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Décision n° 2016-608 QPC du 24 janvier 2017 - Décision de renvoi Cass.

Mme Audrey J. [Délit de communication irrégulière avec un détenu]
Non conformité totale

Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 19 octobre 2016, 16-81.743, Inédit
N° de pourvoi : 16-81.743
ECLI : FR : CCASS : 2016 : CR05378
Non publié au bulletin
Solution : Qpc incidente - renvoi au cc

Audience publique du mercredi 19 octobre 2016
Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble, du 23 novembre 2015

Président
M. Guérin (président)
Avocat(s)
SCP Spinosi et Sureau
Texte intégral
RÉPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

________________________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à Paris, le dix-neuf octobre deux mille seize, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller RAYBAUD, les observations de la société civile professionnelle SPINOSI et SUREAU et les conclusions de M. l'avocat général GAILLARDOT ;

Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité formulée par mémoire spécial reçu le 1er août 2016 et présenté par :

-Mme Audrey X...,

à l'occasion du pourvoi formé par elle contre l'arrêt de la cour d'appel de GRENOBLE, chambre correctionnelle, en date du 23 novembre 2015, qui, pour port d'arme prohibé, l'a condamnée à cinq mois d'emprisonnement avec sursis et 1 000 euros d'amende ;

Attendu que la question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« En édictant, au sein de l'article 434-35, alinéa 1er, du code pénal, les dispositions « ainsi que de communiquer par tout moyen avec une personne détenue, en dehors des cas autorisés par les règlements », lesquelles permettent de réprimer toute communication avec un détenu qui ne correspondrait pas à un cas fixé par le pouvoir réglementaire, le législateur a, d'abord, porté une atteinte disproportionnée à la liberté de communication des pensées et des opinions et au droit au respect de la vie privée, tels qu'ils sont garantis par les articles 11 et 2 de la Déclaration de droits de l'homme et du citoyen, et, ensuite, méconnu sa propre compétence en affectant ces droits et libertés que la Constitution garantit" ;

Attendu que la disposition législative contestée, qui constitue le fondement juridique de l'interpellation de la prévenue lors de l'audience, est applicable à la procédure et n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Mais attendu que la question, ne portant pas sur l'interprétation d'une disposition constitutionnelle dont le Conseil constitutionnel n'aurait pas encore eu l'occasion de faire application, n'est pas nouvelle ;

Et attendu que la question présente un caractère sérieux en ce que l'interdiction de communiquer par tout moyen avec une personne détenue, en dehors des cas autorisés par les règlements, est susceptible de porter une atteinte disproportionnée à la liberté de communication des pensées et des opinions et au droit au respect de la vie privée, principes de valeur constitutionnelle, et de méconnaître la compétence du législateur pour fixer les règles concernant les garanties fondamentales accordées aux personnes détenues ;

D'où il suit qu'il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

Par ces motifs :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Raybaud, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Bray ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;
ECLI : FR : CCASS : 2016 : CR05378