Décision n° 2022-5776 AN du 2 décembre 2022
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 28 juin 2022 d'une requête présentée par Mme Véronique BOURCET-GINER, candidate à l'élection qui s'est déroulée dans la 10ème circonscription du département des Bouches-du-Rhône, tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé dans cette circonscription les 12 et 19 juin 2022 en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2022-5776 AN.
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Au vu des pièces suivantes :
- les observations présentées par le ministre de l'intérieur et des outre-mer, enregistrées le 15 septembre 2022 ;
- les pièces du dossier desquelles il résulte que communication de la requête a été donnée à M. José GONZALEZ, député, qui n'a pas produit d'observations ;
- la décision de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques du 12 octobre 2022, approuvant le compte de campagne de M. José GONZALEZ ;
- les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
- Sur les griefs relatifs au déroulement de la campagne électorale :
1. En premier lieu, la requérante reproche à M. Serge PEROTTINO, candidat sous l'étiquette « Les Républicains », de s'être prévalu du soutien de la majorité présidentielle, alors qu'elle seule avait reçu l'investiture de cette coalition, créant ainsi une confusion dans l'esprit des électeurs et altérant la sincérité du scrutin.
2. S'il appartient au juge de l'élection de vérifier si des manœuvres ont été susceptibles de tromper les électeurs sur la réalité de l'investiture des candidats par les partis politiques, il ne lui appartient pas de vérifier la régularité de cette investiture au regard des statuts et des règles de fonctionnement des partis politiques.
3. Il ne résulte pas de l'instruction que l'apposition par M. PEROTTINO du terme « Ensemble » sur ses affiches électorales, suivie de la mention « avec le soutien des maires et des conseillers départementaux » et sans recourir au logotype ou à la charte graphique de la coalition constituée par la majorité présidentielle, aurait constitué, de la part de l'intéressé, une manœuvre de nature à influencer les résultats du scrutin. En outre, la question de l'investiture des candidats par la nuance « Ensemble ! » a fait l'objet d'un large débat public durant toute la campagne, relayé notamment par la presse. Le grief invoqué doit donc être écarté.
4. En second lieu, la requérante se plaint de l'envoi par erreur aux électeurs de la commune de Meyreuil des professions de foi de la candidate « Ensemble ! » de la 1ère circonscription ainsi que de l'absence d'envoi de sa profession de foi à de nombreux électeurs de certaines communes de la 10ème circonscription, ce qui aurait faussé la sincérité du scrutin. Cependant, si des erreurs isolées ont pu être commises, le procès-verbal de constat d'huissier produit ne permet pas d'établir la réalité et l'ampleur des dysfonctionnements allégués. L'inégalité de traitement et la partialité du préfet des Bouches-du-Rhône alléguées par la requérante ne sont ainsi corroborées par aucun élément de preuve. Le grief invoqué doit donc être écarté.
- Sur les griefs relatifs aux opérations de vote :
5. En premier lieu, si la requérante soutient que, dans les deux bureaux de vote de la commune de Cadolive, l'identité des votants n'a pas été systématiquement vérifiée au moment du vote au premier tour en méconnaissance des dispositions de l'article R. 60 du code électoral, elle n'apporte aucun élément de preuve à l'appui de ses allégations. Le grief invoqué ne peut donc qu'être écarté.
6. En second lieu, elle soutient que les signatures figurant sur les listes d'émargement de plusieurs bureaux de sept communes, en face du nom d'un même électeur, présentent, dans cent-quarante cas, des différences entre le premier et le second tours. Toutefois, ces différences, à les supposer avérées, ne sauraient, en tout état de cause, être de nature à avoir altéré la sincérité des résultats du scrutin compte tenu de l'écart de voix séparant Mme MESURE, candidate arrivée en deuxième position à l'issue du premier tour de scrutin, et la requérante. Le grief invoqué doit donc être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de Mme BOURCET-GINER doit être rejetée.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - La requête de Mme Véronique BOURCET-GINER est rejetée.
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 1er décembre 2022, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Jacqueline GOURAULT, M. Alain JUPPÉ, Mmes Corinne LUQUIENS, Véronique MALBEC, MM. Jacques MÉZARD, François PILLET, Michel PINAULT et François SÉNERS.
Rendu public le 2 décembre 2022.
JORF n°0282 du 6 décembre 2022, texte n° 96
ECLI : FR : CC : 2022 : 2022.5776.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
- 8.3.3.3. Circulaires
8.3.3.3.2. Présentation des professions de foi
La requérante se plaint de l'envoi par erreur aux électeurs de la commune de Meyreuil des professions de foi de la candidate « Ensemble ! » de la 1ère circonscription ainsi que de l'absence d'envoi de sa profession de foi à de nombreux électeurs de certaines communes de la 10ème circonscription, ce qui aurait faussé la sincérité du scrutin. Cependant, si des erreurs isolées ont pu être commises, le procès-verbal de constat d'huissier produit ne permet pas d'établir la réalité et l'ampleur des dysfonctionnements allégués. L'inégalité de traitement et la partialité du préfet des Bouches-du-Rhône alléguées par la requérante ne sont ainsi corroborées par aucun élément de preuve. Le grief invoqué doit donc être écarté.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
- 8.3.4.2. Manœuvres ou interventions relatives à la situation politique des candidats
8.3.4.2.3. Soutiens
La requérante reproche à M. Serge PEROTTINO, candidat sous l'étiquette « Les Républicains », de s'être prévalu du soutien de la majorité présidentielle, alors qu'elle seule avait reçu l'investiture de cette coalition, créant ainsi une confusion dans l'esprit des électeurs et altérant la sincérité du scrutin. S'il appartient au juge de l'élection de vérifier si des manœuvres ont été susceptibles de tromper les électeurs sur la réalité de l'investiture des candidats par les partis politiques, il ne lui appartient pas de vérifier la régularité de cette investiture au regard des statuts et des règles de fonctionnement des partis politiques. Il ne résulte pas de l'instruction que l'apposition par M. PEROTTINO du terme « Ensemble » sur ses affiches électorales, suivie de la mention « avec le soutien des maires et des conseillers départementaux » et sans recourir au logotype ou à la charte graphique de la coalition constituée par la majorité présidentielle, aurait constitué, de la part de l'intéressé, une manœuvre de nature à influencer les résultats du scrutin. En outre, la question de l'investiture des candidats par la nuance « Ensemble ! » a fait l'objet d'un large débat public durant toute la campagne, relayé notamment par la presse. Le grief invoqué doit donc être écarté.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.6. Opérations électorales
- 8.3.6.4. Déroulement du scrutin
- 8.3.6.4.10. Listes d'émargement
8.3.6.4.10.4. Signatures
La requérante soutient que les signatures figurant sur les listes d'émargement de plusieurs bureaux de sept communes, en face du nom d'un même électeur, présentent, dans cent-quarante cas, des différences entre le premier et le second tours. Toutefois, ces différences, à les supposer avérées, ne sauraient, en tout état de cause, être de nature à avoir altéré la sincérité des résultats du scrutin compte tenu de l'écart de voix séparant Mme MESURE, candidate arrivée en deuxième position à l'issue du premier tour de scrutin, et la requérante. Le grief invoqué doit donc être écarté.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.9. Contentieux - Griefs
8.3.9.8. Griefs qui ne sont assortis d'aucun commencement de preuve
Si la requérante soutient que, dans les deux bureaux de vote de la commune de Cadolive, l'identité des votants n'a pas été systématiquement vérifiée au moment du vote au premier tour en méconnaissance des dispositions de l'article R. 60 du code électoral, elle n'apporte aucun élément de preuve à l'appui de ses allégations. Le grief invoqué ne peut donc qu'être écarté.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.9. Contentieux - Griefs
8.3.9.12. Portée des griefs
La requérante soutient que les signatures figurant sur les listes d'émargement de plusieurs bureaux de sept communes, en face du nom d'un même électeur, présentent, dans cent-quarante cas, des différences entre le premier et le second tours. Toutefois, ces différences, à les supposer avérées, ne sauraient, en tout état de cause, être de nature à avoir altéré la sincérité des résultats du scrutin compte tenu de l'écart de voix séparant Mme MESURE, candidate arrivée en deuxième position à l'issue du premier tour de scrutin, et la requérante. Le grief invoqué doit donc être écarté.