Décision

Décision n° 78-841 AN du 21 juin 1978

A.N., Corse-du-Sud (2ème circ.)
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

Vu l'article 59 de la Constitution ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le Code électoral ;

Vu la requête présentée par M. Toussaint Luciani, demeurant à Ajaccio (Corse-du-Sud), ladite requête enregistrée le 23 mars 1978 à la préfecture de la Corse-du-Sud et tendant à ce qu'il plaise au Conseil constitutionnel statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé le 12 mars 1978 dans la deuxième circonscription de la Corse-du-Sud, pour la désignation d'un député à l'Assemblée nationale ;

Vu les observations en défense présentées par M. de Rocca Serra, député, lesdites observations enregistrées le 7 avril 1978 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;

Vu les observations présentées par le ministre de l'Intérieur enregistrées le 8 mai 1978 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Ouï le rapporteur en son rapport ;

Sur le grief tiré de la violation du secret du vote :

1. Considérant que, si le requérant affirme que « des milliers d'électeurs » s'étant abstenus de passer par l'isoloir, le secret du vote n'a pas été respecté, il ne ressort nullement des observations imprécises et souvent contradictoires formulées à ce sujet sur des procès-verbaux de bureaux de vote que les assesseurs ou délégués qui ont noté cette anomalie auraient tenté de s'y opposer ; que la non-utilisation des isoloirs par un certain nombre d'électeurs, en l'absence de toute pression ou contrainte, n'a pas porté atteinte à la sincérité du scrutin ;

Sur les griefs tirés des irrégularités de votes par procuration :

2. Considérant que, s'il est exact que le nombre de votes par procuration a été élevé dans la deuxième circonscription de la Corse-du-Sud où ils représentaient 32,25 p. 100 du total des suffrages exprimés, on ne saurait déduire de ce simple fait une anomalie alors qu'un grand nombre d'électeurs résidant sur le continent demeurent inscrits sur les listes électorales de leur commune d'origine ; qu'aussi bien le nombre de votes par procuration a été élevé dans toute la circonscription ; que, notamment, dans des communes où M. Luciani a obtenu la majorité, le pourcentage des votes par procuration était nettement plus élevé ;

3. Considérant que, si une plainte a donné lieu à une information pénale dans le département voisin, on ne saurait en conclure que des fraudes auraient été réalisées dans la circonscription où a eu lieu l'élection qui fait l'objet du présent recours ;

4. Considérant que les observations portées sur six procès-verbaux de bureaux de vote révèlent des irrégularités ou négligences dans l'établissement ou le contrôle des procurations ; qu'ainsi, à Quenza, le maire s'est borné à mentionner sur les registres la désignation de l'autorité devant laquelle ont été dressées les procurations et a omis, contrairement aux dispositions de l'article R. 76-1 du Code électoral, de porter également le nom de cette autorité ; que l'on ne saurait conclure de cette erreur que les 111 votes émis par procuration dans cette commune seraient entachés de fraude ; que, s'il est mentionné sur le procès-verbal du troisième bureau de vote de Porto-Vecchio que les cachets apposés sur les volets des procurations adressés aux mandataires n'auraient pas été vérifiés, le requérant, à la disposition duquel les procurations litigieuses ont été tenues durant l'instruction de son recours, n'a donné aucune précision quant à l'irrégularité qui aurait entaché leur validité et, au surplus, l'instruction n'a permis de déceler aucune anomalie ;

5. Considérant que les observations formulées aux procès-verbaux des premier et deuxième bureaux de Bonifacio, du bureau de vote de Sota et du deuxième bureau de vote de Levie, indiquent que 43 procurations au total comportent des vices de forme, tels que défaut de signature, de cachet ou mentions incomplètes ; que même en tenant pour nulles ces 43 procurations et en retranchant les 43 votes ainsi émis tant du nombre des suffrages exprimés que du nombre des voix recueillies par le candidat proclamé élu, arrivé en tête dans ces bureaux, les résultats du premier tour de scrutin n'auraient pu en être modifiés ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la requête de M. Toussaint Luciani doit être rejetée ;

Décide :
Article premier :
La requête susvisée de M. Toussaint Luciani est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 21 juin 1978, où siégaient : MM. Roger FREY, président, MONNERVILLE, JOXE, GROS, GOGUEL, BROUILLET, SEGALAT, COSTE-FLORET, PÉRETTI.

Journal officiel du 25 juin 1978, page 2494
Recueil, p. 158
ECLI : FR : CC : 1978 : 78.841.AN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.6. Opérations électorales
  • 8.3.6.4. Déroulement du scrutin
  • 8.3.6.4.7. Isoloirs

Des assesseurs ou délégués ont noté, par des observations imprécises et souvent contradictoires portées sur les procès-verbaux, que des électeurs ne seraient pas passés par les isoloirs, sans qu'il apparaisse qu'ils auraient tenté de s'opposer à cette anomalie. Le défaut d'utilisation des isoloirs, en l'absence de toute pression ou contrainte, n'a pas porté atteinte à la sincérité du scrutin.

(78-841 AN, 21 juin 1978, cons. 1, Journal officiel du 25 juin 1978, page 2494)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.6. Opérations électorales
  • 8.3.6.5. Vote par procuration
  • 8.3.6.5.1. Établissement des procurations
  • 8.3.6.5.1.4. Mentions de la procuration, signatures

À supposer établis des vices de forme dans les procurations (tels défaut de signature, de cachet ou mentions incomplètes), la déduction des votes ainsi émis du nombre des suffrages recueillis par le candidat arrivé en tête dans les bureaux dont il s'agit n'aurait pas modifié les résultats du scrutin.

(78-841 AN, 21 juin 1978, cons. 5, Journal officiel du 25 juin 1978, page 2494)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.6. Opérations électorales
  • 8.3.6.5. Vote par procuration
  • 8.3.6.5.3. Contrôle des documents de vote par procuration

L'erreur d'un maire qui, après avoir désigné sur son registre les autorités devant lesquelles ont été établies des procurations, a omis d'en indiquer le nom, ne permet pas de conclure que les votes émis au moyen de ces procurations sont entachés de fraude. Mention sur un procès-verbal de l'absence de vérification de cachets apposés sur des volets de procuration adressés aux mandataires. Aucune précision sur l'irrégularité n'a été donnée par le requérant à la disposition duquel les procurations litigieuses ont été tenues durant l'instruction. Grief non retenu.

(78-841 AN, 21 juin 1978, cons. 4, Journal officiel du 25 juin 1978, page 2494)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.9. Contentieux - Griefs
  • 8.3.9.7. Griefs insuffisamment précisés

Mention sur un procès-verbal de l'absence de vérification de cachets apposés sur des volets de procuration adressés aux mandataires. Aucune précision sur l'irrégularité n'a été donnée par le requérant à la disposition duquel les procurations litigieuses ont été tenues durant l'instruction.

(78-841 AN, 21 juin 1978, cons. 4, Journal officiel du 25 juin 1978, page 2494)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.10. Contentieux - Instruction
  • 8.3.10.2. Preuve
  • 8.3.10.2.3. Appréciation au regard des procès-verbaux

Mention sur un procès-verbal de l'absence de vérification et cachets apposés sur des volets de procuration adressés aux mandataires. Aucune précision sur l'irrégularité n'a été donnée par le requérant à la disposition duquel les procurations litigieuses ont été tenues durant l'instruction.

(78-841 AN, 21 juin 1978, cons. 4, Journal officiel du 25 juin 1978, page 2494)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.10. Contentieux - Instruction
  • 8.3.10.2. Preuve
  • 8.3.10.2.5. Faits non pertinents pour prouver la fraude ou l'irrégularité alléguée

Un pourcentage élevé de votes par procuration ne dénote aucune fraude. Pas d'avantage une plainte à propos de fraudes qui auraient été commises dans un département voisin.

(78-841 AN, 21 juin 1978, cons. 2, 3, Journal officiel du 25 juin 1978, page 2494)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.11. Contentieux - Appréciation des faits par le Conseil constitutionnel
  • 8.3.11.1. Irrégularités qui ne modifient pas le résultat
  • 8.3.11.1.1. Irrégularités dont il n'est pas établi qu'elles aient permis des fraudes
  • 8.3.11.1.1.3. Opérations électorales

Feuilles de dépouillement signées par un seul ou par deux scrutateurs. Résultats non faussés, dès lors qu'il n'est pas allégué que les membres du bureau de vote n'ont pas participé aux opérations de dépouillement. Non-utilisation des isoloirs par certains électeurs. Cette irrégularité n'a pas été commise sous l'effet de la contrainte et n'a pas altéré la sincérité du scrutin.

(78-841 AN, 21 juin 1978, cons. 1, Journal officiel du 25 juin 1978, page 2494)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.11. Contentieux - Appréciation des faits par le Conseil constitutionnel
  • 8.3.11.1. Irrégularités qui ne modifient pas le résultat
  • 8.3.11.1.2. Irrégularités qui, en raison de l'écart des voix, ne modifient pas le résultat
  • 8.3.11.1.2.5. Opérations électorales

À supposer établis des vices de forme dans les procurations (tels défauts de signature, de cachet ou mentions incomplètes), le déduction des votes ainsi émis du nombre des suffrages recueillis par le candidat arrivé en tête dans les bureaux dont il s'agit n'aurait pas modifié les résultats du scrutin.

(78-841 AN, 21 juin 1978, cons. 5, Journal officiel du 25 juin 1978, page 2494)
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