Contenu associé

Décision n° 2020-864 QPC du 13 novembre 2020 - Décision de renvoi Cass.

Société Route destination voyages [Redressement des cotisations et contributions sociales sur la base des informations contenues dans les procès-verbaux de travail dissimulé]
Conformité

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 10 SEPTEMBRE 2020

Par mémoire spécial présenté le 19 juin 2020, la société Route destination voyages, société à responsabilité limitée, dont le siège est [...] , a formulé une question prioritaire de constitutionnalité à l'occasion du pourvoi n° P 19-24.836 qu'elle a formé contre l'arrêt rendu le 26 septembre 2019 par la cour d'appel d'Amiens (2e chambre protection sociale), dans une instance l'opposant à l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) Nord-Pas de Calais, dont le siège est [...] .

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Vigneras, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Route destination voyages, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de l'union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales Nord-Pas de Calais, et l'avis de M. Gaillardot, premier avocat général, après débats en l'audience publique du 9 septembre 2020 où étaient présents M. Pireyre, président, Mme Vigneras, conseiller référendaire rapporteur, M. Prétot, conseiller doyen, M. Gaillardot, premier avocat général, et Mme Szirek, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

  1. La société Route destination voyages (la société) a fait l'objet d'un redressement portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2013 par l'URSSAF du Nord-Pas de Calais (l'URSSAF), à la suite d'un constat de travail dissimulé dressé par procès-verbal du 16 mai 2013 transmis par la brigade mobile de la police aux frontières de Coquelles (62).

  2. La société a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale.

Enoncé de la question prioritaire de constitutionnalité

  1. A l'occasion de la défense au pourvoi formé par l'URSSAF contre l'arrêt rendu le 26 septembre 2019 par la cour d'appel d'Amiens, la société a, par mémoire distinct et motivé, demandé de renvoyer au Conseil constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité ainsi rédigée :
    « Les dispositions de l'article L. 243-7-5 du code de la sécurité sociale, dans leur version issue de la loi 2012-1404 du 17 décembre 2012, applicable au litige, en ce qu'elles autorisent les organismes de recouvrement à procéder au redressement des cotisations et contributions dues sur la base des informations contenues dans les procès-verbaux de travail dissimulé qui leur sont transmis, sans prévoir la communication préalable desdits procès-verbaux à la personne à laquelle est réclamée le paiement des cotisations et contributions prétendument dues, méconnaissent-elles les dispositions de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen garantissant le respect des droits de la défense ? »

Examen de la question prioritaire de constitutionnalité

  1. La disposition contestée, de nature législative, est applicable au litige, qui concerne un redressement effectué par l'URSSAF, à la suite d'un constat de travail dissimulé dressé par procès-verbal de la police aux frontières.

  2. Elle n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel.

  3. Le redressement des cotisations et contributions sociales par les organismes de recouvrement sur la base des informations contenues dans les procès-verbaux de travail dissimulé qui leur sont adressés par les agents mentionnés à l'article L. 8271-1-2 du code du travail, expose le cotisant d'une part, à la privation, pour les rémunérations en litige, de toute mesure de réduction ou d'exonération de cotisations de sécurité sociale ou de minoration de leur assiette, d'autre part, à l'application de majorations spécifiques s'ajoutant aux majorations de retard déjà dues, sans que l'article L. 243-7-5 du code de la sécurité sociale ne prévoie la communication, au cotisant, du procès-verbal sur lequel se fondent les organismes de recouvrement pour procéder à ce redressement sur la base des informations qu'il contient. La question posée présente, dés lors, un caractère sérieux.

  4. En conséquence, il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix septembre deux mille vingt.
ECLI : FR : CCASS : 2020 : C201034