'un refus de transmission d'une QPC.

La réception aléatoire de la jurisprudence du Conseil constitutionnel

CE, 12 février 2016, Commune des Arcs, n° 395041

La réception de la jurisprudence du Conseil constitutionnel par le Conseil d'État et la Cour de cassation dévoile toujours une part d'autonomie. Mais parfois également une part de confusion. Dans un arrêt du 12 février 2016, le Conseil d'État s'interroge sur le sérieux d'une question de constitutionnalité relative à une sanction fiscale prévue par la loi. Après avoir rappelé les griefs de la commune, l'arrêt cite les termes de l'article 8 de la Déclaration des droits de 1789 et énonce les normes constitutionnelles de référence de la manière suivante : « qu'il résulte de ces dispositions qui s'appliquent à toute sanction ayant le caractère de punition, comme des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, qu'une peine ne peut être infligée qu'à la condition que soient respectés le principe de légalité des délits et des peines, le principe de nécessité des peines, le principe de non-rétroactivité de la loi répressive d'incrimination plus sévère ainsi que le principe du respect des droits de la défense ». La référence aux principes fondamentaux reconnus par les lois de la République renvoie certainement au « principe du respect des droits de la défense ». Il est vrai que le Conseil constitutionnel avait dégagé ce PFRLR dans une décision n° 76-70 DC du 2 décembre 1976. Sauf que, depuis une décision du 30 mars 2006(41), le Conseil constitutionnel rattache de manière claire et constante les droits de la défense à l'article 16 de la Déclaration des droits de 1789 que ce soit à propos des peines ou des sanctions ayant le caractère de punition(42), en matière de procédure fiscale par exemple(43).

La persistance du Conseil d'État dans l'arrêt du 12 février 2016 à rattacher les droits de la défense aux PFRLR suscite des interrogations, d'autant plus qu'il ne s'agit pas d'un cas isolé(44). En termes d'unité, d'accessibilité et de lisibilité du droit c'est regrettable, car le fondement constitutionnel des droits de la défense apparaît obscur et le justiciable comme les juges du fond peuvent être désorientés, d'autant que certains arrêts du Conseil d'État suivent au contraire le Conseil constitutionnel en rattachant les droits de la défense à l'article 16 de la Déclaration(45). Cependant, il n'est pas certain que cette prise de distance sémantique du Conseil d'État, qui ne dispose que de trois mois pour statuer, réponde à une intention précise bien qu'un juge puisse toujours trouver avantage à maîtriser les sources du droit. Sur le fond, il n'est pas non plus certain que le justiciable soit réellement victime d'un régime différencié des sources des droits de la défense, contrairement par exemple à l'affaire du lanceur d'alerte dans laquelle le Conseil d'État avait appliqué un régime de la liberté d'expression moins protecteur que celui offert par le Conseil constitutionnel(46). Erreur de plume ou pas, il n'en reste pas moins que la motivation adoptée n'est pas tout à fait anecdotique et révèle une fausse note dans le dialogue entre les juges constitutionnels.

Revue doctrinale

Articles relatifs aux décisions du Conseil constitutionnel

25 avril 2014

2014-392 QPC

Province Sud de Nouvelle-Calédonie [Loi adoptée par référendum -- Droit du travail en Nouvelle-Calédonie]

-- M'Saïdié, Thomas. « Le contrôle des lois référendaires et le droit du travail en Nouvelle-Calédonie : réflexions à partir de la décision n° 2014-392 QPC du 25 avril 2014 », Revue de la recherche juridique, droit prospectif, janvier 2016, n° 2015-1, p. 201-223.

29 mai 2015

2015-470 QPC

Société SAUR SAS [Interdiction d'interrompre la distribution d'eau dans les résidences principales]

-- Baillon-Passe, Christian. « Actualité jurisprudentielle nationale du droit de l'eau. Le droit constitutionnel de l'eau (sous l'angle de la jurisprudence QPC) », Les Petites Affiches, 8 janvier 2016, n° 6, p. 7-8.

23 juillet 2015

2015-713 DC

Loi relative au renseignement

-- Chauvin, Édouard ; Vadillo, Floran. « La loi n° 2015-912 du 24 juillet 2015 »relative au renseignement« au secours de la protection pénale des systèmes de données », Revue Lamy droit de l'immatériel, janvier 2016, n° 122, p. 34-35.

-- Roblot-Troizier, Agnès. « Un contrôle de constitutionnalité restreint sur les mesures de la police administrative du renseignement », Revue française de droit administratif, novembre-décembre 2015, n° 6, p. 1195-1200.

13 août 2015

2015-718 DC

Loi relative à la transition énergétique pour la croissance verte

-- Lormeteau, Blanche. « La validation par le Conseil constitutionnel de la méthode de transition comme principe directeur de l'action publique dans le champ de l'énergie », Constitutions, octobre-décembre 2015, n° 2015-4, p. 607-611.

22 septembre 2015

2015-484 QPC

Société UBER France SAS et autre (II) [Incrimination de la mise en relation de clients avec des conducteurs non professionnels]

-- Haquet, Arnaud. « Taxis contre voitures de tourisme avec chauffeur -- Droit constitutionnel », Revue française de droit administratif, novembre-décembre 2015, n° 6, p. 1135-1143.

14 octobre 2015

2015-489 QPC

Société Grands Moulins de Strasbourg SA et autre [Saisine d'office et sanctions pécuniaires prononcées par le Conseil de la concurrence]

-- Lemaire, Christophe. « QPC -- Auto-saisine -- Sanctions pécuniaires », Concurrences : revue des droits de la concurrence, janvier 2016, n° 2016-1, p. 179-181.

2015-490 QPC

M. Omar K. [Interdiction administrative de sortie du territoire]

-- Le Bot, Olivier. « Constitutionnalité de l'interdiction administrative de sortie du territoire », Constitutions, octobre-décembre 2015, n° 2015-4, p. 585-588.

16 octobre 2015

2015-492 QPC

Association Communauté rwandaise de France [Associations pouvant exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne l'apologie des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité]

-- Montgolfier, Jean-François de. « Le Conseil constitutionnel, les crimes contre l'humanité et la loi du 29 juillet 1881 », Légipresse, mars 2016, n° 336, p. 159-166.

11 décembre 2015

2015-508 QPC

M. Amir F. [Prolongation exceptionnelle de la garde à vue pour des faits de blanchiment, de recel et d'association de malfaiteurs en lien avec des faits d'escroquerie en bande organisée]

-- Perrier, Jean-Baptiste. « Le Conseil constitutionnel, l'escroquerie en bande organisée et la garde à vue (bis) : la virtualité du contrôle de constitutionnalité », Actualité juridique, Pénal, février 2016, n° 2, p. 77-79.

22 décembre 2015

2015-527 QPC

M. Cédric D. [Assignations à résidence dans le cadre de l'état d'urgence]

-- Rambour, Muriel. « Une COP 21 sous état d'urgence. Le Conseil constitutionnel et l'assignation à résidence de militants »écologistes" », Droit de l'environnement, février 2016, n° 242, p. 69-71.

-- Roblot-Troizier, Agnès. « Note sous Conseil d'État, Section, 11 décembre 2015, M. C. Domenjoud, n° 395009 et Conseil constitutionnel, 22 décembre 2015, M. Cédric D., n° 2015-527 QPC », Revue française de droit administratif, janvier-février 2016, n° 1, p. 123-135.

-- Verpeaux, Michel. « La première QPC relative à l'état d'urgence », La Semaine juridique, Administrations et collectivités territoriales, 15 février 2016, n° 6, p. 37-40.

7 janvier 2016

2015-510 QPC

Association Expert-comptable média association [Sanctions pécuniaires prononcées par l'Autorité de la concurrence]

-- Chavent-Leclère, Anne-Sophie. « Constitutionnalité des sanctions pécuniaires en matière anticoncurrentielle », Procédures, février 2016, n° 2, p. 32-33.

-- Soltani, Sarra. « Amendes : le régime de sanction différenciée prévu par le Code de commerce est conforme à la Constitution », Revue Lamy droit des affaires, février 2016, n° 112, p. 27.

8 janvier 2016

2015-512 QPC

M. Vincent R. [Délit de contestation de l'existence de certains crimes contre l'humanité]

-- Chagnollaud, Dominique. « Le retour de Sherlock Holmes. Après la décision n° 2015-512 QPC du 8 janvier 2016 : le moyen disparu », Recueil Dalloz, 3 mars 2016, n° 9, p. 492-493.

-- Décima, Olivier. « Le révisionnisme et l'égalité devant la loi pénale », La Semaine juridique, Édition générale, 29 février 2016, n° 9-10, p. 453-456.

-- Perrier, Jean-Baptiste ; Raschel, Evan. « Le négationnisme face aux droits et libertés garantis par la Constitution », Recueil Dalloz, 3 mars 2016, n° 9, p. 521-525.

-- Tissier-Raffin, Marion. « La constitutionnalité enfin confirmée de la loi Gayssot », Lettre Actualités Droits-Libertés du CREDOF, 10 février 2016, 11 p.

3 février 2016

2015-520 QPC

Société Metro Holding France SA venant aux droits de la société CRFP Cash [Application du régime fiscal des sociétés mères aux produits de titres auxquels ne sont pas attachés des droits de vote]

-- Blanluet, Gauthier. « Discrimination à rebours : le droit interne à l'épreuve du droit de l'union européenne », Revue de droit fiscal, 24 mars 2016, n° 12, p. 21-28.

-- Fouquet, Olivier. « La discrimination à rebours franco-européenne sanctionnée », Revue de droit fiscal, 11 février 2016, n° 6, p. 5-7.

-- Fouquet, Olivier. « La discrimination à rebours : nouvel outil de contrôle du Conseil constitutionnel ? », Études-fiscales-internationales.com, 21 février 2016, 2 p.

-- Meier, Eric ; Valeteau, Mathieu. « Le contrôle des discriminations à rebours : du subtil équilibre entre contrôle de conventionalité et contrôle de constitutionnalité », Revue de droit fiscal, 24 mars 2016, n° 12, p. 73-79.

-- Perrotin, Frédérique. « Discrimination à rebours : la censure du Conseil constitutionnel », Les Petites Affiches, 9 mars 2016, n° 49, p. 4-6.

Articles thématiques

Droit de la communication et des médias

-- Viguier, Jacques. « Le juge constitutionnel et la régulation audiovisuelle », in La régulation de la communication audiovisuelle : enjeux et perspectives, Clermont-Ferrand, Institut universitaire Varenne, 2015, p. 143-165.

Droit électoral

-- Rambaud, Thierry. « Quelques remarques sur une curiosité juridique : les recours en rectification d'erreur matérielle dans le contentieux électoral devant le Conseil constitutionnel », in L'erreur en droit public, Aix-en-Provence, 2015, p. 107-112.

Droits fondamentaux / Libertés publiques

-- Aumond, Florian. « Les droits et libertés politiques dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel », in Les libertés politiques : socle pour un ordre public européen ?, Poitiers, Presses universitaires de Poitiers, 2015, p. 117-148.

-- Champeil-Desplats, Véronique. « Le droit de la lutte contre les discriminations face aux cadres conceptuels de l'ordre juridique français », La Revue des droits de l'homme, mars 2016, n° 9, 8 p.

-- Domingo, Laurent. « La loi reconnaissant le génocide arménien et QPC », Constitutions, octobre-décembre 2015, n° 2015-4, p. 588-591.

-- Dutheillet de Lamothe, Louis ; Odinet, Guillaume. « L'urgence dans tous ses états [CE, 11 décembre 2005, n° 395009, Cedric D.] », Actualité juridique. Droit administratif, 15 février 2016, n° 5, p. 247-254.

-- Le Bot, Olivier. « Référé-liberté et état d'urgence [III. L'office du juge des référés renvoyant une QPC] [CE, 11 décembre 2005, n° 394990, Gauthier] », Les Petites Affiches, 8 mars 2016, n° 48, p. 8-15.

-- Quinart, Emilien. « Conseiller l'État sur l'état d'urgence : entre légalité et opportunité », Actualité juridique. Droit administratif, 7 mars 2016, n° 8, p. 426-434.

-- Rambaud, Romain. « Élections régionales : le Conseil d'État rejette une demande de report pour cause d'état d'urgence [CE, 1er décembre 2015, n° 394888] », Actualité juridique. Droit administratif, 15 février 2016, n° 5, p. 275-279.

-- Truchet, Didier. « La dignité et les autres domaines du droit, [in Les vingt ans de l'arrêt Commune de Morsang-sur-Orge, Colloque du 27 mai 2015] », Revue française de droit administratif, novembre-décembre 2015, n° 6, p. 1094-1099.

-- Wachsmann, Patrick. « De la marginalisation du juge judiciaire en matière de libertés et des moyens d'y remédier », Recueil Dalloz, 3 mars 2016, n° 9, p. 473.

Droit de la santé / Bioéthique

-- Moquet-Anger, Marie-Laure. « La dignité et le droit de la santé », [in Les vingt ans de l'arrêt Commune de Morsang-sur-Orge, Colloque du 27 mai 2015], Revue française de droit administratif, novembre-décembre 2015, n° 6, p. 1075-1081.

-- Renaudie, Olivier. « Conseil constitutionnel, liberté d'aller et venir et protection des personnes souffrant de troubles mentaux », Revue de droit sanitaire et social, novembre-décembre 2015, n° 6, p. 963-972.

Principe de laïcité

-- Joyau, Marc. « Libertés religieuses et Conseil constitutionnel », in Liberté religieuse et cohésion sociale : la diversité française, Aix-en-Provence, Presses universitaires d'Aix-Marseille, 2015, p. 473-486.

(1) Sur cette décision, cf. notre chronique, in Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, n° 51, p. 85 ; cf. également, A. Roblot-Troizier, « Assignations à résidence en état d'urgence, note sous Conseil d'État, Section, 11 décembre 2015, M. C. Domenjoud, n° 395009 et Conseil constitutionnel, 22 décembre 2015, M. Cédric D., n° 2015-527 QPC », RFDA, 2016, p. 123.
(2) La stabilité et donc la prévisibilité de la jurisprudence du Conseil constitutionnel a été particulièrement mise en avant par l'ancien président du Conseil, Jean-Louis Debré, comme pour mieux souligner la sécurité juridique qui en résulte, dans les vœux au Président de la République pour 2016, 5 janvier 2016.
(3) CE, 15 janvier 2016, Ligue des droits de l'homme, n° 395091.
(4) Cons. const. 94-352 DC 18 janvier 1995, Loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité, cons. 16 ; Cons. const. 2010-04 DC 25 février 2010, Loi renforçant la lutte contre les violences de groupes et la protection des personnes chargées d'une mission de service public, cons. 4.
(5) Notre chronique dans le précédent numéro des Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel.
(6) Consid. 6 de la décision n° 2016-535 QPC.
(7) Consid. 5 de la décision précit.
(8) Déc. précit.
(9) Loi du 30 juin 1881 sur la liberté de réunion, Recueil Duvergier, p. 379 à 390 ; Loi du 28 mars 1907 relative aux réunions publiques, JORF du 29 mars 1907, p. 2493.
(10) Consid. 13 à 15 de la décision n° 2016-535 QPC.
(11) Cons. const. n° 99-411 DC du 16 juin 1999, *Loi portant diverses mesures relatives à la sécurité routière et aux infractions sur les agents des exploitants de réseau de transport public de voyageurs *: cf. consid. 20 : « Considérant, en premier lieu, que la procédure instaurée par l'article L. 11-1 du code de la route ne porte pas atteinte à la liberté individuelle au sens de l'article 66 de la Constitution ; qu'eu égard à son objet, et sous réserve des garanties dont est assortie sa mise en œuvre, elle ne porte pas davantage atteinte à la liberté d'aller et venir ».
(12) Cons. const. 2003-467 DC du 13 mars 2003, Loi pour la sécurité intérieure, consid. 8.
(13) Cons. const. 2013-357 QPC du 29 nov 2013, Société Wesgate Charters Ltd, consid. 6 à 8.
(14) L'inviolabilité du domicile, comme le secret des correspondances, figurent dans un paragraphe intitulé « Détachement partieldes composantes de la liberté individuelle depuis 1999 ». Peuvent notamment être mentionnés deux considérants de la décision n° 2004-492 DC du 2 mars 2004 dans laquelle le Conseil semble placer les atteintes à l'inviolabilité du domicile sous l'autorisation et le contrôle de l'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle (cons. 46) tout en distinguant l'inviolabilité du domicile protégée par l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 et la liberté individuelle que l'article 66 place sous la surveillance de l'autorité judiciaire (cons. 4).
(15) CE, 15 janvier 2016, Ligue des droits de l'homme, n° 395092.
(16) Nous désignons par cette expression l'interprétation par laquelle le Conseil précise le sens d'une disposition législative dans les motifs de sa décision sans que cette interprétation ne soit expressément formulée sous la forme d'une réserve -- par l'utilisation expresse des termes « sous réserve » -- et sans qu'elle ne soit rappelée expressément dans le dispositif de la décision.
(17) Consid. 8 de la décision n° 2016-535 QPC.
(18) Ibid.
(19) Cons. const. n° 2015-512 QPC du 8 janvier 2016, M. Vincent R.
(20) Consid. 6 à 8 de la décision n° 2015-512 QPC.
(21) La perquisition donnant lieu à un compte rendu qui est communiqué sans délai au procureur de la République, article 8 de la loi du 3 avril 1955.
(22) Consid. 9 de la décision n° 2016-536 QPC.
(23) Consid. 10 de la décision précitée.
(24) Consid. 11 de la décision précitée.
(25) Cf. notamment, P. Cassia, « Les perquisitions administratives partiellement censurées par le Conseil constitutionnel », blogs.mediapart.fr/paul-cassia, 20 févr. 2016 et O. Beaud et C. Guérin-Bargues, « L'état d'urgence de novembre 2015 : mise en perspective historique et critique », Jus Politicum, n° 15.
(26) On pense particulièrement à l'atteinte à la réputation, particulièrement dans le voisinage, de la personne dont le domicile a fait l'objet d'une perquisition.
(27) Cass. crim., 1er mars 2011, n° 10-90125 ; CE, 29 avril 2013, n° 356976 ; Cass. crim., 30 septembre 2015, n° 15-83026.
(28) Sur l'absence contestable de changement de circonstances issu de la consécration du principe d'individualisation des peines, cf. Cons. const. n° 2010-104 QPC, 17 mars 2011.
(29) Cass. crim., 20 août 2014, n° 14-80394 ; Cass. crim., 19 décembre 2014, n° 14-90043 ; Cass. crim., 28 janvier 2015, n° 14-90049.
(30) CE, 13 février 2015, n° 382019. Sur le refus de qualifier de changement de circonstances un arrêt de la CJCE condamnant sur le fondement du droit communautaire le dispositif contesté, cf. CE, 19 septembre 2011, M. et Mme Paul A., n° 346012.
(31) Cons. const. 2014-424 QPC du 7 novembre 2014 ; Cons. const. 2014-453/454 QPC et 2015-462 QPC du 18 mars 2015.
(32) Cons. const. 2011-120 QPC du 8 avril 2011.
(33) Cons. const. 2013-363 QPC du 31 janvier 2014.
(34) Cass. crim., 5 févr. 2014, n° 12-80154, Dalloz, 2014, p. 807.
(35) Cf. également CE, 9 avril 2014, n° 362263.
(36) Cass. Soc., 12 mars 2014, n° 13-23174.
(37) En ce sens, CE, 11 mars 2011, n° 341658.
(38) Cass., crim., 8 janvier 2013, n° 12-86537.
(39) CAA Paris, 26 mai 2015, n°14PA02853.
(40) J.-H. Stahl, Recours en cassation, Rép. Dalloz, 2015. Dans l'exposé de la procédure, l'arrêt de la CAA de Paris du 26 mai 2015 indique que le mémoire en défense du Ministre soutenait pour ce motif l'irrecevabilité de la QPC.
(41) Cons. const. 2006-535 DC du 30 mars 2006.
(42) V. par ex. Cons. const. 2014-423 QPC du 24 octobre 2014, cons. 16 à 18.
(43) Cons. const. 2013-679 DC du 4 décembre 2013, cons. 33 ; Cons. const. 2013-361 QPC du 28 janvier 2014, cons. 16.
(44) CE, 14 octobre 2010, n° 341845.
(45) CE, 3 novembre 2014, n° 359701.
(46) CE, 5 février 2014, n° 371396 : le Conseil d'État se contente d'une simple conciliation équilibrée entre la sauvegarde de l'ordre public, les exigences de service et le respect de la liberté d'expression et de communication, alors que le Conseil constitutionnel va systématiquement plus loin en exerçant un triple test de proportionnalité selon lequel « les atteintes portées à l'exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l'objectif d'intérêt général poursuivi » (cf. par ex. Cons. const. 2015-512 QPC du 8 janvier 2016).