Décision

Décision n° 77-90 DC du 30 décembre 1977

Dernière loi de finances rectificative pour 1977 et, notamment, son article 6
Conformité

Le Conseil constitutionnel,
Saisi le 22 décembre 1977 par MM Pierre JOXE, Claude MICHEL, Charles JOSSELIN, Raymond FORNI, Louis MEXANDEAU, René GAILLARD, André GUERLIN, Christian LAURISSERGUES, Francis LEENHARDT, Jean POPEREN, Jacques-Antoine GAU, Louis DARINOT, Michel SAINTE-MARIE, Alain VIVIEN, Albert DENVERS, Louis LE PENSEC, Jacques HUYGHUES DES ETAGES, Dominique DUPILET, Pierre CHARLES, André DELEHEDDE, François ABADIE, Daniel BENOIST, Gilbert SENES, Antoine GAYRAUD, Henri LAVIELLE, Raoul BAYOU, André GRAVELLE, Joseph FRANCESCHI, Jean-Pierre COT, Madame Jacqueline THOME-PATENOTRE, MM Louis PHILIBERT, Guy BECK, Lucien PIGNION, Charles NAVEAU, André LEBON, Claude DELORME, Yves ALLAINMAT, Arsène BOULAY, Maurice BRUGNON, Georges FILLIOUD, Louis EYRAUD, André POUTISSOU, Philippe MADRELLE, André BOULLOCHE, Maurice LEGENDRE, André SAINT-PAUL, Edmond VACANT, Yves LE FOLL, Gilbert FAURE, Roger DUROURE, Roland HUGUET, Léonce CLERAMBEAUX, Louis BESSON, Marcel MASSOT, Pierre LAGORCE, Maurice BLANC, Antonin VER, Fernand BERTHOUIN, Jean LABORDE, Robert AUMONT, Alex RAYMOND, Jean BASTIDE, Maurice ANDRIEU, députés à l'Assemblée nationale, dans les conditions prévues à l'article 61, alinéa 2, de la Constitution, du texte de la dernière loi de finances rectificative pour 1977, telle qu'elle a été adoptée par le Parlement le 21 décembre 1977 et, notamment, de son article 6 ;

Vu la Constitution ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958, portant loi organique sur le Conseil constitutionnel, notamment le chapitre II du titre II de ladite ordonnance ;

Vu le traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté économique européenne ;

Vu la décision du Conseil des communautés européennes en date du 21 avril 1970, relative au remplacement des contributions financières des Etats membres par des ressources propres aux communautés ;

Vu le règlement n° 1111-77 du Conseil des communautés européennes, en date du 17 mai 1977, établissant des dispositions communes pour l'isoglucose ;

Ouï le rapporteur en son rapport ;

1. Considérant que, par un règlement n° 1111-77 du 17 mai 1977, pris en vertu des pouvoirs qu'il tient de l'article 145 du traité du 25 mars 1957 instituant la Communauté économique européenne, qui a été régulièrement ratifié par la France et publié, le Conseil des communautés a établi un prélèvement à l'importation et une cotisation à la production d'isoglucose ; qu'il en a déterminé l'assiette et le taux, laissant aux Etats membres le soin de fixer seulement les modalités de recouvrement de la cotisation ;

2. Considérant, d'une part, que la décision, en date du 21 avril 1970, du Conseil des communautés européennes, qui a été régulièrement approuvée par la France et publiée à la suite de la loi du 7 juillet 1970, range, en son article 2 a), au nombre des ressources propres des communautés « les cotisations et autres droits prévus dans le cadre de l'organisation commune des marchés dans le secteur du sucre » ; que la cotisation à la production d'isoglucose, instituée en vue de régulariser le marché de ce produit dans le cadre de l'organisation du secteur du sucre, a le caractère d'une ressource propre communautaire et échappe aux règles applicables en matière d'impositions nationales ;

3. Considérant, d'autre part, que l'article 189, alinéa 2, du traité du 25 mars 1957 dispose que les règlements arrêtés par le Conseil et la Commission des communautés européennes sont obligatoires dans tous leurs éléments et sont directement applicables dans les Etats membres ; qu'il suit de là que la force obligatoire qui s'attache aux dispositions qu'ils comportent n'est pas subordonnée à une intervention des autorités des Etats membres et, notamment, du Parlement français ; que l'intervention de ces autorités est limitée à l'adoption des modalités d'application laissées à leur initiative par les règlements communautaires ;

4. Considérant que, dans le cas du règlement du 17 mai 1977, le Parlement n'avait pas à intervenir dans la détermination de l'assiette et du taux de la cotisation et qu'il lui revenait seulement de règler les modalités de recouvrement non fixées par le règlement ; que les répercussions de la répartition des compétences ainsi opérée entre les institutions communautaires et les autorités nationales au regard tant des conditions d'exercice de la souveraineté nationale que du jeu des règles de l'article 34 de la Constitution relatives au domaine de la loi ne sont que la conséquence d'engagements internationaux souscrits par la France qui sont entrés dans le champ de l'article 55 de la Constitution ; que, dans ces conditions, les dispositions de la loi de finances rectificative pour 1977 soumises à l'examen du Conseil constitutionnel ne sont contraires à aucune règle ni à aucun principe ayant valeur constitutionnelle ;

5. Considérant qu'en l'espèce, il n'y a lieu pour le Conseil constitutionnel de soulever d'office aucune question de conformité à la Constitution en ce qui concerne les autres dispositions de la loi soumise à son examen ;

Décide :
Article premier :
Les dispositions de la loi de finances rectificative pour 1977, soumise à l'examen du Conseil constitutionnel, ne sont pas contraires à la Constitution.
Article 2 :
La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.

Journal officiel du 31 décembre 1977, page 6385
Recueil, p. 44
ECLI : FR : CC : 1977 : 77.90.DC

Les abstracts

  • 6. FINANCES PUBLIQUES
  • 6.5. CONTRIBUTIONS PUBLIQUES
  • 6.5.2. Prélèvements et cotisations communautaires

Par un règlement du 17 mai 1977, le Conseil des Communautés européennes a établi un prélèvement à l'importation et une cotisation à la production d'isoglucose, dont il a déterminé l'assiette et le taux, laissant aux États membres le soin de fixer les modalités de recouvrement de la cotisation. La cotisation à la production d'isoglucose, instituée en vue de régulariser le marché de ce produit dans le cadre de l'organisation du secteur du sucre, a le caractère d'une ressource propre communautaire en vertu d'une décision du Conseil des Communautés européennes du 21 avril 1970 régulièrement approuvée par la France et publiée. Elle échappe donc aux règles applicables en matière d'imposition nationale. En vertu du traité de Rome, les règlements arrêtés par le Conseil et la Commission des Communautés européennes sont obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans tout État membre sans qu'aucune intervention des autorités nationales soit nécessaire. L'intervention de ces autorités est limitée à l'adoption des modalités d'application laissées à leur initiative par les règlements communautaires. Les répercussions de la répartition des compétences ainsi opérée entre les institutions communautaires et les autorités nationales en ce qui concerne les conditions d'exercice de la souveraineté nationale et le jeu des règles de l'article 34 de la Constitution ne sont que la conséquence d'engagements internationaux souscrits par la France et entrés dans le champ de l'article 55 de la Constitution.

(77-90 DC, 30 décembre 1977, cons. 4, Journal officiel du 31 décembre 1977, page 6385)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.1. PRINCIPES GÉNÉRAUX DU DROIT INTERNATIONAL
  • 7.1.1. Droit public international
  • 7.1.1.1. Pacta sunt servanda

Force obligatoire des traités entrant dans le champ des prévisions de l'article 55 de la Constitution.

(77-90 DC, 30 décembre 1977, cons. 2, 3, Journal officiel du 31 décembre 1977, page 6385)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.2. RATIFICATION OU APPROBATION DES TRAITÉS ET ACCORDS INTERNATIONAUX
  • 7.2.4. Caractéristiques du contrôle de constitutionnalité a priori
  • 7.2.4.4. Actes exclus du contrôle
  • 7.2.4.4.2. Actes qui ne sont pas des traités ou accords au sens des articles 52 et 53 de la Constitution
  • 7.2.4.4.2.1. Actes d'application d'un traité n'ayant pas valeur de traité ou accord international

Les Règlements communautaires n'ont pas le caractère de traités ou accords internationaux au sens des articles 52 et 52 de la Constitution (solution implicite)

(77-90 DC, 30 décembre 1977, cons. 3, Journal officiel du 31 décembre 1977, page 6385)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.3. TRAITÉS ET ACCORDS INTERNATIONAUX EN VIGUEUR
  • 7.3.2. Primauté des traités et accords (article 55)
  • 7.3.2.2. Force obligatoire des traités et accords internationaux en vigueur

Force obligatoire des traités entrant dans le champ des prévisions de l'article 55 de la Constitution.

(77-90 DC, 30 décembre 1977, cons. 2, 3, Journal officiel du 31 décembre 1977, page 6385)
  • 7. DROIT INTERNATIONAL ET DROIT DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.4. QUESTIONS PROPRES AU DROIT COMMUNAUTAIRE OU DE L'UNION EUROPÉENNE
  • 7.4.3. Hiérarchie des normes
  • 7.4.3.2. Autorité du droit communautaire

Par un règlement du 17 mai 1977, le Conseil des Communautés européennes a établi un prélèvement à l'importation et une cotisation à la production d'isoglucose, dont il a déterminé l'assiette et le taux, laissant aux États membres le soin de fixer les modalités de recouvrement de la cotisation. La cotisation à la production d'isoglucose, instituée en vue de régulariser le marché de ce produit dans le cadre de l'organisation du secteur du sucre, a le caractère d'une ressource propre communautaire en vertu d'une décision du Conseil des Communautés européennes du 21 avril 1970 régulièrement approuvée par la France et publiée. Elle échappe donc aux règles applicables en matière d'imposition nationale. En vertu du traité de Rome, les règlements arrêtés par le Conseil et la Commission des Communautés européennes sont obligatoires dans tous leurs éléments et directement applicables dans tout État membre sans qu'aucune intervention des autorités nationales soit nécessaire. L'intervention de ces autorités est limitée à l'adoption des modalités d'application laissées à leur initiative par les règlements communautaires. Les répercussions de la répartition des compétences ainsi opérée entre les institutions communautaires et les autorités nationales en ce qui concerne les conditions d'exercice de la souveraineté nationale et le jeu des règles de l'article 34 de la Constitution ne sont que la conséquence d'engagements internationaux souscrits par la France et entrés dans le champ de l'article 55 de la Constitution.

(77-90 DC, 30 décembre 1977, cons. 4, Journal officiel du 31 décembre 1977, page 6385)
À voir aussi sur le site : Saisine par 60 députés, Références doctrinales.
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