Décision n° 2002-113 PDR du 26 septembre 2002
Le Conseil constitutionnel,
Vu le compte de campagne déposé au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 4 juillet 2002 par M. Bruno MÉGRET et publié au Journal officiel du 21 juillet 2002 ;
Vu les pièces jointes à ce compte ;
Vu les questionnaires adressés par les rapporteurs à M. Bruno MÉGRET les 18 juillet et 13 août 2002 ;
Vu les réponses faites au nom du candidat par son représentant M. Hubert SAVON les 25 juillet et 11 septembre 2002 ;
Vu la lettre du 19 septembre 2002 adressée par les rapporteurs à M. Bruno MÉGRET et M. Hubert Savon ;
Vu la réponse à cette lettre, adressée par M. Hubert SAVON le 23 septembre 2002 ;
Vu les pièces jointes au dossier ;
Vu l'article 58 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu l'article 3 de la loi n° 62-1292 du 6 novembre 1962, modifiée en dernier lieu par la loi organique n° 2001-100 du 5 février 2001, relative à l'élection du Président de la République au suffrage universel ;
Vu le code électoral ;
Vu le décret n° 2001-213 du 8 mars 2001 modifié portant application de la loi du 6 novembre 1962 susvisée ;
Vu la déclaration des résultats du premier tour de scrutin en date du 24 avril 2002 et la proclamation des résultats de l'élection du Président de la République en date du 8 mai 2002 ;
Les rapporteurs ayant été entendus ;
1. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 52-8 du code électoral : « Les personnes morales, à l'exception des partis ou groupements politiques, ne peuvent participer au financement de la campagne électorale d'un candidat, ni en lui consentant des dons sous quelque forme que ce soit, ni en lui fournissant des biens, services ou autres avantages directs ou indirects à des prix inférieurs à ceux qui sont habituellement pratiqués » ;
2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, d'une part, la commune de Vitrolles (Bouches-du-Rhône) a assuré l'ensemble des opérations relatives à l'expédition, en deux envois, d'environ 62 000 lettres adressées à des personnalités mentionnées au I de l'article 3 de la loi du 6 novembre 1962 susvisée, les invitant à présenter la candidature de M. Bruno MÉGRET ; que, si, à la suite des observations de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'azur, les achats effectués en vue de la réalisation de ces prestations ont été remboursés par l'association de financement électorale à la commune, celle-ci a conservé à sa charge les frais généraux de toute nature afférents à l'opération en cause ; que, d'autre part, le candidat, dont le compte ne retrace aucune dépense de personnel, a bénéficié, entre juin 2001 et avril 2002, du concours d'un agent rémunéré par la commune de Vitrolles ; qu'il ressort des pièces du dossier que la participation effective de cet agent à la campagne électorale de M. Bruno MÉGRET a revêtu un caractère significatif pendant ses heures de service ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le candidat a bénéficié, de la part d'une personne morale autre qu'un parti politique, d'avantages prohibés par l'article L. 52-8 du code électoral ; qu'il s'ensuit que le compte de campagne de M. Bruno MÉGRET doit être rejeté ;
- Sur le droit à remboursement par l'État :
4. Considérant qu'aux termes du dernier alinéa du V de la loi du 6 novembre 1962 susvisée : « Le remboursement forfaitaire prévu à l'alinéa précédent n'est pas accordé aux candidats… dont le compte de campagne a été rejeté, sauf décision contraire du Conseil constitutionnel dans les cas où la méconnaissance des dispositions applicables serait non intentionnelle et de portée très réduite » ; qu'il résulte de l'instruction que la méconnaissance par M. Bruno MÉGRET des dispositions de l'article L. 52-8 du code électoral ne peut être regardée, en l'espèce, comme ayant été non intentionnelle et de portée très réduite ; que, dès lors, le remboursement forfaitaire de ses dépenses électorales ne peut être accordé à M. Bruno MÉGRET, lequel devra restituer à l'État l'avance de 153 000 euros qui lui a été consentie,
Décide :
Article premier :
Le compte de campagne de M. Bruno MÉGRET est rejeté.Article 2 :
M. Bruno MÉGRET n'a pas droit au remboursement forfaitaire de ses dépenses électorales.Article 3 :
M. Bruno MÉGRET restituera à l'État l'avance forfaitaire de 153 000 euros dont il a bénéficié en tant que candidat à l'élection du Président de la République.Article 4 :
La présente décision sera notifiée à M. Bruno MÉGRET, ainsi qu'au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales et publiée au Journal officiel de la République française.Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 26 septembre 2002, où siégeaient : MM. Yves GUÉNA, Président, Michel AMELLER, Jean-Claude COLLIARD, Olivier DUTHEILLET de LAMOTHE, Pierre JOXE, Pierre MAZEAUD, Mmes Monique PELLETIER, Dominique SCHNAPPER et Simone VEIL.
Journal officiel du 12 octobre 2002, page 16865
Recueil, p. 221
ECLI : FR : CC : 2002 : 2002.113.PDR
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.2. ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE
- 8.2.4. Financement
8.2.4.4. Rejet du compte de campagne
Doit être rejeté le compte d'un candidat qui a bénéficié de la part d'une personne morale autre qu'un parti politique d'avantages prohibés par l'article L. 52-8 du code électoral. En l'espèce, une commune a conservé à sa charge les frais généraux de toute nature de l'expédition, en deux envois, d'environ 62 000 lettres adressées à des élus et les invitant à présenter la candidature de l'intéressé. En outre, le candidat, dont le compte ne retrace aucune dépense de personnel, a bénéficié, entre juin 2001 et avril 2002, du concours d'un agent rémunéré par la même commune et dont la participation effective à la campagne électorale a revêtu un caractère significatif pendant ses heures de service.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.2. ÉLECTION PRÉSIDENTIELLE
- 8.2.4. Financement
8.2.4.5. Remboursement à la charge de l'État
Ne sont pas simultanément remplies, en l'espèce, les deux conditions fixées par le dernier alinéa du V de la loi du 6 novembre 1962 et qui permettent au Conseil constitutionnel d'accorder, au moins partiellement, le remboursement forfaitaire de l'État à un candidat dont le compte a été rejeté : la méconnaissance des dispositions applicables doit être à la fois non intentionnelle et de portée très réduite. Le candidat devra, en conséquence, restituer à l'État l'avance de 153 000 € qui lui a été consentie.