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Décision n° 2011-190 QPC du 21 octobre 2011 - Décision de renvoi Cass.

M. Bruno L. et autre [Frais irrépétibles devant les juridictions pénales]
Non conformité partielle - effet différé

Cour de cassation
chambre criminelle
Audience publique du mercredi 20 juillet 2011
N° de pourvoi : 11-90058
Publié au bulletin

M. Louvel (président), président
SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

N° S 11-90.058 F-P+B

N° 4306

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, le vingt juillet deux mille onze, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le rapport de M. le conseiller MONFORT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CORDIER ;

Statuant sur la question prioritaire de constitutionnalité transmise par un jugement du tribunal de grande instance de PARIS, 17e chambre correctionnelle, en date du 17 mai 2011, dans la procédure suivie du chef de diffamation publique envers un dépositaire de l'autorité publique contre :

- M. Bruno X...,
- La société Hachette Filipacchi Associés,
civilement responsable,

reçu le 19 mai 2011 à la Cour de cassation ;

Attendu que la question prioritaire de constitutionnalité est ainsi rédigée :

« Les dispositions combinées :

- de l'article 475-1 du code de procédure pénale, qui interdit aux prévenus relaxés et aux civilement responsables de demander au juge la condamnation de la partie civile perdante à leur payer la somme qu'il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, tout en accordant cette possibilité à la partie civile contre l'auteur de l'infraction,

- de l'article 800-2 du code de procédure pénale soumettant le droit du prévenu de solliciter l'indemnisation de ses frais irrépétibles à l'encontre de la partie civile à des conditions restrictives et écartant le civilement responsable de son bénéfice,

portent-elles atteinte aux droits et libertés que la Constitution garantit, et plus précisément aux principes d'égalité devant la justice, d'exigence d'un procès équitable et du respect des droits de la défense, droits fondamentaux de nature constitutionnelle garantis par les articles 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, et relevant des « principes fondamentaux reconnus par les lois de la République » mentionnés au préambule de la Constitution de 1946 ? »

Attendu que les dispositions contestées sont applicables à la procédure, dès lors que des demandes ont été présentées devant le tribunal correctionnel sur le fondement de ces textes ;

Qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel ;

Et attendu que la question est sérieuse en ce que les textes critiqués instituent des régimes d'indemnités pour frais différenciés selon les parties, et sont ainsi de nature à porter atteinte au principe d'équilibre entre les parties au procès pénal, au droit à un procès équitable, et au respect des droits de la défense ;

D'où il suit qu'il y a lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel ;

Par ces motifs :

RENVOIE au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité ;

Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;

Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Louvel président, M. Monfort conseiller rapporteur, Mme Koering-Joulin conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Daudé ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;