Décision

Décision n° 2013-4805 AN du 24 mai 2013

A.N., Mayotte (1ère circ.)
Inéligibilité

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la décision en date du 10 janvier 2013, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 30 janvier 2013 sous le numéro 2013-4805 AN, par laquelle la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques, saisit le Conseil constitutionnel de la situation de M. Abdoulatifou ALY, demeurant à Pamandzi (Mayotte), candidat aux élections qui se sont déroulées en juin 2012 dans la 1ère circonscription du département de Mayotte pour l'élection d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu les observations présentées par M. ALY, enregistrées au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 25 février 2013 ;

Vu les autres pièces produites et jointes aux dossiers ;

Vu la Constitution, notamment son article 59 ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral, notamment ses articles L.O. 136-1 et L. 52-12 ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 52-12 du code électoral : « Chaque candidat ou candidat tête de liste soumis au plafonnement prévu à l'article L. 52-11 et qui a obtenu au moins 1 % des suffrages exprimés est tenu d'établir un compte de campagne retraçant, selon leur origine, l'ensemble des recettes perçues et, selon leur nature, l'ensemble des dépenses engagées ou effectuées en vue de l'élection, hors celles de la campagne officielle par lui-même ou pour son compte, au cours de la période mentionnée à l'article L. 52-4. La même obligation incombe au candidat ou au candidat tête de liste dès lors qu'il a bénéficié de dons de personnes physiques conformément à l'article L. 52-8 du présent code selon les modalités prévues à l'article 200 du code général des impôts. Sont réputées faites pour son compte les dépenses exposées directement au profit du candidat et avec l'accord de celui-ci, par les personnes physiques qui lui apportent leur soutien, ainsi que par les partis et groupements politiques qui ont été créés en vue de lui apporter leur soutien ou qui lui apportent leur soutien. Le candidat estime et inclut, en recettes et en dépenses, les avantages directs ou indirects, les prestations de services et dons en nature dont il a bénéficié. Le compte de campagne doit être en équilibre ou excédentaire et ne peut présenter un déficit » ; que l'article L. 52-15 prévoit que la commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques saisit le juge de l'élection notamment lorsqu'elle rejette e compte ; que l'article L.O. 136-1 dispose qu'alors le Conseil constitutionnel peut déclarer inéligible le candidat qui n'a pas déposé son compte de campagne dans les conditions prescrites à l'article L. 52-12 ;

2. Considérant que M. ALY a obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés à l'issue du premier tour de scrutin qui s'est tenu le 10 juin 2012 ; qu'il a déposé son compte de campagne le 17 août 2012 avant l'expiration du délai prévu ; que, par sa décision du 10 janvier 2013, la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a rejeté le compte de campagne de M. ALY au motif qu'il était présenté en déficit de 3 000 € euros ;

3. Considérant que M. ALY ne conteste pas cette circonstance mais soutient qu'ayant obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés et n'ayant pas reçu de dons, il n'était pas tenu de déposer un compte de campagne ;

4. Considérant que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques a estimé que M. ALY n'ayant pas restitué les carnets de reçus-dons délivrés par la préfecture à son mandataire financier, il ne pouvait être regardé comme n'ayant pas bénéficié de dons consentis par des personnes physiques et était en conséquence tenu de déposer un compte de campagne ; qu'en effet, l'absence de restitution par le candidat des carnets de reçus-dons fait présumer de la perception de dons de personnes physiques visés à l'article L. 52-8 ; que, toutefois, cette présomption peut être combattue par tous moyens ; qu'en l'espèce, M. ALY n'a produit aucun justificatif de nature à combattre cette présomption ; qu'il doit donc être regardé comme ayant perçu des dons ; que le compte ayant été présenté en déficit, c'est donc à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne a rejeté le compte et saisi le Conseil constitutionnel ;

5. Considérant qu'eu égard au caractère substantiel de l'obligation méconnue dont M. ALY ne pouvait ignorer la portée, il y a lieu, en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral, de prononcer son inéligibilité à tout mandant pour une durée d'un an à compter de la date de la présente décision,

D É C I D E :

Article 1er.- M. Abdoulatifou ALY est déclaré inéligible en application de l'article L.O. 136-1 du code électoral pour une durée d'un an à compter de la présente décision.

Article 2.- La présente décision sera notifiée à M. ALY et au président de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 23 mai 2013, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mmes Claire BAZY MALAURIE, Nicole BELLOUBET, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Hubert HAENEL et Mme Nicole MAESTRACCI.

Rendu public le 24 mai 2013.

JORF du 28 mai 2013 page 8758, texte n° 69
Recueil, p. 771
ECLI : FR : CC : 2013 : 2013.4805.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.6. Déficit (voir également ci-dessus : Présentation du compte)

Le candidat a obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés à l'issue du premier tour de scrutin qui s'est tenu le 10 juin 2012 et a déposé son compte de campagne le 17 août 2012 avant l'expiration du délai prévu. Par sa décision du 10 janvier 2013, la CNCCFP a rejeté le compte de campagne au motif qu'il était présenté en déficit de 3 000 € euros.
Le candidat ne conteste pas cette circonstance mais soutient qu'ayant obtenu moins de 1 % des suffrages exprimés et n'ayant pas reçu de dons, il n'était pas tenu de déposer un compte de campagne.
La CNCCFP a estimé que le candidat n'ayant pas restitué les carnets de reçus-dons délivrés par la préfecture à son mandataire financier, il ne pouvait être regardé comme n'ayant pas bénéficié de dons consentis par des personnes physiques et était en conséquence tenu de déposer un compte de campagne. L'absence de restitution par le candidat des carnets de reçus-dons fait en effet présumer de la perception de dons de personnes physiques visés à l'article L. 52-8, mais cette présomption peut être combattue par tous moyens. En l'espèce, le candidat n'a produit aucun justificatif de nature à combattre cette présomption, il doit donc être regardé comme ayant perçu des dons. Le compte ayant été présenté en déficit, c'est donc à bon droit que la Commission nationale des comptes de campagne a rejeté le compte et saisi le Conseil constitutionnel. Inéligibilité à tout mandat pour une durée d'un an.

(2013-4805 AN, 24 mai 2013, cons. 2, 3, 4, JORF du 28 mai 2013 page 8758, texte n° 69)
À voir aussi sur le site : Commentaire, Version PDF de la décision.
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