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Décision n° 2018-720/721/722/723/724/725/726 QPC du 13 juillet 2018 - Décision de renvoi Cass. 5

Syndicat CFE-CGC France Télécom Orange et autres [Dérogation à la tenue d'élections partielles en cas d'annulation de l'élection de délégués du personnel ou de membres du comité d'entreprise]
Non conformité totale

16 mai 2018
Cour de cassation
Pourvoi n° 18-11.386
Chambre sociale - Formation de section

ECLI : FR : CCASS : 2018 : SO00915

SOC. / ELECT

COUR DE CASSATION

CGA
______________________
QUESTION PRIORITAIRE de CONSTITUTIONNALITÉ
______________________

Audience publique du 16 mai 2018

RENVOI

M. FROUIN, président

Arrêt n° 915 FS-D
Pourvoi n° Y 18-11.386

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité formulée par mémoire spécial reçu le 28 février 2018 et présenté par :

1 °/ le syndicat CFE-CGC France Télécom Orange, dont le siège est [...] ,

2 °/ Mme Marie-Noëlle A... , domiciliée [...] comité d'établissement DO Sud-Ouest, [...] ,

à l'occasion du pourvoi formé par eux contre le jugement rendu le 18 janvier 2018 par le tribunal d'instance de Bordeaux (contentieux des élections professionnelles), dans le litige les opposant :

1 °/ au syndicat Fédération communication conseil culture F3C-CFDT, dont le siège est [...] ,

2 °/ à M. Denis X..., domicilié [...] ,

3 °/ à la société Orange, société anonyme, dont le siège est [...] ,

4 °/ à la société Orange porte-à-porte, société anonyme, dont le siège est [...] ,

5 °/ à la société Orange Caraïbes, société anonyme, dont le siège est [...] ,

défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 9 mai 2018, où étaient présents : M. Frouin, président, Mme Y..., conseiller rapporteur, M. Huglo, conseiller doyen, M. Rinuy, Mmes Basset, Pécaut-Rivolier, conseillers, Mmes Chamley-Coulet, Lanoue, MM. Joly, Le Masne de Chermont, conseillers référendaires, Mme Z..., avocat général, Mme Piquot, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Y..., conseiller, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat du syndicat CFE-CGC France Télécom-Orange et de Mme A... , de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Orange, de la société Orange porte-à-porte et de la société Orange Caraïbes, l'avis de Mme Z..., avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu qu'à l'occasion du pourvoi formé contre le jugement du tribunal d'instance de Bordeaux du 18 janvier 2018, le syndicat CFE-CGC France Télécom Orange a, par mémoire distinct et motivé, demandé à la Cour de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité suivante :

« Les dispositions de l'article 7-VIII de la loi du 17 août 2015 codifié sous les deux derniers alinéas de l'article L. 2324-23 du code du travail et l'article 7-VI de la même loi codifié sous l'article L. 2324-10 du code du travail portent-elles atteintes à l'effectivité du principe d'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales garanti par l'article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958, au principe de la participation des travailleurs à la détermination collective des conditions de travail ainsi qu'à la gestion des entreprises garanti par l'alinéa 8 du Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 et au principe résultant de l'article 34 de la Constitution selon lequel l'incompétence négative du législateur ne doit pas affecter un droit ou une liberté que la Constitution garantit, en l'espèce le principe de participation et celui de l'égal accès des femmes et des hommes aux responsabilités professionnelles et sociales précités dès lors qu'elles imposent l'annulation de l'élection des représentants du personnel au comité d'entreprise du sexe surreprésenté ou mal positionné sur la liste de candidatures sans assortir cette sanction de dispositions prévoyant le remplacement des sièges vacants selon des modalités permettant d'assurer l'effectivité de la représentation proportionnelle des deux sexes dans les instances représentatives du personnel voulue par le législateur et sans obliger l'employeur, dans cette hypothèse, à organiser de nouvelles élections si un collège électoral n'est plus représenté ou si le nombre de représentants du personnel titulaires est au moins réduit de moitié  ».

Attendu que les dispositions contestées sont applicables au litige, lequel concerne l'annulation des élections d'élus du sexe surreprésenté en violation de l'obligation de représentation équilibrée des hommes et des femmes, au regard de leur part respective dans l'effectif de l'entreprise ;

Qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Que la question posée présente un caractère sérieux en ce que les dispositions contestées qui peuvent aboutir à ce que plusieurs sièges de membres du comité d'entreprise demeurent vacants, y compris dans le cas où un collège électoral n'est plus représenté ou si le nombre de membres du comité d'entreprise est réduit de moitié ou plus, sont susceptibles de porter atteinte au principe de participation des travailleurs ;

D'où il suit qu'il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

PAR CES MOTIFS :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize mai deux mille dix-huit.