Décision

Décision n° 96-11 ELEC du 12 juillet 1996

Observations du Conseil constitutionnel relatives aux élections sénatoriales du 24 septembre 1995

Le Conseil constitutionnel,

Chargé en application de l'article 59 de la Constitution de statuer, en cas de contestation, sur la régularité de l'élection des sénateurs, est conduit consécutivement au contentieux des dernières élections sénatoriales à faire les observations suivantes :

Le contentieux procédant de treize requêtes qui a porté sur neuf circonscriptions électorales a mis en évidence des irrégularités d'une indéniable gravité concernant trois d'entre elles. Dans ces conditions, il semble opportun au Conseil constitutionnel qu'à l'occasion du prochain renouvellement triennal, l'accent soit porté par circulaire sur l'ensemble des obligations qu'implique l'observation du code électoral, notamment à l'intention des bureaux de vote en ce qui concerne la tenue des urnes, des listes électorales et le décompte des bulletins.

Par ailleurs, la modification des règles applicables lui paraît souhaitable à différents égards.

  1. En ce qui concerne le régime des inéligibilités

L'article L.O. 133 du code électoral figurant parmi les dispositions spéciales à l'élection des députés comporte une énumération de catégories de personnes qui ne peuvent être élues dans toute circonscription comprise dans le ressort dans lequel elles exercent ou dans lequel elles ont exercé leurs fonctions depuis moins de six mois. Or cette disposition est rendue applicable aux élections des sénateurs par l'article L.O. 296 du même code. Le Conseil constitutionnel souligne à cette occasion que cette liste devrait faire l'objet d'un réexamen par le législateur organique afin d'y apporter les précisions et les actualisations nécessaires en fonction des évolutions statutaires et fonctionnelles provoquées, notamment, par les mesures prises en matière de décentralisation et de déconcentration.

  1. En ce qui concerne les conditions du second tour

Les règles applicables aux conditions des déclarations de candidature pour le second tour dans les circonscriptions où fonctionne le scrutin majoritaire apparaissent imprécises et lacunaires.

L'article L. 305 du code électoral se borne à disposer que : « Toute candidature présentée entre le premier et le second tour de scrutin dans les départements où s'applique le scrutin majoritaire doit faire l'objet d'une déclaration conforme aux dispositions des articles L. 298 et L. 299. Cette candidature ne donne pas lieu à enregistrement. »
Il résulte de ces dispositions que les déclarations de candidature pour le premier tour de scrutin valent pour le second et qu'ainsi une déclaration de candidature n'est nécessaire que pour qui n'était pas candidat au premier tour.

Par ailleurs, en vertu de l'article R. 157 du même code, les commissions de propagande ont pour seule obligation, s'agissant du second tour de scrutin, de mettre en place un nombre de bulletins en blanc correspondant au nombre d'électeurs inscrits et au nombre de candidats en présence. L'article R. 153 prescrit pour sa part que les déclarations de candidature doivent être déposées à la préfecture avant l'heure fixée pour l'ouverture du scrutin et affichées dans la salle de vote avant le commencement des opérations.
Ainsi l'approvisionnement en bulletins imprimés pour le second tour est à la discrétion des candidats et aucune formalité n'est requise des candidats au premier tour s'agissant du retrait ou de la confirmation de leur candidature. Pour qu'aucune indétermination ne puisse affecter les conditions du vote, il paraît souhaitable de confier au bureau de vote prévu par l'article R. 163 du code électoral la responsabilité d'établir et de faire connaître par affichage la liste de l'ensemble des candidats. Ceux-ci devraient alors être tenus de confirmer explicitement, le cas échéant, leur candidature déjà déclarée et enregistrée pour le premier tour et, dans tous les cas, de fournir des bulletins imprimés à leur nom. Cette dernière exigence qui pouvait paraître naguère excessive ne soulève en effet plus de difficultés compte tenu des moyens modernes de reproduction en usage.
Ainsi, en pleine clarté, serait assurée l'égalité de tous les candidats en présence pour les opérations électorales décisives du second tour.

  1. En ce qui concerne les modalités de vote

L'article L. 316 du code électoral ne rend pas applicable aux élections sénatoriales l'article L. 62-1 du même code qui dispose, notamment, que le vote de chaque électeur doit être constaté par sa signature apposée à l'encre en face de son nom sur la liste d'émargement. Même s'agissant d'un collège électoral par nature restreint, il apparaît souhaitable que cette disposition de nature à garantir l'authenticité des listes d'émargement soit à l'avenir incluse parmi celles qui s'imposent pour le déroulement du vote aux élections sénatoriales.

Fait à Paris, le 12 juillet 1996.
Pour le président : M. Faure

Journal officiel du 26 juillet 1996, page 11321
Recueil, p. 163
ECLI : FR : CC : 1996 : 96.11.ELEC

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