Décision

Décision n° 2023-6249 AN du 26 mai 2023

A.N., Meurthe-et-Moselle, 1re circ.
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 17 février 2023 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 9 février 2023), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de M. Éric TOLLÉNAÈRE, candidat aux élections qui se sont déroulées les 12 et 19 juin 2022, dans la 1re circonscription du département de Meurthe-et-Moselle, en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2023-6249 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées par M. TOLLÉNAÈRE, enregistrées le 13 mars 2023 ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il résulte de l’article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l’article L. 52-11 est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s’il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l’article L. 52-8. Pour la période mentionnée à l’article L. 52-4 du code électoral, ce compte de campagne retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection. Il doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Ce compte de campagne doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. Il ressort également de l’article L. 52-12 que ce compte doit être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables qui met le compte en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives requises. Cette présentation n’est pas obligatoire lorsque le candidat a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas un montant fixé par décret. Dans ce cas, le candidat doit transmettre à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les relevés du compte bancaire ouvert en application de l’article L. 52-5 ou de l’article L. 52-6.

2. Le compte de campagne de M. TOLLÉNAÈRE a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 9 février 2023, au motif qu’un nouveau compte de campagne a été déposé par l’expert-comptable sans être revêtu de la signature du candidat et sans être accompagné de la copie des relevés bancaires du compte unique ouvert par le mandataire financier et des attestations de prise en charge de divers frais par la formation politique de l’intéressé.

3. M. TOLLÉNAÈRE a produit devant le Conseil constitutionnel son compte de campagne signé, les relevés du compte bancaire ouvert par son mandataire financier, des factures et un extrait des écritures de son compte nominatif auprès de sa formation politique. Il résulte de l’examen de ces pièces que le compte de campagne de M. TOLLÉNAÈRE ne comporte pas une description sincère et exhaustive de l’ensemble des opérations relatives au financement de sa campagne. En particulier, il ne retrace pas la totalité des chèques qui ont été versés sur le compte bancaire de son mandataire financier, ni un virement bancaire effectué par sa formation politique. En outre, c’est à tort qu’il indique que les honoraires de l’expert-comptable ont été payés directement par sa formation politique, alors que cette somme, qui au demeurant ne figure pas dans les relevés bancaires produits, a en réalité été remboursée par la formation politique au candidat. Le compte de M. TOLLÉNAÈRE ne retrace pas non plus les virements de 1 180 et 380 euros effectués à une association, ni la somme de 2 524 euros payée à une entreprise d’impression. Les factures de cette entreprise produites par l’intéressé ne correspondent pas aux sommes réglées par le mandataire et la formation politique.

4. Dans ces conditions, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. TOLLÉNAÈRE.

5. L’article L.O. 136-1 du même code dispose que, en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat qui n’a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l’article L. 52-12.

6. Compte tenu de la particulière gravité de ces manquements, et du cumul des irrégularités, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité de M. TOLLÉNAÈRE à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. - M. Éric TOLLÉNAÈRE est déclaré inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.
 
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 25 mai 2023, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT.
 
Rendu public le 26 mai 2023.
 

JORF n°0123 du 28 mai 2023, texte n° 67
ECLI : FR : CC : 2023 : 2023.6249.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.2. Établissement d'un compte de campagne
  • 8.3.5.2.4. Conditions du dépôt
  • 8.3.5.2.4.5. Absence de pièces justificatives : inéligibilité

Le compte de campagne a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au motif qu’un nouveau compte de campagne a été déposé par l’expert-comptable sans être revêtu de la signature du candidat et sans être accompagné de la copie des relevés bancaires du compte unique ouvert par le mandataire financier et des attestations de prise en charge de divers frais par la formation politique de l’intéressé. Le candidat a produit devant le Conseil constitutionnel son compte de campagne signé, les relevés du compte bancaire ouvert par son mandataire financier, des factures et un extrait des écritures de son compte nominatif auprès de sa formation politique. Il résulte de l’examen de ces pièces que le compte de campagne ne comporte pas une description sincère et exhaustive de l’ensemble des opérations relatives au financement de sa campagne. En particulier, il ne retrace pas la totalité des chèques qui ont été versés sur le compte bancaire de son mandataire financier, ni un virement bancaire effectué par sa formation politique. En outre, c’est à tort qu’il indique que les honoraires de l’expert-comptable ont été payés directement par sa formation politique, alors que cette somme, qui au demeurant ne figure pas dans les relevés bancaires produits, a en réalité été remboursée par la formation politique au candidat. Le compte ne retrace pas non plus les virements de 1 180 et 380 euros effectués à une association, ni la somme de 2 524 euros payée à une entreprise d’impression. Les factures de cette entreprise produites par l’intéressé ne correspondent pas aux sommes réglées par le mandataire et la formation politique. Dans ces conditions, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne. Compte tenu de la particulière gravité de ces manquements, et du cumul des irrégularités, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité du candidat pour une durée de trois ans.

(2023-6249 AN, 26 mai 2023, cons. 2, 3, 4, 6, JORF n°0123 du 28 mai 2023, texte n° 67)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.3. Présentation du compte
  • 8.3.5.3.2. Totalité des opérations financières

Le compte de campagne a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au motif qu’un nouveau compte de campagne a été déposé par l’expert-comptable sans être revêtu de la signature du candidat et sans être accompagné de la copie des relevés bancaires du compte unique ouvert par le mandataire financier et des attestations de prise en charge de divers frais par la formation politique de l’intéressé. Le candidat a produit devant le Conseil constitutionnel son compte de campagne signé, les relevés du compte bancaire ouvert par son mandataire financier, des factures et un extrait des écritures de son compte nominatif auprès de sa formation politique. Il résulte de l’examen de ces pièces que le compte de campagne ne comporte pas une description sincère et exhaustive de l’ensemble des opérations relatives au financement de sa campagne. En particulier, il ne retrace pas la totalité des chèques qui ont été versés sur le compte bancaire de son mandataire financier, ni un virement bancaire effectué par sa formation politique. En outre, c’est à tort qu’il indique que les honoraires de l’expert-comptable ont été payés directement par sa formation politique, alors que cette somme, qui au demeurant ne figure pas dans les relevés bancaires produits, a en réalité été remboursée par la formation politique au candidat. Le compte ne retrace pas non plus les virements de 1 180 et 380 euros effectués à une association, ni la somme de 2 524 euros payée à une entreprise d’impression. Les factures de cette entreprise produites par l’intéressé ne correspondent pas aux sommes réglées par le mandataire et la formation politique. Dans ces conditions, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne. Compte tenu de la particulière gravité de ces manquements, et du cumul des irrégularités, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité du candidat pour une durée de trois ans.

(2023-6249 AN, 26 mai 2023, cons. 2, 3, 4, 6, JORF n°0123 du 28 mai 2023, texte n° 67)
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