Décision n° 2006-538 DC du 13 juillet 2006
Le Conseil constitutionnel a été saisi, dans les conditions prévues à l'article 61, deuxième alinéa, de la Constitution, de la loi portant règlement définitif du budget de 2005, le 4 juillet 2006, par M. Jean-Marc AYRAULT, Mmes Patricia ADAM, Sylvie ANDRIEUX, MM. Jean-Paul BACQUET, Jean-Pierre BALLIGAND, Gérard BAPT, Claude BARTOLONE, Jacques BASCOU, Christian BATAILLE, Jean-Claude BATEUX, Jean-Claude BEAUCHAUD, Éric BESSON, Jean-Louis BIANCO, Jean-Pierre BLAZY, Serge BLISKO, Patrick BLOCHE, Jean-Claude BOIS, Daniel BOISSERIE, Maxime BONO, Augustin BONREPAUX, Jean-Michel BOUCHERON, Pierre BOURGUIGNON, Mme Danielle BOUSQUET, MM. François BROTTES, Thierry CARCENAC, Christophe CARESCHE, Mme Martine CARRILLON-COUVREUR, MM. Laurent CATHALA, Jean-Paul CHANTEGUET, Michel CHARZAT, Alain CLAEYS, Mme Marie-Françoise CLERGEAU, MM. Gilles COCQUEMPOT, Pierre COHEN, Mme Claude DARCIAUX, M. Michel DASSEUX, Mme Martine DAVID, MM. Marcel DEHOUX, Michel DELEBARRE, Bernard DEROSIER, Michel DESTOT, Marc DOLEZ, François DOSÉ, René DOSIÈRE, Julien DRAY, Tony DREYFUS, Pierre DUCOUT, Jean-Pierre DUFAU, William DUMAS, Jean-Paul DUPRÉ, Yves DURAND, Mme Odette DURIEZ, MM. Henri EMMANUELLI, Laurent FABIUS, Albert FACON, Jacques FLOCH, Pierre FORGUES, Michel FRANÇAIX, Jean GAUBERT, Mmes Nathalie GAUTIER, Catherine GÉNISSON, MM. Jean GLAVANY, Gaëtan GORCE, Alain GOURIOU, Mmes Elisabeth GUIGOU, Paulette GUINCHARD, M. David HABIB, Mme Danièle HOFFMAN-RISPAL, MM. François HOLLANDE, Jean-Louis IDIART, Mme Françoise IMBERT, MM. Eric JALTON, Serge JANQUIN, Jean-Pierre KUCHEIDA, Mme Conchita LACUEY, MM. Jérôme LAMBERT, François LAMY, Jack LANG, Jean LAUNAY, Jean-Yves LE BOUILLONNEC, Gilbert LE BRIS, Jean-Yves LE DÉAUT, Jean LE GARREC, Jean-Marie LE GUEN, Bruno LE ROUX, Mme Marylise LEBRANCHU, MM. Michel LEFAIT, Patrick LEMASLE, Guy LENGAGNE, Mme Annick LEPETIT, MM. Jean-Claude LEROY, Michel LIEBGOTT, Mme Martine LIGNIÈRES-CASSOU, MM. François LONCLE, Victorin LUREL, Bernard MADRELLE, Louis-Joseph MANSCOUR, Philippe MARTIN, Didier MATHUS, Kléber MESQUIDA, Jean MICHEL, Didier MIGAUD, Mme Hélène MIGNON, MM. Arnaud MONTEBOURG, Henri NAYROU, Alain NÉRI, Mme Marie-Renée OGET, MM. Christian PAUL, Germinal PEIRO, Jean-Claude PÉREZ, Mmes Marie-Françoise PÉROL-DUMONT, Geneviève GAILLARD, MM. Jean-Jack QUEYRANNE, Paul QUILÈS, Alain RODET, Bernard ROMAN, René ROUQUET, Patrick ROY, Mme Ségolène ROYAL, M. Michel SAINTE-MARIE, Mme Odile SAUGUES, MM. Henri SICRE, Dominique STRAUSS-KAHN, Pascal TERRASSE, Philippe TOURTELIER, Daniel VAILLANT, André VALLINI, Manuel VALLS, Michel VERGNIER, Alain VIDALIES, Jean-Claude VIOLLET, Philippe VUILQUE, Paul GIACOBBI, Joël GIRAUD, Simon RENUCCI, Mme Chantal ROBIN-RODRIGO et M. Roger-Gérard SCHWARTZENBERG, députés ;
LE CONSEIL CONSTITUTIONNEL,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 modifiée portant loi organique relative aux lois de finances ;
Vu la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 modifiée relative aux lois de finances, ensemble la décision du Conseil constitutionnel n° 2001-448 DC du 25 juillet 2001 ;
Vu l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 modifiée relative au remboursement de la dette sociale ;
Vu la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004 de finances pour 2005 ;
Vu la loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005, notamment ses articles 20 et 117 ;
Vu le décret n° 86-451 du 14 mars 1986 pris en application de l'article 16 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances en ce qui concerne la comptabilisation des recettes et dépenses de l'Etat ;
Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 93-330 DC du 29 décembre 1993 concernant la loi de finances pour 1994 ;
Vu la décision du Conseil constitutionnel n° 2001-456 DC du 27 décembre 2001 concernant la loi de finances pour 2002 ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que les députés requérants défèrent au Conseil constitutionnel la loi portant règlement définitif du budget de 2005 en dénonçant son absence de sincérité ; qu'ils mettent en cause l'ouverture de certains crédits par voie de décret d'avance, la qualification donnée à des opérations liées à des reprises de dette par l'Etat, ainsi que les modalités de remboursement d'avances à un établissement public ;
- SUR LES NORMES APPLICABLES À LA LOI PORTANT RÈGLEMENT DÉFINITIF DU BUDGET DE 2005 :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 14 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 : « Tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée » ; que son article 15 dispose que : « La société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration » ; qu'il résulte de ces dispositions que les ressources et les charges de l'Etat doivent être présentées de façon sincère ;
3. Considérant que l'article 32 de la loi organique du 1er août 2001 susvisée rappelle ce principe, en précisant que la sincérité des lois de finances « s'apprécie compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler » ; qu'il en résulte que le principe de sincérité n'a pas la même portée s'agissant des lois de règlement et des autres lois de finances ; que, dans le cas de la loi de finances de l'année, des lois de finances rectificatives et des lois particulières prises selon les procédures d'urgence prévues à l'article 45 de la loi organique, la sincérité se caractérise par l'absence d'intention de fausser les grandes lignes de l'équilibre déterminé par la loi de finances ; que la sincérité de la loi de règlement s'entend en outre comme imposant l'exactitude des comptes ;
4. Considérant que les articles 27 à 31 de la loi organique du 1er août 2001 imposent à l'Etat de nouvelles obligations comptables ; que son article 37 redéfinit le contenu de la loi de règlement ; que son article 67 rend ces dispositions applicables à compter du 1er janvier 2005 ; qu'il précise, toutefois, que les dispositions de l'ordonnance du 2 janvier 1959 susvisée « demeurent applicables aux lois de finances afférentes à l'année 2005 et aux années antérieures » ; que, dès lors, la loi portant règlement définitif du budget de 2005 reste soumise, s'agissant de la délimitation de son contenu, aux règles fixées par ladite ordonnance ;
5. Considérant que dans son article 2, alinéa 5, l'ordonnance du 2 janvier 1959 dispose que : « La loi de règlement constate les résultats financiers de chaque année civile et approuve les différences entre les résultats et les prévisions de la loi de finances de l'année, complétée, le cas échéant, par ses lois rectificatives » ; que l'article 35 de la même ordonnance précise le contenu du projet annuel de loi de règlement ; qu'il est spécifié au premier alinéa de cet article que le projet « constate le montant définitif des encaissements de recettes et des ordonnancements de dépenses se rapportant à une même année ; le cas échéant, il ratifie les ouvertures de crédits par décrets d'avances et approuve les dépassements de crédits résultant de circonstances de force majeure » ; qu'en vertu du deuxième alinéa du même article 35, le projet annuel de loi de règlement établit le compte de résultat de l'année qui comprend : - a) le déficit ou l'excédent résultant de la différence nette entre les recettes et les dépenses du budget général ; - b) les profits et les pertes constatés dans l'exécution des comptes spéciaux du Trésor ; - c) les profits et les pertes résultant éventuellement de la gestion des opérations de trésorerie ; qu'aux termes du troisième alinéa de l'article 35 : « Le projet de loi de règlement autorise enfin le transfert du résultat de l'année au compte permanent des découverts du Trésor » ;
6. Considérant qu'il ressort de ces différents textes, encore applicables à la loi de règlement pour 2005, que celle-ci comporte deux catégories de dispositions ayant une portée différente : d'une part, celles qui constatent les résultats des opérations de toute nature intervenues pour l'exécution du budget et établissent le compte de résultat de l'année ; d'autre part, celles qui approuvent, le cas échéant, les ajustements de crédits par rapport aux prévisions des lois de finances et autorisent le transfert du résultat de l'année au compte permanent des découverts du Trésor ;
7. Considérant que, dans la mesure où elle procède à des constatations, la loi de règlement pour 2005 ne peut que retracer, à partir des comptes, les ordonnancements de dépenses et les encaissements de recettes, quelle que soit la régularité des opérations effectuées ;
8. Considérant enfin que la constitutionnalité d'une loi de finances s'apprécie au regard des règles que la Constitution a elle-même fixées ou auxquelles elle a expressément renvoyé ;
9. Considérant qu'il convient d'apprécier les griefs formulés par les requérants à l'encontre de la loi portant règlement définitif du budget de 2005 au regard des principes ainsi définis ;
- SUR L'OUVERTURE DE CRÉDITS PAR VOIE DE DÉCRET D'AVANCE :
10. Considérant que les requérants font valoir que les ouvertures de crédits par voie de décret d'avance opérées au titre des opérations militaires extérieures et de l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile ne respectent pas la condition d'urgence fixée par l'article 11 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 susvisée, applicable à l'exercice 2005 ; qu'elles traduiraient en outre des sous-dotations manifestes de la loi de finances pour 2005, dont la sincérité est ainsi mise en cause ;
11. Considérant que la conformité à la Constitution des termes d'une loi promulguée ne peut être utilement contestée qu'à l'occasion de l'examen de dispositions législatives qui en modifient le contenu, la complètent ou affectent son domaine d'application ;
12. Considérant que les décrets d'avances contestés ont été ratifiés par l'article 20 de la loi de finances rectificative pour 2005, promulguée le 30 décembre 2005 ;
13. Considérant qu'en tant qu'elle se borne à retracer les montants des ouvertures de crédits par voie de décret d'avance, la loi de règlement pour 2005 ne modifie ni ne complète les lois de finances initiale et rectificative pour 2005 ; qu'elle n'en affecte pas non plus les domaines d'application ; que, par suite, les conditions dans lesquelles la conformité à la Constitution de ces deux lois de finances pourraient être utilement contestées ne sont pas réunies en l'espèce ; que, dès lors, les griefs doivent, en tout état de cause, être rejetés ;
- SUR LA QUALIFICATION DONNÉE À DES OPÉRATIONS LIÉES À DES REPRISES DE DETTE :
14. Considérant que les requérants soutiennent que la loi de règlement opère une confusion entre opérations budgétaires et opérations de trésorerie ; qu'ils considèrent que la reprise par l'Etat de la dette contractée pour le compte du Fonds de financement de la protection sociale agricole aurait dû être qualifiée de dépense budgétaire et non d'opération de trésorerie ; qu'ils estiment, à l'inverse, que les versements effectués par la Caisse d'amortissement de la dette sociale au budget général auraient dû être considérés comme des opérations de trésorerie et non comme des recettes budgétaires ;
. En ce qui concerne la reprise par l'Etat de la dette contractée pour le compte du Fonds de financement de la protection sociale agricole :
15. Considérant qu'aux termes de l'article 25 de la loi organique du 1er août susvisée, rendu applicable à compter du 1er janvier 2002 par l'article 65 de la même loi : « Les ressources et les charges de trésorerie de l'Etat résultent des opérations suivantes ... - 4 ° L'émission, la conversion, la gestion et le remboursement des emprunts et autres dettes de l'Etat... » ; qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires, que les reprises par l'Etat de dettes d'organismes publics ou privés constituent des opérations de trésorerie ;
16. Considérant que l'article 117 de la loi de finances rectificative pour 2005 a transféré à l'Etat, dans la limite de 2,5 milliards d'euros, « la dette contractée pour le compte du Fonds de financement des prestations sociales des non-salariés agricoles par la Caisse centrale de la mutualité sociale agricole, sous forme d'ouvertures de crédits à court terme consenties, par voie de convention, auprès d'établissements bancaires » ;
17. Considérant que la qualification d'opération de trésorerie et non de dépense budgétaire donnée par la loi déférée à la reprise par l'Etat de la dette contractée pour le compte du Fonds de financement de la protection sociale agricole est conforme à l'article 25 de la loi organique du 1er août 2001 ;
18. Considérant, par ailleurs, que, si l'article 37 de la loi organique du 1er août 2001 dispose que la loi de règlement arrête le montant définitif des ressources et des charges de trésorerie et approuve le résultat comptable de l'exercice, tel n'est pas le cas des dispositions encore applicables à l'exercice 2005 ; qu'en effet, l'article 35 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 se borne à fixer les modalités selon lesquelles doit être calculé le résultat budgétaire de l'année concernée et n'exige de prendre en compte les opérations de trésorerie que pour ce qui concerne les profits ou les pertes résultant éventuellement de leur gestion ; qu'il s'ensuit que le montant de la dette litigieuse n'avait pas à être inclus dans le calcul du résultat budgétaire de l'année 2005 ; que l'opération critiquée a toutefois affecté le résultat comptable de l'exercice porté à la connaissance du Parlement en application du 7 ° de l'article 54 de la loi organique du 1er août 2001 rendu applicable par son article 64 à la loi de règlement pour 2005 ;
19. Considérant qu'à l'avenir, en vertu du III de l'article 37 de la loi susvisée du 1er août 2001, de telles opérations de reprise de dette par l'Etat seront retracées tant dans le résultat comptable que dans le bilan de l'exercice, tous deux soumis au vote du Parlement lors de l'examen de la loi de règlement ;
. En ce qui concerne les versements effectués par la Caisse d'amortissement de la dette sociale au budget général :
20. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 susvisée, applicable aux lois de finances pour 2005 : « Les ressources permanentes de l'Etat comprennent : - Les impôts ainsi que le produit des amendes ; - Les rémunérations de services rendus, redevances, fonds de concours, dons et legs ; - Les revenus du domaine et des participations financières ainsi que la part de l'Etat dans les bénéfices des entreprises nationales ; - Les remboursements de prêts et avances ; - Les produits divers » ;
21. Considérant que, conformément aux articles 2 et 4 de l'ordonnance du 24 janvier 1996 susvisée, l'établissement public dénommé « Caisse d'amortissement de la dette sociale » a pour mission d'effectuer des versements au budget général de l'Etat selon un échéancier fixé par ladite ordonnance ; qu'à cet effet, le IV de l'article 4 de cette ordonnance dispose que : « La Caisse verse... au budget général de l'Etat... une somme de 3 milliards d'euros chaque année, de 2002 à 2005 » ; que, comme l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 décembre 2001 susvisée, ces dispositions n'établissent aucun lien juridique entre les versements de la Caisse à l'Etat et les conditions de remboursement de la dette de la sécurité sociale ; que, comme en a également jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 29 décembre 1993 susvisée, de tels versements ne constituent pas un remboursement de prêt ou d'avance au sens de l'article 3 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances ; qu'ils constituent donc des recettes budgétaires ;
- SUR LES MODALITÉS DE REMBOURSEMENT D'AVANCES À UN ÉTABLISSEMENT PUBLIC :
22. Considérant qu'entre octobre et décembre 2005, dans l'attente d'aides en provenance du Fonds européen d'orientation et de garantie agricole, l'Etat a versé à l'Agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole une avance de 6,09 milliards d'euros dont le remboursement a été effectué à hauteur de 190 millions d'euros le 5 décembre 2005 et à hauteur de 5,9 milliards d'euros le 5 janvier 2006 ; qu'à cette dernière date, l'Etat a versé au même organisme une nouvelle avance d'un montant de 4,2 milliards d'euros, dont le remboursement est intervenu le 3 février 2006 ; que les opérations liées à la première avance ont été rattachées à l'exercice 2005 et à sa période complémentaire, tandis que celles liées à la seconde ont été rattachées à l'exercice 2006 ;
23. Considérant que les requérants soutiennent que les modalités de la comptabilisation du remboursement de l'avance méconnaissent l'exigence de sincérité ; qu'ils estiment que les deux avances, qui s'analysent en une opération unique, ont été artificiellement rattachées à deux exercices distincts ;
24. Considérant que l'article 28 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 susvisée, encore applicable à l'exécution du budget de 2005, dispose : « Les comptes d'avances décrivent les avances que le ministre des finances est autorisé à consentir dans la limite des crédits ouverts à cet effet... - Les avances du Trésor sont productives d'intérêt. Sauf dispositions spéciales contenues dans une loi de finances, leur durée ne peut excéder deux ans ou quatre ans... » ;
25. Considérant qu'en application des principes rappelés ci-dessus, la loi de règlement pour 2005 devait retracer l'avance consentie à l'Agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole en 2005, ainsi que les remboursements subséquents, qu'ils soient intervenus en 2005 ou au cours de la période complémentaire afférente à cet exercice, laquelle s'étendait jusqu'au 7 février 2006 ; que ceux-ci ont permis le remboursement intégral de l'avance consentie en 2005 ; que, dès lors, le grief tiré de l'omission d'une dépense budgétaire résultant d'un remboursement incomplet au titre de 2005 manque en fait ;
26. Considérant qu'il n'y a lieu, pour le Conseil constitutionnel, de soulever d'office aucune question de conformité à la Constitution,
Décide :
Article premier.- La loi portant règlement définitif du budget de 2005 n'est pas contraire à la Constitution.
Article 2.- La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 13 juillet 2006, où siégeaient : M. Pierre MAZEAUD, Président, MM. Jean-Claude COLLIARD, Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE et Valéry GISCARD d'ESTAING, Mme Jacqueline de GUILLENCHMIDT, M. Jean-Louis PEZANT, Mme Dominique SCHNAPPER, M. Pierre STEINMETZ et Mme Simone VEIL.
Journal officiel du 20 juillet 2006, page 10894, texte n° 2
Recueil, p. 73
ECLI : FR : CC : 2006 : 2006.538.DC
Les abstracts
- 1. NORMES CONSTITUTIONNELLES
- 1.2. DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME ET DU CITOYEN DU 26 AOÛT 1789
- 1.2.17. Article 15
1.2.17.1. Contrôle et responsabilité des agents publics
Référence expresse au principe.
- 1. NORMES CONSTITUTIONNELLES
- 1.2. DÉCLARATION DES DROITS DE L'HOMME ET DU CITOYEN DU 26 AOÛT 1789
- 1.2.20. Combinaison de plusieurs dispositions de la Déclaration de 1789
1.2.20.14. Principe de sincérité du budget de l'État (articles 14 et 15)
Affirmation de sa valeur constitutionnelle et rattachement aux articles 14 et 15 de la Déclaration de 1789.
- 6. FINANCES PUBLIQUES
- 6.1. PRINCIPES BUDGÉTAIRES ET FISCAUX
- 6.1.7. Principe de sincérité
- 6.1.7.1. Loi de finances
6.1.7.1.2. Régime de la loi organique relative aux lois de finances de 2001
Aux termes de l'article 14 de la Déclaration de 1789, " tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou par leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ". Aux termes de son article 15, " la société a le droit de demander compte à tout agent public de son administration ". Il résulte de ces dispositions que les ressources et les charges de l'État doivent être présentées de façon sincère. L'article 32 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances rappelle ce principe, en précisant que la sincérité des lois de finances " s'apprécie compte tenu des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler ". Il en résulte que le principe de sincérité n'a pas la même portée s'agissant des lois de règlement et des autres lois de finances. Dans le cas de la loi de finances de l'année, des lois de finances rectificatives et des lois particulières prises selon les procédures d'urgence prévues à l'article 45 de la loi organique, la sincérité se caractérise par l'absence d'intention de fausser les grandes lignes de l'équilibre déterminé par la loi de finances. La sincérité de la loi de règlement s'entend en outre comme imposant l'exactitude des comptes.
- 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
- 11.5. GRIEFS (contrôle a priori des lois - article 61 de la Constitution)
- 11.5.3. Cas des lois promulguées
11.5.3.2. Exception : admission conditionnelle du contrôle
La conformité à la Constitution des termes d'une loi promulguée ne peut être utilement contestée qu'à l'occasion de l'examen de dispositions législatives qui en modifient le contenu, la complètent ou affectent son domaine d'application. En l'espèce, d'une part, les décrets d'avances contestés ont été ratifiés par l'article 20 de la loi de finances rectificative pour 2005, promulguée le 30 décembre 2005. D'autre part, en tant qu'elle se borne à retracer les montants des ouvertures de crédits par voie de décret d'avance, la loi de règlement pour 2005 ne modifie ni ne complète les lois de finances initiale et rectificative pour 2005. Elle n'en affecte pas non plus les domaines d'application. Par suite, les conditions dans lesquelles la conformité à la Constitution de ces deux lois de finances pourraient être utilement contestées ne sont pas réunies en l'espèce.
- 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
- 11.7. EXAMEN DE LA CONSTITUTIONNALITÉ
- 11.7.2. Conditions de prise en compte d'éléments extrinsèques au texte de la loi
- 11.7.2.2. Référence aux travaux préparatoires
11.7.2.2.2. Référence aux travaux préparatoires d'une loi organique
Aux termes de l'article 25 de la loi organique du 1er août 2001, rendu applicable à compter du 1er janvier 2002 par l'article 65 de la même loi : " Les ressources et les charges de trésorerie de l'État résultent des opérations suivantes... - 4° L'émission, la conversion, la gestion et le remboursement des emprunts et autres dettes de l'État... ". Il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux parlementaires, que les reprises par l'État de dettes d'organismes publics ou privés constituent des opérations de trésorerie.
- 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
- 11.8. SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION
- 11.8.7. Autorité des décisions du Conseil constitutionnel
- 11.8.7.3. Portée des précédentes décisions
11.8.7.3.1. Autorité de la chose interprétée
Conformément aux articles 2 et 4 de l'ordonnance du 24 janvier 1996, l'établissement public dénommé " Caisse d'amortissement de la dette sociale " a pour mission d'effectuer des versements au budget général de l'État selon un échéancier fixé par ladite ordonnance. À cet effet, le IV de l'article 4 de cette ordonnance dispose que " la Caisse verse... au budget général de l'État... une somme de 3 milliards d'euros chaque année, de 2002 à 2005 ". Comme l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 décembre 2001, ces dispositions n'établissent aucun lien juridique entre les versements de la Caisse à l'État et les conditions de remboursement de la dette de la sécurité sociale. Comme en a également jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision du 29 décembre 1993, de tels versements ne constituent pas un remboursement de prêt ou d'avance au sens de l'article 3 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances. Ils constituent donc des recettes budgétaires.