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Décision n° 2021-952 QPC du 3 décembre 2021 - Décision de renvoi Cass.

M. Omar Y. [Réquisition de données informatiques par le procureur de la République dans le cadre d'une enquête préliminaire]
Non conformité totale - effet différé

Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 21 septembre 2021, 21-90.032, Inédit
Cour de cassation - Chambre criminelle
N° de pourvoi : 21-90.032
ECLI : FR : CCASS : 2021 : CR01230
Non publié au bulletin
Solution : Qpc seule - renvoi au cc

Audience publique du mardi 21 septembre 2021
Décision attaquée : Tribunal judiciaire de Douai, du 02 juillet 2021

Président
M. Soulard (président)
Avocat(s)
SCP Spinosi
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° V 21-90.032 F-D

N° 01230

21 SEPTEMBRE 2021

SL2

RENVOI

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 21 SEPTEMBRE 2021

Le tribunal correctionnel de Douai, par jugement en date du 2 juillet 2021, reçu le 9 juillet 2021 à la Cour de cassation, a transmis une question prioritaire de constitutionnalité dans la procédure suivie contre M. [W] [U] du chef d'infractions à la législation sur les stupéfiants.
Des observations ont été produites.

Sur le rapport de M. Barbier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi, avocat de M. [W] [U], et les conclusions de M. Lagauche, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 septembre 2021 où étaient présents M. Soulard, président, M. Barbier, conseiller rapporteur, M. Bonnal, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

1. La question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« En édictant les dispositions des articles 77-1-1 et 77-1-2 du code de procédure pénale - lesquelles autorisent, dans le cadre d'une enquête préliminaire, le procureur de la République qui n'est pas une autorité ou une entité indépendante, ou sur autorisation de celui-ci, l'officier ou l'agent de police judiciaire, par tout moyen, de requérir de toute personne, de tout établissement ou organisme privé ou public ou de toute administration publique qui sont susceptibles de détenir des informations intéressant l'enquête, y compris celles issues d'un système informatique ou d'un traitement de données nominatives, de lui remettre ces informations, par décision du seul procureur de la République et sans contrôle préalable par une juridiction indépendante - le législateur a-t-il d'une part, porté une atteinte disproportionnée au droit au respect à la vie privée, protégés aux articles 6 et 8 de la CEDH, et aux articles 4, 5,6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789, ainsi qu'aux droits de la défense et à un recours effectif et, d'autre part, méconnu sa propre compétence en affectant ces mêmes droits et liberté que la Constitution garantit ? »

2. Les dispositions législatives contestées sont applicables à la procédure et n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

3. La question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle.

4. La question posée présente un caractère sérieux en ce que les articles 77-1-1 et 77-1-2 du code de procédure pénale, qui autorisent une autorité chargée de diriger l'enquête et d'engager les poursuites à requérir la communication de données de connexion de nature à permettre de tirer des conclusions précises sur la vie privée de la ou des personnes concernées, sans le contrôle préalable d'une autorité extérieure, sont susceptibles de porter une atteinte excessive aux droits et aux libertés protégés par les articles 2 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen.

5. En conséquence, il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en audience publique du vingt et un septembre deux mille vingt et un.ECLI : FR : CCASS : 2021 : CR01230