Décision n° 97-2155/2157 AN du 14 octobre 1997
Le Conseil constitutionnel,
Vu 1 °) sous le n°97-2155 la requête présentée par Madame Georgia VINCENT, demeurant à Bondy (Seine -Saint-Denis), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 9 juin 1997, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 25 mai et 1er juin 1997dans la 9ème circonscription du département de la Seine-Saint-Denis pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu 2 ° sous le n° 97-2157 la requête présentée par Madame Myriam DIBUNDU-BORDREUIL, demeurant à Noisy-Le-Grand (Seine-Saint-Denis), enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 9 juin 1997, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 25 mai et 1er juin 1997 dans la 9ème circonscription du département de la Seine-Saint-Denis pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;
Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur, enregistrées comme ci-dessus les 12 juin et 11 août 1997 ;
Vu les mémoires en défense présentés par Madame Véronique NEÏERTZ, député, enregistrés comme ci-dessus le 22 juillet 1997 ;
Vu les mémoires en réplique présentés par Madame VINCENT, enregistrés comme ci-dessus les 30 juillet et 28 août 1997 ;
Vu le mémoire en réplique et les observations complémentaires présentés par Madame DIBUNDU-BORDREUIL, enregistrés comme ci-dessus respectivement les 5 août et 5 septembre 1997 ;
Vu les mémoires en duplique, présentés par Madame Véronique NEIERTZ, enregistrés comme ci-dessus le 9 octobre 1997 ;
Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et sénateurs ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
1. Considérant que les requêtes de Madame VINCENT et de Madame DIBUNDU-BORDREUIL sont relatives à des opérations électorales qui se sont déroulées dans la même circonscription ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par une seule décision ;
- SUR LA REQUETE DE MADAME VINCENT :
2. Considérant que, si lors du premier tour de scrutin, sur lequel portent les griefs de Madame VINCENT, des fonctionnaires municipaux placés à l'entrée des bureaux de vote tenaient un double de la liste électorale, une telle pratique, quoique anormale, ne peut être regardée comme ayant constitué une atteinte à la liberté de vote, dès lors qu'il n'est pas établi que la liste ainsi mise à la disposition des agents de la commune ait été utilisée afin d'exercer des pressions sur les électeurs ;
3. Considérant que si la requérante fait valoir que trois électeurs auraient constaté que la feuille d'émargement était déjà signée en face de leur nom lorsqu'ils se sont présentés pour émarger, un seul cas, d'ailleurs mentionné au procès-verbal, se trouve établi ; qu'il résulte de ce procès-verbal qu'il s'agissait d'une erreur matérielle de la part de l'électeur inscrit sur la liste électorale immédiatement après l'électeur concerné ; que ce dernier a pu exercer son droit de vote ; que le grief doit dès lors être écarté ;
4. Considérant que si, à la suite de la maladresse d'un électeur qui avait renversé dans le bureau de vote plusieurs piles de bulletins de vote mis à la disposition des électeurs, les bulletins portant le nom de la requérante ont été, pendant quelques minutes, recouverts par des bulletins portant le nom de Madame NEÏERTZ, cette circonstance n'a eu aucune incidence sur le déroulement des opérations de vote du premier tour ;
- SUR LA REQUETE DE MADAME DIBUNDU- BORDREUIL :
5. Considérant que le maire de Noisy-le-Sec a, d'une part, interdit, par arrêté en date du 23 mai 1997, en faisant usage de son pouvoir de police générale, pour atteinte à la dignité de la personne humaine, l'affiche de Madame DIBUNDU-BORDREUIL, candidate au premier tour de scrutin, au motif que cette affiche contenait, à l'appui d'un slogan contre l'interruption volontaire de grossesse, une photographie de l'intéressée montrant la représentation d'un foetus d'une dizaine de semaines et, d'autre part, pour les mêmes motifs, déposé une plainte devant le procureur de la République sur le fondement de l'article 227-24 du code pénal ; que la requérante soutient que cet arrêté et cette plainte ont affecté la liberté et la sincérité du scrutin ;
6. Considérant que, pour blâmable qu'ait été l'interdiction d'apposer les affiches de Madame DIBUNDU-BORDREUIL sur les emplacements réservés à cet effet, il ne résulte pas de l'instruction que les interventions du maire de Noisy-le-Sec dans le déroulement de la campagne électorale précédant le premier tour, non plus que l'écho que leur a donné la presse, aient eu pour effet de priver la requérante de la possibilité de faire connaître auprès des électeurs les thèmes sur lesquels était fondée sa campagne ; que, par suite, eu égard à l'écart substantiel des voix, ces interventions de l'autorité municipale sont restées sans incidence sur le résultat de l'élection ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par madame NEÏERTZ à la requête de Madame VINCENT, qu'aucun des griefs invoqués dans les requêtes susvisées n'est de nature à justifier l'annulation des opérations électorales contestées,
Décide :
Article premier :
La requête de Madame Georgia VINCENT est rejetée.
Article 2 :
La requête de Madame Myriam DIBUNDU-BORDREUIL est rejetée.
Article 3 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 14 octobre 1997, où siégeaient : MM. Roland DUMAS, Président, Georges ABADIE, Michel AMELLER, Jean CABANNES, Maurice FAURE, Yves GUÉNA, Alain LANCELOT, Mme Noëlle LENOIR et M. Jacques ROBERT.
Journal officiel du 17 octobre 1997, page 15110
Recueil, p. 166
ECLI : FR : CC : 1997 : 97.2155.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.1. PRINCIPES DU DROIT ÉLECTORAL
- 8.1.1. Droits et libertés de l'électeur
- 8.1.1.4. Liberté de l'électeur
8.1.1.4.1. Liberté de vote
Des fonctionnaires municipaux placés à l'entrée des bureaux de vote tenaient un double de la liste électorale afin de s'assurer, préalablement aux vérifications opérées par le bureau de vote, de l'inscription sur cette liste des personnes venant voter. Une telle pratique, quoique anormale, ne peut, dès lors qu'il n'est pas établi que la liste ainsi mise à la disposition des agents de la commune a été utilisée afin d'exercer des pressions sur les électeurs, être regardée comme ayant constitué une atteinte à la liberté de vote.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
- 8.3.3.1. Affiches
8.3.3.1.7. Contenu des affiches
Un maire a interdit, sur le fondement de son pouvoir de police générale, l'affiche d'une candidate pour atteinte à la dignité humaine. Pour blâmable qu'ait été une telle interdiction sur les panneaux électoraux, il n'est pas établi que cette intervention du maire dans le déroulement de la campagne électorale précédant le premier tour ait eu pour effet de priver la requérante de la possibilité de faire connaître auprès des électeurs les thèmes sur lesquels était fondée sa campagne. Eu égard à l'écart substantiel des voix, intervention sans incidence sur les résultats de l'élection.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
- 8.3.4.1. Nature des pressions, interventions, manœuvres
- 8.3.4.1.1. Interventions d'autorités officielles
8.3.4.1.1.6. Autres élus
Un maire a, d'une part, interdit, sur le fondement de son pouvoir de police générale, l'affiche d'une candidate, au motif que cette affiche contenait, à l'appui d'un slogan contre l'interruption volontaire de grossesse, une photo de l'intéressée montrant la représentation d'un fœtus d'une dizaine de semaines et, d'autre part, pour les mêmes motifs, déposé une plainte devant le procureur de la République. Pour blâmable qu'ait été l'interdiction de l'affiche de la candidate sur les panneaux électoraux, il n'est pas établi que les interventions du maire dans le déroulement de la campagne électorale, ainsi que la publicité qui en a été donnée dans la presse, aient eu pour effet de priver la requérante de la possibilité de faire connaître auprès des électeurs les thèmes sur lesquels était fondée sa campagne. Par suite, et eu égard, par ailleurs, à l'écart substantiel des voix, ces interventions de l'autorité municipale sont restées sans incidence sur les résultats de l'élection.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.6. Opérations électorales
- 8.3.6.4. Déroulement du scrutin
- 8.3.6.4.6. Mise à disposition des électeurs des bulletins et des enveloppes
8.3.6.4.6.1. Bulletins
Si, à la suite de la maladresse d'un électeur qui avait renversé dans le bureau de vote plusieurs piles de bulletins mis à la disposition des électeurs, les bulletins portant le nom de la requérante ont été, pendant quelques minutes, recouverts par des bulletins portant le nom de la candidate élue, cette circonstance n'a eu aucune incidence sur le déroulement des opérations de vote du premier tour.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.6. Opérations électorales
- 8.3.6.4. Déroulement du scrutin
- 8.3.6.4.12. Violences ou pressions lors du scrutin
8.3.6.4.12.3. Pressions sur les électeurs
Des fonctionnaires municipaux placés à l'entrée des bureaux de vote tenaient un double de la liste électorale afin de s'assurer, préalablement aux vérifications opérées par le bureau de vote, de l'inscription sur cette liste des personnes venant voter. Une telle pratique, quoique anormale, ne peut, dès lors qu'il n'est pas établi que la liste ainsi mise à la disposition des agents de la commune a été utilisée afin d'exercer des pressions sur les électeurs, être regardée comme ayant constitué une atteinte à la liberté de vote.