Décision

Décision n° 71-575/578 SEN du 20 janvier 1972

Sénat, Ain
Rejet

Le Conseil constitutionnel,

Vu l'article 59 de la Constitution ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu le code électoral ;

Vu, 1 ° la requête présentée par M. Hubert Pernin, demeurant à Bâgé-Le Châtel (Ain), et M. Marcel Buis, demeurant à Saint-Rambert-en-Bugey (Ain), 113, rue du Docteur-Temporal, ladite requête enregistrée le 5 octobre 1971 à la préfecture de l'Ain et le 7 octobre 1971 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à ce qu'il plaise au Conseil statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé le 26 septembre 1971 dans le département de l'Ain pour la désignation de deux sénateurs ;

Vu, 2 ° la requête présentée- par M. Henri Durand, demeurant à Bessey, Sandrans (Ain), M. Jean Dalin, demeurant à Vouvray (Ain), M. Paul Robert, demeurant à Le Creux, Replonges (Ain), M. André Rullière, demeurant à Pont-de-Veyle (Ain), 66, Grande-Rue, M. Joseph Putoud, demeurant au Bourg, Foissiat (Ain), M. Jean Faure, demeurant à Montrevel (Ain), rue des Remparts, M. Jean Valencin, demeurant à Malafretaz, Montrevel (Ain), M. Jean Ducret, emeurant à Massignieu (Ain), M. Marcel Faudot, demeurant à Virignin (Ain), villa Sam'Suffy, M. Jean Daillon, demeurant à Groslée (Ain), M. Samuel Rouviere, demeurant à Lhuis (Ain), M. Simon Pernod, demeurant à Nantua (Ain), 48, rue du Docteur-Mercier et M, Roger Pioud, demeurant à Saint-Cyr-sur-Menthon (Ain), ladite requête enregistrée le 6 octobre 1971 à la préfecture de l'Ain et le 11 octobre 1971 au secrétariat général du Conseil constitutionnel et tendant à ce qu'il plaise au Conseil statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé le 26 septembre 1971 dans le département de l'Ain pour la désignation de deux sénateurs ;

Vu les observations en défense présentées par M. Auguste Billiemaz, sénateur, lesdites observations enregistrées les 22 et 27 octobre 1971 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;

Vu les observations en défense présentées par M. Roland Ruet, sénateur, lesdites observations enregistrées le 25 octobre 1971 au secrétariat général du Conseil constitutionnel ;

Vu les observations en réplique présentées par M. Hubert Pernin, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus les 10, 12 et 15 novembre 1971 ;

Vu les observations en réplique présentées par M. Marcel Buis, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 12 novembre 1971 ;

Vu les observations présentées par MM. Henri Durand, Jean Daillon et Roger Pioud, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 15 novembre 1971 ;

Vu les observations en duplique présentées par M. Auguste Billiemaz, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 29 novembre 1971 ;

Vu les observations en duplique présentées par M. Roland Ruet, lesdites observations enregistrées comme ci-dessus le 1 °' décembre 1971 ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Ouï le rapporteur en son rapport ;

1. Considérant que les requêtes susvisées de MM. Pernin et Buis et de MbI. Durand et autres sont relatives aux mêmes opérations électorales ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;

Sur la recevabilité

2. Considérant, d'une part, qu'il résulte clairement du texte même de la première requête que celle-ci est dirigée contre les opérations électorales qui ont eu lieu le 26 septembre 1971 dans le département de l'Ain et qui ont abouti à la proclamation de l'élection de MM. Billiemaz et Ruet en qualité de sénateur ; qu'ainsi, nonobstant la circonstance que cette requête ne mentionne pas les noms des élus dont l'élection est attaquée, son objet était suffisamment explicite ; que, par suite, elle peut être regardée comme satisfaisant aux conditions exigées par l'article 35 de l'ordonnance susvisée du 7 novembre 1958 ;

3. Considérant, d'autre part, que la seconde requête a été enregistrée à la préfecture de l'Ain le 6 octobre 1971, c'est-à-dire dans le délai de dix jours suivant la proclamation du scrutin, délai qui expirait le 6 octobre à minuit ; qu'eu égard à la faculté ouverte aux requérants par l'article 34 de l'ordonnance susvisée d'adresser leur requête au préfet, la circonstance qu'elle n'ait été enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel qu'après l'expiration du délai est sans influence sur la recevabilité ;

Sur le fond :

4. Considérant, en premier lieu, que s'il est constant qu'au début du second tour de scrutin les casiers déposés à cet effet n'ont pas été approvisionnés pendant un certain temps de bulletins imprimés au nom de MM. Buis et Pernin, cette circonstance ne saurait être regardée comme constituant une irrégularité, l'article R. 157 (e) du code électoral imposant seulement, pour le second tour, la mise à la disposition des électeurs de bulletins en blanc en nombre suffisant ; qu'il n'est pas allégué que cette prescription n'ait pas été respectée ; qu'au demeurant, il ne résulte pas de l'instruction que cette absence de bulletins puisse être attribuée à une manoeuvre quelconque ;

5. Considérant, en second lieu, que s'il est soutenu qu'un certain nombre de personnes n'ayant pas la qualité d'électeur ont pu pénétrer dans les locaux réservés au vote par suite de l'insuffisance ou de l'absence d'un contrôle d'identité à l'entrée desdits locaux, aucune observation ni aucune réclamation corroborant cette allégation n'a été inscrite au procès-verbal ; qu'en tout état de cause, il n'est pas allégué qu'une quelconque personne ait été admise à voter sans avoir la qualité d'électeur ;

6. Considérant, en troisième lieu, que si une affiche manuscrite apposée entre les deux tours sur le panneau réservé à cet effet mentionnait que « tous les responsables départementaux de la majorité présidentielle » invitaient les électeurs à voter pour MM. Pernin et Ruet, alors qu'en fait cette démarche n'aurait pas reçu l'accord d'une des formations politiques composant ladite majorité, il est constant que cette affiche portait la signature de ses, quatre auteurs ; que, dans ces conditions, les électeurs ne sauraient être regardés comme ayant été induits en erreur sur la portée ou l'origine de ladite démarche ; que la circonstance que cette recommandation ait été faite sans l'accord des deux candidats en faveur desquels elle était formulée, ne saurait être tenue pour une manoeuvre de nature à fausser la sincérité du scrutin ; qu'en effet il était loisible aux formations politiques de recommander aux électeurs de voter pour clés candidats appartenant, comme en l'espèce, à des listes différentes ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que si un électeur a enlevé ou tenté d'enlever une autre affiche par laquelle MM. Ruet et Jannel se déclaraient « solidaires et unis » en réponse à l'appel susmentionné qui tendait à dissocier leurs candidatures, il résulte des indications mêmes des requérants et des témoignages produits par eux qu'une seconde affiche des mêmes candidats contenant les mêmes indications est restée apposée sur le panneau ; qu'ainsi les électeurs ont été mis à même de connaître leur position ;

8. Considérant enfin qu'il n'est pas établi que l'information inexacte selon laquelle M. Brayard, sénateur sortant, candidat radical-socialiste, avait l'intention de se désister, au second tour, en faveur de M. Jannel ait constitué une manoeuvre dirigée contre ces deux candidats ; qu'au surplus, eu égard aux possibilités de rectification qui étaient ouvertes aux intéressés et à l'écart de voix séparant les candidats proclamés élus de leurs concurrents immédiats, il n'est pas établi que la diffusion de cette rumeur ait été, dans les circonstances de l'espèce, de nature à entacher la sincérité du scrutin,

Décide :
Article premier :
Les requêtes susvisées de MM. Pernin, Buis, Durand et autres sont rejetées.
Aricle 2. - La présente décision sera notifiée au Sénat et publiée au Journal officiel de la République française.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 20 janvier 1972, où siégeaient MM. Gaston PALEWSKI, président, Monnet, Rey, Sainteny, Goguel, Dubois, Coste-Floret, Chatenet et Luchaire.

Journal officiel du 30 janvier 1972, page 1203
Recueil, p. 50
ECLI : FR : CC : 1972 : 71.575.SEN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.4.3.1. Affiches
  • 8.4.3.1.2. Contenu

Apposition d'une affiche manuscrite, entre les deux tours de scrutin, faisant état du soutien apporté à deux candidats par un ensemble de formations politiques alors que l'une d'elles n'avait pas donné son accord. Sans influence, dès lors que ladite affiche portait la signature de ses auteurs, alors même que la recommandation en cause avait été faite sans le consentement des deux candidats et que ceux-ci appartenaient à des listes différentes.

(71-575/578 SEN, 20 janvier 1972, cons. 6, Journal officiel du 30 janvier 1972, page 1203)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.3. Campagne électorale - Moyens de propagande
  • 8.4.3.1. Affiches
  • 8.4.3.1.3. Affiches enlevées, recouvertes ou lacérées

Le fait d'avoir enlevé une affiche faisant état de la solidarité de deux candidats est sans influence, une autre affiche semblable étant restée apposée.

(71-575/578 SEN, 20 janvier 1972, cons. 7, Journal officiel du 30 janvier 1972, page 1203)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.5. Campagne électorale - Interventions, pressions, manœuvres
  • 8.4.5.3. Manœuvres
  • 8.4.5.3.2. Manœuvres ou interventions relatives au second tour
  • 8.4.5.3.2.2. Soutiens

Apposition d'une affiche faisant état du soutien apporté à deux candidats par un ensemble de formations politiques alors que l'une d'elles n'avait pas donné son accord. Sans influence, dès lors que ladite affiche portait la signature de ses auteurs, alors même que la recommandation en cause avait été faite sans le consentement des deux candidats et que ceux-ci appartenaient à des listes différentes.

(71-575/578 SEN, 20 janvier 1972, cons. 6, Journal officiel du 30 janvier 1972, page 1203)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.5. Campagne électorale - Interventions, pressions, manœuvres
  • 8.4.5.3. Manœuvres
  • 8.4.5.3.2. Manœuvres ou interventions relatives au second tour
  • 8.4.5.3.2.4. Désistements

Rumeur inexacte de désistement d'un candidat pour le second tour. Pas de manœuvre établie, les intéressés ayant au surplus la possibilité de rectifier.

(71-575/578 SEN, 20 janvier 1972, cons. 8, Journal officiel du 30 janvier 1972, page 1203)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.6. Opérations électorales
  • 8.4.6.3. Déroulement du scrutin
  • 8.4.6.3.5. Mise à la disposition des électeurs des bulletins et enveloppes
  • 8.4.6.3.5.1. Bulletins

La circonstance que, pendant un certain temps, des bulletins au nom de candidats à une élection sénatoriale aient manqué, ne saurait être regardée comme une irrégularité, l'article R. 157 du code électoral, imposant seulement, pour le second tour, la mise à la disposition des électeurs de bulletins blancs.

(71-575/578 SEN, 20 janvier 1972, cons. 4, Journal officiel du 30 janvier 1972, page 1203)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.6. Opérations électorales
  • 8.4.6.3. Déroulement du scrutin
  • 8.4.6.3.11. Incidents divers

Le fait que des personnes n'ayant pas la qualité d'électeur aient pu pénétrer dans les locaux réservés au vote est sans effet, dès lors qu'il n'est pas allégué qu'une de ces personnes ait été admise à voter.

(71-575/578 SEN, 20 janvier 1972, cons. 5, Journal officiel du 30 janvier 1972, page 1203)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.8. Contentieux - Recevabilité de la réclamation
  • 8.4.8.1. Délais
  • 8.4.8.1.1. Date d'enregistrement au secrétariat général du Conseil constitutionnel

La date d'enregistrement d'une requête au secrétariat général du Conseil constitutionnel est sans influence sur sa recevabilité, dès lors que cette requête a été enregistrée à la préfecture dans le délai prescrit à l'article 33 de l'ordonnance du 7 novembre 1958.

(71-575/578 SEN, 20 janvier 1972, cons. 1, 2, 3, Journal officiel du 30 janvier 1972, page 1203)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.8. Contentieux - Recevabilité de la réclamation
  • 8.4.8.5. Formes de la requête
  • 8.4.8.5.1. Désignation de l'élection contestée

Le fait que la requête ne mentionne pas les noms des élus dont l'élection est attaquée ne la rend pas irrecevable, dès lors que son objet est suffisamment explicite.

(71-575/578 SEN, 20 janvier 1972, cons. 2, Journal officiel du 30 janvier 1972, page 1203)
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