Décision n° 83-164 DC du 29 décembre 1983
Le Conseil constitutionnel a été saisi, les 20 et 21 décembre 1983, par MM Jean Arthuis, Alphonse Arzel, Jean-Pierre Blanc, André Bohl, Roger Boileau, Charles Bosson, Pierre Brantus, Louis Caiveau, Jean Cauchon, Pierre Ceccaldi-Pavard, Adolphe Chauvin, Auguste Chupin, Jean Cluzel, Jean Colin, Jean Faure, Jean Francou, Jacques Genton, Daniel Hoeffel, Jean Huchon, Louis Jung, Bernard Laurent, Edouard Le Jeune, Bernard Lemarié, Georges Lombard, Jean Machet, Jean Madelain, Guy Malé, Louis Mercier, Daniel Millaud, Claude Mont, Jacques Mossion, Dominique Pado, André Rabineau, Jean-Marie Rausch, Paul Séramy, Michel Souplet, René Tinant, Pierre Vallon, Albert Vecten, Frédéric Wirth, Marcel Daunay, Alfred Gérin, Claude Huriet, Yves Le Cozannet, Amédée Bouquerel, Edmond Valcin, Maurice Schumann, Jean Chamant, Charles Descours, Claude Prouvoyeur, Arthur Moulin, Jean Natali, André Voisin, Paul d'Ornano, Paul Masson, Roger Romani, Sosefo-Makapé Papilio, Charles de Cuttoli, Raymond Bourgine, Michel Sordel, Jean Puech, Serge Mathieu, Guy de La Verpillière. Louis de La Forest, Jean Bénard Mousseaux, Jean-Pierre Tizon, Jacques Ménard, Marcel Lucotte, Richard Pouille, Michel Crucis, Pierre-Christian Taittinger, Jean Boyer, Jean-Paul Bataille, Albert Voilquin, Henri Elby, Philippe de Bourgoing, Bernard Barbier, Roland Ruet, Michel Miroudot, Jean Delaneau, Pierre Louvot, Louis Boyer, Pierre Croze, Jean-Pierre Fourcade, René Travert, Louis Lazuech, Hubert Martin, Jacques Thyraud, Roland du Luart, Michel Alloncle, Jean Amelin, Hubert d'Andigné, Henri Belcour, Paul Bénard, Jacques Braconnier, Raymond Brun, Pierre Carous, Auguste Cazalet, Jacques Chaumont, Michel Chauty, Jean Chérioux, François Collet, Henri Collette, Luc Dejoie, Jacques Delong, Franz Duboscq, Marcel Fortier, Philippe François, Michel Giraud, Adrien Gouteyron, Bernard-Charles Hugo, Roger Husson, Paul Kauss, Christian de la Malène, Jean-François Le Grand, Maurice Lombard, Paul Malassagne, Michel-Maurice Bokanowski, Geoffroy de Montalembert, Lucien Neuwirth, Charles Pasqua, Christian Poncelet, Henri Fortier, Alain Pluchet, Josselin de Rohan, Michel Ruffin, Louis Souvet, Dick Ukeiwe, Jacques Valade, Etienne Dailly, sénateurs,
et le 22 décembre 1983, par MM Jean-Claude Gaudin, Jean-Marie Caro, Germain Gengenwin, Francisque Perrut, Jean Rigaud, Marcel Bigeard, Paul Pernin, Albert Brochard, Philippe Mestre, Raymond Barre, Gilbert Gantier, Charles Deprez, Jean Brocard, Jacques Blanc, Jacques Barrot, Roger Lestas, Joseph-Henri Maujoüan du Gasset, Francis Geng, Georges Mesmin, Jean-Paul Fuchs, Charles Fèvre, Pierre Méhaignerie, Alain Madelin, Pascal Clément, Victor Sablé, Adrien Zeller, Claude Wolff, Jean Briane, Loïc Bouvard, Edmond Alphandery, Charles Million, Jean-Pierre Soisson, Claude Labbé, Jacques Chirac, Bernard Pons, Philippe Séguin, Serge Charles, René La Combe, Régis Perbet, Alain Peyrefitte, Jean-Paul de Rocca Serra, Michel Péricard, Pierre Bachelet, Gérard Chasseguet, Roger Corrèze, Mme Nicole de Hauteclocque, MM Didier Julia, Roland Nungesser, Camille Petit, Yves Lancien, Pierre Messmer, Daniel Goulet, Pierre-Charles Krieg, Rolland Vuillaume, Emmanuel Aubert, Marc Lauriol, Robert-André Vivien, Hyacinthe Santoni, Pierre Mauger, Pierre Bas, Jacques Toubon, Jacques Marette, Jean Foyer, Olivier Guichard, Gabriel Kaspereit, Maurice Couve de Murville, Georges Gorse, Jean de Lipkowski, Pierre Godefroy, Jean-Paul Charié, Jacques Chaban-Delmas, Jacques Godfrain, Etienne Pinte, René André, Robert Galley, Pierre-Bernard Cousté, Claude-Gérard Marcus, Michel Debré, députés, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, de la conformité à celle-ci de la loi de finances pour 1984 ;
Le Conseil constitutionnel,
Vu la Constitution ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;
Vu l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances ;
Le rapporteur ayant été entendu ;
Sur l'article 14-I relatif à la taxe foncière sur les propriétés bâties :
1. Considérant que l'article 14-I de la loi de finances ramène à quinze ans à compter de 1984 la durée des exonérations de taxe foncière sur les propriétés bâties prévues à l'article 1385 du code général des impôts, sauf en ce qui concerne certaines catégories de logements sociaux à usage locatif ;
2. Considérant que les députés auteurs de la saisine soutiennent que ces dispositions méconnaissent « le principe de la continuité de l'État » en ce qu'elles remettent en cause une exonération alors que « la durée déterminée de l'avantage fiscal octroyé lui donne le caractère d'un engagement contractuel » ; qu'ils soutiennent, en outre, qu'elles méconnaissent le principe d'égalité dès lors que la durée des exonérations aura été différente selon la date de construction des immeubles.
3. Considérant, d'une part, qu'aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle n'interdit à la loi de revenir sur une exonération fiscale acquise sous l'empire d'une loi antérieure ou d'en réduire la durée ; que, d'autre part, le principe d'égalité ne fait pas obstacle à ce que la loi soumette à des règles identiques des situations qui ne diffèrent qu'en ce qu'elles ont été régies par des législations antérieures pendant une durée plus ou moins longue ;
Sur l'article 19-VI-1 relatif à l'impôt sur les grandes fortunes :
4. Considérant que l'article 19-VI-1 de la loi de finances pour 1984 exclut de l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes « les biens professionnels définis aux articles 885 N, 885 O, 885 P et 885 Q » du code général des impôts ; qu'en vertu de l'article 885 O du code général des impôts sont des biens professionnels, notamment « les parts d'une société à responsabilité limitée détenues par un gérant minoritaire si elles représentent 25 p 100 du capital de la société » ainsi que « les actions de sociétés lorsque leur propriétaire possède plus de 25 p 100 du capital de la société et y exerce effectivement des fonctions de direction, de gestion ou d'administration » à la condition que les propriétaires de ces parts ou actions « exercent leurs fonctions professionnelles dans la société à titre principal ».
5. Considérant que les députés et certains sénateurs auteurs de la saisine soutiennent que ces dispositions sont contraires au principe d'égalité exprimé par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en son article 6 et, plus spécialement en ce qui concerne la fiscalité, en son article 13 qui dispose que la contribution aux charges publiques« doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ; qu'en effet, selon eux : « la nécessaire différence de situation n'existe pas et se trouve même inversée (seuls les dirigeants et gérants minoritaires petits porteurs sont assujettis à l'impôt sur les grandes fortunes), ensuite et surtout, la règle posée est incompatible avec la finalité de toute loi de finances telle que posée par l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen » ;
6. Considérant que l'article 19 de la loi de finances pour 1984 dispose que les biens nécessaires à l'exercice de certaines professions par leur propriétaire sont des « biens professionnels » qui n'entrent pas dans le calcul de l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes ; qu'il considère comme « biens professionnels » les parts ou actions d'une société à la condition qu'elles représentent 25 p 100 au moins du capital de la société où leur propriétaire exerce effectivement des fonctions de gestion, d'administration ou de direction qui constituent son activité professionnelle principale ;
7. Considérant qu'il appartient au législateur de décider si les biens nécessaires à l'exercice d'une profession doivent ou non être pris en compte pour l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes ;
8. Considérant que les parts sociales ou actions, par le pouvoir qu'elles confèrent à leur propriétaire dans la société où il jouit de l'influence liée à une fonction de gestion de direction ou d'administration donnent à celui-ci une maîtrise telle de son instrument de travail qu'elles peuvent être considérées comme des biens professionnels dès lors qu'elles représentent une part substantielle du capital lors des votes sociaux ;
9. Considérant que la fixation au quart du capital social du seuil à partir duquel les parts ou actions ont, dans les conditions définies par l'article 19, la nature de biens professionnels ne procède pas d'une appréciation manifestement erronée ;
10. Considérant que pour poser les règles d'établissement de l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes, le législateur a fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en cette matière ; que, dès lors, cet impôt est établi d'une façon régulière au regard des règles et principes de valeur constitutionnelle, et notamment de la prise en compte nécessaire des facultés contributives des citoyens ;
Sur l'article 42 et l'état A relatifs à la taxe intérieure sur les produits pétroliers :
11. Considérant que les députés auteurs de la saisine soutiennent que l'ordonnance du 18 mai 1983, qui a modifié le tarif de la taxe intérieure sur les produits pétroliers tel qu'il avait été fixé par la loi de finances pour 1983, méconnaît l'avant-dernier alinéa de l'article 2 de l'ordonnance 59-2 du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances, en vertu duquel seules les lois de finances dites rectificatives peuvent, en cours d'année, modifier les dispositions de la loi de finances de l'année ; que, selon eux, l'article 42 de la loi de finances pour 1984 et l'état A qui y est annexé qui, pour évaluer les recettes de l'État, prennent en compte les conséquences financières de l'ordonnance du 18 mai 1983 l'ont implicitement validée et sont ainsi entachés de l'inconstitutionnalité qui affecte cette ordonnance ;
12. Considérant que l'article 42 et l'état A se bornent, pour évaluer les ressources de l'État, à traduire l'incidence des dispositions, notamment d'ordre fiscal, actuellement en vigueur, que les éléments contenus dans l'annexe « Voies et moyens » de la loi de finances concernant ces évaluations n'ont pas la nature de dispositions ayant pour objet d'édicter ou de modifier des règles relatives aux impositions ; que l'inclusion dans cet état de l'évaluation du produit attendu pour 1984 de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, telle qu'elle résulte de l'ordonnance du 18 mai 1983, n'est qu'un élément de sincérité de cet article et de cet état ;
13. Considérant que les dispositions critiquées ne constituent ni une validation ni une ratification de l'ordonnance du 18 mai 1983 ; qu'ainsi le moyen manque en fait ;
Sur l'article 44 et les annexes au budget de l'éducation nationale :
14. Considérant que, dans l'annexe « Services votés et mesures nouvelles » de l'éducation nationale qui constitue le développement pour ce ministère de l'état B auquel renvoie l'article 44 de la loi de finances, figurent deux chapitres nouveaux, n° 31-60 et 31-62 ; que leur intitulé est pour le chapitre 31-60 « Personnels enseignants précédemment rémunérés sur le chapitre 43-01. - Rémunérations principales » et pour le chapitre 31-62 « Personnels enseignants précédemment rémunérés sur le chapitre 43-01. - Heures supplémentaires d'enseignement » ; que ces chapitres nouveaux ne comportent aucune évaluation de crédits mais portent simplement la mention Mémoire ; qu'il ressort des discussions au Parlement qu'ils sont destinés à rémunérer, dans la limite de quinze mille, des agents exerçant actuellement une activité d'enseignement dans des établissements privés sous contrat pour le cas où ils seraient titularisés ;
15. Considérant que certains sénateurs auteurs de la saisine font valoir que l'inscription de ces deux chapitres est contraire aux règles de la procédure budgétaire et porte atteinte au droit de contrôle du Parlement sur la gestion des finances publiques ; qu'elle permettrait la création de postes de fonctionnaire par la voie réglementaire ou bien ne saurait avoir d'effet avant l'entrée en vigueur d'une loi de finances ultérieure ; qu'ils demandent que la création de ces deux chapitres soit déclarée contraire à la Constitution et à l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances ;
16. Considérant que les députés auteurs de la saisine font valoir que la création de ces deux chapitres ne saurait constituer une création de postes ; que, de plus, elle ne pourrait avoir d'effet sans que soient méconnues les dispositions des articles 1er, 14, 32 et 43 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances ; qu'en effet, en vertu du cinquième alinéa de l'article 1er de cette ordonnance, les transformations et créations d'emplois ne peuvent résulter que de dispositions prévues par une loi de finances ; que, s'agissant d'une mesure nouvelle, il y aurait eu lieu, par application des articles 32 et 43 de l'ordonnance, d'en préciser le coût et les modalités ; qu'en outre, en l'absence d'emplois créés, ces chapitres ne sauraient être régulièrement dotés par transferts ou virements de crédits ; qu'ainsi qu'il a été admis par le Gouvernement devant le Sénat, les chapitres 31-60 et 31-62 ne sauraient être d'aucune utilité avant l'intervention d'une nouvelle loi de finances et que, par suite, il convient d'annuler l'inscription de ces chapitres dans les annexes de l'éducation nationale et, par voie de conséquence, l'article 44 relatif aux mesures nouvelles concernant les dépenses ordinaires des services civils, l'article 42 relatif à l'équilibre général du budget et l'ensemble de la loi de finances ;
17. Considérant qu'aux termes du cinquième alinéa de l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances « les créations et transformations d'emplois ne peuvent résulter que de dispositions prévues par une loi de finances » ; qu'aux termes de l'article 32 de cette ordonnance « le projet de loi de finances de l'année est accompagné d'annexes explicatives faisant connaître notamment : 1 ° par chapitre les mesures nouvelles qui justifient les modifications proposées au montant antérieur des services votés et notamment les crédits afférents aux créations, suppressions et transformations d'emplois » ; qu'enfin le dernier alinéa de l'article 43 de l'ordonnance dispose : « les créations, suppressions et transformations d'emplois résultent des modifications de crédits correspondantes, dûment explicitées par les annexes » ;
18. Considérant qu'aucune disposition de la loi de finances ou de ses annexes ne mentionne la création des emplois envisagée dans le titre des chapitres 31-60 et 31-62, ni ne contient, d'ailleurs, aucune indication de nature à permettre d'en déterminer le nombre, la nature et les caractéristiques ; que, dans ces conditions, l'inscription dans une annexe de la loi de finances de ces deux chapitres dotés pour mémoire ne saurait tenir lieu d'une création d'emplois, laquelle ne pourrait résulter que de dispositions expresses d'une loi de finances ;
19. Considérant que, si les transferts ou virements de crédits en cours d'année nécessitent l'existence préalable des chapitres entre lesquels ils sont opérés, la seule création des chapitres 31-60 et 31-62 ne suffit pas à rendre leur dotation possible par de telles procédures ; qu'en effet, si un prélèvement de crédits était opéré sur le chapitre 43-01 auquel il est fait renvoi par l'intitulé des chapitres contestés, un transfert modifierait la nature de la dépense et un virement devrait intervenir entre deux titres différents, c'est-à-dire que, dans les deux cas, les dispositions de l'article 14 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 seraient méconnues ; que ces chapitres ne pourraient pas davantage être dotés par voie de transformation d'emplois selon la procédure prévue au cinquième alinéa de l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959 qui ne saurait permettre d'affecter à la rémunération d'emplois publics des crédits de subvention ;
20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la création des chapitres 31-60 et 31-62 ne saurait avoir aucune portée juridique ou financière sans l'intervention d'une nouvelle loi de finances ; que, si le caractère inopérant d'une disposition d'une loi ordinaire empêche qu'elle puisse être déclarée contraire à la Constitution, l'article 1er de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 définit limitativement la nature des dispositions que peut contenir une loi de finances et qu'ainsi une indication de nomenclature budgétaire se bornant à énoncer une intention d'action future ne saurait trouver place dans une loi de finances ; que, dès lors, il y a lieu de déclarer que la création, à l'annexe « Services votés et mesures nouvelles » de l'éducation nationale, des chapitres 31-60 et 31-62 n'est pas conforme à la Constitution ;
21. Considérant que l'inscription de ces chapitres non dotés, n'ayant aucune incidence sur les crédits ouverts par l'article 44 ou sur l'équilibre des ressources et des charges fixé par l'article 42, est séparable de toutes les autres dispositions de la loi de finances pour 1984 ;
Sur l'article 82 relatif à l'imposition des bénéfices agricoles :
22. Considérant que les députés auteurs de la saisine soutiennent que l'article 82 de la loi de finances pour 1984, qui abaisse pour les seuls exploitants agricoles la limite des recettes au-dessous de laquelle l'impôt sur les bénéfices est établi d'après le régime du forfait, institue à l'encontre de ces exploitants une discrimination en ce qui concerne l'imposition des plus-values professionnelles ; qu'ils rappellent que, en vertu de l'article 151 septies du code général des impôts, les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité agricole, artisanale, commerciale ou libérale par des contribuables dont les recettes n'excèdent pas la limite du forfait sont exonérées de l'imposition sur les plus-values ; que, par suite, la limite de l'application du forfait n'étant abaissée que pour les exploitants agricoles, ceux-ci se verront soumis à l'imposition sur les plus-values alors que, à recettes égales, d'autres catégories et notamment les commerçants y échapperont ; qu'ainsi le principe d'égalité serait méconnu à l'encontre des exploitants agricoles ;
23. Considérant que le principe d'égalité n'interdit pas au législateur de tenir compte de la nature particulière de l'activité des diverses catégories de travailleurs indépendants pour édicter les règles fiscales qui leur sont applicables ; qu'ainsi peuvent différer selon les catégories professionnelles les règles relatives au forfait ; qu'il en est de même des règles relatives au régime fiscal des plus-values professionnelles ; que dans ces conditions, l'article 82 de la loi de finances pour 1984, qui se borne à aménager le régime fiscal applicable à une catégorie de contribuables se trouvant tous dans la même situation, n'est pas contraire au principe de l'égalité devant l'impôt ;
Sur l'article 89 relatif à la recherche d'infractions en matière d'impôts sur le revenu et de taxes sur le chiffre d'affaires :
24. Considérant que l'article 89 permet à certains agents de l'administration des impôts spécialement habilités à cet effet de procéder, assistés d'un officier de police judiciaire, à des investigations comportant des perquisitions et des saisies pour la recherche des infractions en matière d'impôts directs et de taxes sur le chiffre d'affaires, à la condition d'y être autorisés par ordonnance du président du tribunal de grande instance ou du juge d'instruction qu'il a désigné pour le suppléer ; que ces opérations doivent être effectuées en présence de l'occupant des lieux ou du représentant qu'il aura été invité à désigner par l'officier de police judiciaire ou, à défaut, de deux témoins requis par ce dernier en dehors des personnes relevant de son autorité ou de celle de l'administration fiscale ; que ces témoins doivent signer le procès-verbal de saisie ; que la visite d'un lieu servant exclusivement à l'habitation doit faire l'objet d'une autorisation spéciale du juge ;
25. Considérant que, selon les députés et certains sénateurs auteurs de la saisine, l'article 89 est rédigé de façon imprécise et générale en ce qui concerne la nature des infractions poursuivies et les pouvoirs qu'il confère aux agents de l'administration des impôts ; qu'en outre, il laisse les perquisitions qu'il prévoit à la discrétion de fonctionnaires qui peuvent y procéder alors même qu'il n'existe aucun indice d'infraction ; qu'en conséquence ils estiment ces dispositions contraires à la liberté individuelle dont l'article 66 de la Constitution confie la garde à l'autorité judiciaire ;
26. Considérant que l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen proclame : « Pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses d'administration une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés » ;
27. Considérant qu'il découle nécessairement de ces dispositions ayant force constitutionnelle que l'exercice des libertés et droits individuels ne saurait en rien excuser la fraude fiscale ni en entraver la légitime répression ; qu'ainsi, dans leur principe, les dispositions de l'article 89 ne peuvent être critiquées ;
28. Considérant cependant que, si les nécessités de l'action fiscale peuvent exiger que des agents du fisc soient autorisés à opérer des investigations dans des lieux privés, de telles investigations ne peuvent être conduites que dans le respect de l'article 66 de la Constitution qui confie à l'autorité judiciaire la sauvegarde de la liberté individuelle sous tous ses aspects, et notamment celui de l'inviolabilité du domicile ; que l'intervention de l'autorité judiciaire doit être prévue pour conserver à celle-ci toute la responsabilité et tout le pouvoir de contrôle qui lui reviennent ;
29. Considérant que, quelles que soient les garanties dont les dispositions de l'article 89 entourent les opérations qu'elles visent, ces dispositions ne précisent pas l'acceptation du terme « infraction » qui peut être entendu en plusieurs sens et ne limitent donc pas clairement le domaine ouvert aux investigations en question ; qu'elles n'assignent pas de façon explicite au juge ayant le pouvoir d'autoriser les investigations des agents de l'administration la mission de vérifier de façon concrète le bien-fondé de la demande qui lui est soumise ; qu'elles passent sous silence les possibilités d'intervention et de contrôle de l'autorité judiciaire dans le déroulement des opérations autorisées ; qu'enfin elles n'interdisent pas une interprétation selon laquelle seules les visites effectuées dans des locaux servant exclusivement à l'habitation devraient être spécialement autorisées par le juge, de telle sorte que, a contrario, les visites opérées dans d'autres locaux pourraient donner lieu à des autorisations générales ;
30. Considérant qu'ainsi, pour faire pleinement droit de façon expresse tant aux exigences de la liberté individuelle et de l'inviolabilité du domicile qu'à celles de la lutte contre la fraude fiscale, les dispositions de l'article 89 auraient dû être assorties de prescriptions et de précisions interdisant toute interprétation ou toute pratique abusive et ne sauraient dès lors, en l'état, être déclarées conformes à la Constitution ;
Sur l'article 90 relatif au règlement de biens ou de services :
31. Considérant que l'article 90 de la loi de finances pose l'obligation pour les particuliers non commerçants d'effectuer tout règlement de biens ou services d'un montant supérieur à 10000 F soit par chèque répondant aux caractéristiques de barrement d'avance et de non-transmissibilité par voie d'endossement mentionnées à l'article L 96 du livre des procédures fiscales, soit par virement bancaire ou postal, soit par carte de paiement ou de crédit ; qu'il prévoit, toutefois, que les particuliers non commerçants n'ayant pas leur domicile fiscal en France peuvent continuer d'effectuer leurs paiements d'un montant supérieur à 10000 F en chèques de voyage ou en billets, après relevé par le vendeur du bien ou le prestataire de service de leur identité et domicile justifiés ;
32. Considérant que certains sénateurs auteurs de la saisine soutiennent que ces dispositions instituent en matière de paiement une discrimination arbitraire entre les particuliers non commerçants selon qu'ils ont ou n'ont pas leur domicile fiscal en France ;
33. Considérant que les dispositions critiquées ont pour objet de lutter contre la fraude fiscale ; qu'il n'est pas arbitraire d'établir, à cet égard, une distinction entre des personnes qui sont soumises à des régimes fiscaux ne comportant pas des modes de déclarations et de contrôle semblables ; que le régime fiscal applicable aux personnes n'ayant pas leur domicile fiscal en France diffère notamment sur ces points de celui applicable aux personnes ayant leur domicile fiscal en France ; que, dès lors, les dispositions contestées ne méconnaissent pas le principe d'égalité ;
Sur l'article 93-III relatif au secret fiscal :
34. Considérant que l'article 93-III de la loi de finances dispose que les créanciers d'aliments dont la qualité est reconnue par une décision de justice peuvent consulter la liste détenue par la direction des services fiscaux dans le ressort de laquelle l'imposition du débiteur est établie ;
35. Considérant que, selon certains sénateurs auteurs de la saisine, ces dispositions méconnaissent la liberté individuelle qui implique le droit au secret de la vie privée, notamment en matière fiscale, en ce qu'elles instituent au profit de créanciers d'aliments une dérogation aux règles du secret fiscal dont elles ne définissent pas la portée avec précision ;
36. Considérant que le texte critiqué, qui permet à certaines personnes, dans des conditions clairement définies, de connaître des documents dont l'accès leur était interdit par la législation antérieure en matière de secret fiscal, ne méconnaît aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle ;
Sur l'article 108 relatif à la modification d'une taxe instituée par la loi de finances pour 1983 :
37. Considérant que les députés auteurs de la saisine reprochent aux dispositions de l'article 108 de la loi de finances pour 1984, qui rendent applicable au 1er janvier 1983 la modification apportée par l'article 107 à une disposition contenue dans la loi de finances pour 1983, de méconnaître l'alinéa de l'article 2 de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 relative aux lois de finances aux termes duquel : « seules les lois de finances, dites rectificatives, peuvent, en cours d'année, modifier les dispositions de la loi de finances de l'année » ;
38. Considérant que l'article 1er de l'ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959 a prévu qu'en plus des dispositions qui ne peuvent figurer que dans les lois de finances, celles-ci « peuvent également contenir » des dispositions relatives aux impositions ; qu'aux termes de l'article 34 de la Constitution, « la loi fixe les règles concernant l'assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toute nature » alors que « les lois de finances déterminent les ressources et les charges de l'État » ; qu'on ne saurait, dès lors, sans méconnaître les compétences définies par la Constitution, opposer à la modification de dispositions fiscales des règles qui ne sont pas obligatoires qu'au regard des matières réservées à la compétence exclusive des lois de finances ; qu'ainsi les pouvoirs du législateur ne sont pas limités par le fait qu'il inclut, comme il en a la faculté, de telles dispositions dans la loi de finances de l'année ;
39. Considérant que l'article 107, rendu applicable au 1er janvier 1983 par l'article 108 qui lui donne valeur interprétative, modifie les éléments de calcul d'une taxe et que de telles dispositions n'entrent pas dans le champ d'application de la règle organique invoquée par les auteurs de la saisine ;
Sur l'article 114 relatif à la publicité de l'impôt :
40. Considérant que l'article 114 de la loi de finances prévoit qu'une liste des personnes assujetties à l'impôt sur le revenu, à l'impôt sur les sociétés ou à l'impôt sur les grandes fortunes est dressée de manière à distinguer les trois impôts par commune ; qu'elle est complétée par l'indication des personnes non assujetties dans la commune à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés mais qui y possèdent une résidence ; que la liste concernant l'impôt sur le revenu comporte, outre la mention du montant de l'impôt et du nombre des parts du quotient familial, l'indication du revenu imposable et de l'avoir fiscal ; qu'enfin, pour l'impôt sur les grandes fortunes, la liste est complétée par l'indication de la valeur du patrimoine déclaré et du montant de l'impôt mis à la charge de chaque redevable ;
41. Considérant que, selon les députés auteurs de la saisine, ces dispositions auraient été adoptées, sur amendement d'origine parlementaire, contrairement aux règles de recevabilité posées par les articles 40 de la Constitution et 42 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 ; qu'elles méconnaissent l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen en ce qu'elles portent atteinte à la fois au « respect de la vie privée » et à la « sûreté des citoyens » ; qu'elles sont contraires aux prescriptions de l'article 1er de l'ordonnance du 2 janvier 1959 portant loi organique relative aux lois de finances en ce qu'elles n'ont pas une portée financière ou fiscale ;
42. Considérant que le reproche de méconnaissance par l'amendement dont elles tirent leur origine des conditions de recevabilité posées par les articles 40 de la Constitution et 42 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 ne saurait être invoqué devant le Conseil constitutionnel dès lors qu'une exception d'irrecevabilité n'a pas été soulevée selon la procédure prévue par le règlement de celle des assemblées du Parlement devant laquelle cet amendement a été déposé ;
43. Considérant qu'aux termes de l'article 2 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen« le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme. Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression » ; que les dispositions de l'article 114 ne portent aucune atteinte à ces principes non plus qu'à aucune autre règle ou principe de valeur constitutionnelle ;
44. Considérant que ces dispositions sont de nature à améliorer la sincérité des déclarations fiscales et, comme telles, sont au nombre de celles qui peuvent trouver place dans une loi de finances ;
Sur l'ensemble de la loi :
45. Considérant qu'en l'espèce il n'y a pas lieu pour le Conseil constitutionnel de soulever d'office aucune question de conformité à la Constitution en ce qui concerne les autres dispositions de la loi soumise à son examen,
Décide :
Article premier :
L'inscription des chapitres 31-60 et 31-62 portée à l'annexe « Services votés et mesures nouvelles » du ministère de l'éducation nationale ainsi que l'article 89 de la loi de finances pour 1984 sont déclarés non conformes à la Constitution.
Article 2 :
Les autres dispositions de la loi de finances pour 1984 sont déclarées conformes à la Constitution.
Article 3 :
La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.Journal officiel du 30 décembre 1983, page 3871
Recueil, p. 67
ECLI : FR : CC : 1983 : 83.164.DC
Les abstracts
- 3. NORMES LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES
- 3.3. ÉTENDUE ET LIMITES DE LA COMPÉTENCE LÉGISLATIVE
3.3.5. Abrogation ou modification des lois
Aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle n'interdit à la loi de revenir sur une exonération fiscale acquise sous l'empire d'une loi antérieure ou d'en réduire la durée. Le principe d'égalité ne fait pas obstacle à ce que la loi soumette à des règles identiques des situations qui ne diffèrent qu'en ce qu'elles ont été régies par des législations antérieures pendant une durée plus ou moins longue.
- 3. NORMES LÉGISLATIVES ET RÉGLEMENTAIRES
- 3.4. POUVOIR LÉGISLATIF DÉLÉGUÉ
- 3.4.1. Ordonnances de l'article 38
- 3.4.1.6. Ratification des ordonnances
- 3.4.1.6.1. Ratification explicite
3.4.1.6.1.4. Texte ne valant pas ratification
La prise en compte dans l'article d'équilibre d'une loi de finances des conséquences fiscales de mesures édictées par une ordonnance non encore ratifiée par le Parlement ne vaut ni ratification ni validation de cette ordonnance.
- 4. DROITS ET LIBERTÉS
- 4.5. DROIT AU RESPECT DE LA VIE PRIVÉE (voir également ci-dessous Droits des étrangers et droit d'asile, Liberté individuelle et Liberté personnelle)
- 4.5.9. Secrets protégés
4.5.9.1. Secret fiscal
Selon certains sénateurs auteurs de la saisine, les dispositions déférées méconnaissent la liberté individuelle qui implique le droit au secret de la vie privée, notamment en matière fiscale, en ce qu'elles instituent au profit de créanciers d'aliments une dérogation aux règles du secret fiscal dont elles ne définissent pas la portée avec précision. La disposition critiquée, qui permet à certaines personnes, dans des conditions clairement définies, de connaître des documents dont l'accès leur était interdit par la législation antérieure en matière de secret fiscal, ne méconnaît aucun principe ou règle de valeur constitutionnelle.
- 4. DROITS ET LIBERTÉS
- 4.18. LIBERTÉ INDIVIDUELLE
- 4.18.2. Champ d'application
- 4.18.2.1. Composantes de la liberté individuelle avant 1999
4.18.2.1.3. Inviolabilité du domicile
- 4. DROITS ET LIBERTÉS
- 4.18. LIBERTÉ INDIVIDUELLE
- 4.18.3. Protection de la liberté individuelle par l'autorité judiciaire
- 4.18.3.2. Séparation des pouvoirs
- 4.18.3.2.2. Enquêtes administratives et constatation d'infractions par une autorité administrative
4.18.3.2.2.3. Contrôle de la Commission des opérations de bourse
Compte tenu de ce qu'ils ne disposent d'aucune possibilité de contrainte matérielle et ne peuvent procéder à aucune perquisition ou saisie, aucun principe non plus qu'aucune règle de valeur constitutionnelle n'exige que les agents, investis des missions d'enquête prévues par la loi déférée au Conseil constitutionnel et dont l'objet est précisé par l'ordonnance du 28 septembre 1967, aient qualité d'officier de police judiciaire ou appartiennent nécessairement au personnel de la Commission des opérations de bourse ou que leur habilitation soit limitée à une enquête particulière ou à une durée déterminée.
- 4. DROITS ET LIBERTÉS
- 4.18. LIBERTÉ INDIVIDUELLE
- 4.18.4. Contrôle des mesures portant atteinte à la liberté individuelle
- 4.18.4.3. Perquisitions, visites domiciliaires et saisies
- 4.18.4.3.1. Perquisitions
4.18.4.3.1.3. Perquisitions en matière fiscale
Les investigations opérées dans des lieux privés par l'administration fiscale ne peuvent être conduites que dans le respect de l'article 66 de la Constitution qui confie à l'autorité judiciaire la sauvegarde de la liberté individuelle sous tous ses aspects, et notamment celui de l'inviolabilité du domicile. L'intervention de l'autorité judiciaire doit être prévue pour conserver à celle-ci toute la responsabilité et tout le pouvoir de contrôle qui lui reviennent. L'article 89 de la loi de finances pour 1984 n'est pas en l'état conforme à ces exigences car il n'assigne pas explicitement au juge la mission de vérifier de façon concrète le bien-fondé de la demande de perquisition, omet d'énoncer les possibilités d'intervention et de contrôle du juge dans le déroulement des opérations autorisées et ouvre la possibilité d'autorisations générales pour les visites de locaux ne servant pas exclusivement à l'habitation.
- 5. ÉGALITÉ
- 5.4. ÉGALITÉ DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES
- 5.4.2. Champ d'application du principe
- 5.4.2.2. Égalité en matière d'impositions de toutes natures
5.4.2.2.25. Imposition de la fortune (IGF et ISF)
Il n'y a pas d'atteinte au principe d'égalité devant les charges publiques lorsque, pour poser les règles d'établissement de l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes, le législateur fonde son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en cette matière. Exonération de l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes, en tant que biens professionnels, des parts ou actions si elles représentent au moins 25 % du capital social et si leur propriétaire exerce des fonctions de direction dans la société.
- 5. ÉGALITÉ
- 5.4. ÉGALITÉ DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES
- 5.4.2. Champ d'application du principe
- 5.4.2.2. Égalité en matière d'impositions de toutes natures
5.4.2.2.28. Imposition des plus-values professionnelles
Le principe d'égalité n'interdit pas au législateur de tenir compte de la nature particulière de l'activité des diverses catégories de travailleurs indépendants pour édicter les règles fiscales qui leur sont applicables. Ainsi peuvent différer selon les catégories professionnelles les règles relatives au forfait. Il en est de même des règles relatives au régime fiscal des plus-values professionnelles. Dans ces conditions, l'article 82 de la loi de finances pour 1984, qui se borne à aménager le régime fiscal applicable à une catégorie de contribuables se trouvant tous dans la même situation, n'est pas contraire au principe de l'égalité devant l'impôt.
- 5. ÉGALITÉ
- 5.4. ÉGALITÉ DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES
- 5.4.3. Contrôle du principe - Conditions du contrôle
- 5.4.3.1. Étendue de la compétence législative
- 5.4.3.1.2. Détermination de l'objectif poursuivi
5.4.3.1.2.1. Objectif purement fiscal
Le principe d'égalité n'interdit pas au législateur de tenir compte de la nature particulière de l'activité des diverses catégories de travailleurs indépendants pour édicter les règles fiscales qui leur sont applicables. Ainsi peuvent différer selon les catégories professionnelles les règles relatives au forfait. Il en est de même des règles relatives au régime fiscal des plus-values professionnelles. Dans ces conditions, l'article 82 de la loi de finances pour 1984, qui se borne à aménager le régime fiscal applicable à une catégorie de contribuables se trouvant tous dans la même situation, n'est pas contraire au principe de l'égalité devant l'impôt.
- 5. ÉGALITÉ
- 5.4. ÉGALITÉ DEVANT LES CHARGES PUBLIQUES
- 5.4.4. Contrôle du principe - exercice du contrôle
5.4.4.1. Adéquation des dispositions législatives
Pour poser les règles d'établissement de l'assiette de l'impôt sur les grandes fortunes, le législateur a fondé son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en cette matière. Dès lors, cet impôt est établi d'une façon régulière au regard des règles et principes de valeur constitutionnelle, et notamment de la prise en compte nécessaire des facultés contributives des citoyens.
- 6. FINANCES PUBLIQUES
- 6.1. PRINCIPES BUDGÉTAIRES ET FISCAUX
- 6.1.7. Principe de sincérité
- 6.1.7.1. Loi de finances
6.1.7.1.1. Régime de l'ordonnance de 1959
L'article 42 de la loi de finances pour 1984 (équilibre général du budget) et l'état A (voies et moyens) se bornent, pour évaluer les ressources de l'État, à traduire l'incidence des dispositions, notamment d'ordre fiscal, actuellement en vigueur ; les éléments contenus dans l'état A de la loi de finances concernant ces évaluations n'ont pas la nature de dispositions ayant pour objet d'édicter ou de modifier des règles relatives aux impositions. L'inclusion dans cet état de l'évaluation du produit attendu pour 1984 de la taxe intérieure sur les produits pétroliers, telle qu'elle résulte de l'ordonnance du 18 mai 1983, n'est qu'un élément de sincérité de cet article et de cet état ; les dispositions dont est saisi le Conseil constitutionnel ne constituent ni une validation ni une ratification de l'ordonnance du 18 mai 1983.
- 6. FINANCES PUBLIQUES
- 6.2. PROCÉDURE D'EXAMEN
- 6.2.6. Droit d'amendement parlementaire (article 40)
6.2.6.1. Procédure d'examen de la recevabilité financière des amendements
Est irrecevable une demande présentée par soixante députés, en application de l'article 61, alinéa 2, de la Constitution et fondée sur la non-conformité de certaines dispositions de la loi à l'article 40 de la Constitution en vertu duquel les propositions et amendements formulés par les membres du Parlement ne sont pas recevables lorsque leur adoption aurait pour conséquence soit une diminution des ressources publiques, soit la création ou l'aggravation d'une charge publique. Le motif de l'irrecevabilité de la saisine du Conseil constitutionnel est que ces dispositions de la loi n'avaient fait l'objet d'aucune contestation à cet égard au cours de la procédure parlementaire. Il résulte, en effet, des travaux préparatoires de la Constitution que le contrôle de recevabilité des propositions et amendements d'initiative parlementaire, en application de l'article 40 de la Constitution, doit être mis en œuvre au cours des débats devant le Parlement, devant les instances propres aux assemblées. L'irrecevabilité instituée par l'article 40 ne peut être directement invoquée devant le Conseil constitutionnel à l'encontre de la loi dont il s'agit.
- 6. FINANCES PUBLIQUES
- 6.3. PÉRIMÈTRE DE LA LOI (voir également Titre 3 Normes législatives et réglementaires - Conditions de recours à la loi)
- 6.3.2. Périmètre des lois
- 6.3.2.3. Domaine interdit (cavaliers)
- 6.3.2.3.1. Loi de finances
6.3.2.3.1.1. Régime de l'ordonnance de 1959
Une indication de nomenclature budgétaire se bornant à énoncer une intention d'action future ne saurait trouver place dans une loi de finances ; dès lors il y a lieu de déclarer que la création de deux chapitres budgétaires dotés pour mémoire à l'annexe " Services votés et mesures nouvelles " de l'éducation nationale n'est pas conforme à la Constitution.
- 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
- 11.5. GRIEFS (contrôle a priori des lois - article 61 de la Constitution)
- 11.5.1. Griefs irrecevables
- 11.5.1.2. Irrecevabilité tirée de l'article 42 de l'ordonnance organique n° 59-2 du 2 janvier 1959
11.5.1.2.2. Évolution de la jurisprudence
Le règlement de l'Assemblée nationale en ses articles 92, 98 et 121 et celui du Sénat en son article 45, dont les dispositions ont été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel, organisent un contrôle de la recevabilité des articles additionnels et amendements au regard de l'article 42 de l'ordonnance du 2 janvier 1959 et ce contrôle est exercé par des instances propres à chacune des assemblées selon les règles mêmes qui valent pour les demandes d'irrecevabilité présentées au titre de l'article 40 de la Constitution. Dans ces conditions, l'irrecevabilité prévue par l'article 42 de l'ordonnance du 2 janvier 1959, qui répond aux mêmes préoccupations que l'article 40 de la Constitution et ne fait qu'en appliquer les dispositions en matière de loi de finances, ne peut être invoquée devant le Conseil constitutionnel que si elle a été soulevée devant le Parlement.
- 11. CONSEIL CONSTITUTIONNEL ET CONTENTIEUX DES NORMES
- 11.8. SENS ET PORTÉE DE LA DÉCISION
- 11.8.1. Dispositions de loi dépourvues d'effet normatif
11.8.1.1. Déclaration d'inopérance