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Décision n° 2014-709 DC du 15 janvier 2015 - Observations du Président du Sénat

Loi relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral
Non conformité partielle

La saisine du Conseil constitutionnel concernant la loi relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral soulève un point de grande importance relatif à la procédure parlementaire.

Le Président de l'Assemblée nationale vous ayant adressé une lettre à ce sujet, je me dois d'appeler votre attention sur la position du Sénat, en précisant que mon prédécesseur, le Président Jean-Pierre BEL, avait déjà été conduit à faire part de son désaccord, par écrit, au Président de l'Assemblée nationale.

La question en débat porte sur la faculté dont dispose l'Assemblée nationale en vertu du dernier alinéa de l'article 45 de la Constitution, lorsqu'elle statue définitivement sur un texte de loi, de reprendre un ou plusieurs des « amendements adoptés par le Sénat ».

L'Assemblée nationale estime qu'en raison des spécificités de la lecture définitive, ces amendements susceptibles d'être repris doivent avoir été présentés et adoptés en séance publique par le Sénat et qu'ils excluent ceux que le Sénat a retenus, en nouvelle lecture après la commission mixte paritaire, en commission avant de les adopter en séance publique.

Le Sénat récuse cette analyse restrictive qui ne trouve aucun fondement dans le texte constitutionnel et qui, au contraire, méconnaît les règles de notre loi fondamentale relatives au vote de la loi. Rien dans la Constitution ne justifie en effet que la procédure applicable à la nouvelle lecture au Sénat doive répondre à des règles différentes de celles édictées aux articles 42 et 44 de la Constitution, en vertu desquels, d'une part, la discussion des projets de loi porte, en séance, sur le texte adopté par la commission, d'autre part, le droit d'amendement s'exerce en séance ou en commission.

Rien, dans la combinaison des articles 42, 44 et 45 de la Constitution, ne s'oppose donc à ce qu'en nouvelle lecture la commission compétente du Sénat examine le texte qui lui est transmis et vote, le cas échéant, des amendements.

Rien, dans la combinaison de ces articles ne s'oppose à ce que l'Assemblée nationale puisse reprendre, en lecture définitive, des amendements adoptés par le Sénat après avoir été ainsi votés en commission ; de tels amendements sont bien des « amendements adoptés par le Sénat » au sens du dernier alinéa de l'article 45 de la Constitution.

Il n'est pas rare que, comme dans le cas de la loi aujourd'hui en cause, l'Assemblée nationale s'interdise de reprendre des amendements adoptés par le Sénat au motif qu'ils seraient irrecevables sur le fondement de l'article 45 de la Constitution. Il est important, pour la clarté du débat parlementaire, que cette question soit tranchée.