Décision

Décision n° 88-1086 AN du 23 novembre 1988

A.N., Jura (3ème circ.)
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

Vu la requête présentée par M. Gilbert Barbier, demeurant à Dole, Jura, enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel le 22 juin 1988 et tendant à l'annulation des opérations électorales auxquelles il a été procédé les 5 et 12 juin 1988 dans la 3e circonscription du Jura pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu les observations en défense présentées par M. Jean-Pierre Santa Cruz, député, enregistrées comme ci-dessus le 7 juillet 1988 ;

Vu le mémoire en réplique présenté par M. Gilbert Barbier, et la réponse à ce mémoire, présentée par M. Jean-Pierre Santa Cruz, enregistrés comme ci-dessus les 28 juillet et 15 septembre 1988 ;

Vu les observations présentées par le ministre de l'intérieur et la réponse à ces observations, présentée par M. Gilbert Barbier, enregistrées comme ci-dessus les 9 août et 7 septembre 1988 ;

Vu le mémoire en réplique complémentaire présenté par M. Gilbert Barbier et la réponse à ce mémoire, présentée par M. Jean-Pierre Santa Cruz, enregistrés comme ci-dessus les 7 et 23 septembre 1988 ;

Vu le mémoire présenté par M. Gilbert Barbier et les nouvelles observations en défense présentées par M. Jean-Pierre Santa Cruz, enregistrés comme ci-dessus les 29 septembre et 21 octobre 1988 ;

Vu l'article 59 de la Constitution ;

Vu l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse modifiée notamment par la loi n° 82-506 du 15 juin 1982 ;

Vu le code électoral ;

Vu le règlement applicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour le contentieux de l'élection des députés et des sénateurs ;

Le rapporteur ayant été entendu ;

En ce qui concerne la diffusion d'un tract :

1. Considérant que dans la nuit du 10 au 11 juin 1988 un tract reproduisant, à partir d'un montage, un article paru dans un hebdomadaire national au mois de janvier 1988 et comportant des imputations diffamatoires de nature à jeter le discrédit sur M. Barbier a été affiché et diffusé ;

2. Considérant toutefois que le tract litigieux, dont la diffusion est restée limitée, reproduisait des allégations déjà publiées plusieurs mois auparavant ; qu'il était même identique à un tract affiché à Dole au début de l'année ; que M. Barbier avait été conduit à saisir le juge pénal d'une action en diffamation qui a entraîné l'intervention, le 27 mai 1988, d'un jugement de condamnation du tribunal de grande instance de Paris, statuant en matière correctionnelle, et qui a été frappé d'appel ; qu'ainsi, et quel que soit l'auteur du tract, sa diffusion la veille du scrutin, pour répréhensible qu'elle soit, n'a pu exercer d'influence déterminante sur le vote des électeurs ;

En ce qui concerne l'apposition d'inscriptions obscènes et malveillantes :

3. Considérant que, si des inscriptions obscènes et malveillantes à l'égard de M. Barbier ont été apposées dans la nuit du 10 au 11 juin 1988 sur trois bâtiments de la ville de Dole, ces actes de vandalisme isolés n'ont pu davantage influer sur l'issue de l'élection ;

En ce qui concerne les modalités d'intervention d'un comité de soutien :

4. Considérant que la mention sur la liste des membres du comité de soutien de M. Santa Cruz des qualités de président de l'office municipal des sports de Dole de l'un de ses membres et de président d'un club de football d'un autre membre n'ont pu induire en erreur les électeurs sur le caractère personnel de l'engagement politique et n'a pas constitué, en l'espèce, une pression sur l'électorat ;

En ce qui concerne l'application de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881 :

5. Considérant que les affirmations figurant dans le mémoire en défense de M. Santa Cruz ne présentent pas le caractère de discours injurieux, outrageant ou diffamatoire justifiant l'application des dispositions du quatrième alinéa de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, dans sa rédaction issue de la loi n° 82-506 du 15 juin 1982 ; qu'il en est de même de la production par M. Santa Cruz à l'appui de sa défense d'un exemplaire de « La Lettre radicale de Dole et du Jura » dont il n'a pas entendu s'approprier les termes ; qu'en revanche, il y a lieu, en application du cinquième alinéa de l'article 41 de la loi précitée, de réserver au profit de M. Barbier l'exercice éventuel de l'action en diffamation contre les responsables de cette publication ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'ordonner une nouvelle mesure d'instruction, que la requête de M. Barbier doit être rejetée,

Décide :
Article premier :
La requête susvisée de M. Gilbert Barbier est rejetée.
Article 2 :
Il y a lieu de réserver au profit de M. Barbier l'exercice éventuel de l'action en diffamation à l'encontre des responsables de « La Lettre radicale de Dole et du Jura » .
Article 3 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 23 novembre 1988, où siégeaient : MM. Robert BADINTER, président, Louis JOXE, Robert LECOURT, Daniel MAYER, Léon JOZEAU-MARIGNÉ, Georges VEDEL, Robert FABRE, Francis MOLLET-VIÉVILLE, Jacques LATSCHA.

Journal officiel du 25 novembre 1988, page 14690
Recueil, p. 207
ECLI : FR : CC : 1988 : 88.1086.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.3.3.16. Tracts
  • 8.3.3.16.3. Irrégularités sans influence sur les résultats de l'élection
  • 8.3.3.16.3.3. Contenu et portée des tracts

Diffusion dans la nuit du 10 au 11 juin 1988 d'un tract reproduisant, à partir d'un montage, un article paru dans un hebdomadaire national au mois de janvier 1988 et comportant des imputations diffamatoires. Toutefois, le tract litigieux, dont la diffusion est restée limitée, reproduisait des allégations déjà publiées plusieurs mois auparavant. Il était identique à un tract affiché à D. au début de l'année et une action en diffamation avait entraîné un jugement de condamnation frappé d'appel. Ainsi, et quel que soit l'auteur du tract, sa diffusion la veille du scrutin, pour répréhensible qu'elle soit, n'a pu exercer d'influence déterminante sur le vote des électeurs.

(88-1086 AN, 23 novembre 1988, cons. 1, 2, Journal officiel du 25 novembre 1988, page 14690)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.3.3.17. Irrégularités diverses de propagande

Si des inscriptions obscènes et malveillantes à l'égard d'un candidat ont été apposées la veille du scrutin sur trois bâtiments de la ville de D., ces actes de vandalisme isolés, n'ont pu influer sur l'issue de l'élection.

(88-1086 AN, 23 novembre 1988, cons. 3, Journal officiel du 25 novembre 1988, page 14690)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.1. Nature des pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.1.3. Interventions d'organismes divers
  • 8.3.4.1.3.4. Associations

La mention sur la liste des membres du comité de soutien d'un candidat des qualités de président de l'office municipal des sports d'un de ses membres et de président d'un club de football d'un autre membre n'ont pu induire en erreur les électeurs sur le caractère personnel de l'engagement et n'a pas constitué, en l'espèce, une pression sur l'électorat.

(88-1086 AN, 23 novembre 1988, cons. 4, Journal officiel du 25 novembre 1988, page 14690)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.4. Campagne électorale - Pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.1. Nature des pressions, interventions, manœuvres
  • 8.3.4.1.8. Pressions par intimidation ou corruption
  • 8.3.4.1.8.4. Réserve d'action en diffamation

Les affirmations figurant dans le mémoire en défense ne présentent pas le caractère de discours injurieux, outrageant ou diffamatoire justifiant l'application des dispositions du quatrième alinéa de l'article 41 de la loi modifiée du 29 juillet 1881. Il en va de même de la production à l'appui de la défense d'un exemplaire d'une publication dont le défendeur n'a pas entendu s'approprier les termes. En revanche, il y a lieu, en application du cinquième alinéa de l'article 41 de la loi précitée, de réserver au profit du requérant l'exercice éventuel de l'action en diffamation contre les responsables de cette publication.

(88-1086 AN, 23 novembre 1988, cons. 5, Journal officiel du 25 novembre 1988, page 14690)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.10. Contentieux - Instruction
  • 8.3.10.3. Incidents de procédure, demandes particulières, non-lieu à statuer
  • 8.3.10.3.6. Réserve d'action en diffamation

Les affirmations figurant dans le mémoire en défense ne présentent pas le caractère de discours injurieux, outrageant ou diffamatoire justifiant l'application des dispositions du quatrième alinéa de l'article 41 de la loi modifiée du 29 juillet 1881. Il en va de même de la production à l'appui de la défense d'un exemplaire d'une publication dont le défendeur n'a pas entendu s'approprier les termes. En revanche, il y a lieu, en application du cinquième alinéa de l'article 41 de la loi précitée de réserver au profit du requérant l'exercice éventuel de l'action en diffamation contre les responsables de cette publication.

(88-1086 AN, 23 novembre 1988, cons. 5, Journal officiel du 25 novembre 1988, page 14690)
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