Décision n° 2018-5501 AN du 6 juillet 2018
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL A ÉTÉ SAISI le 31 janvier 2018 par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (décision du 24 janvier 2018), dans les conditions prévues au troisième alinéa de l'article L. 52-15 du code électoral. Cette saisine est relative à la situation de M. Cyrille REY-COQUAIS, candidat aux élections qui se sont déroulées les 11 et 18 juin 2017, dans la 2ème circonscription du département de l'Yonne, en vue de la désignation d'un député à l'Assemblée nationale. Elle a été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel sous le n° 2018-5501 AN.
Au vu des textes suivants :
- la Constitution, notamment son article 59 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
- le code électoral, notamment ses articles L.O. 136-1 et L. 52-12 ;
- le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;
Au vu des pièces suivantes :
- les pièces du dossier desquelles il résulte que communication de la saisine de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a été donnée à M. REY-COQUAIS, qui n'a pas produit d'observations ;
Et après avoir entendu le rapporteur ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL S'EST FONDÉ SUR CE QUI SUIT :
1. Il résulte de l'article L. 52-12 du code électoral que chaque candidat aux élections législatives soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 du même code et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés doit établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection. Ce compte doit être déposé à la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques au plus tard avant 18 heures le dixième vendredi suivant le premier tour de scrutin. La même obligation incombe au candidat qui a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit. Il ressort également de l'article L. 52-12 que, sauf lorsqu'aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne, celui-ci est présenté par un membre de l'ordre des experts-comptables et des comptables agréés qui met ce compte en état d'examen et s'assure de la présence des pièces justificatives requises. Lorsqu'aucune dépense ou recette ne figure au compte de campagne, le mandataire établit une attestation d'absence de dépense et de recette.
2. L'article L.O. 136-1 du même code dispose que le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12.
3. M. REY-COQUAIS a obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés à l'issue du scrutin dont le premier tour s'est tenu le 11 juin 2017. À l'expiration du délai prévu à l'article L. 52-12 du code électoral, soit le 18 août 2017 à 18 heures, M. REY-COQUAIS n'avait pas déposé son compte de campagne. Il n'avait pas davantage produit une attestation d'absence de dépense et de recette établie par un mandataire.
4. La Commission nationale des comptes de campagnes et des financements politiques a saisi le Conseil constitutionnel au motif que M. REY-COQUAIS n'ayant pas restitué les carnets de reçus-dons délivrés à son mandataire en préfecture, il ne pouvait être regardé comme n'ayant pas bénéficié de dons consentis par des personnes physiques et était en conséquence tenu de déposer un compte de campagne.
5. L'absence de restitution par le candidat des carnets de reçus-dons fait présumer de la perception de dons de personnes physiques visées à l'article L. 52-8. Si cette présomption peut être combattue par tous moyens, M. REY-COQUAIS n'a, en l'espèce, produit aucun justificatif de nature à combattre cette présomption. Il ne résulte pas de l'instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations résultant de l'article L. 52-12. Dès lors, il y a lieu de prononcer l'inéligibilité de M. REY-COQUAIS à tout mandat pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL DÉCIDE :
Article 1er. - M. Cyrille REY-COQUAIS est déclaré inéligible en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée de trois ans à compter de la présente décision.
Article 2. - Cette décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 18 du règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs.
Jugé par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 5 juillet 2018, où siégeaient : M. Laurent FABIUS, Président, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Jean-Jacques HYEST, Lionel JOSPIN, Mmes Dominique LOTTIN, Corinne LUQUIENS, Nicole MAESTRACCI et M. Michel PINAULT.
Rendu public le 6 juillet 2018.
JORF n°0157 du 10 juillet 2018, texte n°66
ECLI : FR : CC : 2018 : 2018.5501.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.5. Financement
- 8.3.5.2. Établissement d'un compte de campagne
- 8.3.5.2.1. Obligation de dépôt du compte de campagne
8.3.5.2.1.1. Absence de dépôt
Le candidat a obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés à l'issue du premier tour de scrutin. A l'expiration du délai prévu à l'article L. 52-12 du code électoral, le candidat n'avait pas déposé son compte de campagne. Il n'avait pas davantage produit une attestation d'absence de dépense et de recette établie par un mandataire financier. La CNCCFP a saisi le Conseil constitutionnel au motif que le candidat n'ayant pas restitué les carnets de reçus-dons délivrés à son mandataire financier par la préfecture, il ne pouvait être regardé comme n'ayant pas bénéficié de dons consentis par des personnes physiques et était en conséquence tenu de déposer un compte de campagne. L'absence de restitution par le candidat des carnets de reçus-dons fait présumer de la perception de dons de personnes physiques visées à l'article L. 52-8. Toutefois, cette présomption peut être combattue par tous moyens. En l'espèce, le candidat n'a produit aucun justificatif de nature à combattre cette présomption. Il ne résulte pas de l'instruction que des circonstances particulières étaient de nature à justifier la méconnaissance des obligations résultant de l'article L. 52-12. Par suite, il y a lieu de prononcer l'inéligibilité du candidat à tout mandat pour une durée de trois ans.