Décision

Décision n° 93-1249 AN du 4 novembre 1993

A.N., Réunion (2ème circ.)
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

Vu la requête présentée par M. Jean-François Bosviel, demeurant à Saint-Denis (Réunion), déposée à la préfecture de la Réunion le 7 avril 1993 et enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 16 avril 1993, et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 21 et 28 mars 1993 dans la 2e circonscription de la Réunion pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu la requête complémentaire présentée par M. Bosviel, enregistrée comme ci-dessus le 24 mai 1993 ;

Vu les observations présentées par le ministre des départements et territoires d'outre-mer, enregistrées comme ci-dessus le 17 mai 1993 ;

Vu le mémoire en défense présenté par M. Paul Vergès, député, enregistré comme ci-dessus le 2 juin 1993 ;

Vu le mémoire en réplique présenté par M. Bosviel, enregistré comme ci-dessus le 21 juin 1993 ;

Vu le nouveau mémoire en défense présenté par M. Vergès, enregistré comme ci-dessus le 14 octobre 1993 ;

Vu le mémoire en duplique présenté par M. Bosviel, enregistré comme ci-dessus le 18 octobre 1993 ;

Vu le nouveau mémoire en défense présenté par M. Vergès, enregistré comme ci-dessus le 4 novembre 1993 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Vu l'article 59 de la Constitution ;

Vu l'ordonnance no 58-1067 du 7 novembre 1958 modifiée portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

1. Considérant, en premier lieu, que M. Bosviel soutient que M. Vergès, candidat élu dans la 2e circonscription de la Réunion, a irrégulièrement bénéficié du soutien de la station Radio-Freedom, laquelle aurait ainsi rompu l'égalité entre les candidats et méconnu, tant les dispositions régissant la communication audiovisuelle que celles du premier alinéa de l'article L. 52-1 du code électoral aux termes desquelles « pendant trois mois précédant le premier jour du mois d'une élection et jusqu'à la date du tour de scrutin où celle-ci est acquise, l'utilisation à des fins de propagande électorale de tout procédé de publicité commerciale par la voie de la presse ou par tout moyen de communication audiovisuelle est interdite »

2. Considérant qu'à l'appui de ce grief, M. Bosviel a produit la retranscription de plusieurs émissions, intitulées « Radio-doléances », que cette station avait consacrées à la campagne électorale ; que, pour certaines, ces émissions concernent des candidats présents dans d'autres circonscriptions de ce département, et notamment le dirigeant de cette station, lui-même candidat dans la 5e circonscription ; qu'il ne ressort pas de l'examen des documents produits par le requérant que cette station aurait diffusé des messages de soutien à l'ensemble des candidats du Parti communiste réunionnais, formation politique dont se réclame M. Vergès ; que si ce dernier a pris part à deux de ces émissions, les 13 et 19 mars 1993, ni ses propos ni ceux de ses interlocuteurs ne peuvent être regardés comme ayant été tenus en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 52-1 ; que, enfin, il n'est pas davantage établi que la diffusion de ces émissions aurait méconnu l'équilibre entre les différents candidats de la circonscription en cause, alors que M. Bosviel, qui déclare avoir refusé de participer à ces émissions, reconnaît ainsi avoir été mis à même de bénéficier d'un temps d'antenne sur cette station ;

3. Considérant que, si le requérant formule le même grief à l'encontre des émissions de la station Radio-Corail, il n'apporte aucune précision permettant d'en apprécier la pertinence ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que la publication d'une brochure émanant du conseil régional de la Réunion, dont M. Verges est vice-président, ne constitue pas un moyen de propagande électorale dès lors que ce document, d'ailleurs diffusé dès le mois d'octobre 1992, qui n'avait pas pour objet d'assurer la promotion publicitaire des réalisations, ni de la gestion de cette collectivité, se bornait à présenter l'adoption du plan de développement de cette dernière ;

5. Considérant, en troisième lieu, que l'information diffusée à l'occasion de la publication d'un livre intitulé D'une île au monde et dont le candidat élu est l'auteur n'a pas constitué, dans les circonstances de l'espèce, un instrument de propagande électorale méconnaissant les dispositions précitées de l'article L. 52-1 du code électoral ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que si le requérant soutient que la lettre publiée entre les deux tours par le quotidien Témoignages, et par laquelle le premier secrétaire du parti socialiste faisait connaître que sa formation apportait son soutien à M. Vergès, ne serait pas authentique, il ne l'établit pas ; qu'en tout état de cause cette lettre ne saurait, eu égard à son contenu et à sa portée, être regardée, contrairement à ce que soutient M. Bosviel, comme une manoeuvre susceptible d'avoir induit en erreur les électeurs ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que M. Bosviel estime que la sincérité du srutin a été affectée par la diffusion d'une information erronée aux termes de laquelle son élection se traduirait par la remise en cause des avantages existant dans ce département en matière de gratuité des cantines scolaires ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la polémique en cause est née de la publication, au début de la campagne, du programme du Rassemblement pour la République, formation dont se réclame M. Bosviel, et qui préconisait une participation des familles au coût des repas pris au sein de ces cantines ; qu'en outre le requérant ne soutient pas avoir été privé de la possibilité de procéder aux mises au point nécessaires, alors qu'il ressort des pièces du dossier que la presse avait fait une large place au débat relatif au financement des cantines ;

8. Considérant, enfin, que si, comme le fait valoir le requérant, un affichage irrégulier a eu lieu au profit de M. Vergès, des abus de même nature ont été commis par les partisans de M. Bosviel ; que, dans ces conditions, les irrégularités invoquées n'ont pu avoir d'incidence sur le résultat du scrutin ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la requête de M. Bosviel doit être rejetée,

Décide :
Article premier :
La requête de M. Jean-François Bosviel est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 4 novembre 1993, où siégeaient : MM. Robert BADINTER, président, Robert FABRE, Marcel RUDLOFF, Georges ABADIE, Jean CABANNES, Jacques LATSCHA, Jacques ROBERT et Mme Noëlle LENOIR.
Le président,
Robert BADINTER

Journal officiel du 14 novembre 1993, page 15743
Recueil, p. 422
ECLI : FR : CC : 1993 : 93.1249.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.3.3.1. Affiches
  • 8.3.3.1.5. Date et lieu d'apposition des affiches

Affichage illégal de la part des deux candidats arrivés en tête, sans incidence en l'espèce.

(93-1249 AN, 04 novembre 1993, cons. 8, Journal officiel du 14 novembre 1993, page 15743)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.3.3.13. Radio-télévision

Le requérant fait grief au candidat proclamé élu d'avoir bénéficié du soutien d'une radio locale et produit, à l'appui de ce grief, la retranscription de plusieurs émissions de cette radio, consacrées à la campagne électorale. Pour certaines, ces émissions concernent des candidats présents dans d'autres circonscriptions de ce département, et notamment le dirigeant de cette station, lui-même candidat dans une autre circonscription. Il ne ressort pas de l'examen des documents produits par le requérant que cette station aurait diffusé des messages de soutien à l'ensemble des candidats du Parti communiste réunionnais, formation politique dont se réclame le candidat élu. Ce dernier a pris part à deux de ces émissions, les 13 et 19 mars 1993, mais ni ses propos, ni ceux de ses interlocuteurs ne peuvent être regardés comme ayant été tenus en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral. Il n'est pas établi que la diffusion de ces émissions aurait méconnu l'équilibre entre les différents candidats de la circonscription en cause, alors que le requérant, qui déclare avoir refusé de participer à ces émissions, reconnaît ainsi avoir été mis à même de bénéficier d'un temps d'antenne sur cette station.

(93-1249 AN, 04 novembre 1993, cons. 2, Journal officiel du 14 novembre 1993, page 15743)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.2. Manœuvres ou interventions relatives à la situation politique des candidats
  • 8.3.4.2.3. Soutiens

Le requérant soutient que la lettre publiée entre les deux tours par le quotidien " Témoignages ", et par laquelle le premier secrétaire du Parti socialiste faisait connaître que sa formation apportait son soutien au candidat élu, ne serait pas authentique mais il ne l'établit pas. En tout état de cause, cette lettre ne saurait, eu égard à son contenu et à sa portée, être regardée comme une manœuvre susceptible d'avoir induit en erreur les électeurs.

(93-1249 AN, 04 novembre 1993, cons. 6, Journal officiel du 14 novembre 1993, page 15743)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.5. Financement
  • 8.3.5.5. Dépenses produites au compte de campagne
  • 8.3.5.5.3. Dépenses n'ayant pas à figurer dans le compte
  • 8.3.5.5.3.2. Absence de campagne de promotion publicitaire

Le requérant fait grief au candidat proclamé élu d'avoir bénéficié du soutien d'une radio locale et produit, à l'appui de ce grief la retranscription de plusieurs émissions de cette radio, consacrées à la campagne électorale. Il ne ressort pas de l'examen des documents produits par le requérant que cette station aurait diffusé des messages de soutien à l'ensemble des candidats du parti dont se réclame le candidat élu. Ce dernier a pris part à deux de ces émissions, mais ni ses propos, ni ceux de ses interlocuteurs ne peuvent être regardés comme ayant été tenus en méconnaissance des dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral.

(93-1249 AN, 04 novembre 1993, cons. 2, Journal officiel du 14 novembre 1993, page 15743)

L'information diffusée à l'occasion de la publication d'un livre intitulé " d'une île au monde " et dont le candidat élu est l'auteur n'a pas constitué, dans les circonstances de l'espèce, un instrument de propagande électorale méconnaissant les dispositions de l'article L. 52-1 du code électoral.

(93-1249 AN, 04 novembre 1993, cons. 5, Journal officiel du 14 novembre 1993, page 15743)
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