Décision

Décision n° 61-2 D du 18 juillet 1961

Demande tendant à la déchéance de plein droit de Monsieur Pierre LAGAILLARDE de sa qualité de membre de l'Assemblée nationale
Déchéance

Le Conseil constitutionnel,
Saisi le 3 juillet 1961 d'une requête en date du 28 juin 1961 émanant du Commissaire du Gouvernement près le Tribunal permanent des Forces armées de Paris, transmise au Conseil par lettre du Ministre aux armées en date du 1er juillet 1961, tendant à la constatation de la déchéance de plein droit du sieur LAGAILLARDE (Pierre), de sa qualité de membre de l'Assemblée nationale ;

Vu l'ordonnance du 24 octobre 1958 portant loi organique relative aux conditions d'éligibilité et aux incompatibilités parlementaires ;

Vu la loi du 30 mars 1955 modifiant le décret organique du 2 février 1852 sur les élections ;

Vu le Code pénal et notamment son article 34 ;

Vu le jugement du Tribunal permanent des Forces armées de Paris en date du 2 mars 1961 ;

Vu l'arrêt de la Cour de cassation (Chambre criminelle) en date du 4 mai 1961 ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de l'ordonnance susvisée du 24 octobre 1958 : « Sera déchu de plein droit de la qualité de membre de l'Assemblée nationale ou du Sénat celui dont l'inéligibilité se révélera après la proclamation de l'élection et l'expiration du délai pendant lequel elle peut être contestée ou qui, pendant la durée de son mandat, se trouvera dans l'un des cas d'inéligibilité prévus par la présente loi.
 »La déchéance est constatée par le Conseil constitutionnel à la requête du bureau de l'assemblée intéressée ou du Garde des sceaux, Ministre de la justice, ou, en outre, en cas de condamnation postérieure à l'élection, du ministère public près la juridiction qui a prononcé la condamnation" ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 5, 1er alinéa, de la même ordonnance : « Sont inéligibles les individus condamnés lorsque la condamnation empêche d'une manière définitive leur inscription sur une liste électorale » ; et que l'article 1er de la loi du 30 mars 1955, modifiant le décret organique du 2 février 1852, dispose que « ne doivent pas être inscrits sur la liste électorale : ... les individus condamnés pour crime .. » ; que le même article 5 de l'ordonnance précitée du 24 octobre 1958 dispose, dans son troisième alinéa, que « sont en outre inéligibles : ... les individus privés par décision judiciaire de leur droit d'éligibilité en application des lois qui autorisent cette privation » ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le sieur LAGAILLARDE (Pierre), député d'Alger a été condamné à dix ans de détention criminelle et à la dégradation civique pour attentat contre la sûreté de l'Etat et infractions à la loi du 24 mai 1834 ; que cette décision est devenue définitive à la suite de l'arrêt de la Cour de cassation en date du 4 mai 1961 rejetant le pourvoi du sieur LAGAILLARDE (Pierre) et qu'elle a entraîné, en vertu des dispositions précitées de l'ordonnance du 24 octobre 1958, l'inéligibilité de ce dernier ;

4. Considérant qu'il appartient, en conséquence, au Conseil constitutionnel de constater en application des dispositions sus-rappelées de l'article 8 de l'ordonnance du 24 octobre 1958, la déchéance de plein droit de son mandat encourue par le sieur LAGAILLARDE (Pierre) du fait de l'inéligibilité résultant de la condamnation définitivement prononcée à son encontre ;

Déclare :
Est constatée la déchéance de plein droit, à compter du 5 mai 1961, du sieur LAGAILLARDE (Pierre), de sa qualité de membre de l'Assemblée nationale.

Délibéré par le Conseil constitutionnel dans sa séance du 18 juillet 1961.

Journal officiel du 29 juillet 1961, page 7008
Recueil, p. 63
ECLI : FR : CC : 1961 : 61.2.D

Les abstracts

  • 10. PARLEMENT
  • 10.1. MANDAT PARLEMENTAIRE
  • 10.1.3. Exercice du mandat parlementaire
  • 10.1.3.6. Fin du mandat parlementaire
  • 10.1.3.6.2. Déchéance de plein droit

Il appartient au Conseil constitutionnel, saisi en application de l'article 8 de l'ordonnance n° 58-998 du 24 octobre 1958 portant loi organique relative aux conditions d'éligibilité et aux incompatibilités parlementaires d'une requête du procureur de la République transmise par le ministre de la justice, de constater la déchéance de plein droit de son mandat encourue par un parlementaire du fait de l'inéligibilité résultant de la condamnation pour crime définitivement prononcée à son encontre, dans la mesure où cette condamnation empêche d'une manière définitive son inscription sur les listes électorales.

(61-2 D, 18 juillet 1961, cons. 4, Journal officiel du 29 juillet 1961, page 7008)

Les actes accomplis par un parlementaire jusqu'à la décision du Conseil constitutionnel prononçant la déchéance de son mandat en application de l'article L.O. 136 du code électoral demeurent valables.

(61-2 D, 18 juillet 1961, cons. 1, 2, 3, 4, Journal officiel du 29 juillet 1961, page 7008)
Toutes les décisions