Décision n° 78-836 AN du 10 mai 1978
Le Conseil constitutionnel,
Vu l'article 59 de la Constitution ;
Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu le code électoral ;
Vu la requête présentée par M. Jean-Marie Benoist demeurant 70, rue Madame, à Paris (6e), ladite requête enregistrée le 22 mars 1978 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à ce qu'il plaise au Conseil statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé les 12 et 19 mars 1978 dans la première circonscription du Val-de-Marne pour la désignation d'un député à l'assemblée nationale ;
Vu le mémoire complémentaire présenté par M. Benoist, ledit mémoire enregistré comme ci-dessus le 30 mars 1978 ;
Vu les observations en défense présentées par M. Georges Marchais, député, lesdites observations enregistrées le 31 mars 1978 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu les observations en réplique présentées par M. Benoist, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus les 14 et 18 avril 1978 ;
Vu les observations en duplique présentées par M. Marchais, député, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 21 avril 1978 ;
Vu les observations présentées par le ministre de l'Intérieur, enregistrées les 3 et 14 avril 1978 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Ouï le rapporteur en son rapport ;
Sur le refus d'admission de la candidature de M. Benoist au deuxième tour :
1. Considérant qu'aux termes du troisième alinéa de l'article L. 162 du code électoral, dans sa rédaction issue de la loi du 19 juillet 1976, « sous réserve des dispositions de l'article L. 163, nul ne peut être candidat au deuxième tour s'il ne s'est présenté au premier tour et s'il n'a obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 p. 100 du nombre des électeurs inscrits » ; que, si le quatrième alinéa du même article prévoit que « dans le cas où un seul candidat remplit ces conditions, le candidat ayant obtenu après celui-ci le plus grand nombre de suffrages au premier tour peut se maintenir au second », il résulte des délibérations du Parlement lors de l'adoption de la loi précitée du 19 juillet 1976 que cette disposition s'applique uniquement dans le cas où un seul des candidats au premier tour a obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 p. 100 du nombre des électeurs inscrits, et non dans le cas où, deux candidats au premier tour remplissant cette condition, un seul d'entre eux a fait acte de candidature pour le second tour ;
2. Considérant qu'au premier tour des élections législatives dans la première circonscription du Val-de-Marne M. Marchais et M. Hernu ont obtenu un nombre de suffrages supérieur à 12,5 p. 100 du nombre des électeurs inscrits ; que, par suite, les dispositions de l'article L. 162 du code électoral s'opposaient à ce que M. Benoist, qui avait obtenu un nombre de suffrages inférieur à 12,5 p. 100 du nombre des électeurs inscrits, pût être candidat au second tour, alors même que M. Hernu n'avait pas fait acte de candidature pour ce second tour ;
3. Considérant qu'il suit de là que M. Benoist n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par jugement du 15 mars 1978, le tribunal administratif de Paris a, sur requête du préfet du Val-de-Marne, déclaré non recevable sa candidature au second tour des élections législatives ;
Sur le déroulement de la campagne électorale :
4. Considérant que M..Benoist soutient que l'apposition sur un certain nombre de ses panneaux d'affichage, la veille du premier tour du scrutin, d'une « mise au point » de la commission des sondages a été de nature à fausser la libre appréciation des électeurs et à le priver des voix qui lui eussent permis d'atteindre le seuil de 12,5 p. 100 du nombre des électeurs inscrits ;
5. Considérant que cette mise au point, émanant d'un organisme officiel institué par la loi, avait été établie sur réclamation de M. Hernu et adressée à celui-ci ainsi qu'à M. Benoist ; qu'elle faisait suite à la diffusion de tracts mentionnant des « sondages officiels » favorables à M. Benoist et des estimations « lui donnant 25 p. 100 au premier tour » ; que la commission des sondages se bornait à rappeler qu'il n'y a pas de sondages officiels, qu'il ne doit pas être fait état de sondages sans indication de leur origine et à préciser que les estimations données dans le tract contesté ne résultaient pas de sondages ; qu'ainsi la publicité donnée à ladite mise au point a constitué, de la part de ses auteurs, une réplique à la propagande électorale de M. Benoist ;
6. Considérant que l'irrégularité résultant de l'apposition, de cette mise au point sur des panneaux réservés à M. Benoist n'a pas été de nature à modifier les résultats du scrutin ; que, dès lors, le grief analysé ci-dessus ne saurait être accueilli ;
Décide :
Article premier :
La requête susvisée de M. Jean-Marie Benoist est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée à l'Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.Délibéré par le conseil constitutionnel dans sa séance du 10 mai 1978, où siégeaient : MM. Roger FREY, président, MONNERVILLE, JOXE, GROS, GOGUEL, BROUILLET, SEGALAT, COSTE-FLORET, PÉRETTI.
Journal officiel du 14 mai 1978, page 2097
Recueil, p. 70
ECLI : FR : CC : 1978 : 78.836.AN
Les abstracts
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.2. Candidatures
- 8.3.2.3. Déclaration de candidature
8.3.2.3.5. Candidatures pour le second tour de scrutin
Il résulte de l'article L. 162 du code électoral que " nul ne peut être candidat au second tour s'il ne s'est présenté au premier tour et s'il n'a obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 % du nombre des électeurs inscrits ". Si le quatrième alinéa du même article prévoit que " dans le cas où un seul candidat remplit ces conditions, le candidat ayant obtenu, après celui-ci, le plus grand nombre de suffrages au premier tour, peut se maintenir au second ", cette disposition ne s'applique que lorsqu'un seul des candidats a obtenu au moins 12,5 % des suffrages au premier tour. Est donc justifié le refus d'enregistrer pour le second tour de scrutin la candidature du candidat le mieux placé à l'issue du premier tour, après ceux qui avaient obtenu un nombre de suffrages au moins égal à 12,5 % du nombre des électeurs inscrits et dont l'un seulement se présente au second tour.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
- 8.3.3.1. Affiches
8.3.3.1.6. Affiches recouvertes ou lacérées
Des tracts ayant fait état de " sondages officiels " favorables au requérant, une mise au point émanant de la commission des sondages rappelant qu'il n'y a pas de sondages officiels et précisant que les estimations données dans le tract ne résultaient pas de sondages, a été apposée sur des affiches du requérant. Cette publicité donnée, par des moyens irréguliers, à ladite mise au point, a constitué une réplique à la propagande électorale du requérant et n'a pas été de nature à fausser la libre appréciation des électeurs.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
- 8.3.3.16. Tracts
- 8.3.3.16.3. Irrégularités sans influence sur les résultats de l'élection
8.3.3.16.3.3. Contenu et portée des tracts
Des tracts ayant fait état de " sondages officiels " favorables au requérant, une mise au point, émanant de la commission des sondages rappelant qu'il n'y a pas de sondages officiels et précisant que les estimations données dans le tract ne résultaient pas de sondages, a été apposée sur des affiches du requérant. Cette publicité donnée, par des moyens irréguliers, à ladite mise au point, a constitué une réplique à la propagande électorale du requérant et n'a pas été de nature à fausser la libre appréciation des électeurs.
- 8. ÉLECTIONS
- 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
- 8.3.11. Contentieux - Appréciation des faits par le Conseil constitutionnel
- 8.3.11.1. Irrégularités qui ne modifient pas le résultat
- 8.3.11.1.1. Irrégularités dont il n'est pas établi qu'elles aient permis des fraudes
8.3.11.1.1.2. Propagande
Des tracts ayant fait état de " sondages officiels " favorables au requérant, une mise au point émanant de la commission des sondages, rappelant qu'il n'y a pas de sondages officiels et précisant que les estimations données dans le tract ne résultaient pas de sondages, a été apposée sur des affiches du requérant. Cette publicité donnée, par des moyens irréguliers, à ladite mise au point, a constitué une réplique à la propagande électorale du requérant et n'a pas été de nature à fausser la libre appréciation des électeurs.