Décision n° 2002-459 DC du 22 août 2002 - Saisine par 60 députés
Sur l'article 3 de la loi
L'article 3 de la loi critiquée complète par deux alinéas l'article L. 351-14 du code du travail, et a pour objet de donner une base législative à l'accord interprofessionnel du 19 juin 2002 dont l'une des clauses consiste à instituer une contribution spécifique d'assurance chômage destinée à financer le régime propre aux intermittents du spectacle, en la doublant pour la faire passer de 5,8 % à 11,6 %.
Cet article résulte d'un amendement gouvernemental déposé au Sénat le 17 juillet 2002 au cours de la première lecture du texte pour lequel l'urgence était déclarée.
Cet amendement s'avère avoir été adopté en méconnaissance du premier alinéa de l'article 39 C et du premier alinéa de l'article 44 C, et ne peut qu'être censuré conformément à votre jurisprudence applicable aux adjonctions ou modifications sans lien avec le texte au cours de la discussion (pour une application récente : Décision n° 2000-436 DC du 7 décembre 2000).
En l'occurrence, il est peu de dire que le lien est inexistant.
La loi porte sur le soutien à l'emploi des jeunes en entreprises. L'amendement du gouvernement déposé au Sénat sous le n° 23 , et devenu l'article 3 du texte, concerne donc le régime des cotisations ASSEDIC, patronales et salariales, de la catégorie des intermittents du spectacle.
Les dispositions de cet article n'ont aucun rapport avec l'intitulé du texte et sont donc dépourvues de tout lien avec la loi.
D'ailleurs, monsieur le ministre lui-même en a fait l'aveu au moment où il le défendait devant la Haute Assemblée : « Cet amendement, je l'imagine, a de quoi surprendre dans une discussion sur le dispositif de soutien à l'emploi des jeunes en entreprises. (…). Quant au lien avec ce projet de loi, je reconnais qu'il est ténu. Permettez-moi seulement de relever que nous sommes bien dans le champ de la politique de l'emploi et que les intermittents du spectacle sont aussi, souvent des jeunes » (Sénat, Compte-rendu analytique, séance du 17 juillet 2002).
A l'Assemblée Nationale, interpellé par au moins trois députés sur la nature de « cavalier » de l'article 3, monsieur le ministre n'a plus répondu, s'étant aperçu, sans doute, depuis sa justification initiale que l'article n'a pas de rapport avec un texte sur l'emploi des jeunes.
L'absence de lien avec le texte en discussion est évident et l'invalidation au titre de la méconnaissance des articles 39 et 44 de la Constitution est inévitable.