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Décision n° 2013-682 DC du 19 décembre 2013 - Observations complémentaires du Gouvernement

Loi de financement de la sécurité sociale pour 2014
Non conformité partielle

I/ SUR L'ARTICLE 34.

Cet article systématise un examen sous trois mois, par les instances conventionnelles, de toutes les nouvelles rémunérations autres que relatives aux actes négociées par les libéraux. En cas d'avis favorable de ces instances, ces rémunérations seront intégrées à l'accord des centres de santé dans les conditions de droit commun (avenant ou nouvel accord approuvé par les ministres).

Il prévoit également la négociation, dans les neuf mois suivant la publication de la loi de financement de la sécurité sociale, d'un avenant à l'accord national des centres de santé afin de traiter le « stock » des modes de rémunération hors paiement à l'acte aujourd'hui non transposés.

Dès lors qu'elles modifient les tarifs de remboursement en vigueur (actes, majorations), les conventions libérales s'appliquent automatiquement aux centres de santé. En revanche, les autres rémunérations pouvant être prévues par les conventions avec les professionnels libéraux (forfaits, rémunération sur objectif de santé publique, aides conventionnelles), qui pouvaient faire l'objet d'une transposition par voie d'avenant à l'accord national des centres de santé, ont en pratique été très peu transposées.

Les centres de santé n'ont pas connu d'évolution substantielle de leurs rémunérations conventionnelles hors acte depuis la création de l'accord national en 2002, notamment faute de vecteurs adaptés à ces transpositions.

Or, depuis cette date, les conventions conclues entre l'assurance maladie et les professionnels de santé libéraux, notamment avec les médecins, ont intégré de nouveaux modes de rémunération, forfaitaires ou sur objectif de santé publique par exemple.

Par exemple, les centres de santé ne bénéficient pas aujourd'hui de la rémunération liée aux patients en affection de longue durée (40 €/an par patient - « rémunération médecin traitant ») ou non (5 €/an par patient - « forfait médecin traitant ») et n'ont pas non plus de rémunération sur objectifs de santé publique à l'instar des maisons de santé. Ils ne perçoivent pas non plus d'aides conventionnelles « démographiques » alors que la majorité de ces centres est implantée dans des zones fragiles.

La révision de l'accord des centres de santé sous neuf mois après publication de la loi l'amènera à évoluer pour intégrer tout ou partie de ces éléments de rémunération (autres que le paiement à l'acte) aujourd'hui non perçus par les centres, ce qui aura un impact direct sur les dépenses des régimes obligatoires d'assurance maladie. En application du C du V de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale, cette disposition relève donc bien du champ de la loi de financement de la sécurité sociale.

Par la suite, toute rémunération nouvelle négociée avec les libéraux (à commencer, à court terme, par les rémunérations d'équipe qui devraient être négociées début 2014 dans le cadre d'un accord conventionnel interprofessionnel prévu par l'article 45 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2013) pourront faire l'objet d'une transposition rapide aux centres (après examen dans un délai de trois mois), ce qui n'était pas observé dans le cadre actuel, dans lequel les négociations avec les centres de santé n'étaient pas conduites de façon régulière.

Cette transposition rapide et systématisée aux centres de santé des rémunérations libérales conventionnelles (hors actes) induira directement une dépense supplémentaire pour les régimes obligatoires d'assurance maladie.

La mesure relève donc bien du champ de la loi de financement en vertu des dispositions de l'article LO. 111-3 précité.

II/ SUR L'ARTICLE 37.

Cet article prévoit que le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur la situation des zones médicalement sous-dotées en France.

Ces dispositions entrent bien dans le champ de la loi de financement de la sécurité sociale, le 4 ° du C du V de l'article LO 111-3 du code de la sécurité sociale disposant que peuvent figurer dans la partie de la loi de financement de la sécurité sociale de l'année comprenant les dispositions relatives aux dépenses pour l'année à venir les dispositions « améliorant l'information et le contrôle du Parlement sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale ».

III/ SUR L'ARTICLE 57.

Cet article élargit aux bénéficiaires de l'ACS (aide à l'acquisition d'une complémentaire santé) l'encadrement des pratiques tarifaires qui s'applique aux bénéficiaires de la CMU-c. Il sera ainsi possible de définir des plafonds de prix pour certains dispositifs médicaux, comme les équipements d'optique, pour les personnes bénéficiant de l'ACS.

Le frein financier à l'accès aux soins est particulièrement présent sur les postes de dépenses pour lesquels l'assurance maladie solvabilise moins bien les assurés. Ainsi, sur certains dispositifs médicaux comme les équipements d'optique, on constate un renoncement aux soins plus important que sur d'autres postes de soins pour les assurés ayant de faibles revenus et ne disposant pas d'une couverture complémentaire suffisante.

Cette mesure tend donc à fixer des plafonds tarifaires sur ces produits au bénéfice des assurés précaires que sont les bénéficiaires de l'ACS.

Elle va augmenter le recours à ces soins de la part des bénéficiaires de l'ACS, en permettant de maîtriser le reste à charge. A ce titre, on peut noter que la consommation de soins des bénéficiaires de la CMU-c est supérieure à celles des bénéficiaires de l'ACS, qui bénéficient d'une couverture moins importante de leur reste à charge et ne disposent pas de mesures de limitation des pratiques tarifaires sur les soins dentaires et d'optique alors que celles-ci existent dans le cadre de la CMU-c.
Ainsi, le taux de recours des bénéficiaires de l'ACS aux équipements d'optiques, pour les verres complexes, est inférieur à celui des bénéficiaires de la CMU-c (2,5 % contre 3,3 % - source CNAMTS). La mesure aura donc un effet direct sur les dépenses des régimes de base.

Parallèlement, cette mesure renforce l'attractivité de l'ACS pour les populations pouvant en bénéficier. Abondé par le versement par les organismes complémentaires (OC) de la taxe de solidarité additionnelle aux cotisations d'assurance (TSA), le Fonds CMU finance les dépenses d'ACS (correspondant au montant de la réduction opérée par l'OC sur le coût du contrat de complémentaire), via une déduction correspondante sur les montants de TSA dus par les OC. Ainsi, l'augmentation du nombre de bénéficiaires liée à une plus grande attractivité du dispositif, et son impact sur les déductions opérées par les OC sur leur versement de TSA, minore les ressources du Fonds CMU. Ces dépenses supplémentaires pour le Fonds CMU réduiront la majoration des remboursements des dépenses de CMU-c affectés à la CNAMTS en application du quatrième alinéa de l'article L. 862-2 du code de la sécurité sociale.

Ces deux effets justifient la place en loi de financement de la sécurité sociale de cette mesure.

IV/ SUR L'ARTICLE 58.

Cet article prévoit un renouvellement automatique du bénéfice de l'ACS pour les titulaires d'un minimum vieillesse. Cette mesure vise à s'assurer qu'une fois que ces allocataires sont entrés dans le dispositif, ils y demeurent tant qu'ils justifient des conditions d'ouverture du droit.

A l'heure actuelle, certains allocataires d'un minimum vieillesse, alors même qu'ils ont fait une première demande de bénéfice de l'ACS, ne procèdent pas à une nouvelle démarche à l'échéance de leur droit annuel en vue de son renouvellement et perdent ainsi le bénéfice du dispositif alors même qu'ils continuent de remplir les conditions pour en bénéficier.

On estime ainsi le « taux de chute » à 33 %. La mesure, en ce qu'elle conduira à renouveler automatiquement les droits de ces bénéficiaires, aura donc un impact financier évalué à 15,4 M€ à effectifs constants.

Compte tenu de la projection des effectifs de l'ACS pour les prochaines années (augmentation liée à la montée en charge de la mesure de relèvement du plafond de
ressources intervenue au 1er juillet 2013), le coût de la mesure est estimé à 23,4 M€ en 2014, et 26,6 M€ en 2015.

L'accroissement des dépenses au titre de l'ACS consécutif à cette mesure justifie sa place en loi de financement de la sécurité sociale au titre du mécanisme de financement et de reversement à la CNAMTS décrit en réponse à la question précédente.