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Décision n° 2014-397 QPC du 6 juin 2014 - Décision de renvoi CE

Commune de Guyancourt [Fonds de solidarité des communes de la région d'Île-de-France]
Non conformité totale - effet différé

Conseil d'État

N° 374873
ECLI : FR : CESSR : 2014 : 374873.20140401
Inédit au recueil Lebon
3ème et 8ème sous-sections réunies
M. Guillaume Odinet, rapporteur
M. Vincent Daumas, rapporteur public
DELAMARRE, avocat

lecture du mardi 1 avril 2014
REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

Texte intégral
Vu l'ordonnance n° 1304618 du 21 janvier 2014, enregistrée le 24 janvier 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, par laquelle la présidente de la première chambre du tribunal administratif de Versailles, avant qu'il soit statué sur la demande de la commune de Guyancourt tendant à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision du 30 avril 2013 du préfet des Yvelines fixant sa contribution au fonds de solidarité des communes de la région Ile-de-France pour l'année 2013, a décidé, par application des dispositions de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, de transmettre au Conseil d'Etat la question de la conformité aux droits et libertés garantis par la Constitution du b du 2 ° du II de l'article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales ;

Vu le mémoire, enregistré le 26 juillet 2013 au greffe du tribunal administratif de Versailles, présenté par la commune de Guyancourt, représentée par son maire, en application de l'article 23-1 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Guillaume Odinet, Auditeur,

- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Delamarre, avocat de la commune de Guyancourt ;

1. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux ;

2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 2531-12 du code général des collectivités territoriales, le fonds de solidarité des communes de la région d'Ile-de-France a pour objet de contribuer à l'amélioration des conditions de vie dans les communes urbaines de cette région supportant des charges particulières au regard des besoins sociaux de leur population sans disposer des ressources fiscales suffisantes ; que le I de l'article L. 2531-13 de ce code fixe le montant total des ressources du fonds pour les années 2012 à 2015 à, respectivement, 210, 230, 250 et 270 millions d'euros ; que le 1 ° du II de cet article prévoit que les communes contributrices à ce fonds sont les communes dont le potentiel financier par habitant est supérieur au potentiel financier moyen par habitant des communes de la région ; qu'en vertu du 2 ° du II de cet article, dans sa version issue de la loi du 29 décembre 2012 de finances pour 2013, le prélèvement, calculé pour atteindre le niveau fixé au I, est réparti entre les communes contributrices en proportion du carré de l'écart entre leur potentiel financier par habitant et le potentiel financier moyen par habitant, multiplié par la population ;

3. Considérant que le 2 ° du II de l'article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales, dans sa version issue de la loi du 29 décembre 2012, prévoit, en outre, que la répartition du prélèvement entre les communes contributrices doit tenir compte de cinq conditions qu'il fixe ; que, notamment, selon le a de ce 2 °, le prélèvement au titre du fonds ne peut excéder, pour chaque commune, 10 % des dépenses réelles de fonctionnement du pénultième exercice ; que le c de ce 2 ° prévoit un abattement du prélèvement des communes contribuant pour la première fois ; que son d prévoit un lissage sur trois ans du prélèvement des communes qui sont à la fois contributrices et attributaires du fonds ; que son e exonère du prélèvement les communes de la région figurant parmi les cent cinquante premières communes de 10 000 habitants et plus classées en fonction d'un indice synthétique de ressources et de charges ; qu'enfin, aux termes du b du même 2 ° du II de l'article L. 2531-13 du code, le prélèvement d'une commune « ne peut excéder 120 % en 2012, 130 % en 2013, 140 % en 2014 et, à compter de 2015, 150 % du montant du prélèvement opéré au titre de l'année 2009 conformément à l'article L. 2531-13 dans sa rédaction en vigueur au 31 décembre 2009 » ;

4. Considérant que la commune de Guyancourt soutient que les dispositions du b du 2 ° du II de l'article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales sont contraires au principe d'égalité garanti par les articles 6 et 13 de la Déclaration de 1789 ;

5. Considérant que le b du 2 ° du II de l'article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales est applicable au litige dont est saisi le tribunal administratif de Versailles ; que cette disposition n'a pas déjà été déclarée conforme à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce qu'elle porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, et notamment au principe d'égalité devant les charges publiques, soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ;

D E C I D E :
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Article 1er : La question de la conformité à la Constitution des dispositions du b du 2 ° du II de l'article L. 2531-13 du code général des collectivités territoriales est renvoyée au Conseil constitutionnel.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à la commune de Guyancourt et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au Premier ministre et au tribunal administratif de Versailles.