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Chronique de droit privé

Thomas PIAZZON, Maître de conférence à l'Université Panthéon-Assas (Paris II)

Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel n°58 - janvier 2018

Petite moisson, pour le droit privé, que celle de l’été 2017. Si le contrôle a priori reprend doucement ses droits, par la voie de l’examen par les sages de la loi – très attendue – habilitant le Gouvernement à modifier par ordonnances le code du travail (décision n° 751 DC), seules cinq décisions QPC occuperont par ailleurs cette chronique, le tout pour deux censures seulement. La première,qui concerne les droits des enquêteurs de l’Autorité des marchés financiers (AMF) d’obtenir la communication de certaines données de connexion, était hautement prévisible, car elle constitue le simple décalque d’une précédente censure fulminée contre les pouvoirs identiques conférés par la loi à l’Autorité de la concurrence. La seconde censure, plus inattendue, intervient dans une matière techniquement connexe, mais politiquement plus sensible : celle del’accès administratif en temps réel aux données de connexion dans le domaine de la lutte contre le terrorisme (espionnage administratif). Dans les deux cas, les dispositions sont censurées au nom du respect de la vie privée, droit constitutionnel moins platonique qu’il n’y paraît pour lutter contre les dérives de la République numérique et « connectée » – ainsi que cette chronique l’a déjà montré dans un passé récent(1). L’exposé de ces deux décisions sera précédé par l’étude de celles relatives au droit du travail, deux QPC accompagnant en ce domaine la décision n° 751 DC, et il sera suivi par le rapide examen d’une décision mettant en oeuvre les principes, chers au droit privé, de la protection de la propriété, de la liberté d’entreprendre et de la liberté contractuelle.

À tout seigneur tout honneur, nous commencerons par le contrôle a priori. Comme l’on pouvait s’y attendre, la décision n° 2017‑751 DC du 7 septembre 2017 rejette l’ensemble des nombreux griefs dirigés contre la loi d’habilitation à prendre par ordonnances des mesures pour le renforcement du dialogue social – ce thème étant loin de constituer l’unique objet de la loi du 15 septembre 2017, mais le législateur nous a habitués depuis longtemps aux intitulés trompeurs. Cette déclaration de conformité était prévisible, tant les exigences posées par le Conseil en matière de loi d’habilitation sont notoirement faibles, comme l’exemple de la réforme du droit des obligations l’a superbement montré voici à peine trois ans(2). À quoi bon, dans une République déliquescente où tant d’électeurs s’abstiennent de voter, exiger que la Représentation nationale exerce la tâche fondamentale pour laquelle nous sommes censés l’avoir élue… De ce point de vue, la récente censure d’une loi d’habilitation par la décision n° 2016‑745 DC du 26 janvier 2017(3) pourrait bien demeurer longtemps, comme on le pressentait, l’exception unique qui confirme la permissivité des règles constitutionnelles. Dans sa décision n° 751 DC, le Conseil reprend les principes dégagés de longue date en ce qui concerne le recours aux ordonnances sur le fondement de l’article 38 de la Constitution. En premier lieu, « si cette disposition fait obligation au Gouvernement d’indiquer avec précision au Parlement, afin de justifier la demande qu’il présente, la finalité des mesures qu’il se propose de prendre par voie d’ordonnances ainsi que leur domaine d’intervention, elle n’impose pas au Gouvernement de faire connaître au Parlement la teneur des ordonnances qu’il prendra en vertu de cette habilitation » (§ 2). Au regard de cette exigence, toutes les dispositions de la loi du 15 septembre 2017 qui étaient contestées (y compris sur la scène médiatique, pendant tout l’été 2017) sont validées par les sages, quand bien même certaines de ces habilitations pourraient être jugées un brin évasives : autorisation donnée au Gouvernement d’harmoniser et simplifier les conditions de recours et le contenu des accords de compétitivité ainsi que le régime juridique de la rupture du contrat de travail en cas de refus par le salarié des modifications de son contrat résultant d’un accord collectif, en prévoyant notamment qu’un tel licenciement repose sur un motif spécifique auquel ne s’appliquent pas certaines dispositions relatives au licenciement économique (art. 1, 1 °, c, de la loi et § 11 et s. de la décision du Conseil), autorisation donnée au Gouvernement de favoriser les conditions de mise en oeuvre de la négociation collective en facilitant le recours à la consultation des salariés pour valider un accord, à l’initiative d’un syndicat représentatif dans l’entreprise, de l’employeur ou sur leur proposition conjointe (art. 1, 2 °, b, de la loi et § 17 et s. de la décision), autorisation donnée au Gouvernement de « fusionne[er] en une seule instance les délégués du personnel, le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (…) », la loi d’habilitation n’encadrant cette délégation que sur un point précis, « en fixant à trois, sauf exceptions, le nombre maximal de mandats électifs successifs des membres de l’instance » (art. 2, 1 °, de la loi et § 23 et s. de la décision), autorisation donnée au Gouvernement de « fix[er] un référentiel obligatoire établi notamment en fonction de l’ancienneté, pour les dommages et intérêts alloués par le juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse (…) » (art. 3, 1 °, b, de la loi et § 29 et s. de la décision), autorisation donnée au Gouvernement de « modifier les dispositions relatives au licenciement économique en définissant la règle selon laquelle la cause économique d’un licenciement, dans une entreprise appartenant à un groupe, est appréciée au niveau des entreprises appartenant au même groupe, situées sur le territoire national et relevant du même secteur d’activité, ainsi que les éventuels aménagements à cette règle » (art. 3, 2 °, a, de la loi et § 39 et s. de la décision), autorisation donnée au Gouvernement de « modifier les dispositions relatives au licenciement économique en adaptant les modalités de licenciements collectifs à la taille de l’entreprise et au nombre de ces licenciements » (art. 3, 2 °, e, de la loi et § 46 et s. de la décision), autorisation donnée au Gouvernement de « modifier, à des fins de simplification, de sécurisation juridique et de prévention, les règles de prise en compte de la pénibilité au travail (…) » (art. 5, 1 °, et § 51 et s. de la décision). En dix articles seulement – et cinq pages de JO – le Parlement a ainsi autorisé le Gouvernement à modifier un nombre impressionnant de dispositions du code du travail – à tel point que les éditeurs privés ont dû publier à nouveau, et en urgence, leur code du travail qui datait de mars 2017… Voilà qui suffit à démontrer la précision très relative, quoi qu’en dise le Conseil constitutionnel, de l’entreprise gouvernementale, dans un domaine ô combien sensible pour la paix sociale et si important pour la vie quotidienne des salariés. Mais il suffit, au fond, pour comprendre cette mansuétude constitutionnelle, de revenir à la formulation même du principe posé par le Conseil : ce qui doit être précis, dans une loi d’habilitation, c’est seulement « la finalité des mesures »(4) (dans bien des cas, le Conseil semble toutefois se contenter d’une volonté de « simplification » ou de « modernisation », parfait témoignage de la faiblesse de cette exigence) et leur « domaine d’intervention » (on imagine mal plus basse exigence…), ce qui signifie bien que le contenu des ordonnances est laissé à l’entière appréciation du Gouvernement. Et comme bien souvent les ordonnances sont rédigées avant que la loi d’habilitation ne soit votée(5), celle-ci peut grosso modo se contenter d’un vague résumé de leurs dispositions (une sorte d’annonce de plan répétitive et rébarbative), le seul but de la manoeuvre étant d’éviter un réel débat parlementaire sur le contenu des mesures – quand bien même le Gouvernement disposerait à l’Assemblée de la plus large des majorités politiques. « En marche » ou pas, la République est toujours en berne ! Il est vrai, cependant, que cette exigence de précision « suffisante » n’est pas la seule condition posée par le Conseil constitutionnel pour valider le recours aux ordonnances. Car, en deuxième lieu, « les dispositions d’une loi d’habilitation ne sauraient, ni par elles-mêmes, ni par les conséquences qui en découlent nécessairement, méconnaître une règle ou un principe de valeur constitutionnelle. En outre, elles ne sauraient avoir ni pour objet ni pour effet de dispenser le Gouvernement, dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés en application de l’article 38 de la Constitution, de respecter les règles et principes de valeur constitutionnelle » (§ 3). C’est sur cette idée – sinon sur ce fondement – que la récente décision n° 745 DC (préc.) a invalidé les dispositions de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté qui habilitaient le Gouvernement à remplacer les régimes de déclaration d’ouverture préalable des établissements privés d’enseignement scolaires par un régime d’autorisation, sans préciser les motifs de refus d’ouverture. Le Conseil avait jugé, au nom de l’atteinte susceptible d’être portée à la liberté de l’enseignement, que « le législateur [avait] insuffisamment précisé les finalités des mesures susceptibles d’être prises par voie d’ordonnances ». Il en résulte que l’exigence de précision des finalités de l’habilitation doit également être lue au regard des principes constitutionnels susceptibles d’être mis en cause par la délégation de pouvoirs consentie par le Parlement au Gouvernement. La décision n° 751 DC passe ainsi en revue les principes évoqués par les députés requérants : ici le droit à l’emploi, pour contester une disposition qui « pourrait (…) permettre au Gouvernement de dispenser les employeurs de motiver [certains] licenciement[s] » (selon le grief des requérants, § 12) ou pour s’opposer aux règles permettant de définir un nouveau périmètre d’appréciation des licenciements économiques (§ 39 et s.), là les sixième et huitième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946 (liberté syndicale et participation des travailleurs), pour s’opposer à la consultation des salariés pour valider un accord (§ 17 et s.) ou pour contester la fusion des instances représentatives du personnel (§ 23 et s.), etc. Déjà peu efficients lorsqu’il s’agit d’apprécier la conformité à la Constitution de « véritables » dispositions législatives, il était somme toute peu probable que ces principes sociaux puissent être efficacement opposés aux dispositions purement mécaniques d’une loi d’habilitation. Aussi ces griefs sont-ils brièvement écartés, dans la grande majorité des cas, au terme d’une motivation elle-même très mécanique : toutes ces dispositions « ne sont, ni par elles-mêmes, ni par les conséquences qui en découlent nécessairement », contraires aux principes invoqués (§ 14, 21, 27, 37, 44, 49). À chaque fois revient aussi la promesse d’un contrôle futur des mesures qui seront adoptées par le Gouvernement, car les dispositions ici contestées et validées « ne sauraient avoir ni pour objet ni pour effet de dispenser le Gouvernement, dans l’exercice des pouvoirs qui lui sont conférés en vertu de l’article 38 de la Constitution, de respecter » les principes constitutionnels invoqués (mêmes §). La décision n° 751 DC n’est évidemment pas un blanc-seing, mais juste un laissez-passer. Pour introduire un peu de poésie dans cette décision très stéréotypée(6), on notera que deux points font l’objet de développements un peu plus substantiels de la part du Conseil. Le premier concerne la fusion des instances représentatives du personnel. Sur ce sujet, le Conseil décide qu’« aux termes de l’article 34 de la Constitution : “La loi détermine les principes fondamentaux… du droit du travail, du droit syndical” » et qu’« à ce titre, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des sixième et huitième alinéas du Préambule de la Constitution de 1946, les modalités de la représentation des salariés au sein des entreprises », de sorte qu’« il était (…) loisible au législateur d’autoriser le Gouvernement à fusionner plusieurs instances représentatives du personnel » (§ 26). En l’espèce, le laissez-passer prend donc manifestement des allures de blanc-seing ! La question du plafonnement des indemnités de licenciement constitue le second point qui retient davantage l’attention des sages. La chose n’est pas étonnante, dans la mesure où le Conseil avait censuré une précédente tentative de plafonnement dans sa décision n° 715 DC relative à la « loi Macron » du 6 août 2015(7). Dans cette précédente décision, il était toutefois évident que le Conseil n’avait pas condamné le principe même d’un tel plafonnement, mais seulement les modalités choisies par le législateur qui faisait varier le plafond non seulement selon le critère de l’ancienneté du salarié dans l’entreprise, ce qui était « en adéquation avec l’objet de la loi », mais encore en fonction du « critère des effectifs de l’entreprise », ce qui était au contraire inadéquat au regard du principe d’égalité devant la loi. Dans une décision plus récente (n° 582 QPC), dont cette chronique s’était également fait l’écho, le Conseil avait certes admis que le montant minimal de l’indemnité de licenciement (plancher) puisse dépendre de la taille des entreprises (plus ou moins de onze salariés), mais cette solution apparaissait conciliable avec celle du 5 août 2015(8). Remettant l’ouvrage sur le métier, la loi d’habilitation autorise le Gouvernement à modifier « les dispositions relatives à la réparation financière des irrégularités de licenciement (…) en fixant un référentiel obligatoire établi notamment en fonction de l’ancienneté, pour les dommages et intérêts alloués par le juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse, à l’exclusion des licenciements entachés par une faute de l’employeur d’une exceptionnelle gravité, notamment par des actes de harcèlement ou de discrimination (…) » (art. 3, 1 °, b). Dans sa décision, le Conseil passe sous silence le « principe de réparation intégrale du préjudice » invoqué par les députés (§ 30) – principe qui n’a jamais reçu la moindre consécration de sa part – et rappelle, tout au contraire, que le principe de responsabilité(9), déduit de l’article 4 de la Déclaration de 1789, « ne fait pas obstacle à ce que le législateur aménage, pour un motif d’intérêt général, les conditions dans lesquelles la responsabilité peut être engagée. Il peut ainsi, pour un tel motif, apporter à ce principe des exclusions ou des limitations à condition qu’il n’en résulte pas une atteinte disproportionnée aux droits des victimes d’actes fautifs » (§ 32). Rappelant la logique de sa décision relative à la « loi Macron », il estime qu’en permettant de plafonner les indemnités de licenciement, « le législateur a entendu renforcer la prévisibilité des conséquences qui s’attachent à la rupture du contrat de travail. Il a ainsi poursuivi un objectif d’intérêt général » (§ 33)(10). Pour le reste, le Conseil en revient à la logique fantôme des lois d’habilitation, qui sont des lois sans véritable contenu : « Il en résulte que, par elle-même, l’habilitation ne porte pas une atteinte disproportionnée aux droits des victimes d’actes fautifs. Le grief tiré de la méconnaissance du principe de responsabilité doit donc être écarté » (même §). Au nom du principe de responsabilité, les ordonnances adoptées par le Gouvernement devront se garder de porter « une atteinte disproportionnée aux droits des victimes d’actes fautifs ». Au nom du principe d’égalité, au sujet duquel le Conseil reproduit le même raisonnement (§ 36 et 37), elles devront se garder de faire varier les montants selon la taille de l’entreprise – ce que la loi d’habilitation n’interdit pas expressément, puisqu’elle prévoit « un référentiel obligatoire établi notamment en fonction de l’ancienneté ». Avec un peu d’audace, le Conseil aurait peut-être pu se fonder sur l’adverbe « notamment » pour juger imprécise – et donc inconstitutionnelle – cette habilitation, au regard du principe d’égalité qui l’a conduit voilà deux ans à prononcer la censure des précédentes dispositions légales relatives au plafonnement des indemnités. Mais il n’est sans doute pas dans la nature des sages de se montrer provocateurs ! Au reste, les ordonnances du 22 septembre, désormais en vigueur sur ce point, se sont bien gardées de reproduire les erreurs de la « loi Macron », laquelle aura servi, en quelque sorte, de galop d’essai. S’agissant du droit de la responsabilité civile, on relèvera que les requérants contestaient également l’instauration d’un référentiel obligatoire au nom de la séparation des pouvoirs, en ce qu’elle « priverait le juge du pouvoir d’apprécier le préjudice » (§ 30). Cette argumentation est fermement rejetée par le Conseil : « Le principe de la séparation des pouvoirs n’implique pas que le législateur s’abstienne de fixer un barème obligatoire pour la réparation d’un préjudice causé par une faute civile » (§ 35). À l’heure d’une possible réforme du droit commun de la responsabilité civile, dans le sillage de celle du droit des contrats, cette large permission constitutionnelle n’est pas sans intérêt.

Deux autres décisions, rendues cette fois en matière de contrôle a posteriori, concernent le droit du travail. Dans la première (décision n° 2017‑653 QPC du 15 septembre 2017, Confédération générale du travail – Force ouvrière), le Conseil a jugé conformes au principe d’égalité devant la loi les trois premiers alinéas de l’article L. 3121‑8 du code du travail(11) ainsi que l’article L. 3121‑45 du même code. L’article L. 3121‑8 concerne la détermination du temps de travail effectif et dispose qu’à défaut de conclusion d’une convention ou d’un accord collectifs, « le contrat de travail peut fixer la rémunération des temps de restauration et de pause »(12) et qu’il « prévoit soit d’accorder des contreparties aux temps d’habillage et de déshabillage mentionnées à l’article L. 3121‑3(13), soit d’assimiler ces temps à du temps de travail effectif ». Le syndicat requérant soutenait que ce renvoi au contrat de travail créait « des situations inégalitaires contraires à la Constitution » (§ 16). Cet argument, qui paraissait renvoyer plus ou moins aux débats actuels sur la hiérarchie des normes en droit du travail, était politique et n’avait aucune chance de prospérer sur le terrain constitutionnel. Rappelant le contenu du principe d’égalité dans son invariable formulation, le Conseil règle la question en quatre lignes : « En renvoyant en ces termes à la négociation entre l’employeur et le salarié du contrat de travail, le législateur a traité de la même manière tous les salariés placés, compte tenu de l’absence d’une convention ou d’un accord collectifs, dans la même situation » (§ 26). Si la question présente un intérêt – sur le plan du droit du travail plus que sur le plan constitutionnel –, c’est certainement en ce qu’elle illustre la nouvelle architecture des textes adoptés dans le domaine social depuis la « loi El Khomri » du 8 août 2016 (qui a réécrit les dispositions qui faisaient l’objet de cette QPC) : les règles d’ordre public précèdent celles qui sont laissées à la négociation collective et, au bout de cette chaîne, celles qui, supplétives de volonté, sont abandonnées au contrat de travail. Ce jardin à la française, qui ne favorise pas particulièrement, à notre sens, la lisibilité du droit (en raison des répétitions qu’il engendre), est en lui-même à l’abri du principe constitutionnel d’égalité – et peu importe que les contrats individuels de travail contiennent des stipulations divergentes : l’égalité au sens constitutionnel n’est pas l’égalité au sens syndical ! À peine le § 25 de la décision et le commentaire du service juridique qui s’y réfère créent-ils un doute en soulignant que « le Conseil constitutionnel a (…) tout d’abord relevé le caractère encadré et limité de ce renvoi au contrat de travail »(14). Est-ce à dire qu’un renvoi plus substantiel créerait un risque d’inconstitutionnalité ? S’agissant de l’article L. 3121‑45 du code du travail, seconde disposition contestée par cette QPC, son objet est de permettre l’aménagement du temps de travail sur une période supérieure à la semaine. À défaut d’accord collectif, l’employeur peut aménager unilatéralement le temps de travail dans des limites qui sont différentes selon la taille de l’entreprise : neuf semaines pour les entreprises employant moins de cinquante salariés, quatre semaines pour les entreprises employant au moins cinquante salariés. Comme dans les décisions précédemment rappelées au sujet du plafonnement (ou du plancher) des indemnités de licenciement – et comme dans beaucoup d’autres décisions relatives au droit du travail –, la question était donc de savoir si les règles dont la géométrie varie en fonction de la taille de l’entreprise sont compatibles avec le principe constitutionnel d’égalité. En l’espèce, le Conseil suit le même raisonnement salvateur que dans sa décision n° 582 QPC(15) : la différence de traitement est bien justifiée par une différence de situation. Les sages estiment en effet, au terme d’une motivation circonstanciée, que les entreprises d’au moins cinquante salariés sont « dans une situation différente de celles des entreprises de moins de cinquante salariés au regard de la possibilité de recourir à la négociation collective » (§ 31 : présence de représentants des salariés plus fréquente). Ainsi, en prévoyant des possibilités d’aménagement du temps de travail plus souples pour les entreprises les plus petites, la loi « a tenu compte de leur plus grande difficulté d’accès à la négociation collective » (§ 32). La solution demeurera pertinente tant que les ordonnances du 22 septembre 2017 n’auront pas atteint un de leurs buts les plus fameux, qui est justement de dynamiser la négociation collective dans les petites entreprises. Mais alors il sera toujours temps, pour les syndicats vigilants, de plaider le changement de circonstances de droit pour poser une nouvelle QPC sur l’article L. 3121‑45. Les « ordonnances Macron » de 2017 auront alors trahi la « loi El Khomri » de 2016… S’il est des personnes à plaindre, c’est bien nos jeunes étudiants en droit social. Mais qu’ils se rassurent, ils pourront dans quelques mois se frotter les mains en vendant leur science aux entreprises, petites et grandes ! La seconde QPC travailliste jugée par le Conseil ce trimestre concerne le moribond comité d’entreprise, victime comme nous l’avons vu de la fusion des instances représentatives du personnel opérée par les susdites ordonnances. Dans cette décision n° 2017‑652 QPC du 4 août 2017, Comité d’entreprise de l’unité économique et sociale Markem Imaje, étaient soumises au Conseil constitutionnel les dispositions des articles L. 2323‑3, al. 4, et L. 2323‑4, al. 3 (en sursis, depuis les ordonnances du 22 septembre) du code du travail, dispositions qui fixent les règles applicables au délai de consultation du comité d’entreprise. Selon le premier texte, « à l’expiration [des délais mentionnés(16)], le comité d’entreprise ou, le cas échéant, le comité central d’entreprise est réputé avoir été consulté et avoir rendu un avis négatif ». De son côté, l’article L. 2323‑4 prévoit que les membres élus du CE peuvent saisir le juge dans l’hypothèse où l’employeur n’aurait pas transmis les informations nécessaires à l’élaboration d’un « avis motivé », c’est-à-dire réellement utile. Son troisième alinéa ajoute : « Cette saisine n’a pas pour effet de prolonger le délai dont dispose le comité pour rendre son avis. Toutefois, en cas de difficultés particulières d’accès aux informations nécessaires à la formulation de l’avis motivé du comité d’entreprise, le juge peut décider la prolongation du délai prévu à l’article L. 2323‑3 ». Le CE requérant invoquait principalement deux principes constitutionnels à l’encontre de ces textes : d’une part le principe – déjà croisé dans ces lignes – de participation des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail (huitième alinéa du Préambule de 1946) et, d’autre part, le droit à recours juridictionnel effectif reposant sur l’article 16 de la Déclaration de 1789. L’argumentation prenait un tour plus factuel que juridique : constatant que le juge, en pratique, a rarement le temps de statuer sur la demande de transmission d’informations formée par le CE avant que le délai imposé pour que celui-ci émette son avis ne soit expiré, le requérant dénonçait l’absence d’effet utile des dispositions critiquées, au mépris des principes invoqués. Ce genre d’argumentation, on le sait, n’a guère de chances de faire mouche devant le Conseil, tout attachés que se montrent les sages, contrairement à leurs cousins strasbourgeois (CEDH), à défendre une conception abstraite des droits de l’homme. Qu’on songe, par exemple, à la réponse qu’il apporta, naguère, à l’argument développé par les requérants qui reprochaient à la loi sur le mariage entre personnes de même sexe de poser des règles de droit international privé incitant les étrangers à contourner leur loi personnelle prohibant ce type d’union(17). La réponse fut cinglante et se retrouve dans bien d’autres décisions du Conseil : « L’éventualité d’un détournement de la loi ou d’abus lors de son application n’entache pas celle-ci d’inconstitutionnalité »(18). La décision n° 652 QPC étend cet implacable raisonnement à la présente espèce : « L’éventualité, à l’occasion de certaines procédures, du non-respect des délais prévus par la loi pour des motifs tenant aux conditions de fonctionnement des juridictions ne saurait suffire à entacher celle-ci d’inconstitutionnalité. Dès lors, ne peut être accueilli le grief tiré de ce que, en violation du deuxième alinéa de l’article L. 2323‑4 du code du travail, le juge saisi par le comité d’entreprise statuerait souvent au-delà du délai de huit jours, à une date postérieure à l’échéance du délai laissé au comité d’entreprise pour se prononcer » (§ 11). En somme, cela signifie que la proverbiale lenteur de la justice n’est pas contraire à la Constitution. On peut donc respirer dans les Palais de France et jusqu’à la place Vendôme ! De manière assez elliptique, la décision ajoute que « les dispositions contestées sont assorties des garanties nécessaires pour assurer le respect du principe de participation des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail » (§ 12). Quelles sont ces garanties ? À notre sens, elles résultent moins de l’inoffensive saisine du juge que des sanctions que fulmine le code du travail en cas de manquement par l’employeur à son obligation d’informer le CE (suspension, inopposabilité ou nullité de la décision, responsabilité de l’employeur, délit d’entrave) – autant de sanctions qu’évoque le commentaire officiel de la décision du Conseil (p. 6‑7). Ainsi la menace de sanctions demeure-t‑elle sans doute, aujourd’hui comme hier, l’instrument privilégié de la prophylaxie civile. Une autre voie pourrait consister à doter le recours formé par le CE d’un effet suspensif – c’est d’ailleurs sous cet angle que la chambre sociale de la Cour de cassation avait renvoyé la présente QPC au Conseil(19). Cette solution avait été proposée, mais finalement repoussée, lors des débats parlementaires relatifs aux dispositions du code du travail ici contestées(20). Quant à la jurisprudence du Conseil, nous avons déjà eu l’occasion de voir, dans cette chronique, qu’elle ne fait pas du caractère suspensif des recours une exigence constitutionnelle, en dépit de quelques ouvertures en ce sens, ouvertures qui paraissent de moins en moins rares(21). Il y a deux ans, l’une d’elles a d’ailleurs concerné – au pécuniaire profit des employeurs – la possibilité de contester efficacement en justice la désignation d’un expert par le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT)(22). Au terme d’une froide analyse juridique, le Conseil refuse donc au comité d’entreprise ce qu’il avait accordé aux employeurs en 2015.

La mise en oeuvre du droit constitutionnel au respect de la vie privée, déduit par le Conseil de l’article 2 de la Déclaration de 1789, forme le deuxième bloc de décisions intéressant le droit privé pour ce troisième trimestre 2017. Comme nous l’avons vu, les deux décisions concernées gagnent beaucoup à être rapprochées. La décision n° 2017‑646/647 QPC du 21 juillet 2017, M. Alexis K. et autre, qui conduit à une censure de certaines dispositions de l’article L. 621‑10 du code monétaire et financier, relatif aux pouvoirs de l’AMF, est la plus simple à présenter. Selon ce texte, les enquêteurs de l’AMF pouvaient se faire communiquer par les opérateurs de télécommunication, par les fournisseurs d’accès à internet et par les hébergeurs, les données de connexion que ces derniers conservent et traitent, et ils pouvaient en obtenir la copie. Acceptant l’argumentation des requérants, le Conseil décide que « la communication des données de connexion est de nature à porter atteinte au droit au respect de la vie privée de la personne intéressée. Si le législateur a réservé à des agents habilités et soumis au respect du secret professionnel le pouvoir d’obtenir ces données dans le cadre d’une enquête et ne leur a pasconféré un pouvoir d’exécution forcée, il n’a assorti la procédure prévue par les dispositions en cause d’aucune autre garantie. Dans ces conditions, le législateur n’a pas entouré la procédure prévue par les dispositions contestées de garanties propres à assurer une conciliation équilibrée entre, d’une part, le droit au respect de la vie privée et, d’autre part, la prévention des atteintes à l’ordre public et la recherche des auteurs d’infractions » (§ 9). Cette censure était hautement prévisible, dans la mesure où la disposition contestée (dont l’origine est ancienne, à l’heure numérique, puisqu’elle remonte à la loi du 28 décembre 2001 de finances rectificative pour 2001), était rédigée exactement de la même manière que celle condamnée par le Conseil dans sa décision n° 2015‑715 DC du 5 août 2015, relative à la « loi Macron » (encore la « loi Macron » !), au sujet des pouvoirs d’enquête de l’Autorité de la concurrence(23). Cette décision avait marqué un renforcement des exigences posées par le Conseil constitutionnel, renforcement que la décision du 21 juillet 2017 vient logiquement confirmer. Le commentaire du service juridique parle ouvertement de « revirement de jurisprudence » et explique que les décisions de 2015 et 2017 s’inscrivent « dans un mouvement jurisprudentiel plus large, ayant élevé les exigences en matière de protection de la vie privée et tiré les conséquences des évolutions techniques : même si les données de connexion n’incluent pas le contenu des conversations ou de la correspondance échangées(24), elles comportent des informations de plus en plus précises, notamment en ce qu’elles permettent la localisation en temps réel de l’utilisateur ou du terminal utilisé. En outre, les capacités de traitement des masses de données ainsi générées ont atteint un tel niveau qu’elles permettent d’en tirer des informations de plus en plus précises sur les personnes concernées » (p. 14). Cette argumentation est très convaincante et conduit le Conseil à examiner que des garanties sont prévues par la loi pour encadrer ces pouvoirs des enquêteurs. Et c’est bien l’absence de toute garantie, en 2015 comme en 2017, qui justifie la censure. Deux précisions doivent encore être apportées. La première tient aux conditions d’application dans le temps de cette censure. Sur ce point, le Conseil décide de reporter les effets de celle-ci au 31 décembre 2018, délai substantiel qui permet de sauver les procédures en cours et qui laissera le temps à notre Parlement démissionnaire de voter une loi d’habilitation autorisant le Gouvernement à modifier le code monétaire et financier par ordonnances. Selon les sages, en effet, « l’abrogation immédiate des dispositions contestées aurait des conséquences manifestement excessives » (§ 12). À cet égard, le § 7 de la décision rappelle le principe selon lequel le respect dû à la vie privée doit être concilié avec « la prévention des atteintes à l’ordre public et la recherche des auteurs d’infractions » (voir aussi § 9, préc.). Voilà qui justifie une nouvelle censure platonique pour nos courageux requérants, qui auront peut-être gagné du temps grâce à cette QPC, mais qui auront aussi perdu de l’argent en vain sur l’autel de la promotion des droits de l’homme. Sans doute cela n’a-t‑il pas de prix ! La seconde précision est plus importante et concerne le fond du droit : quelles sont les « garanties » qui permettent de justifier la communication des données de connexion ? Selon la décision n° 646/647 QPC, le fait que les agents de l’AMF soit habilités et tenus au secret professionnel ainsi que le fait qu’ils ne disposent pas d’un pouvoir d’exécution forcée est insuffisant (§ 9)(25). S’agirait-il alors d’imposer l’intervention de l’autorité judiciaire, que l’article 66 de la Constitution – contrairement aux lois contemporaines (v. infra)… – désigne toujours comme la « gardienne de la liberté individuelle » ? Il est peu probable que les sages fassent montre d’une telle hardiesse, comme l’a prouvé leur décision du 23 juillet 2015 sur la loi relative au renseignement, spécialement en ce qui concerne la lutte contre le terrorisme. Or, tel est précisément l’embarrassant domaine dans lequel intervient la seconde décision mettanten oeuvre le droit au respect de la vie privée, rendue quinze jours après celle relative aux pouvoirs de l’AMF. Dans cette décision n° 2017‑648 QPC du 4 août 2017, La Quadrature du Net et autres, le Conseil a dû se prononcer sur la conformité à la Constitution de l’article L. 851‑2 du code de la sécuritéintérieure (CSI). Ce texte, issu de la loi du 24 juillet 2015 relative au renseignement, avait été validé par le Conseil dans sa décision n° 2015‑713 DC examinant cette loi(26). Mais il a été modifié par la loi du 21 juillet 2016 prorogeant l’état d’urgence et portant mesures de renforcement de la lutte antiterroriste. Selon un schéma bien huilé – et vertement dénoncé par ceux qui s’opposent à cette politique –, il s’agit, pour le législateur, d’étendre par touches successives, de plus en plus rapprochées dans le temps (décembre 2013, juillet 2015, juillet 2016), les pouvoirs d’enquête de l’administration(27). Or ces pouvoirs menacent particulièrement la vie privée quand ils permettent, comme en l’espèce, un accès en temps réel aux données de connexion. Deux extensions apportées par la loi du 21 juillet 2016 à l’article L. 851‑2 du CSI étaient critiquées par les requérants, soutenus par la Ligue des droits de l’homme (dont le Conseil a admis l’intervention) : d’une part l’élargissement du champ des personnes dont les connexions peuvent être recueillies en temps réel et, d’autre part, le prolongement de la durée de l’autorisation de deux mois renouvelable à quatre mois renouvelable. Comme dans sa décision relative aux pouvoirs de l’AMF, le Conseil a d’abord relevé que la protection du secret des correspondances était hors de cause, puisque seules les données de connexion (« métadonnées ») sont rendues accessibles à l’administration (§ 6) ; il a donc uniquement fait porter son contrôle sur le respect dû à la vie privée qui, comme nous l’avons vu, doit être concilié avec « la prévention des atteintes à l’ordre public et des infractions, nécessaire à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle » (§ 4). L’extension de la durée de l’autorisation, ensuite, est validée de manière implicite par le Conseil au nom des garanties dont le législateur a entouré les pouvoirs de l’administration – cette durée limitée apparaissant au reste elle-même, malgré son allongement, comme l’une de ces garanties(28). Ces fameuses garanties, qui n’avaient pas d’équivalent dans la décision n° 646/647 QPC sur l’AMF (d’où la censure), sont exactement les mêmes que celles qui avaient conduit le Conseil à juger conforme à la Constitution le même article L. 851‑2, dans sa version issue de la loi du 24 juillet 2015(29) : finalité exclusive de prévention du terrorisme (§ 7), autorisation délivrée « par le Premier ministre ou les collaborateurs directs auxquels il a délégué cette compétence, sur demande écrite et motivée du ministre de la défense, duministre de l’intérieur ou des ministres chargés de l’économie, du budget ou des douanes, après avis préalable de la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement », autorisation « pour une durée de quatre mois renouvelable », inapplicabilité de la procédure d’urgence absolue prévue à l’article L. 821‑5 du CSI, opérations matérielles ne pouvant être exécutées que « par des agents qualifiés des services ou organismes placés sous l’autorité ou la tutelle du ministre chargé des communications électroniques ou des exploitants de réseaux ou fournisseurs de services de télécommunications » (§ 8), contrôle exercé par la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR, qui est une autorité administrative indépendante),commission dont « la composition et l’organisation (…) assurent [l’]indépendance » et dont les dispositions du CSI « assurent l’effectivité [du] contrôle », saisine possible du Conseil d’État « par toute personne souhaitant vérifier qu’aucune technique de recueil de renseignement n’est irrégulièrement mise en oeuvre à son égard ou par la commission nationale de contrôle des techniques de renseignement » (§ 9). Le moins que l’on puisse dire est que le Conseil prend bien soin d’énumérer toutes ces « garanties », dont on sait qu’elles ont pour effet – sinon pour objet ? – d’écarter de l’affaire le juge judiciaire, au profit de l’autorité et des juridictions administratives. Le Conseil d’État peut ainsi se gargariser de défendre les libertés, ce qui suscite l’agacement de moins en moins dissimulé des plus hauts magistrats judiciaires(30) qui, contrairement aux membres du Conseil d’État, ne sont pas chargés de donner au pouvoir politique des conseils sur les textes qui renforcent leurs propres prérogatives et qui n’ont plus qu’à prêcher dans un vaste désert juridique que c’est l’article 66 de la Constitution qu’on assassine. Tout cela est bien connu ; tout cela n’en est pas moins inquiétant. Enfin, le Conseil s’est prononcé sur l’élargissement du cercle des personnes concernées par cet accès à leurs données de connexion. Il a, d’une part, admis que la loi du 21 juillet 2016 vise non plus « la personne préalablement identifiée comme présentant une menace », mais, de manière beaucoup plus large, la « personne préalablement identifiée susceptible d’être en lien avec une menace » – sans pourtant que la nature de ce « lien » ne soit précisée par la loi d’une quelconque façon… Est-ce à dire que le champ d’application personnel de la loi ne peut connaître aucune limite ? Apparemment non, puisque, d’autre part, les sages ont censuré la seconde extension qui était rédigée dans les termes suivants : « Lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser qu’une ou plusieurs personnes appartenant à l’entourage de la personne concernée par l’autorisation sont susceptibles de fournir des informations au titre de la finalité qui motive l’autorisation, celle-ci peut être également accordée individuellement pour chacune de ces personnes ». Cette censure suscite des sentiments ambivalents. Dans un premier temps, sans doute faut-il saluer le courage et l’indépendance politiques du Conseil qui, dans les temps difficiles qui courent, ne craint pas d’annuler, au nom de la défense des libertés, une disposition destinée à renforcer encore les pouvoirs de l’administration en matière de lutte contre le terrorisme. Cependant, dans un second temps, les motifs de la censure mettent en lumière les limites de celle-ci. Contrairement à ce que l’on pouvait attendre, le Conseil ne juge pas les termes « entourage de la personne concernée » trop vagues en eux-mêmes – comme il avait pu le faire, dans une QPC ancienne et célèbre, au sujet du terme « famille » employé par la loi pour définir le champ d’application de l’inceste (il est vrai dans le domaine plus strict du droit pénal)(31). D’ailleurs, dans sa décision n° 713 DC, le Conseil avait bien admis que la loi sur le renseignement puisse se référer aux « personnes appartenant à l’entourage » en matière d’interception des correspondances (art. L. 852‑1 du CSI). Le commentaire du service juridique rappelle que « toutefois, dans son appréciation, le Conseil constitutionnel avait relevé que le recours à cette technique de renseignement était quantitativement limité. En effet, l’article L. 852‑1 prévoit que le nombre maximal des autorisations d’interception en vigueur simultanément est arrêté par le Premier ministre après avis de la CNCTR » (p. 14). Or, c’est ce même argument – exclusivement quantitatif – qui vient seulement fonder ici la censure des dispositions contestées : « Le législateur a permis que fasse l’objet de cette technique de renseignement un nombre élevé de personnes, sans que leur lien avec la menace soit nécessairement étroit. Ainsi, faute d’avoir prévu que le nombre d’autorisations simultanément en vigueur doive être limité, le législateur n’a pas opéré une conciliation équilibrée entre, d’une part, la prévention des atteintes à l’ordre public et des infractions et, d’autre part, le droit au respect de la vie privée » (§ 11). Pour sonder la maigreur juridique de cette censure, on rappellera que le système de limitation du nombre d’autorisations mis en place par l’article L. 852‑1 (en matière d’interception des correspondances) n’apparaît que peu contraignant : « Le nombre maximal des autorisations d’interception en vigueur simultanément est arrêté par le Premier ministre, après avis de la Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement. La décision fixant ce contingent et sa répartition entre les ministres mentionnés au premier alinéa de l’article L. 821‑2 ainsi que le nombre d’autorisations d’interception délivrées sont portés à la connaissance de la commission » (art. L. 852‑1, VI). Voilà qui ne devrait guère brider les initiatives de l’administration, d’autant que le Conseil constitutionnel a reporté au 1er novembre 2017 les effets de sa censure, ce qui laissera le temps au Gouvernement de faire un « copié-collé » du paragraphe VI de l’article L. 852‑1 du CSI sous son article L. 851‑2 et de faire entériner la manoeuvre par son assemblée d’enregistrement nationale.

Le classique triptyque droit de propriété – liberté d’entreprendre – liberté contractuelle conclura cette chronique avec une décision, plus récréative que la précédente, portant sur le droit de la propriété littéraire et artistique (décision n° 2017‑649 QPC du 4 août 2017, Société civile des producteurs phonographiques et autre). Était contesté, dans cette affaire, le 3 ° de l’article L. 214‑1 du code de la propriété intellectuelle (CPI) qui prévoit que lorsqu’un phonogramme a été publié à des fins de commerce, l’artiste-interprète et le producteur ne peuvent s’opposer à sa communication au public par des services de radio par internet, sauf si le programme principal de ce service est dédié majoritairement à un artiste-interprète, à un même auteur, à un même compositeur ou est issu d’un même phonogramme. Issues d’une loi du 7 juillet 2016, ces dispositions ont eu pour objet d’étendre la licence légale reconnue au profit des radios hertziennes en direction des radios par internet dont les modalités de diffusion sont similaires à celles des radios hertziennes (d’où les exclusions prévues par le texte, qui concernent par exemple les services de radio qui permettent aux auditeurs d’effectuer des choix de programmes). Les requérants contestaient ces dispositions « en ce qu’elles privent les producteurs et les artistes-interprètes de la possibilité de s’opposer à la diffusion d’un phonogramme sur certains services de radio par internet, entraîn[ant] une privation du droit de propriété ou, à tout le moins, y port[ant] une atteinte disproportionnée. Les sociétés requérantes dénon[çaient], ensuite, des atteintes à la liberté contractuelle et à la liberté d’entreprendre, dès lors que les producteurs de phonogrammes et les artistes-interprètes seraient empêchés de déterminer et de négocier le montant de leur rémunération » (§ 2). Sur le premier grief, le Conseil décide qu’aucune privation de propriété au sens de l’article 17 de la Déclaration de 1789 n’est caractérisée, puisque « les dispositions contestées sont dépourvues d’effet sur le droit moral des artistes-interprètes » et puisque ceux-ci et leurs producteurs « ont déjà accepté la commercialisation » des phonogrammes en question (§ 9). Si la décision confirme ainsi, dans le sillage de nombreuses autres(32), l’application du droit constitutionnel de propriété au domaine intellectuel (§ 5), peut-être pourrait-on reprocher au Conseil de ne pas tirer toutes les conséquences de la spécificité des propriétés intellectuelles, qui sont incorporelles. Le commentaire officiel semble d’ailleurs trahir cet embarras lorsqu’il résume la position des sages de la manière suivante : « Compte tenu de son champ actuel, tel qu’étendu par les dispositions contestées, la licence légale n’entraîne donc pas de privation de propriété au sens de l’article 17 de la Déclaration de 1789 » (p. 13). Peut-on véritablement soutenir, en bon droit, qu’une privation de propriété n’en est pas une parce que son champ est restreint ? Qui vole un oeuf ne vole-t‑il pas un boeuf ? En vérité, on sait bien que l’article 17 de la Déclaration de 1789 s’accorde très mal avec les « expropriations » relevant du droit privé, ce qui conduit généralement le Conseil à examiner ces dispositions sous l’angle d’une simple atteinte aux conditions d’exercice du droit de propriété (article 2 de la Déclaration de 1789). Tel est ensuite l’objet de la décision, qui articule ce grief avec la liberté d’entreprendre et la liberté contractuelle, ces trois règles constitutionnelles opérant de façon identique : caractérisation d’un objectif d’intérêt général et contrôle de proportionnalité. Sur le premier point, le Conseil décide qu’« en adoptant les dispositions contestées, le législateur a entendu faciliter l’accès des services de radio par internet aux catalogues des producteurs de phonogrammes et ainsi favoriser la diversification de l’offre culturelle proposée au public. Ce faisant, il a poursuivi un objectif d’intérêt général » (§ 10). S’agissant du contrôle de proportionnalité, deux séries de circonstances permettent d’écarter les griefs. D’abord, le Conseil relève qu’au regard des exclusions posées par la loi de 2016, « les dispositions contestées ne limitent (…) les prérogatives des titulaires de droits voisins qu’à l’égard desservices de radio par internet dont les modalités d’offre et de diffusion sont comparables à celles de la radiodiffusion hertzienne » (§ 11 ; « services de radio par internet non interactifs »(33)). Ensuite, l’article L. 214‑1 du CPI prévoit une rémunération au profit des artistes-interprètes et des producteurs dont il fixe les modalités, de sorte « qu’une rémunération équitable [selon le terme employé par la loi et sagement repris par le Conseil] est assurée aux titulaires de droits voisins au titre de l’exploitation des phonogrammes » (§ 12). Justifiées par un objectif d’intérêt général auquel elles sont proportionnées, les dispositions de l’article L. 214‑1 du CPI ne sont donc pas contraires au droit et libertés invoqués. Il faut encore noter que les requérants dénonçaient l’absence « de dispositions transitoires relatives à la mise en oeuvre des dispositions contestées », de sorte que « le législateur aurait affecté l’économie des contrats en cours [liant notamment les producteurs aux radios « en ligne »]_ et ainsi porté atteinte au « principe de sécurité juridique »_ » (§ 2). Sur ce dernier point, la réponse des sages, bien qu’elle soit brève, n’est pas sans intérêt : « En l’absence de disposition expresse contraire, les dispositions contestées [issues de la loi du 7 juillet 2016] n’affectent pas les contrats légalement conclus avant leur entrée en vigueur. Par conséquent, le grief tiré de la méconnaissance des exigences résultant des articles 4 et 16 de la Déclaration de 1789 doit être écarté » (§ 15). Cette réponse est précieuse à l’heure où d’aucuns s’interrogent pour savoir si certaines dispositions de l’ordonnance du 10 février 2016 réformant le droit des contrats pourraient – dans le silence de l’ordonnance – s’appliquer aux accords conclus avant la date de son entrée en vigueur (1er octobre 2016), en particulier sur le fondement de la théorie des « effets légaux », théorie que le Conseil a eu l’occasion de faire sienne dans quelques hypothèses(34). Or, sur ce point, le Conseil constitutionnel prescrit la sagesse : faute de disposition légale expresse, le contrat doit être soumis aux règles en vigueur au jour de sa conclusion (comme le prévoit l’ordonnance de 2016 en son article 9). On ne saurait mieux dire.

Revue doctrinale

29 septembre 2016

2016-570 QPC

M. Pierre M. [Cumul des poursuites pénales pour banqueroute avec la procédure de redressement ou de liquidation judiciaire et cumul des mesures de faillite ou d'interdiction prononcées dans ces cadres]

  • Matsopoulou, Haritini. « Banqueroute : la fin du cumul des mesures de faillite personnelle et d’interdiction de gérer », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, avril-juin 2017, n° 2, p. 305‑314.

2016-573 QPC

M. Lakhdar Y. [Cumul des poursuites pénales pour banqueroute avec la procédure de redressement ou de liquidaion judiciaire et cumul des mesures de faillite ou interdiction prononcées dans ces cadres]

  • Matsopoulou, Haritini. « Banqueroute : la fin du cumul des mesures de faillite personnelle et d’interdiction de gérer », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, avril-juin 2017, n° 2, p. 305‑314.

24 février 2017

2016-613 QPC

Département d'Ille-et-Vilaine et autres [Recours subrogatoire des départements servant des prestations sociales]

  • Jourdain, Patrice. « Conformité à la Constitution de l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985 », RTD civ. : revue trimestrielle de droit civil, avril-juin 2017, n° 2, p. 408‑411.

16 mars 2017

2017-749 DC

Loi relative à la lutte contre l'accaparement des terres agricoles et au développement du biocontrôle

  • Giacuzzo, Jean-François. « Politique foncière agricole et droit de propriété privée : la difficile équation constitutionnelle », Constitutions, avril-juin 2017, n° 2017‑2, p. 264‑266.

23 mars 2017

2017-750 DC

Loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre

  • Mathieu, Bertrand. « Jusqu’où peut-on faire porter sur les entreprises un devoir de vigilance en matière de protection des droits de l’homme et de l’environnement ? », Constitutions, avril-juin 2017, n° 2017‑2, p. 291‑284.

30 mars 2017

2016-621 QPC

EARL Clos Teddi et autre [Cumul des sanctions : contribution spéciale et sanction pénale en cas d'emploi illégal d'un travailleur étranger]

  • Cerf-Hollender, Agnès. « Cumul des poursuites pénales et administratives en cas d’emploi illégal d’un travailleur étranger », Revue de science criminelle et de droit pénal comparé, avril-juin 2017, n° 2, p. 325‑329.
  • Imbert, Louis. « Cumul des poursuites pénales et administratives en cas d’emploi illégal d’un travailleur étranger », Constitutions, avril-juin 2017, n° 2017‑2, p. 296‑299.
  • Mayel, Myriam. « Winter is coming ou la douche froide dans la saga du cumul des sanctions [Cass. crim., 31 mai 2017, n° 15‑82159] », La Gazette du Palais, 11 juillet 2017, n° 26, p. 21‑23.

6 avril 2017

2017-623 QPC

Conseil national des barreaux [secret professionnel et obligation de dsicrétion du défenseur syndical]

  • Bugada, Alexis. « L’obligation de discrétion du défenseur syndical équivaut le secret professionnel de l’avocat », Procédures, juillet 2017, n° 7, p. 19.
  • Orif, Vincent. « La consécration de l’obligation de discrétion du défenseur syndical », La Gazette du Palais, 25 juillet 2017, n° 28, p. 48‑49.

2 juin 2017

2017-632 QPC

Union nationale des associations de famille de traumatisés crâniens et de cérébro-lésés [Procédure collégiale préalable à la décision de limitation ou d'arrêt des traitements d'une personne hors d'état d'exprimer sa volonté]

  • Doublet, Yves-Marie. « Les modalités de mise en oeuvre des décisions d’arrêt de traitement chez les personnes hors d’état d’exprimer leur volonté », Les Petites Affiches, 4 août 2017, n° 155, p. 12‑22.
  • Lamarche, Marie. « Fin de vie : un “brevet de constitutionnalité” pour la loi Claeys-Leonetti ? », Droit de la famille, juillet-août 2017, n° 7‑8, p. 3.
  • Mathieu, Bertrand. « Les garanties constitutionnelles relatives à la fin de vie sont exclusivement procédurales », La Semaine juridique. Édition générale, 10 juillet 2017, n° 28, p. 1367‑1370.
  • Vigneau, Daniel. « Le Conseil constitutionnel et la fin de vie d’une personne hors d’état d’exprimer sa volonté : une décision pour presque rien ! », Dictionnaire permanent santé, bioéthique, biotechnologies, juillet 2017, n° 283, p. 1‑3.

Articles thématiques

Droit social

  • Mouly, Jean. « L’article L. 1451‑1 du code du travail imposant un délai d’un mois au conseil de prud’hommes pour statuer sur une prise d’acte est conforme à la Constitution [Cass. soc., 1er juin 2017, 17‑40031] », Droit social, septembre 2017, n° 9, p. 782‑784.
  • Mouly, Jean. « Prise en charge des frais d’une expertise décidée illégalement par le CHSCT : une fausse mise en balance du droit à l’exécution des décisions de justice et du droit à la santé et à la sécurité des salariés ? », Droit social, septembre 2017, n° 9, p. 784‑787.
  • Tauran, Thierry. « La sécurité sociale et les limitations apportées à la liberté d’entreprendre », La Semaine juridique. Social, 25 juillet 2017, n° 29, p. 14‑19.

(1) Ces nouvelles censures, prononcées au nom du respect de la vie privée, s’inscrivent en effet dans le prolongement de plusieurs autres, par exemple au sujet du registre des trusts. Voir Cons. const., déc. n° 2016‑591 QPC du 21 octobre 2016, Mme Helen S.informations sur la manière dont une personne entend disposer de son patrimoine » (§ 6), atteinte inconstitutionnelle à la vie privée).

(2) Voir Cons. const., déc. n° 2015‑710 DC du 12 février 2015, Loi relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.

(3) À propos de la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté, § 13. Voir cette chronique in Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2017, n° 55‑56, p. 205 et s., spéc. p. 207‑209.

(4) Sans qu’il soit nécessaire d’indiquer les possibles ou probables effets pervers !

(5) En l’espèce, le contenu définitif des ordonnances a été révélé à la fin du mois d’août 2017, moins d’un mois après que la loi d’habilitation a été définitivement adoptée par le Parlement (2 août 2017 ; saisine des députés le 9 août). Les cinq ordonnances ont, quant à elles, été signées le 22 septembre 2017, soit quinze jours seulement après la présente décision du Conseil. Voir notamment B. Teyssié, « Les ordonnances du 22 septembre 2017 ou la tentation des cathédrales », JCP éd. G, 2017, 1068.

(6) Comp. O. Dutheillet de Lamothe, ancien membre du Conseil constitutionnel et actuel avocat, qui juge la décision « élégante et intéressante » (Semaine sociale Lamy, 25 septembre 2017, n° 1783, p. 7).

(7) Déc. n° 2015‑715 DC du 5 août 2015, Loi pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, cons. 148 et s.

(8) Cons. const., déc. n° 2016‑582 QPC du 13 octobre 2016, Société Goodyear Dunlop Tires France SA. Voir cette chronique in Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2017, n° 55‑56, p. 202 (indemnité à la charge de l’employeur en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse).

(9) Il y a ainsi requalification implicite du grief soulevé par les requérants.

(10) Dans la décision portant sur la « loi Macron », le Conseil n’avait pas examiné la question sous l’angle du principe de responsabilité, mais sous celui du principe d’égalité, qui était seul invoqué par les requérants. Il avait alors décidé « qu’en prévoyant que les montants minimal et maximal de l’indemnité accordée par le juge en cas de licenciement sans cause réelle et sérieuse sont fonction croissante des effectifs de l’entreprise, le législateur a entendu, en aménageant les conditions dans lesquelles la responsabilité de l’employeur peut être engagée, assurer une plus grande sécurité juridique et favoriser l’emploi en levant les freins à l’embauche ; qu’il a ainsi poursuivi des buts d’intérêt général » (déc. n° 715 DC, préc., cons. 151). De la sécurité juridique (version 2015) à la prévisibilité des droits (version 2017), on conviendra qu’il n’y a pas une grande différence. Quant au fait de lever « les freins à l’embauche », ils passent cette fois à la trappe dans la motivation du Conseil.

(11) La saisine portait également sur le 4e alinéa du même article, mais le Conseil a décidé qu’il n’y avait pas lieu d’examiner sa conformité à la Constitution, puisque celle-ci résulte déjà de sa décision n° 2004‑509 DC du 13 janvier 2005, Loi de programmation pour la cohésion sociale (pas de changement de circonstances ; § 18 et s. de la déc. n° 653 QPC).

(12) Dans l’hypothèse de principe où ceux-ci ne sont pas considérés comme du temps de travail effectif, ce qui suppose que le salarié ne soit pas « à la disposition effective de l’employeur » (art. L. 3121‑1 C. trav.).

(13) Selon cette disposition, « le temps nécessaire aux opérations d’habillage et de déshabillage, lorsque le port d’une tenue de travail est imposé par des dispositions légales, des stipulations conventionnelles, le règlement intérieur ou le contrat de travail et que l’habillage et le déshabillage doivent être réalisés dans l’entreprise ou sur le lieu de travail, fait l’objet de contreparties. Ces contreparties sont accordées soit sous forme de repos, soit sous forme financière ».

(14) Commentaire du service juridique, site Internet du Conseil, p. 12.

(15) Préc., note 8.

(16) Délai conventionnel (accord entre l’employeur et le CE) ou, à défaut, délai fixé par décret. Voir art. R. 2323‑1-1 C. trav. (un mois en principe).

(17) Cons. const., déc. n° 2013‑669 DC du 17 mai 2013, cons. 26 et s.

(18) Déc. préc., cons. 30. Pour d’autres exemples, voir commentaire de la décision n° 652 QPC, site Internet du Conseil, p. 14.

(19) Cass. soc., 1er juin 2017, n° 17‑13.081 : « L’absence d’effet suspensif du recours peut conduire (…) à ce que l’institution représentative du personnel soit privée de toute protection de son droit à l’information nécessaire pour que puisse être assurée la participation du personnel à la gestion de l’entreprise, en dépit de l’exercice d’une voie de recours ».

(20) Voir commentaire préc., p. 6.

(21) Voir Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2017, n° 57, spéc. p. 207 (au sujet de la récente décision n° 2017‑632 QPC du 2 juin 2017 relative à la fin de vie).

(22) Voir Cons. const., déc. n° 2015‑500 QPC du 27 novembre 2015, Société Foot Locker France SAS, au sujet de la contestation et de la prise en charge par l’employeur des frais d’une expertise décidée par le CHSCT. Dans une décision du 13 octobre 2017 (n° 2017‑662 QPC, conformité), le Conseil vient de se prononcer sur les dispositions de la « loi El Khomri » du 8 août 2016 qui ont réécrit les textes censurés en 2015. Cette décision sera analysée dans notre prochaine chronique.

(23) Cons. 134 à 138.

(24) Ce qui explique que la protection constitutionnelle du secret des correspondances, dont la décision n° 646/647 QPC rappelle l’existence aux côtés du respect de la vie privée (§ 7), ne soit finalement pas mentionnée à l’appui de la censure.

(25) Rapp. Cons. const., déc. n° 2015‑715 DC (préc., note 7), cons. 137. À notre connaissance, le législateur n’a pas encore entendu remédier à l’inconstitutionnalité des dispositions relatives aux pouvoirs de l’Autorité de la concurrence prononcée par cette décision. Aucun indice légal ne résulte donc de ce précédent.

(26) Cons. const., déc. n° 2015‑713 DC du 23 juillet 2015, Loi relative au renseignement, spéc. cons. 52 et s.

(27) De son côté, le commentaire du service juridique évoque une jolie théorie du « pas supplémentaire » (site Internet du Conseil, p. 13).

(28) Sur l’extension de la durée, il est vrai que la réforme du 21 juillet 2016 ne fait qu’aligner les dispositions de l’article L. 851‑2 du CSI sur le droit commun applicable en matière d’espionnage administratif (art. L. 821‑4 du CSI).

(29) Cons. const., déc. n° 2015‑713 DC, préc., note 26.

(30) Voir à ce sujet : Ch. Jamin, « Duel au sommet ! », D., 2017, éditorial, p. 1649.

(31) Cons. const., déc. n° 2011‑163 QPC du 16 septembre 2011, M. Claude N. (définition des délits et crimes incestueux).

(32) Voir, en particulier, la fameuse « décision HADOPI » : Cons. const., déc. n° 2009‑580 DC, Loi favorisant la diffusion et la protection de la création sur internet, cons. 13.

(33) Le commentaire du service juridique explique en effet que « les titulaires de droits voisins retrouvent leurs droits exclusifs dès lors que la diffusion en ligne est susceptible de concurrencer les exploitations primaires des phonogrammes, c’est-à-dire les ventes physiques de disques, auxquelles s’ajoutent désormais les ventes par téléchargement de fichiers audio et l’écoute en ligne sur abonnement via des plateformes de diffusion en flux ou streaming » (p. 14‑15).

(34) Voir Cons. const., déc. n° 2014‑441/442/443 QPC du 23 janvier 2015, Mme Michèle C. et autres (Les Nouveaux Cahiers du Conseil constitutionnel, 2015, n° 48, p. 200).