Décision

Décision n° 2021-26 D du 23 novembre 2021

Demande tendant à la déchéance de plein droit de M. Jean-Noël GUÉRINI de sa qualité de membre du Sénat
Rejet

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI, le 6 septembre 2021, par une requête du garde des sceaux, ministre de la justice, tendant à la constatation de la déchéance de plein droit de M. Jean-Noël GUÉRINI de sa qualité de membre du Sénat..

Au vu des textes suivants :

  • la Constitution ;
  • le code électoral ;
  • le code pénal ;
  • le code de procédure pénale ;

Au vu des pièces suivantes ;

  • le jugement n° 2021/3827 du tribunal judiciaire de Marseille du 28 mai 2021 ;
  • la déclaration d'appel formé contre ledit jugement par M. GUÉRINI, le 1er juin 2021 ;
  • les observations présentées pour M. GUÉRINI par Me Dominique Mattei, avocat au barreau de Marseille, et Me Hervé Témime, avocat au barreau de Paris, enregistrées le 22 septembre 2021 ;

Et après avoir entendu le rapporteur ;

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :

1. M. GUÉRINI a été condamné par jugement du 28 mai 2021 mentionné ci-dessus à une peine de trois ans d'emprisonnement, dont dix-huit mois assortis d'un sursis, à une amende de 30 000 euros et à une peine complémentaire d'interdiction des droits civiques et civils pour une durée de cinq ans. Cette dernière peine a été assortie de l'exécution provisoire en application de l'article 471 du code de procédure pénale. Le 1er juin 2021, M. GUÉRINI a interjeté appel de ce jugement.

2. En application des articles L.O. 136 et L.O. 296 du code électoral, le Conseil constitutionnel a été saisi le 6 septembre 2021 d'une requête du garde des sceaux, ministre de la justice, tendant à la constatation de la déchéance de plein droit de M. GUÉRINI de sa qualité de membre du Sénat.

3. Aux termes de l'article L.O. 296 du code électoral : « Nul ne peut être élu au Sénat s'il n'est âgé de vingt-quatre ans révolus. - Les autres conditions d'éligibilité et les inéligibilités sont les mêmes que pour l'élection à l'Assemblée nationale… ». L'article L.O. 127 du même code dispose : « Toute personne qui, à la date du premier tour de scrutin, remplit les conditions pour être électeur et n'entre dans aucun des cas d'inéligibilité prévus par le présent livre peut être élue à l'Assemblée nationale ». En vertu de son article L. 2 : « Sont électeurs les Françaises et Français âgés de dix-huit ans accomplis, jouissant de leurs droits civils et politiques et n'étant dans aucun cas d'incapacité prévu par la loi ». Selon l'article 131-26 du code pénal, l'interdiction des droits civiques, civils et de famille porte notamment sur le droit de vote et l'éligibilité. Il ressort de ces dispositions que les personnes qui ne jouissent pas de leurs droits civils et politiques sont inéligibles au Sénat.

4. Il résulte de l'article 506 du code de procédure pénale qu'il est sursis à l'exécution du jugement du tribunal judiciaire pendant les délais et durant l'instance d'appel. Dès lors, l'exécution provisoire de la sanction privant M. GUÉRINI de son droit d'éligibilité est sans effet sur le mandat parlementaire en cours, dont la poursuite dépend de la seule exécution du jugement.

5. Il s'ensuit que, en l'absence de condamnation définitive à ce jour, la requête du garde des sceaux, ministre de la justice, tendant à la constatation de la déchéance de plein droit de M. GUÉRINI de sa qualité de membre du Sénat est irrecevable et doit donc être rejetée. Il appartiendra aux autorités mentionnées à l'article L.O. 136 du code électoral de saisir le Conseil constitutionnel en cas de condamnation devenue définitive.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
 
Article 1er. - En l'absence de condamnation définitive, la requête du garde des sceaux, ministre de la justice, tendant à la constatation de la déchéance de plein droit de M. Jean-Noël GUÉRINI de sa qualité de membre du Sénat est irrecevable et doit être rejetée.
 
Article 2. - La présente décision sera notifiée au garde des sceaux, ministre de la justice, ainsi qu'à M. Jean-Noël GUÉRINI et publiée au Journal officiel de la République française.
 

Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 23 novembre 2021, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, M. Alain JUPPÉ, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et MM. François PILLET et Michel PINAULT.

 
Rendu public le 23 novembre 2021

JORF n°0274 du 25 novembre 2021, texte n° 110
ECLI : FR : CC : 2021 : 2021.26.D

Les abstracts

  • 10. PARLEMENT
  • 10.1. MANDAT PARLEMENTAIRE
  • 10.1.3. Exercice du mandat parlementaire
  • 10.1.3.6. Fin du mandat parlementaire
  • 10.1.3.6.2. Déchéance de plein droit

En application des articles L.O. 136 et L.O. 296 du code électoral, le Conseil constitutionnel a été saisi le 6 septembre 2021 d'une requête du garde des sceaux, ministre de la justice, tendant à la constatation de la déchéance de plein droit de M. GUÉRINI de sa qualité de membre du Sénat.
Aux termes de l'article L.O. 296 du code électoral : « Nul ne peut être élu au Sénat s'il n'est âgé de vingt-quatre ans révolus. - Les autres conditions d'éligibilité et les inéligibilités sont les mêmes que pour l'élection à l'Assemblée nationale… ». L'article L.O. 127 du même code dispose : « Toute personne qui, à la date du premier tour de scrutin, remplit les conditions pour être électeur et n'entre dans aucun des cas d'inéligibilité prévus par le présent livre peut être élue à l'Assemblée nationale ». En vertu de son article L. 2 : « Sont électeurs les Françaises et Français âgés de dix-huit ans accomplis, jouissant de leurs droits civils et politiques et n'étant dans aucun cas d'incapacité prévu par la loi ». Selon l'article 131-26 du code pénal, l'interdiction des droits civiques, civils et de famille porte notamment sur le droit de vote et l'éligibilité. Il ressort de ces dispositions que les personnes qui ne jouissent pas de leurs droits civils et politiques sont inéligibles au Sénat.
Il résulte de l'article 506 du code de procédure pénale qu'il est sursis à l'exécution du jugement du tribunal judiciaire pendant les délais et durant l'instance d'appel. Dès lors, l'exécution provisoire de la sanction privant M. GUÉRINI de son droit d'éligibilité est sans effet sur le mandat parlementaire en cours, dont la poursuite dépend de la seule exécution du jugement.
Il s'ensuit que, en l'absence de condamnation définitive à ce jour, la requête du garde des sceaux, ministre de la justice, tendant à la constatation de la déchéance de plein droit de M. GUÉRINI de sa qualité de membre du Sénat est irrecevable et doit donc être rejetée. Il appartiendra aux autorités mentionnées à l'article L.O. 136 du code électoral de saisir le Conseil constitutionnel en cas de condamnation devenue définitive.

(2021-26 D, 23 novembre 2021, cons. 2, 3, 4, 5, JORF n°0274 du 25 novembre 2021, texte n° 110)
À voir aussi sur le site : Version PDF de la décision.
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