Décision n° 2009-576 DC du 3 mars 2009
Le Conseil constitutionnel a été saisi, le 6 février 2009, par le Premier ministre, conformément aux articles 46, alinéa 5, et 61, alinéa 1er, de la Constitution, de la loi organique relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France.
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la Constitution, dans sa rédaction résultant de la loi constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu la loi relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, adoptée par le Parlement le 4 février 2009, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 2009-577 DC du 3 mars 2009 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que la loi organique soumise à l'examen du Conseil constitutionnel a été prise sur le fondement de l'article 13 de la Constitution ; que cette loi, qui ne constitue pas une loi organique relative au Sénat, a été adoptée dans le respect des règles de procédure prévues par les trois premiers alinéas de l'article 46 de la Constitution ;
2. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution : « Une loi organique détermine les emplois ou fonctions, autres que ceux mentionnés au troisième alinéa, pour lesquels, en raison de leur importance pour la garantie des droits et libertés ou la vie économique et sociale de la Nation, le pouvoir de nomination du Président de la République s'exerce après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée. Le Président de la République ne peut procéder à une nomination lorsque l'addition des votes négatifs dans chaque commission représente au moins trois cinquièmes des suffrages exprimés au sein des deux commissions. La loi détermine les commissions permanentes compétentes selon les emplois ou fonctions concernés » ;
3. Considérant que l'article unique de la loi organique soumet à l'avis des commissions compétentes de chaque assemblée la nomination, par le Président de la République, des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France ; qu'eu égard à leur importance pour la garantie des droits et libertés et pour la vie économique et sociale de la Nation, ces emplois entrent dans le champ d'application du dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution ;
4. Considérant que le législateur a pu prévoir, pour garantir l'indépendance des sociétés nationales de programme et concourir ainsi à la mise en œuvre de la liberté de communication, que « dans chaque assemblée parlementaire, la commission permanente compétente se prononce après avoir entendu publiquement la personnalité dont la nomination lui est proposée » ; que, toutefois, il a ainsi fixé une règle qui ne relève pas du domaine de la loi organique défini par le dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution ;
5. Considérant qu'il s'ensuit que le texte soumis au Conseil constitutionnel, tant dans ses dispositions ayant valeur de loi organique que dans celles ayant valeur de loi, n'est pas contraire à la Constitution,
D É C I D E :
Article premier.- La loi organique relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France n'est pas contraire à la Constitution.
Article 2.- À l'article unique de la même loi, les mots : « Dans chaque assemblée parlementaire, la commission permanente compétente se prononce après avoir entendu publiquement la personnalité dont la nomination lui est proposée » n'ont pas le caractère organique.
Article 3.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.
Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 3 mars 2009, où siégeaient : M. Jean-Louis DEBRÉ, Président, MM. Guy CANIVET, Jacques CHIRAC, Renaud DENOIX de SAINT MARC et Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, MM. Pierre JOXE et Jean-Louis PEZANT, Mme Dominique SCHNAPPER et M. Pierre STEINMETZ.
Journal officiel du 7 mars 2009, page 4336, texte n° 3
Recueil, p. 62
ECLI : FR : CC : 2009 : 2009.576.DC
Les abstracts
- 1. NORMES CONSTITUTIONNELLES
- 1.7. OBJECTIFS DE VALEUR CONSTITUTIONNELLE
- 1.7.1. Retenus
1.7.1.3. Pluralisme
Pour garantir l'indépendance des sociétés nationales de programme et concourir ainsi à la mise en œuvre de la liberté de communication, l'article unique de la loi organique relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France a pu, en soumettant la nomination des présidents de ces sociétés à l'avis des commissions compétentes de chaque assemblée parlementaire, préciser que, dans chaque assemblée, la commission permanente compétente se prononce après avoir entendu publiquement la personnalité dont la nomination lui est proposée.
- 2. NORMES ORGANIQUES
- 2.1. PROCÉDURE D'ÉLABORATION DES LOIS ORGANIQUES
- 2.1.2. Procédure parlementaire
2.1.2.2. Loi organique relative au Sénat
La loi organique relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France qui soumet, en application du dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution, cette nomination par le Président de la République à l'avis de la commission permanente compétente de chaque assemblée ne constitue pas une loi organique relative au Sénat.
- 2. NORMES ORGANIQUES
- 2.2. CHAMP D'APPLICATION DES LOIS ORGANIQUES
- 2.2.2. Normes organiques et autres normes
- 2.2.2.2. Répartition lois organiques / lois ordinaires
2.2.2.2.4. Dispositions du domaine de la loi ordinaire incluses dans une loi organique - Déclassement
Si le législateur a pu prévoir, pour garantir l'indépendance de sociétés nationales de programme audiovisuelles et concourir ainsi à la mise en œuvre de la liberté de communication, que " dans chaque assemblée parlementaire, la commission permanente compétente se prononce après avoir entendu publiquement la personnalité dont la nomination lui est proposée " par le Président de la République, il a fixé une règle qui ne relève pas du domaine de la loi organique défini par le dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution. Déclassement mentionné dans le dispositif.
- 10. PARLEMENT
- 10.3. FONCTION LEGISLATIVE
- 10.3.9. Procédures particulières
- 10.3.9.2. Lois organiques
10.3.9.2.4. Loi organique relative au Sénat
La loi organique relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France qui soumet, en application du dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution, cette nomination par le Président de la République à l'avis de la commission permanente compétente de chaque assemblée ne constitue pas une loi organique relative au Sénat.
- 10. PARLEMENT
- 10.4. FONCTION DE CONTRÔLE ET D'ÉVALUATION
10.4.1. Contrôle des nominations
L'article unique de la loi organique relative à la nomination des présidents des sociétés France Télévisions et Radio France et de la société en charge de l'audiovisuel extérieur de la France qui soumet cette nomination par le Président de la République à l'avis de la commission permanente compétente de chaque assemblée est conforme, eu égard à l'importance des emplois concernés pour la garantie des droits et libertés et pour la vie économique et sociale de la Nation, au dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution. Cependant, si le législateur a pu prévoir, pour garantir l'indépendance des sociétés nationales de programme, et concourir ainsi à la mise en œuvre de la liberté de communication, que, " dans chaque assemblée parlementaire, la commission permanente compétente se prononce après avoir entendu publiquement la personnalité dont la nomination lui est proposée ", il a ainsi fixé une règle qui ne relève pas du domaine de la loi organique défini par le dernier alinéa de l'article 13 de la Constitution.