Décision

Décision n° 2023-6111 AN du 26 mai 2023

A.N., Seine-Saint-Denis, 10e circ.
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 3 février 2023 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 25 janvier 2023), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de M. Mohamed BOUNOUA, candidat aux élections qui se sont déroulées les 12 et 19 juin 2022, dans la 10e circonscription du département de la Seine-Saint-Denis, en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2023-6111 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées par la SCP Delamarre et Jéhannin, avocat au Conseil d’État et à la Cour de cassation, pour M. BOUNOUA, enregistrées le 1er mars 2023 ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il résulte de l’article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l’article L. 52-11 est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s’il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l’article L. 52-8. Pour la période mentionnée à l’article L. 52-4 du code électoral, ce compte de campagne retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection. Il doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Ce compte de campagne doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. Il ressort également de l’article L. 52-12 que ce compte doit être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables qui met le compte en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives requises. Cette présentation n’est pas obligatoire lorsque le candidat a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas un montant fixé par décret. Dans ce cas, le candidat doit transmettre à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les relevés du compte bancaire ouvert en application de l’article L. 52-5 ou de l’article L. 52-6.

2. L’article L.O. 136-1 du même code dispose que, en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat qui n’a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l’article L. 52-12.

3. Le compte de campagne de M. BOUNOUA a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 25 janvier 2023, au motif que le mandataire financier de l’intéressé n’a pas utilisé un compte bancaire spécifique pour l’élection, que le compte de campagne a été déposé sans être visé par un expert-comptable et sans être ultérieurement régularisé dans des conditions permettant de s’assurer que l’expert-comptable a pu effectuer sa mission de manière satisfaisante et que le paiement de la somme de 14 830 euros, inscrite en dépenses, n’était pas justifié.

4. Ces circonstances sont établies. Il est constant que le compte bancaire utilisé par le mandataire financier de M. BOUNOUA avait été utilisé pour le besoin des élections départementales en 2021. Si, le 13 octobre 2022, un expert-comptable a visé le compte de campagne de M. BOUNOUA, ce compte comporte diverses irrégularités qui démontrent qu’il n’a pas été procédé aux vérifications nécessaires à la présentation de ce compte dans les conditions prévues par l’article L. 52-12 du code électoral. Figurent notamment, en recettes, un apport personnel du candidat à hauteur de 14 819 à réaliser ultérieurement et, en dépenses, une somme totale de 14 830 euros engagée avant le premier tour de scrutin mais dont le paiement n’a pas été justifié à la date du dépôt du compte de campagne ni, en tout état de cause, à la date à laquelle la commission s’est prononcée et à la date de la présente décision. Dans ces conditions, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. BOUNOUA.

5. Compte tenu de la particulière gravité de ces manquements, et du cumul des irrégularités, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité de M. BOUNOUA à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. - M. Mohamed BOUNOUA est déclaré inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.
 
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 25 mai 2023, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET et Michel PINAULT.
 
Rendu public le 26 mai 2023.
 

JORF n°0123 du 28 mai 2023, texte n° 49
ECLI : FR : CC : 2023 : 2023.6111.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.1. Mandataire financier
  • 8.3.5.1.3. Compte bancaire ou postal

Le compte de campagne du candidat a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 25 janvier 2023, au motif que le mandataire financier de l’intéressé n’a pas utilisé un compte bancaire spécifique pour l’élection, que le compte de campagne a été déposé sans être visé par un expert-comptable et sans être ultérieurement régularisé dans des conditions permettant de s’assurer que l’expert-comptable a pu effectuer sa mission de manière satisfaisante et que le paiement de la somme de 14 830 euros, inscrite en dépenses, n’était pas justifié. Ces circonstances sont établies. Il est constant que le compte bancaire utilisé par le mandataire financier du candidat avait été utilisé pour le besoin des élections départementales en 2021. Si, le 13 octobre 2022, un expert-comptable a visé le compte de campagne du candidat, ce compte comporte diverses irrégularités qui démontrent qu’il n’a pas été procédé aux vérifications nécessaires à la présentation de ce compte dans les conditions prévues par l’article L. 52-12 du code électoral. Figurent notamment, en recettes, un apport personnel du candidat à hauteur de 14 819 à réaliser ultérieurement et, en dépenses, une somme totale de 14 830 euros engagée avant le premier tour de scrutin mais dont le paiement n’a pas été justifié à la date du dépôt du compte de campagne ni, en tout état de cause, à la date à laquelle la commission s’est prononcée et à la date de la présente décision. Dans ces conditions, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne du candidat. Eu égard au cumul d'irrégularités. Trois ans d'inéligibilité.

(2023-6111 AN, 26 mai 2023, cons. 3, 4, JORF n°0123 du 28 mai 2023, texte n° 49)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.2. Établissement d'un compte de campagne
  • 8.3.5.2.4. Conditions du dépôt
  • 8.3.5.2.4.2. Absence de certification par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés : inéligibilité

Le compte de campagne du candidat a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 25 janvier 2023, au motif que le mandataire financier de l’intéressé n’a pas utilisé un compte bancaire spécifique pour l’élection, que le compte de campagne a été déposé sans être visé par un expert-comptable et sans être ultérieurement régularisé dans des conditions permettant de s’assurer que l’expert-comptable a pu effectuer sa mission de manière satisfaisante et que le paiement de la somme de 14 830 euros, inscrite en dépenses, n’était pas justifié. Ces circonstances sont établies. Il est constant que le compte bancaire utilisé par le mandataire financier du candidat avait été utilisé pour le besoin des élections départementales en 2021. Si, le 13 octobre 2022, un expert-comptable a visé le compte de campagne du candidat, ce compte comporte diverses irrégularités qui démontrent qu’il n’a pas été procédé aux vérifications nécessaires à la présentation de ce compte dans les conditions prévues par l’article L. 52-12 du code électoral. Figurent notamment, en recettes, un apport personnel du candidat à hauteur de 14 819 à réaliser ultérieurement et, en dépenses, une somme totale de 14 830 euros engagée avant le premier tour de scrutin mais dont le paiement n’a pas été justifié à la date du dépôt du compte de campagne ni, en tout état de cause, à la date à laquelle la commission s’est prononcée et à la date de la présente décision. Dans ces conditions, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne du candidat. Eu égard au cumul d'irrégularités. Trois ans d'inéligibilité.

(2023-6111 AN, 26 mai 2023, cons. 3, 4, JORF n°0123 du 28 mai 2023, texte n° 49)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
Toutes les décisions