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Décision n° 2000-1 LP du 27 janvier 2000 - Président de l'Assemblée de la Province Sud

Loi du pays relative à l'institution d'une taxe générale sur les services
Conformité

Monsieur le Président,
J'ai l'honneur d'accuser réception de votre courrier en date du 7 janvier 2000 me transmettant, en application de l'article 104 de la loi organique relative à la Nouvelle-Calédonie, le déféré devant le Conseil constitutionnel de M. XOWIE portant sur la loi du pays n° 99-3 du 7 décembre 1999 relative à la taxe générale sur les services.
Le déféré soulève deux vices de procédure, la consultation du comité économique et social et la non consultation du comité des finances locales.
1) Sur la consultation du comité économique et social.
Il est fait grief au Congrès d'avoir consulté le comité économique et social issu de la loi référendaire du 8 novembre 1988 et non le conseil économique et social institué par la loi organique du 19 mars 1999 alors même que l'article 232-4 ° de la loi organique prévoit la désignation du nouvel organisme dans un délai de trois mois à compter de la mise en place des provinces.
Mais la jurisprudence a, de longue date, statué sur les délais contraignants et les délais non contraignants. En l'espèce, il s'agit d'un délai non contraignant. Même si le texte de la loi organique prévoit la désignation des membres du conseil économique et social dans un certain délai, il n'impose pas ce délai à peine de forclusion. Il invite simplement les autorités compétentes à se déterminer dans ce délai mais elles peuvent toujours prendre leur décision après l'expiration du délai. En effet, puisque la loi prévoit l'intervention d'actes complémentaires pour son application, il serait absurde que, faute de les avoir adopté dans le délai indicatif prévu par la loi, ils ne puissent plus l'être. C'est précisément à l'occasion des décrets d'application des lois que la jurisprudence a, de longue date, dégagé cette solution de délais non contraignants (CE 6 déc. 1907 Chemin de fer de l'Est, rec. p .913)°, 7 avril 1933, Caisse régionale de crédit agricole du Sud-Est, rec. p. 437).
C'est donc à bon droit que le Congrès a eu recours aux dispositions de la deuxième phrase du IV de l'article 232 de la loi qui disposent que jusqu'à la réunion du conseil, le comité économique et social institué par l'article 59 de la loi n° 88-1028 du 9 novembre 1988 exerce ses attributions.
2) Sur la non consultation du comité des finances locales
Le requérant fait également grief au Congrès de ne pas avoir requis l'avis du comité des finances locales institué par l'article 48 de la loi organique.
Ce moyen appelle deux réponses :
a) à titre principal, il convient de juger que le comité consultatif des finances locales n'avait pas à être consulté à raison de l'objet du projet de délibération.
En effet, il ressort clairement de l'esprit de la loi organique que le législateur n'a confié à ce comité qu'un pouvoir limité aux seuls projets relatifs aux relations financières entre la Nouvelle-Calédonie, les provinces et les communes. Le comité des finances locales n'a pas de raison d'être consulté sur les textes fiscaux du territoire. Son homologue métropolitain n'est d'ailleurs pas consulté sur les projets de loi à caractère fiscal : il n'est concerné que par les textes relatifs aux dotations. Le rapport à l'Assemblée nationale n° 1275 du 21 décembre 1998 est très clair sur ce point : « Par rapport au comité des finances locales régi par le titre Ier du livre II du Code général des collectivités territoriales, cet organisme a des compétences restreintes. En particulier, le projet de loi organique ne lui donne pas une capacité d'expertise globale ... Le comité des finances locales de la Nouvelle-Calédonie sera donc consulté sur la répartition des dotations versées aux provinces ».
b) à titre subsidiaire, si le juge devait considérer que le comité des finances locales devait être consulté à raison de l'objet du projet de loi, le moyen soulevé par le requérant devrait néanmoins être rejeté. En effet, le texte devant fixer les modalités d'organisation et de fonctionnement dudit comité est encours de rédaction. Il y a donc lieu de faire application de la règle de procédure impossible appliquée précisément dans les cas où l'organisme consultatif n'a pas encore été constitué à la date où la décision doit être prise. (CE sect. 12 octobre 1956 Baillet p. 356 ; 1er mars 1957 comm. de Port-Louis, p. 134).
Mais il est clair que le souci du requérant n'est pas le respect du droit par le congrès dont il est membre. Ainsi que les représentants du FLNKS l'ont, à plusieurs reprises exprimé publiquement, il s'agit pour eux d'un moyen politicien de protester contre la façon de fonctionner du gouvernement. Malheureusement, tout retard dans l'entrée en vigueur de la nouvelle taxe a pour conséquence réelle et concrète de mettre en difficulté les finances de la Nouvelle-Calédonie, des communes et des provinces.
Je vous prie d'agréer, Monsieur le Président, l'expression de ma haute considération.