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Décision n° 2007-550 DC du 27 février 2007 - Observations du gouvernement

Loi relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur
Conformité

Paris, le 23 février 2007
OBSERVATIONS DU GOUVERNEMENT SUR LE RECOURS DIRIGE CONTRE LA LOI RELATIVE A LA MODERNISATION DE LA DIFFUSION AUDIOVISUELLE ET A LA TELEVISION DU FUTUR
Le Conseil constitutionnel a été saisi, par plus de soixante députés et plus de soixante sénateurs, de deux recours dirigés contre l'article 5 de la loi relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur, adoptée le 22 février 2007, en tant qu'elle modifie les articles 99 et 104 de la loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication.
Ces recours appellent, de la part du Gouvernement, les observations suivantes.
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A/ Selon le sixième alinéa de l'article 99 de la loi du 30 septembre 1986, issu des dispositions de l'article 5 de la loi déférée, par dérogation au I de l'article 28-I de la loi de 1986, les autorisations de diffusion par voie hertzienne terrestre en mode numérique des services nationaux de télévision préalablement diffusés sur l'ensemble du territoire métropolitain en mode analogique accordées aux éditeurs de ces services sont prorogées de cinq ans.
L'article 5 de la loi déférée remplace, par ailleurs, l'article 104 de la loi du 30 septembre 1986 par des dispositions en vertu desquelles à l'extinction complète de la diffusion par voie hertzienne en mode analogique d'un service national de télévision préalablement autorisé sur le fondement de l'article 30, le Conseil supérieur de l'audiovisuel (CSA) accorde à l'éditeur de ce service qui lui en fait la demande, sous réserve du respect des articles 1er, 3-1, 26 et 39 à 41-4, un droit d'usage de la ressource radioélectrique pour la diffusion d'un autre service de télévision à vocation nationale, à condition que ce service ne soit lancé qu'à compter du 30 novembre 2011 et qu'il remplisse les conditions et critères énoncés aux deuxième et troisième alinéas du III de l'article 30-1, souscrive à des obligations renforcées de soutien à la création en matière de diffusion et de production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et d'expression originale française fixées par décret en Conseil d'Etat et soit édité par une personne morale distincte, contrôlée par cet éditeur au sens du 2 ° de l'article 41-3.
Selon les députés et sénateurs requérants, ces dispositions réservent un double avantage, prorogation de cinq ans des autorisations de diffusion d'une part, octroi d'une chaîne numérique supplémentaire, ou « chaîne compensatoire », d'autre part, au bénéfice des seuls éditeurs de services nationaux de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique. En les adoptant, le législateur aurait, par suite, porté atteinte au principe constitutionnel d'égalité. Le dispositif de la « chaîne compensatoire » contreviendrait également à la nécessité d'assurer le pluralisme. Il est enfin soutenu que le législateur aurait méconnu l'étendue de sa compétence en n'encadrant pas de manière suffisante le renvoi à un décret en Conseil d'Etat opéré par les dispositions de l'article 104.
B/ Aucun de ces griefs ne pourra être accueilli.
1/ On doit rappeler, à titre liminaire, que les dispositions critiquées s'insèrent dans une loi dont l'objet est de faire migrer la diffusion de la télévision de l'analogique vers le numérique. L' accélération du déploiement de la télévision numérique terrestre (TNT) sur l'ensemble du territoire national est conçu pour atteindre l'objectif d'un transfert complet le 30 novembre 2011, selon un schéma national d'arrêt de la diffusion analogique et de basculement vers le numérique approuvé par arrêté du Premier ministre. Ce choix répond en particulier aux recommandations du Conseil de l'Union européenne qui, dans des conclusions du 14 novembre 2005, a invité les Etats membres, dans la mesure du possible, à mener à terme le passage au numérique avant 2012, ainsi qu'à publier avant 2006 leurs propositions en matière de passage au numérique.
L'objectif de couverture actuellement assigné aux différents opérateurs par les décisions du CSA du 10 juin 2003 est de couvrir 85 % de la population par la TNT.
L'extension de la couverture du territoire par la TNT, objet des articles 96-1 et 97 de la loi du 30 septembre 1986 issus de l'article 5 de la loi déférée, implique l'extinction de la diffusion par voie analogique. La diffusion en mode analogique accapare en effet une part importante de la ressource radioélectrique déjà partagée et le développement de la TNT nécessite son extinction anticipée pour libérer l'espace nécessaire à la diffusion numérique des nouveaux services. On doit relever ici que l'extension de la couverture numérique du territoire répond au souhait des nouveaux entrants du secteur.
La loi déférée organise cette extinction en trois étapes.
Tout d'abord, dès l'entrée en vigueur de la loi, le CSA est habilité à retirer certaines fréquences analogiques dans des zones géographiques limitées. C'est l'objet de l'article 98 de la loi du 30 septembre 1986, destiné à permettre l'extension de la couverture de la TNT dans les zones à forte pénurie de fréquences. Ensuite, en vertu du troisième alinéa de l'article 99 de la même loi, le CSA procède, à compter du 31 mars 2008, à l'extinction progressive, par zone géographique, de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique. Enfin, au 30 novembre 2011, date limite fixée par le premier alinéa du même article 99, la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique prend fin. L'achèvement du passage au numérique en trois ans et demi suppose une réduction à un rythme très soutenu de la diffusion en mode analogique.
C'est dans ce contexte que s'inscrivent les dispositions critiquées.
Pour atteindre les objectifs décrits plus haut, la loi déférée, et en particulier l'article critiqué par les auteurs du recours, prévoit, d'une part, des mécanismes destinés à inciter les opérateurs de télévision à étendre leur zone de desserte numérique, en tenant compte des coûts croissants de diffusion impliqués par l'extension de la couverture TNT au-delà de 85 % de la population. Les investissements nécessaires pour atteindre les portions du territoire non encore couvertes sont en effet plus coûteux que ceux qui ont permis d'atteindre les portions du territoire sur lesquelles les opérateurs sont déjà engagés. A l'article 96-1 nouveau, le législateur a toutefois exclu que les éditeurs de services en clair préalablement autorisés en mode analogique puissent bénéficier de ce régime incitatif, en leur imposant une zone de desserte numérique correspondant au moins à 95 % de la population. L'article 5 de la loi déférée prévoit, d'autre part, d'accorder aux éditeurs de services nationaux analogiques des contreparties à l'extinction complète de la diffusion en mode analogique de leurs services existants.
2/ Contrairement à ce qui est soutenu, ces dispositions ne sont pas contraires au principe constitutionnel d'égalité.
Sans doute les nouvelles dispositions des articles 99 et 104 de la loi du 30 septembre 1986 issues de l'article 5 de la loi déférée instituent des dispositions favorables aux éditeurs de services nationaux de télévision diffusés par voie hertzienne terrestre en mode analogique. Le sixième alinéa de l'article 99 prévoit ainsi la prorogation de plein droit de cinq ans des autorisations de diffusion en mode numérique des services de télévision nationaux analogiques dans la mesure où ces services deviennent membre du groupement d'intérêt public chargé de mettre en oeuvre l'extinction de la diffusion analogique prévu par l'article 102. L'article 104, s'inspirant du troisième alinéa du III de l'article 30-1 de la loi de 1986 issu de la loi n°2000-719 du 1er août 2000, accorde, d'autre part, aux éditeurs nationaux de services de télévisions diffusés en mode analogique une « chaîne compensatoire » à l'extinction complète de leur signal analogique.
a) En adoptant ces dispositions, le législateur n'a cependant nullement consenti aux éditeurs concernés les « privilèges » que dénoncent les parlementaires saisissants. Il s'est, en effet, borné à leur accorder des contreparties destinées à compenser l'atteinte qu'il portait à leur situation spécifique, tenant à ce qu'ils sont seuls affectés par l'extinction de la diffusion par voie analogique.
Les termes actuels des autorisations de diffusion des trois éditeurs nationaux de services diffusés en mode analogique, Canal plus, TF1 et M6 sont fixés, respectivement, aux 5 décembre 2010, 29 février 2012 et 15 avril 2012.
Ces échéances valent à la fois pour la diffusion par voie hertzienne terrestre en mode analogique de leurs programmes et pour celle de leur reprise intégrale et simultanée en mode numérique sur la TNT. Le deuxième alinéa de l'article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986 qui accordait à ces opérateurs un droit à reprise de leur programme en TNT prévoyait en effet que « cette autorisation est assimilée à l'autorisation initiale dont elle ne constitue qu'une extension ».
En prévoyant la fin de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne en mode analogique au plus tard le 30 novembre 2011, le législateur porte atteinte aux droits qui avaient été ainsi consentis aux éditeurs de ces services, dès l'entrée en vigueur de la loi et jusqu'en 2011.
La Section de l'intérieur du Conseil d'Etat a ainsi relevé, dans son avis du 23 mai 2006 (n°373035), que l'extinction anticipée des services de diffusion par voie analogique remet en cause les autorisations créatrices de droit qui avaient été conférées aux intéressés.
En premier lieu, la loi déférée réduit la durée des autorisations de diffusion accordées aux éditeurs nationaux de service en mode analogique. Cette durée avait d'abord été prorogée de cinq ans par la loi du 1er août 2000 afin d'inciter les opérateurs « historiques » à participer au lancement de la TNT, et d'en garantir ainsi le succès.
En second lieu la loi déférée met un terme au droit des éditeurs « historiques » à une double diffusion de leurs programmes. Les éditeurs nationaux de services par voie analogique bénéficient en effet, à ce jour, d'un droit à une diffusion analogique de leurs programmes, mais également d'un droit à une rediffusion en mode numérique de ceux-ci, appelé « droit au simulcast ». Ce droit, organisé par le deuxième alinéa de l'article 30-1 précité de la loi permettait de garantir aux téléspectateurs que la TNT, tout en leur offrant de nouveaux programmes, leur permettrait toujours de recevoir ceux dont ils bénéficiaient jusque là.
La loi déférée laisse, enfin, à la charge des éditeurs en question les coûts induits par l'extension imposée de la couverture numérique à 95 % du territoire pour les éditeurs de services en clair. L'article 105 de la loi du 30 septembre 1986 issu de la loi déférée indique expressément que la mise en oeuvre du dispositif organisé par le législateur n'est pas susceptible d'ouvrir droit à réparation.
Les avantages réservés par la loi déférée aux seuls éditeurs nationaux de services de télévision diffusés en mode analogique apparaissent, dans ces conditions, justifiés par une différence objective de situation en rapport avec l'objectif d'intérêt général poursuivi par la loi. Ces opérateurs sont dans une situation différente de celle des autres éditeurs de la TNT dès lors que ces derniers ne sont pas directement affectés par l'extinction de la diffusion par voie analogique. Seuls les éditeurs nationaux de services de télévision diffusés en mode analogique voient leurs autorisations en cours remises en cause et doivent supporter les coûts induits par le basculement complet vers le numérique. Le législateur n'a donc pas institué un régime avantageux pour certaines catégories d'éditeurs dont il aurait, sans motif, exclu les chaînes de la TNT. Il a seulement réglé de façon différente des situations différentes de manière compatible avec la finalité de la loi en organisant un mécanisme de réparation du préjudice lié à l'extinction anticipée des services de diffusion par voie analogique.
b) La différence de traitement des éditeurs « historiques » par rapport aux autres opérateurs qui résulte des dispositions critiquées est, en outre, proportionnée à la différence de situation dont le législateur a tenu compte.
En ce qui concerne, en premier lieu, la durée des autorisations, la prorogation de cinq ans des autorisations par application des dispositions du sixième alinéa du nouvel article 99 n'est, d'abord, pas excessive au regard de la durée restant à courir des autorisations actuelles. L'extinction progressive de la diffusion des services de télévision par voie hertzienne terrestre en mode analogique débutera en effet le 31 mars 2008 et portera ainsi atteinte à des autorisations accordées pour encore deux ans et neuf mois (Canal plus), trois ans et onze mois (TF1) et quatre ans et un mois (M6). Au regard de ces durées subsistantes d'autorisations dont les éditeurs concernés tirent des droits auxquels il sera progressivement porté atteinte, la prorogation accordée pour une durée de cinq ans par les dispositions critiquées n'apparaît pas disproportionnée.
On doit ajouter, ensuite, que le législateur a mis à la charge des éditeurs nationaux de télévision en clair diffusés par voie hertzienne de nouvelles exigences spécifiques en leur imposant, par l'insertion d'un nouvel article 96-1 dans la loi de 1986, d'assurer la diffusion de leurs services en mode numérique auprès de 95 % de la population. Ces éditeurs sont par conséquent soumis à des contraintes particulières de couverture par rapport à l'ensemble des autres chaînes de la TNT, de sorte que l'octroi de la prorogation de cinq ans n'est pas excessive compte tenu de cette différence de situation.
On doit, enfin, souligner que la prorogation de cinq ans des autorisations en cause n'est accordée que sous réserve que les éditeurs concernés soient membres du groupement d'intérêt public institué par les nouvelles dispositions de l'article 102 et chargé de mettre en oeuvre les mesures propres à permettre l'extinction de la diffusion des services de télévision en mode analogique et la continuité de la réception de ces services par les téléspectateurs. Ce groupement d'intérêt public gère en particulier le fonds institué par l'article 103 et destiné à atténuer ou supprimer le coût pour les téléspectateurs en difficulté financière du passage à la réception en mode numérique.
En ce qui concerne, en second lieu, l'octroi d'une « chaîne compensatoire », cette compensation apparaît proportionnée à l'atteinte portée aux droits acquis des éditeurs de services de télévision par voie analogique, pour au moins trois raisons.
En premier lieu, le bénéfice de la chaîne numérique supplémentaire ne peut être accordé qu'après l'extinction complète des services de diffusion par voie analogique, celle-ci étant programmée pour le 30 novembre 2011. A cette date, la TNT devrait compter une quarantaine de chaînes supplémentaires qui s'ajouteront à la trentaine de chaînes diffusées aujourd'hui. Le régime particulier qui s'attache ainsi à trois d'entre elles ne saurait donc être regardé comme une contrepartie excessive de l'extinction anticipée des services de diffusion par voie analogique.
En deuxième lieu, le législateur a prévu que les « chaînes compensatoires » en cause seront notamment soumises à des obligations renforcées de soutien à la création en matière de diffusion et de production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et d'expression originale française.
Enfin, la condition d'extinction complète du signal analogique à laquelle est subordonnée l'attribution d'une « chaîne compensatoire » a des effets vertueux et répond à un objectif d'intérêt général en incitant les éditeurs de services diffusés par voie analogique à participer au processus devant conduire à cette extinction.
Les dispositions critiquées ne font, par suite, pas naître une différence de traitement manifestement disproportionnée, par son ampleur, à la différence de situation dont le législateur a entendu tenir compte.
3/ Contrairement à ce que font ensuite valoir les auteurs des recours, les dispositions de l'article 104 issues de l'article 5 de la loi déférée permettant l'octroi d'une chaîne numérique supplémentaire aux éditeurs historiques ne méconnaissent pas l'objectif de valeur constitutionnelle qu'est la préservation du caractère pluraliste des courants d'expression socio-culturels.
En premier lieu, en effet, le basculement complet vers le numérique aboutit mécaniquement à réduire la part relative des éditeurs historiques dans l'offre audiovisuelle, et leur part correspondante de recettes publicitaires ou d'abonnements, y compris avec l'attribution, lors de l'extinction de la diffusion par voie analogique, de « chaînes compensatoires ». Dans ces conditions, la compensation du changement des conditions économiques de diffusion opérée par l'attribution de ces chaînes supplémentaires ne saurait avoir pour effet de porter atteinte à l'objectif de valeur constitutionnelle du pluralisme.
En second lieu, on doit souligner que l'attribution des nouvelles autorisations prévues par les dispositions de l'article 104 issues de l'article 5 de la loi déférée s'effectue « sous réserve du respect des articles 1er, 3-1, 26 et 39 à 41-4 » de la loi du 30 septembre 1986.
Le CSA aura ainsi pour mission de s'assurer que ces autorisations ne portent pas atteinte aux principes fondamentaux régissant l'exercice de la liberté de communication audiovisuelle (articles 1er et 3-1), au nombre desquels figure le caractère pluraliste des courants de pensée et d'opinion, ni à l'exercice des missions de service public par les sociétés nationales de programme (article 26), ni au dispositif anti-concentration destiné à garantir le caractère effectif du pluralisme (articles 39à 41-4).
De même que la mise en oeuvre du troisième alinéa du III de l'article 30-1 de la loi du 30 septembre 1986, celle de l'article 104 devra s'effectuer sous réserve des dispositions et des impératifs et critères énoncés par les articles de la loi auquel il fait référence.
S'agissant d'éditeurs préalablement titulaires d'autorisations nationales de télévision par voie hertzienne terrestre, il en résulte que la délivrance des nouvelles autorisations prévue par l'article 104 est, par exemple, soumise au respect de la règle selon laquelle un opérateur ne peut, en TNT, détenir plus de sept autorisations nationales (cf. le 4ème alinéa de l'article 41) ou de la règle interdisant le cumul d'une autorisation nationale de télévision réalisant plus de 2,5 % de l'audience totale des services de télévision avec une autorisation pour un service à vocation locale (cf. le 3ème alinéa de l'article 41).
Eu égard aux garanties ainsi organisées pas le législateur, le grief d'une atteinte au pluralisme ne pourra qu'être écarté.
4/ Le législateur n'a, enfin, pas méconnu l'étendue de sa compétence en laissant le soin à un décret en Conseil d'Etat de déterminer les obligations renforcées de soutien à la création en matière de diffusion et de production d'oeuvres cinématographiques et audiovisuelles européennes et d'expression originale française.
Le texte même de la loi encadre de manière suffisante le renvoi au pouvoir réglementaire de la détermination des obligations particulières en cause. Le caractère « renforcé » des obligations mises à la charge des attributaires des « chaînes compensatoires » doit, en outre, être apprécié au regard de celles auxquelles sont aujourd'hui assujetties les chaînes de la TNT.
Ces obligations sont prévues par le décret n°2001-1333 du 28 décembre 2001. Elles sont adaptées aux différents formats de programme. Il en résulte, par exemple, que les obligations de contribution à la production audiovisuelle ou cinématographique ne s'appliquent qu'à partir du franchissement de certains seuils conçus pour tenir à l'écart les formats de programme ne diffusant que très peu ou pas d'oeuvres (chaînes sportives, chaînes d'information ou chaînes de télé-achat par exemple). Ainsi, lorsqu'une chaîne consacre moins de 20 % de son temps à la diffusion d'oeuvres audiovisuelles, elle n'est pas soumise à l'obligation de consacrer une part de son chiffre d'affaires à la production de ces oeuvres. De même, l'obligation de contribution à la production cinématographique ne joue que pour autant que la chaîne diffuse annuellement au moins 52 oeuvres cinématographiques.
Les nouvelles « chaînes compensatoires » prévues par le nouvel article 104 ne bénéficieront pas de l'ensemble de ces dérogations et seront soumises, en vertu du décret en Conseil d'Etat à intervenir, à un ensemble d'obligations plus contraignantes. Elles pourront, par exemple, être soumises, en toute hypothèse, à l'exigence de consacrer une part de leur chiffre d'affaires à la production d'oeuvres. Une telle exigence spécifique conduirait ainsi, en particulier, d'une part, à l'exclusion des formats de programmes ne diffusant pas ou peu d'oeuvres audiovisuelles et, d'autre part, à soumettre les éditeurs concernés à des obligations plus fortes en matière de création que celles auxquelles les éditeurs de chaînes comparables sont aujourd'hui assujettis.
Il résulte de ce qui précède que le grief tiré de l'incompétence négative du législateur ne pourra être accueilli.
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Pour ces raisons, le Gouvernement considère qu'aucun des griefs articulés par les parlementaires saisissants n'est de nature à conduire à la censure des dispositions de la loi relative à la modernisation de la diffusion audiovisuelle et à la télévision du futur. Aussi estime-t-il que le Conseil constitutionnel devra rejeter les recours dont il est saisi.