Décision n° 2013-342 QPC du 20 septembre 2013 - Décision de renvoi Cass.
Cour de cassation
chambre civile 3
Audience publique du jeudi 4 juillet 2013
N° de pourvoi : 13-11884
Non publié au bulletin Qpc incidente - renvoi au cc
M. Terrier (président), président
SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)
REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu que les sociétés civiles immobilières de la Perrière neuve et du Traineau d'or, respectivement titulaires d'un bail et d'un sous-bail emphytéotiques sur une parcelle expropriée au profit de la commune de Chambéry, qui ont formé un pourvoi en cassation contre un arrêt de la cour d'appel de Chambéry du 22 mars 2012 les déboutant de leur action indemnitaire pour voie de fait formée contre cette commune, soutiennent que les dispositions de l'article L. 12-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique sont contraires aux principes résultant des articles 16 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 ;
Sur les questions prioritaires de constitutionnalité, qui sont recevables :
« 1 °- L'article L. 12-2 du Code de l'expropriation qui dispose que l'ordonnance d'expropriation éteint par elle-même, et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés, est-il contraire aux principes résultant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 garantissant l'exercice d'un recours juridictionnel effectif, le droit à un procès équitable et le principe du contradictoire, en ce que ce texte permet de priver le preneur, et notamment l'emphytéote titulaire de droits réels, de ses droits sur le bien exproprié, sans qu'il soit appelé à la procédure d'expropriation, et sans qu'il puisse exercer un recours contre l'ordonnance d'expropriation non contradictoire » ;
2 °- L'article L. 12-2 du code de l'expropriation qui dispose que l'ordonnance d'expropriation éteint par elle-même, et à sa date, tous droits réels ou personnels existant sur les immeubles expropriés, est-il contraire aux principes résultant de l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 garantissant le droit de propriété, en ce que ce texte permet de priver le preneur, et notamment l'emphytéote titulaire de droits réels, de ses droits sur le bien exproprié, sans qu'il soit appelé à la procédure d'expropriation, sans qu'il puisse exercer un recours contre l'ordonnance d'expropriation non contradictoire et sans une indemnisation préalable et certaine, dès lors que son droit à indemnisation peut être écarté sur le seul fondement de la négligence du propriétaire à dénoncer son existence à l'autorité expropriante ?" ;
Attendu que les dispositions contestées sont applicables au litige au sens de l'article 23-2 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;
Attendu que les questions qui visent, d'une part, l'absence de recours de l'emphytéote contre l'ordonnance d'expropriation, d'autre part, la perte de son droit réel sans indemnisation préalable, qui pourraient être considérées comme des atteintes aux principes garantis par les articles 16 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, apparaissent sérieuses ;
D'où il suit qu'il y a lieu de les renvoyer au Conseil constitutionnel ;
PAR CES MOTIFS :
RENVOIE au Conseil constitutionnel les questions prioritaires de constitutionnalité relatives à l'application de l'article L. 12-2 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quatre juillet deux mille treize.