Décision

Décision n° 2011-133 QPC du 24 juin 2011

M. Kiril Z. [Exécution du mandat d'arrêt et du mandat d'amener]
Conformité - réserve

Le Conseil constitutionnel a été saisi le 1er avril 2011 par la Cour de cassation (chambre criminelle, arrêt n° 2041 du 29 mars 2011), dans les conditions prévues à l'article 61-1 de la Constitution, d'une question prioritaire de constitutionnalité posée par M. Kiril Z. relative à la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des articles 130 et 130-1 du code de procédure pénale ainsi que du quatrième alinéa de son article 133.

LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code de procédure pénale ;

Vu le règlement du 4 février 2010 sur la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour les questions prioritaires de constitutionnalité ;

Vu la loi n° 2011-392 du 14 avril 2011 relative à la garde à vue ;

Vu les observations produites pour le requérant par Me Loïc Auffret, avocat au barreau de Lyon, enregistrées les 22 avril et 6 mai 2011 ;

Vu les observations produites par le Premier ministre, enregistrées le 26 avril 2011 ;

Vu les pièces produites et jointes au dossier ;

Me Auffret, pour le requérant, et M. Xavier Pottier, désigné par le Premier ministre, ayant été entendus à l'audience publique du 7 juin 2011 ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant que les articles 130 et 130-1 du code de procédure pénale sont relatifs aux modalités d'exécution du mandat d'amener ; qu'aux termes de l'article 130 : « Lorsqu'il y a lieu à transfèrement dans les conditions prévues par les articles 128 et 129, la personne doit être conduite devant le juge d'instruction qui a délivré le mandat dans les quatre jours de la notification du mandat.
« Toutefois, ce délai est porté à six jours en cas de transfèrement d'un département d'outre-mer vers un autre département ou de la France métropolitaine vers un département d'outre-mer » ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 130-1 du même code : « En cas de non-respect des délais fixés par les articles 127 et 130, la personne est libérée, sur ordre du juge d'instruction saisi de l'affaire, à moins que sa conduite ait été retardée par des circonstances insurmontables » ;

3. Considérant que l'article 133 est relatif aux modalités d'exécution d'un mandat d'arrêt ; qu'aux termes de son quatrième alinéa : « Lorsqu'il y a lieu à transfèrement, la personne doit être conduite à la maison d'arrêt indiquée sur le mandat dans les délais prévus à l'article 130. Les dispositions de l'article 130-1 sont applicables » ;

4. Considérant que, selon le requérant, ces dispositions permettent de priver de liberté la personne arrêtée ou détenue en vertu d'un mandat d'arrêt ou d'amener pendant quatre jours sans intervention d'un magistrat du siège devant lequel l'intéressé serait à même de présenter ses moyens de défense ; qu'elles méconnaîtraient tant l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, en vertu duquel la sûreté est un droit naturel et imprescriptible de l'homme, que l'article 66 de la Constitution qui dispose que « nul ne peut être arbitrairement détenu. - L'autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi » ; qu'en conséquence, il demande au Conseil constitutionnel de déclarer contraires à la Constitution ces dispositions dans leur rédaction antérieure à la loi du 14 avril 2011 susvisée et, à titre subsidiaire, dans leur rédaction postérieure à cette loi ;

- SUR LA PROCÉDURE :

5. Considérant, d'une part, qu'il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, de remettre en cause la décision par laquelle le Conseil d'État ou la Cour de cassation a jugé, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée, qu'une disposition était ou non applicable au litige ou à la procédure ou constituait ou non le fondement des poursuites ;

6. Considérant, d'autre part, que, si, postérieurement à la saisine du Conseil constitutionnel, les dispositions contestées ont été modifiées par la loi du 14 avril 2011 susvisée, cette modification n'est pas applicable aux procédures antérieures ; qu'elle est sans incidence sur l'examen, par le Conseil constitutionnel, des dispositions renvoyées ;

7. Considérant que, par suite, il n'appartient au Conseil constitutionnel de se prononcer que sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions contestées du code de procédure pénale dans leur rédaction antérieure à la loi du 14 avril 2011 susvisée ;

- SUR LA CONSTITUTIONNALITÉ DES DISPOSITIONS CONTESTÉES :

8. Considérant qu'en vertu de l'article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant la procédure pénale ; que le législateur tient de cette disposition l'obligation de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale ; que, s'agissant de la procédure pénale, cette exigence s'impose notamment pour éviter une rigueur non nécessaire lors de la recherche des auteurs d'infractions ; qu'il incombe, en outre, au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la poursuite des auteurs d'infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties ; qu'au nombre de celles-ci figure la liberté individuelle que l'article 66 place sous la protection de l'autorité judiciaire ;

9. Considérant que, selon l'article 122 du code de procédure pénale, le mandat d'amener est l'ordre donné par le juge à la force publique de conduire immédiatement devant lui la personne à l'encontre de laquelle il est décerné ; que, selon ce même article, le mandat d'arrêt est l'ordre donné à la force publique de rechercher la personne à l'encontre de laquelle il est décerné et de la conduire devant le juge mandant après l'avoir, le cas échéant, conduite à la maison d'arrêt indiquée dans le mandat où elle sera reçue et détenue ; que ces mandats peuvent être décernés par le juge d'instruction à l'égard d'une personne à l'encontre de laquelle il existe des indices graves ou concordants rendant vraisemblable qu'elle a participé, comme auteur ou complice, à la commission d'une infraction ; qu'il ressort des articles 126 et 133 que la personne arrêtée en vertu d'un mandat d'amener ou d'arrêt ne peut être retenue pendant plus de vingt-quatre heures et doit être présentée devant le juge d'instruction, ou, à défaut, s'agissant du mandat d'arrêt, le président du tribunal ou le juge désigné par lui pour qu'il soit procédé à son interrogatoire ;

10. Considérant, toutefois, que le deuxième alinéa de l'article 133 prévoit que, lorsque la personne est arrêtée en vertu d'un mandat d'arrêt à plus de deux cents kilomètres du siège du juge d'instruction qui a délivré le mandat, elle est conduite devant le procureur de la République du lieu d'arrestation qui reçoit ses déclarations après l'avoir avertie qu'elle est libre de ne pas en faire ; qu'en vertu de l'article 127, il en va de même de la personne recherchée en vertu d'un mandat d'amener lorsque, en outre, il n'est pas possible de la conduire dans le délai de vingt-quatre heures devant le juge mandant ; qu'il ressort de l'article 130 que, dans les deux cas, la personne arrêtée doit être conduite devant le juge d'instruction qui a délivré le mandat dans les quatre jours de sa notification ; que ce délai est porté à six jours en cas de transfèrement vers ou depuis un département d'outre-mer ;

11. Considérant, d'une part, que la privation de liberté de quatre ou six jours ainsi organisée est permise en cas de circonstances matérielles objectivement et précisément déterminées par la loi et qui rendent impossible la présentation immédiate de la personne arrêtée devant le juge qui a ordonné l'arrestation ; qu'en cas de dépassement des délais, la personne est, sauf « circonstances insurmontables », libérée sur ordre du juge d'instruction saisi de l'affaire ; que, par suite, la privation de liberté en cause est rendue nécessaire pour garantir la présentation de la personne arrêtée devant ce juge ; que sa durée est strictement encadrée et proportionnée au but poursuivi ;

12. Considérant, d'autre part, que le procureur de la République du lieu d'arrestation informe « sans délai » le juge d'instruction de l'arrestation, veille à l'exécution du mandat et réfère au juge mandant de ses diligences ; qu'ainsi, le mandat est ordonné par le juge d'instruction et exécuté sous son contrôle ; qu'il peut à tout moment ordonner la remise en liberté de cette personne notamment au vu des déclarations qu'elle a faites devant le procureur de la République ; que, par suite, le juge d'instruction qui a décerné un mandat d'amener ou un mandat d'arrêt conserve la maîtrise de son exécution pendant tout le temps nécessaire à la présentation devant lui de la personne arrêtée ; que, dès lors, le grief tiré de ce que la privation de liberté nécessaire à l'exécution du mandat échapperait à l'intervention d'un magistrat du siège doit être écarté ;

13. Considérant, toutefois que, si, l'article 131 prévoit que le mandat d'arrêt ne peut être décerné qu'à l'encontre d'une personne en fuite ou résidant hors du territoire de la République, à raison de faits réprimés par une peine d'emprisonnement correctionnelle ou une peine plus grave, les dispositions relatives au mandat d'amener ne prévoient pas une telle condition ; que la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infractions et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties ne pourrait être regardée comme équilibrée si la privation de liberté de quatre ou six jours prévue par l'article 130 pouvait être mise en œuvre, dans le cadre d'un mandat d'amener, à l'encontre d'une personne qui n'encourt pas une peine d'emprisonnement correctionnelle ou une peine plus grave ;

14. Considérant qu'il suit de là que, sous la réserve énoncée au considérant précédent, les dispositions contestées ne méconnaissent ni l'article 66 de la Constitution ni l'article 2 de la Déclaration de 1789 ;

15. Considérant que les dispositions contestées ne sont contraires à aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit,

DÉCIDE :

Article 1er.- Sous la réserve énoncée au considérant 13, les articles 130 et 130-1 du code de procédure pénale et le quatrième alinéa de son article 133 sont conformes à la Constitution.

Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française et notifiée dans les conditions prévues à l'article 23-11 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 susvisée.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 23 juin 2011, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, M. Jacques BARROT, Mme Claire BAZY MALAURIE, MM. Guy CANIVET, Michel CHARASSE, Renaud DENOIX de SAINT MARC, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Hubert HAENEL et Pierre STEINMETZ.

Rendu public le 24 juin 2011.

Journal officiel du 25 juin 2011, page 10840, texte n° 70
Recueil, p. 296
ECLI : FR : CC : 2011 : 2011.133.QPC

Les abstracts

  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.18. LIBERTÉ INDIVIDUELLE
  • 4.18.3. Protection de la liberté individuelle par l'autorité judiciaire
  • 4.18.3.1. Notion d'autorité judiciaire
  • 4.18.3.1.1. Magistrats du siège

Dans le cadre de l'exécution d'un mandat d'arrêt ou d'un mandat d'amener, le procureur de la République du lieu d'arrestation informe " sans délai " le juge d'instruction de l'arrestation, veille à l'exécution du mandat et réfère au juge mandant de ses diligences. Ainsi, le mandat est ordonné par le juge d'instruction et exécuté sous son contrôle. Il peut à tout moment ordonner la remise en liberté de cette personne notamment au vu des déclarations qu'elle a faites devant le procureur de la République. Par suite, le juge d'instruction qui a décerné un mandat d'amener ou un mandat d'arrêt conserve la maîtrise de son exécution pendant tout le temps nécessaire à la présentation devant lui de la personne arrêtée. Dès lors, le grief tiré de ce que la privation de liberté nécessaire à l'exécution du mandat échapperait à l'intervention d'un magistrat du siège doit être écarté.

(2011-133 QPC, 24 juin 2011, cons. 12, Journal officiel du 25 juin 2011, page 10840, texte n° 70)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.18. LIBERTÉ INDIVIDUELLE
  • 4.18.4. Contrôle des mesures portant atteinte à la liberté individuelle
  • 4.18.4.6. Mandats

Il ressort de l'article 130 du code de procédure pénale que la personne arrêtée en vertu d'un mandat d'arrêt ou d'amener à plus de deux dents kilomètres du juge mandant doit être conduite devant le juge d'instruction qui a délivré le mandat dans les quatre jours de sa notification. Ce délai est porté à six jours en cas de transfèrement vers ou depuis un département d'outre-mer.
D'une part, la privation de liberté de quatre ou six jours ainsi organisée est permise en cas de circonstances matérielles objectivement et précisément déterminées par la loi et qui rendent impossible la présentation immédiate de la personne arrêtée devant le juge qui a ordonné l'arrestation. En cas de dépassement des délais, la personne est, sauf " circonstances insurmontables ", libérée sur ordre du juge d'instruction saisi de l'affaire. Par suite, la privation de liberté en cause est rendue nécessaire pour garantir la présentation de la personne arrêtée devant ce juge. Sa durée est strictement encadrée et proportionnée au but poursuivi.
D'autre part, le procureur de la République du lieu d'arrestation informe " sans délai " le juge d'instruction de l'arrestation, veille à l'exécution du mandat et réfère au juge mandant de ses diligences. Ainsi, le mandat est ordonné par le juge d'instruction et exécuté sous son contrôle. Il peut à tout moment ordonner la remise en liberté de cette personne notamment au vu des déclarations qu'elle a faites devant le procureur de la République. Par suite, le juge d'instruction qui a décerné un mandat d'amener ou un mandat d'arrêt conserve la maîtrise de son exécution pendant tout le temps nécessaire à la présentation devant lui de la personne arrêtée. Dès lors, le grief tiré de ce que la privation de liberté nécessaire à l'exécution du mandat échapperait à l'intervention d'un magistrat du siège doit être écarté.
Toutefois que, si, l'article 131 du CPP prévoit que le mandat d'arrêt ne peut être décerné qu'à l'encontre d'une personne en fuite ou résidant hors du territoire de la République, à raison de faits réprimés par une peine d'emprisonnement correctionnelle ou une peine plus grave, les dispositions relatives au mandat d'amener ne prévoient pas une telle condition. La conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infractions et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties ne pourrait être regardée comme équilibrée si la privation de liberté de quatre ou six jours prévue par l'article 130 pouvait être mise en œuvre, dans le cadre d'un mandat d'amener, à l'encontre d'une personne qui n'encourt pas une peine d'emprisonnement correctionnelle ou une peine plus grave.
Il suit de là que, sous la réserve énoncée au considérant précédent, les articles 130, 130-1 et 133 du CPP ne méconnaissent ni l'article 66 de la Constitution ni l'article 2 de la Déclaration de 1789.

(2011-133 QPC, 24 juin 2011, cons. 10, 11, 12, 13, 14, Journal officiel du 25 juin 2011, page 10840, texte n° 70)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.23. PRINCIPES DE DROIT PÉNAL ET DE PROCÉDURE PÉNALE
  • 4.23.2. Principe de la légalité des délits et des peines
  • 4.23.2.1. Compétence du législateur
  • 4.23.2.1.1. Principe

En vertu de l'article 34 de la Constitution, la loi fixe les règles concernant la procédure pénale. Le législateur tient de cette disposition l'obligation de fixer lui-même le champ d'application de la loi pénale. S'agissant de la procédure pénale, cette exigence s'impose notamment pour éviter une rigueur non nécessaire lors de la recherche des auteurs d'infractions. Il incombe, en outre, au législateur d'assurer la conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la poursuite des auteurs d'infractions, toutes deux nécessaires à la sauvegarde de droits et de principes de valeur constitutionnelle et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties. Au nombre de celles-ci figure la liberté individuelle que l'article 66 place sous la protection de l'autorité judiciaire.

(2011-133 QPC, 24 juin 2011, cons. 8, Journal officiel du 25 juin 2011, page 10840, texte n° 70)
  • 4. DROITS ET LIBERTÉS
  • 4.23. PRINCIPES DE DROIT PÉNAL ET DE PROCÉDURE PÉNALE
  • 4.23.10. Garantie résultant de l'intervention d'une autorité juridictionnelle
  • 4.23.10.1. Contrôle de la rigueur nécessaire des actes de procédure pénale

Il ressort de l'article 130 du code de procédure pénale que la personne arrêtée en vertu d'un mandat d'arrêt ou d'amener à plus de deux dents kilomètres du juge mandant doit être conduite devant le juge d'instruction qui a délivré le mandat dans les quatre jours de sa notification. Ce délai est porté à six jours en cas de transfèrement vers ou depuis un département d'outre-mer.
D'une part, la privation de liberté de quatre ou six jours ainsi organisée est permise en cas de circonstances matérielles objectivement et précisément déterminées par la loi et qui rendent impossible la présentation immédiate de la personne arrêtée devant le juge qui a ordonné l'arrestation. En cas de dépassement des délais, la personne est, sauf " circonstances insurmontables ", libérée sur ordre du juge d'instruction saisi de l'affaire. Par suite, la privation de liberté en cause est rendue nécessaire pour garantir la présentation de la personne arrêtée devant ce juge. Sa durée est strictement encadrée et proportionnée au but poursuivi.
D'autre part, le procureur de la République du lieu d'arrestation informe " sans délai " le juge d'instruction de l'arrestation, veille à l'exécution du mandat et réfère au juge mandant de ses diligences. Ainsi, le mandat est ordonné par le juge d'instruction et exécuté sous son contrôle. Il peut à tout moment ordonner la remise en liberté de cette personne notamment au vu des déclarations qu'elle a faites devant le procureur de la République. Par suite, le juge d'instruction qui a décerné un mandat d'amener ou un mandat d'arrêt conserve la maîtrise de son exécution pendant tout le temps nécessaire à la présentation devant lui de la personne arrêtée. Dès lors, le grief tiré de ce que la privation de liberté nécessaire à l'exécution du mandat échapperait à l'intervention d'un magistrat du siège doit être écarté.
Toutefois, si l'article 131 du CPP prévoit que le mandat d'arrêt ne peut être décerné qu'à l'encontre d'une personne en fuite ou résidant hors du territoire de la République, à raison de faits réprimés par une peine d'emprisonnement correctionnelle ou une peine plus grave, les dispositions relatives au mandat d'amener ne prévoient pas une telle condition. La conciliation entre, d'une part, la prévention des atteintes à l'ordre public et la recherche des auteurs d'infractions et, d'autre part, l'exercice des libertés constitutionnellement garanties ne pourrait être regardée comme équilibrée si la privation de liberté de quatre ou six jours prévue par l'article 130 pouvait être mise en œuvre, dans le cadre d'un mandat d'amener, à l'encontre d'une personne qui n'encourt pas une peine d'emprisonnement correctionnelle ou une peine plus grave.
Il suit de là que, sous la réserve qui vient d'être énoncée, les articles 130, 130-1 et 133 du CPP ne méconnaissent ni l'article 66 de la Constitution ni l'article 2 de la Déclaration de 1789.

(2011-133 QPC, 24 juin 2011, cons. 10, 11, 12, 13, 14, Journal officiel du 25 juin 2011, page 10840, texte n° 70)
  • 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
  • 11.6. QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITÉ
  • 11.6.2. Critères de transmission ou de renvoi de la question au Conseil constitutionnel
  • 11.6.2.2. Applicable au litige ou à la procédure ou fondement des poursuites

Il n'appartient pas au Conseil constitutionnel, saisi d'une question prioritaire de constitutionnalité, de remettre en cause la décision par laquelle le Conseil d'État ou la Cour de cassation a jugé, en application de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958, qu'une disposition était ou non applicable au litige ou à la procédure ou constituait ou non le fondement des poursuites.
Si, postérieurement à la saisine du Conseil constitutionnel, les dispositions contestées (articles 130, 130-1 et 133, alinéa 4, du CPP) ont été modifiées par la loi du n° 2011-392 QPC du 14 avril 2011, cette modification n'est pas applicable aux procédures antérieures. Elle est sans incidence sur l'examen, par le Conseil constitutionnel, des dispositions renvoyées.
Par suite, il n'appartient au Conseil constitutionnel de se prononcer que sur la conformité aux droits et libertés que la Constitution garantit des dispositions contestées du CPP dans leur rédaction antérieure à la loi du 14 avril 2011.

(2011-133 QPC, 24 juin 2011, cons. 5, 6, 7, Journal officiel du 25 juin 2011, page 10840, texte n° 70)
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