Décision

Décision n° 2022-5964 AN du 19 mai 2023

A.N., Paris, 18e circ.
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 23 décembre 2022 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 30 novembre 2022), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l’article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de Mme Axelle LE GAL DE KERANGAL, candidate aux élections qui se sont déroulées les 12 et 19 juin 2022, dans la 18e circonscription de Paris, en vue de la désignation d’un député à l’Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2022-5964 AN.

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution, notamment son article 59 ;
  • l’ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
  • le code électoral ;
  • le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs ;

Au vu des pièces suivantes :

  • les observations présentées par Mme LE GAL DE KERANGAL, enregistrées le 4 janvier 2023 ;
  • les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S’EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. Il résulte de l’article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l’article L. 52-11 est tenu d’établir un compte de campagne lorsqu’il a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés ou s’il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l’article L. 52-8. Pour la période mentionnée à l’article L. 52-4 du code électoral, ce compte de campagne retrace, selon leur origine, l’ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l’ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l’élection. Il doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Ce compte de campagne doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. Il ressort également de l’article L. 52-12 que ce compte doit être présenté par un membre de l’ordre des experts-comptables qui met le compte en état d’examen et s’assure de la présence des pièces justificatives requises. Cette présentation n’est pas obligatoire lorsque le candidat a obtenu moins de 5 % des suffrages exprimés et que les recettes et les dépenses de son compte de campagne n’excèdent pas un montant fixé par décret. Dans ce cas, le candidat doit transmettre à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques les relevés du compte bancaire ouvert en application de l’article L. 52-5 ou de l’article L. 52-6.

2. Le compte de campagne de Mme LE GAL DE KERANGAL a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 30 novembre 2022 au motif qu’il n’était pas accompagné des relevés bancaires du compte ouvert par son mandataire financier et qu’elle n’a pas transmis ces pièces justificatives en dépit des demandes qui lui ont été adressées.

3. Il résulte de l’instruction que ces circonstances sont établies. Par suite, c’est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a considéré que le compte de campagne de Mme LE GAL DE KERANGAL n’a pas été présenté dans les conditions prévues par l’article L. 52-12 du code électoral.

4. L’article L.O. 136-1 du même code dispose que, en cas de volonté de fraude ou de manquement d’une particulière gravité aux règles de financement des campagnes électorales, le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat dont le compte de campagne a été rejeté à bon droit.

5. Si Mme LE GAL DE KERANGAL soutient avoir été victime de la négligence de son mandataire financier, il ne résulte pas de l’instruction qu’elle ait pris les dispositions nécessaires pour que son compte soit présenté dans les conditions prévues par l’article L. 52-12 du code électoral. Par ailleurs, les pièces qu’elle produit pour la première fois devant le Conseil constitutionnel n'attestent que de manière partielle et lacunaire de la nature et de la réalité des opérations déclarées dans le compte de campagne.

6. Dès lors, compte tenu de la particulière gravité de ce manquement, il y a lieu de prononcer l’inéligibilité de Mme LE GAL DE KERANGAL à tout mandat pour une durée d’un an à compter de la présente décision.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. - Mme Axelle LE GAL DE KERANGAL est déclarée inéligible en application de l’article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d’un an à compter de la présente décision.
 
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l’article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l’élection des députés et des sénateurs.

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 17 mai 2023, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
 
Rendu public le 19 mai 2023.
 

JORF n°0118 du 23 mai 2023, texte n° 68
ECLI : FR : CC : 2023 : 2022.5964.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.2. Établissement d'un compte de campagne
  • 8.3.5.2.4. Conditions du dépôt
  • 8.3.5.2.4.5. Absence de pièces justificatives : inéligibilité

Le compte de campagne a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au motif qu’il n’était pas accompagné des relevés bancaires du compte ouvert par son mandataire financier et que la candidate n’a pas transmis ces pièces justificatives en dépit des demandes qui lui ont été adressées. Il résulte de l’instruction que ces circonstances sont établies. Rejet à bon droit.
Si la candidate soutient avoir été victime de la négligence de son mandataire financier, il ne résulte pas de l’instruction qu’elle ait pris les dispositions nécessaires pour que son compte soit présenté dans les conditions prévues par l’article L. 52-12 du code électoral. Par ailleurs, les pièces qu’elle produit pour la première fois devant le Conseil constitutionnel n'attestent que de manière partielle et lacunaire de la nature et de la réalité des opérations déclarées dans le compte de campagne. Un an d'inéligibilité.

(2022-5964 AN, 19 mai 2023, cons. 2, 3, 5, JORF n°0118 du 23 mai 2023, texte n° 68)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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