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Décision n° 2000-1 LP du 27 janvier 2000 - Président de la Province des Iles Loyautés

Loi du pays relative à l'institution d'une taxe générale sur les services
Conformité

Le soussigné Robert XOWIE, Président de la Province des Iles Loyautés.
A l'honneur de déférer à votre censure la loi du Pays adoptée par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie en sa séance du 28 décembre 1999.
Plaise au Conseil
I - RAPPEL DES FAITS
Le Congrès de la Nouvelle-Calédonie a adopté le 7 décembre 1999 une loi du Pays relative à l'institution d'une taxe générale sur les services.
A la demande de 14 Conseillers de la Nouvelle-Calédonie dont 11 du Groupe F.L.N.K.S., et conformément à l'article 103 de la Loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, cette loi était soumise à une nouvelle délibération du Congrès.
La délibération était donc à nouveau étudiée le 28 décembre 1999 et adoptée par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie.
L'adoption de cette loi du Pays a violé le bloc de constitutionnalité et en particulier, l'Accord de Nouméa et la Loi organique du 19 mars 1999.
II - EN DROIT
L'accord sur la Nouvelle-Calédonie signé le 5 mai 1998 et intégré dans la Constitution par le Congrès réuni à Versailles a prévu la création d'un Conseil Economique et Social représentant les principales institutions économiques et sociales de la Nouvelle-Calédonie.
Aux termes de l'article 2-1-4 de cet Accord, il était stipulé que le Conseil Economique et Social : « sera obligatoirement consulté sur les délibérations à caractère économique et social du Congrès ».
Ces dispositions sont reprises à l'article 155 de la Loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 qui stipule également que le Conseil Economique et Social est consulté sur « les projets et propositions de Loi du Pays et de délibération du Congrès à caractère économique et social ».
La loi du Pays prévoyant l'instauration d'une taxe générale sur les services a, à l'évidence, un caractère économique, puisqu'il s'agit de la création d'un nouvel impôt.
La consultation préalable du Conseil Economique et Social de la Nouvelle-Calédonie s'imposait donc.
Or, il était stipulé à l'article 232-4 ° de la Loi organique du 19 mars 1999 qu'il serait procédé à la désignation du Conseil Economique et Social dans les trois mois suivant la première réunion des Assemblées de Province.
Jusqu'à la réunion du Conseil c'est le Comité Economique et Social, institué par l'article 59 de la loi n° 88-1028 du 9 novembre 1988, qui devait exercer ses attributions.
La fonction « d'intérim » assurée par le Comité Economique et Social avait donc une durée strictement limitée dans le temps à trois mois à compter de la première réunion des Assemblées de Province.
Celle-ci ayant eu lieu le 14 mai 1999, le Conseil Economique et Social devait être désigné au plus tard le 14 août 1999.
La notion « d'intérim » dévolue au Comité Economique et Social par l'article 232-4 ° précité prenait donc nécessairement fin à cette date également.
Or, le Comité Economique et Social a pourtant été consulté le 2 novembre 1999, soit postérieurement au 14 août 1999, sur le projet de Loi du Pays relatif à l'instauration de la taxe générale sur les services.
Le Conseil Economique et Social n'avait pas compétence à donner un avis sur ce projet de loi du pays car il s'agit d'une nouvelle catégorie d'actes prévue par l'Accord de Nouméa, consacrant ainsi le pouvoir législatif autonome accordé à la Nouvelle-Calédonie et exercé par le Congrès.
En conséquence, la procédure de consultation préalable prévue tant par l'Accord sur la Nouvelle-Calédonie que par la Loi organique n'a pas été respectée.
L'article 48 de la Loi Organique n° 99-209 du 19 mars 1999 stipule également que « le Comité des Finances locales, composé de représentants de l'Etat, de la Nouvelle-Calédonie, des Provinces et des Communes est consulté par le Gouvernement sur tout projet ou proposition de loi du Pays ou de délibération du Congrès relatif aux relations financières entre la Nouvelle-Calédonie, les Provinces et les Communes de Nouvelle-Calédonie ».
Les relations financières couvrent le domaine fiscal eu égard à l'extension du domaine de compétence de la Nouvelle-Calédonie réalisée par la loi organique notamment au terme des articles 22-1 °, 21-6 °, 27, 99-2 ° et 99-11 ° de la loi organique.
L'instauration d'une taxe générale sur les services intéresse donc les relations financières entre la Nouvelle-Calédonie, les Provinces et les Communes.
Conformément à la loi organique, le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie devait dès lors préalablement consulter le Comité des Finances locales sur le projet de loi du Pays relatif à l'institution d'une taxe générale sur les services.
Dès lors, que l'élaboration de cette loi n'a pas respecté la procédure de consultation prévue par l'Accord de Nouméa et par la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, cette loi du Pays ne saurait leur être déclarée conforme.
En conséquence, votre Conseil déclarera cette Loi du Pays non conforme au bloc de constitutionnalité et en particulier à l'Accord sur le Nouvelle-Calédonie du 21 avril 1998 et à la Loi Organique n° 99-209 du 19 mars 1999.

PAR CES MOTIFS
Par application des articles 104 et 105 de la Loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999, déclarer non conforme à la Constitution, la Loi du Pays n° 99-003 relative à l'institution d'une taxe générale sur les services.