Décision

Décision n° 58-2/3/4 SEN du 17 janvier 1959

C.R., Guadeloupe
Rejet

La Commission constitutionnelle provisoire,

Vu les articles 59 et 91 de la Constitution ;

Vu l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

Vu la loi du 23 septembre 1948, modifiée par la loi du 27 mai 1958 ;

Vu la requête présentée par le sieur Silvie, demeurant à Basse-Terre (Guadeloupe), ladite requête enregistrée le 16 janvier 1959 au secrétariat de la Commission constitutionnelle provisoire ;

Vu la requête présentée par les sieurs Desbois, Sannier et Gradel demeurant à Moule (Guadeloupe), ladite requête enregistrée au secrétariat du Conseil de la République le 21 juin 1958 et transmise à la Commission constitutionnelle provisoire le 19 novembre 1958 ;

Vu les requêtes présentées par les sieurs Saman et Beaubois demeurant à Moule (Guadeloupe), Albrand, demeurant à Petit-Canal (Guadeloupe), et Satineau, demeurant à Paris, 95, rue de Vaugirard, enregistrées les 16 et 18 juin 1958 au secrétariat du Conseil de la République, et transmises le 19 novembre 1958 au secrétariat de la Commission constitutionnelle provisoire, lesdites requêtes tendant à ce qu'il plaise à la Commission statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé le 8 juin 1958 dans le département de la Guadeloupe pour la désignation de deux sénateurs ;

Vu les observations en défense présentées par les sieurs Valeau et Bernier, sénateurs, lesdites observations enregistrées les 10 et 18 décembre 1958 au secrétariat de la Commission ;

Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;

Ouï le rapporteur en son rapport ;

1. Considérant que les requêtes susvisées sont relatives aux opérations électorales
qui ont eu lieu dans le département de la Guadeloupe le 8 juin 1958 pour l'élection de deux sénateurs ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une même décision :

1 ° Sur la requête du sieur Silvie :

2. Considérant que l'article 58 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 prévoit que la Commission constitutionnelle provisoire examinera les contestations concernant l'élection des sénateurs élus le 8 juin 1958, qui lui seront transmises par le bureau du Sénat, dans le délai de dix jours suivant la publication de ladite ordonnance ; qu'il résulte, de ce texte que les requêtes dirigées contre les élections sénatoriales du 8 juin 1958 pouvaient être valablement formées devant la Commission constitutionnelle provisoire jusqu'au 19 novembre 1958 inclus ;

3. Considérant que la requête du sieur Silvie n'est parvenue au secrétariat de ladite Commission que le 16 janvier 1959 ; que, si le sieur Silvie soutient que cette requête n'est que la copie d'un précédent mémoire adressé au Conseil de la République le 12 juin 1958, il ressort de l'instruction qu'aucun recours de l'intéressé n'a été, à quelque moment que ce soit, enregistré au secrétariat de cette assemblée, et que d'ailleurs le sieur Silvie n'apporte pas la preuve de l'envoi d'un tel recours ; que, dès lors, sa requête susvisée, adressée tardivement à la Commission constitutionnelle provisoire, doit être rejetée comme irrecevable ;

2 ° Sur la requête des sieurs Desbois, Sannier et Gradel :

4. Considérant que ladite requête est dirigée contre l'élection du sieur Valeau acquise au premier tour de scrutin à la majorité absolue des suffrages exprimés ;

5. Considérant que les allégations touchant des faits de corruption électorale formulées par les requérants ne sont assorties d'aucun commencement de preuve ; que ces faits n'ont donné lieu au dépôt d'aucune plainte devant la juridiction pénale qu'ils ne peuvent donc être considérés comme établis ; qu'il n'y a pas lieu, dans ces conditions, de procéder de ce chef à l'annulation des opérations électorales contestées ;

3 ° Sur les requêtes des sieurs Satineau, Albrand, Samar et Beaubois :

6. Considérant qu'au deuxième tour de scrutin pour l'élection du second sénateur du département de la Guadeloupe, M. Bernier a été proclame élu par 267 voix contre 266 à M. Satineau, 2 à M. Renaison et l à M. Cotte ; que les requêtes susvisées sont dirigées contre cette élection ;

7. Considérant que, pour demander la réformation des résultats du scrutin, les requérants font valoir que deux bulletins imprimés pour le premier tour et portant les deux noms des sieurs Valeau et Bernier ont été utilisés au second tour ; qu'ils soutiennent que ces bulletins ont été regardés à tort comme des suffrages exprimés en faveur du candidat Bernier et qu'ils auraient du être attribués au sieur Valeau dont le nom figurait en premier sur la liste ; que dans ces conditions le sieur Satineau aurait dû être proclame élu par 266 voix contre 265 au sieur Bernier ;

8. Considérant qu'en utilisant un bulletin portant les noms des sieurs Valeau et Bernier, alors que le sieur Valeau venait d'être élu le jour même au premier tour du scrutin, les électeurs ont exprimé clairement leur intention de se prononcer en faveur du candidat Bernier, seul candidat de cette liste se présentant au second tour ;

9. Considérant que les requérants ne sauraient à cet égard tirer argument des disposions de l'article 28 alinéas 1er et 2, de la loi du 5 avril 1884 qui ne peuvent trouver application en matière d'élections sénatoriales ;

10. Considérant que dans ces conditions l'attribution des deux bulletins dont s'agit au sieur Bernier n'a revêtu aucun caractère d'irrégularité ;

Décide :

Article premier :
Les requêtes du sieur Silvie, des sieurs Desbois, Saunier et Gradel, et des sieurs Satineau, Albrand, Samar et Beaubois sont rejetées.

Article 2 :
La présente décision sera notifiée au Sénat et publiée au Journal officiel de la République française.

Journal officiel du 21 janvier 1959, page 1128
Recueil, p. 142
ECLI : FR : CC : 1959 : 58.2.SEN

Les abstracts

  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.6. Opérations électorales
  • 8.3.6.8. Dépouillement
  • 8.3.6.8.3. Validité des bulletins
  • 8.3.6.8.3.5. Utilisation, au second tour, de bulletins imprimés pour le premier tour

Utilisation, au second tour, de bulletins imprimés pour le premier tour. Attribution valable au seul candidat de la liste qui se présentait au second tour.

(58-2/3/4 SEN, 17 janvier 1959, cons. 7, Journal officiel du 21 janvier 1959, page 1128)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.3. ÉLECTIONS LÉGISLATIVES
  • 8.3.10. Contentieux - Instruction
  • 8.3.10.1. Pouvoirs généraux d'instruction
  • 8.3.10.1.2. Jonction d'instance

Jonction de requêtes, plusieurs requêtes étant relatives à la même élection. Jurisprudence constante depuis 1959.

(58-2/3/4 SEN, 17 janvier 1959, cons. 1, Journal officiel du 21 janvier 1959, page 1128)
  • 8. ÉLECTIONS
  • 8.4. ÉLECTIONS SÉNATORIALES
  • 8.4.8. Contentieux - Recevabilité de la réclamation
  • 8.4.8.1. Délais
  • 8.4.8.1.3. Requête tardive

En application de l'article 58 de l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958, les requêtes dirigées contre les élections sénatoriales du 8 juin 1958 pouvaient être valablement présentées à la Commission constitutionnelle provisoire jusqu'au 19 novembre 1958. Requête parvenue le 16 janvier 1959, dès lors non recevable.

(58-2/3/4 SEN, 17 janvier 1959, cons. 2, 3, Journal officiel du 21 janvier 1959, page 1128)
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