Décision

Décision n° 2013-4862 AN du 12 avril 2013

A.N., Saint-Barthélemy et Saint-Martin
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la décision en date du 28 janvier 2013, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 11 février 2013 sous le numéro 2013-4862 AN, par laquelle la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques saisit le Conseil constitutionnel de la situation de M. Louis MUSSINGTON, demeurant à Saint-Martin, candidat aux élections qui se sont déroulées en juin 2012 dans la circonscription de Saint-Barthélemy et Saint-Martin pour l'élection d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu les observations produites par M. MUSSINGTON, enregistrées comme ci-dessus le 2 mars 2013 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu la Constitution, notamment son article 59 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral, notamment ses articles L.O. 136-1, L. 52-4 et L. 52-12 ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 52-12 du code électoral : « Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celles de la campagne officielle, par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4. La même obligation incombe au candidat ou au candidat tête de liste dès lors qu'il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8 du présent code selon les modalités prévues à l'article 200 du code général des impôts. Sont réputées faites pour son compte les dépenses exposées directement au profit du candidat et avec l'accord de celui-ci, par les personnes physiques qui lui apportent leur soutien, ainsi que par les partis et groupements politiques qui ont été créés en vue de lui apporter leur soutien ou qui lui apportent leur soutien. Le candidat estime et inclut, en recettes et en dépenses, les avantages directs ou indirects, les prestations de services et dons en nature dont il a bénéficié. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit » ; que les deuxième et troisième alinéas de l'article L. 52-4 du même code imposent au mandataire financier de recueillir les fonds destinés au financement de la campagne et de régler les dépenses engagées en vue de l'élection ;

2. Considérant que le compte de campagne de M. MUSSINGTON, candidat aux élections qui se sont déroulées les 9 et 16 juin 2012 en vue de la désignation d'un député dans la circonscription de Saint-Barthélemy et Saint-Martin, a été rejeté par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques dans sa décision du 28 janvier 2013 en raison de l'absence d'inscription de l'ensemble des dépenses relatives à l'élection ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'une somme de 435 euros, correspondant à des frais d'impression, n'a pas été inscrite au compte de campagne de M. MUSSINGTON ; que, même si cette dépense ne conduisait pas le candidat à dépasser le montant du plafond autorisé, l'absence d'inscription de cette somme, qui représentait près du tiers des dépenses engagées et qui avait été acquittée directement par un tiers, ne permet pas de regarder le compte de campagne de M. MUSSINGTON comme une présentation sincère de l'ensemble de ses dépenses ; que, par suite, c'est à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a constaté que le compte de campagne de M. MUSSINGTON n'avait pas été présenté dans les conditions prévues par l'article L. 52-12 ;

4. Considérant qu'en vertu du deuxième alinéa de l'article L.O. 136-1 du code électoral, le juge de l'élection, saisi par la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, peut déclarer inéligible le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions et le délai prescrits à l'article L. 52-12 du même code ; que pour apprécier s'il y a lieu, pour lui, de faire usage de la faculté de déclarer un candidat inéligible, il appartient au juge de l'élection de tenir compte de la nature de la règle méconnue, du caractère délibéré ou non du manquement, de l'existence éventuelle d'autres motifs d'irrégularité du compte et du montant des sommes en cause ;

5. Considérant que M. MUSSINGTON invoque une erreur du cabinet comptable qu'il avait désigné pour tenir son compte de campagne ; que, toutefois, cette circonstance n'est pas de nature à justifier l'omission de certaines dépenses du compte de campagne ; qu'en outre, ces dépenses ont été payées directement par le frère du candidat, lequel n'était pas son mandataire financier, en méconnaissance des dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 52-4 du code électoral ; que l'affirmation selon laquelle le candidat n'aurait eu aucun autre moyen de payer ces dépenses qu'en sollicitant son frère n'est assortie d'aucun commencement de preuve ; qu'eu égard, d'une part, au caractère substantiel des obligations méconnues, dont M. MUSSINGTON ne pouvait ignorer la portée, d'autre part, au cumul de ces irrégularités, il y a lieu, en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral, de prononcer l'inéligibilité de M. MUSSINGTON à tout mandat pour une durée d'un an à compter de la présente décision,

D É C I D E :

Article 1er.- M. Louis MUSSINGTON est déclaré inéligible en application des dispositions de l'article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d'un an à compter de la présente décision.

Article 2.- La présente décision sera notifiée à M. MUSSINGTON et au président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 11 avril 2013 où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.

Rendu public le : 12 avril 2013.

JORF du 17 avril 2013 page 6723, texte n° 73
Recueil, p. 567
ECLI : FR : CC : 2013 : 2013.4862.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.5. Dépenses produites au compte de campagne
  • 8.3.5.5.2. Dépenses devant figurer dans le compte
  • 8.3.5.5.2.2. Affiches, tracts, lettre circulaire

Il résulte de l'instruction qu'une somme de 435 euros, correspondant à des frais d'impression, n'a pas été inscrite au compte de campagne du candidat. Même si cette dépense ne conduisait pas le candidat à dépasser le montant du plafond autorisé, l'absence d'inscription de cette somme, qui représentait près du tiers des dépenses engagées et qui avait été acquittée directement par un tiers, ne permet pas de regarder le compte de campagne comme une présentation sincère de l'ensemble de ses dépenses. Par suite, c'est à bon droit que la CNCCFP a constaté que le compte de campagne n'avait pas été présenté dans les conditions prévues par l'article L. 52-12.
Le candidat invoque une erreur du cabinet comptable qu'il avait désigné pour tenir son compte de campagne. Toutefois, cette circonstance n'est pas de nature à justifier l'omission de certaines dépenses du compte de campagne. En outre, ces dépenses ont été payées directement par le frère du candidat, lequel n'était pas son mandataire financier, en méconnaissance des dispositions des deuxième et troisième alinéas de l'article L. 52-4 du code électoral. L'affirmation selon laquelle le candidat n'aurait eu aucun autre moyen de payer ces dépenses qu'en sollicitant son frère n'est assortie d'aucun commencement de preuve. Eu égard, d'une part, au caractère substantiel des obligations méconnues, dont le candidat ne pouvait ignorer la portée, d'autre part, au cumul de ces irrégularités, il y a lieu, en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral, de prononcer son inéligibilité à tout mandat pour une durée d'un an à compter de la présente décision.

(2013-4862 AN, 12 avril 2013, cons. 2, 3, 5, JORF du 17 avril 2013 page 6723, texte n° 73)
À voir aussi sur le site : Commentaire, Version PDF de la décision.
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